Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20180409


Dossier : IMM-4195-17

Référence : 2018 CF 382

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 9 avril 2018

En présence de monsieur le juge Southcott

ENTRE :

MARIA NIKOLOVA

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue le 13 septembre 2017 par la Section d’appel des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (décision de la Section d’appel des réfugiés), dans laquelle cette dernière a confirmé la décision rendue le 22 janvier 2016 par la Section de la protection des réfugiés (décision de la Section de la protection des réfugiés) portant que la demanderesse n’est pas une réfugiée au sens de la Convention ni une personne à protéger.

[2]  Comme je l’explique plus en détail ci-après, la présente demande est rejetée, puisque les observations de la demanderesse ne démontrent aucune erreur commise par la Section d’appel des réfugiés qui rend sa décision déraisonnable.

II.  Résumé des faits

[3]  La demanderesse, Maria Nikolova, est une citoyenne de la Bulgarie. Elle allègue qu’elle a des origines romes du côté paternel. Mme Nikolova affirme qu’elle a éprouvé des problèmes dans sa jeunesse et qu’elle est incapable d’obtenir un emploi correspondant à son niveau de scolarité, compte tenu de son origine ethnique. Elle allègue que des skinheads l’ont harcelée et agressée en Bulgarie, que la police ne lui est pas venue en aide et que des policiers l’ont même menacée. Mme Nikolova a quitté la Bulgarie et est entrée au Canada avec un visa de visiteur le 12 juin 2015. Elle a présenté une demande d’asile le 16 juillet 2015.

[4]  Une audience a été tenue devant la Section de la protection des réfugiés le 11 septembre et le 3 décembre 2015. Dans sa décision, la Section de la protection des réfugiés a conclu que Mme Nikolova n’avait pas démontré qu’elle était d’origine rome et elle disposait d’une possibilité de refuge intérieur dans la ville de Varna. Elle a interjeté appel de cette décision devant la Section d’appel des réfugiés, qui a confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés le 9 août 2016. Mme Nikolova a saisi la Cour fédérale d’une demande de contrôle judiciaire, mais l’affaire a été renvoyée, sur consentement, à la Section d’appel des réfugiés, qui a de nouveau confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés. C’est cette décision de la Section d’appel des réfugiés qui fait l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

III.  Décision de la Section d’appel des réfugiés

[5]  La Section d’appel des réfugiés était d’accord avec la Section de la protection des réfugiés que Mme Nikolova n’a pas démontré son appartenance à la communauté rome. Elle a conclu que le nom de famille de la demanderesse ne pouvait servir à établir son appartenance à la communauté rome et que cette dernière n’avait pas démontré qu’elle était Rome au moyen de sa compétence dans la langue de cette communauté. Elle a présenté une lettre de soutien provenant soi-disant d’un membre du conseil des aînés roms, mais la Section d’appel des réfugiés n’a accordé aucune valeur probante à cette lettre, parce qu’elle était écrite à la main et qu’elle ne contenait aucun renseignement, comme un en-tête, qui indiquait qu’elle avait été écrite par un membre du conseil. La Section d’appel des réfugiés a examiné les lettres de soutien d’un groupe communautaire rom au Canada, mais elle ne leur a accordé aucune valeur probante pour la détermination des origines romes de Mme Nikolova. La Section d’appel des réfugiés a également accordé peu de valeur probante au témoignage de Mme Nikolova quant à son intérêt et à ses connaissances à l’égard de la culture rome, et elle a conclu que la Section de la protection des réfugiés n’avait commis aucune erreur en concluant que la demanderesse ne pouvait être considérée comme appartenant à la communauté rome en se fondant sur les vêtements qu’elle portait.

[6]  Puisqu’elle a conclu que Mme Nikolova n’avait pas démontré son appartenance à la communauté rome, la Section d’appel des réfugiés a confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés portant qu’elle n’était pas une réfugiée au sens de la Convention ni une personne à protéger. Ayant tiré cette conclusion, la Section d’appel des réfugiés n’a pas examiné la conclusion subsidiaire de la Section de la protection des réfugiés concernant l’existence d’une possibilité de refuge intérieur.

IV.  Questions en litige et norme de contrôle

[7]  La demanderesse soutient que la Cour doit examiner les questions suivantes :

  1. La Section d’appel des réfugiés a-t-elle commis une erreur en appliquant des stéréotypes ethniques et raciaux?

  2. La Section d’appel des réfugiés a-t-elle commis une erreur en n’examinant pas et en interprétant de manière erronée certains éléments de preuve ou en tirant des conclusions sans éléments de preuve à l’appui?

[8]  Aucune des parties n’a expressément abordé la norme de contrôle applicable, qui, à mon avis, est la norme de la décision raisonnable (voir les décisions Poudel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 978, au paragraphe 5; Balogh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 426, au paragraphe 16).

V.  Discussion

A.  La Section d’appel des réfugiés a-t-elle commis une erreur en appliquant des stéréotypes ethniques et raciaux?

[9]  Mme Nikolova soutient que la Section d’appel des réfugiés a commis une erreur en appliquant des stéréotypes ethniques et raciaux lorsqu’elle s’est appuyée sur l’examen de la Section de la protection des réfugiés, qui a recherché si l’apparence physique de la demanderesse permettait de déterminer qu’elle appartenait à la communauté rome. Elle mentionne la décision de la Cour dans l’affaire Pluhar c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1999), 174 FTR 153 (CFPI), dans laquelle le juge Evans a écrit ce qui suit, au paragraphe 10 :

[10]   À mon avis, la Section du statut du réfugié a commis une erreur de droit en fondant effectivement sa décision sur son appréciation selon laquelle Mme Pluharova n’avait pas le teint foncé, surtout qu’elle ne prétendait pas être « experte » en la matière. Il est fondamentalement dangereux pour les membres de la Commission de décider si les gens dans un autre pays percevraient un revendicateur comme étant d’une origine ethnique particulière en se fondant uniquement sur l’observation de la personne en cause par les membres de la Commission.

[10]  Cet argument pose problème puisque, comme la demanderesse l’a souligné dans ses observations devant la Cour, elle a invoqué son apparence physique, y compris sa manière de s’habiller, comme un moyen de déterminer son appartenance à la communauté rome. Par conséquent, on ne peut pas reprocher à la Section d’appel des réfugiés d’avoir examiné son affirmation à cet égard.

[11]  Mme Nikolova conteste également la déférence accordée par la Section d’appel des réfugiés aux conclusions de la Section de la protection des réfugiés fondées sur la manière dont elle était vêtue à l’audition et sur la photo de vacances qu’elle a présentée. Elle affirme que c’était sa façon de s’habiller en Bulgarie qui permettait de déterminer son appartenance à la communauté rome et non sa manière de se vêtir au Canada ni en vacances. Cependant, Mme Nikolova n’a renvoyé la Cour à aucun élément de preuve présenté à la Section de la protection des réfugiés ou à la Section d’appel des réfugiés sur la manière de se vêtir en Bulgarie ou sur la façon dont cette tenue permettait de déterminer son appartenance à la communauté rome. Selon la prétention du défendeur, il incombe à Mme Nikolova de démontrer son appartenance à la communauté rome. La Section de la protection des réfugiés et la Section d’appel des réfugiés peuvent tirer des conclusions uniquement à partir des éléments de preuve qui leur sont présentés.

[12]  Je ne vois aucune erreur commise par la Section d’appel des réfugiés dans son examen des observations de Mme Nikolova à l’égard de son apparence physique.

B.  La Section d’appel des réfugiés a-t-elle commis une erreur en n’examinant pas et en interprétant de manière erronée certains éléments de preuve ou en tirant des conclusions sans éléments de preuve à l’appui?

1)  Nom de famille

[13]  Mme Nikolova soutient qu’il était déraisonnable de la part de la Section d’appel des réfugiés de conclure qu’elle n’est pas Rome en se fondant sur le fait que son nom de famille n’est pas d’origine rome, puisqu’elle a indiqué dans son témoignage que tous les Roms ont été obligés d’adopter un nom de famille bulgare pendant l’époque communiste.

[14]  Je ne trouve rien de déraisonnable dans cet aspect de l’examen de la Section d’appel des réfugiés. La décision de la Section d’appel des réfugiés démontre que cette dernière a pris en compte plusieurs critères afin de déterminer si les éléments de preuve établissaient que Mme Nikolova appartenait à la communauté rome. Elle a examiné son nom de famille et elle a conclu, selon les éléments de preuve, qu’elle ne pouvait pas déterminer son appartenance à la communauté rome en se fondant sur ce critère. Bien que je reconnaisse que Mme Nikolova n’a pas affirmé que son nom de famille était un indicateur de son origine ethnique, je ne trouve aucune erreur dans l’examen de ce critère par la Section d’appel des réfugiés ni dans les conclusions de cette dernière fondées sur celui-ci.

2)  Langue

[15]  La Section d’appel des réfugiés a également conclu que le peu de connaissance de la langue romani de Mme Nikolova ne l’a pas aidé à démontrer ses origines romes. Elle conteste plusieurs aspects de cette conclusion.

[16]  Mme Nikolova soutient qu’elle n’est pas la seule parmi les Roms à ne pas parler le romani, et elle renvoie aux éléments de preuve qu’elle a présentés selon lesquels les jeunes ne parlent pas cette langue. Cependant, ce point ne lui est pas utile pour démontrer que la Section d’appel des réfugiés a commis une erreur en concluant qu’elle ne pouvait pas se fonder sur la connaissance de la langue pour déterminer les origines ethniques de la demanderesse.

[17]  Mme Nikolova conteste également la conclusion de la Section d’appel des réfugiés quant à sa compétence limitée en romani. Bien que la Section d’appel des réfugiés ait mentionné que Mme Nikolova avait répondu avec les mots en romani pour [traduction] « oie » et [traduction] « agneau », lorsqu’on lui a demandé si elle connaissait des mots en romani, cette dernière soutient que la Section d’appel des réfugiés n’a pas tenu compte des trois autres mots en romani qu’elle a utilisés au cours de son témoignage. J’estime que cet argument est non fondé, puisque la conclusion de la Section d’appel des réfugiés n’est pas minée par les éléments de preuve selon lesquels Mme Nikolova connaissait cinq mots en romani, plutôt que trois.

[18]  Elle conteste aussi la déclaration de la Section d’appel des réfugiés selon laquelle la demanderesse a indiqué dans son témoignage devant la Section de la protection des réfugiés qu’elle ne connaissait pas de termes conversationnels tels que [traduction] « bonjour » ou [traduction] « comment allez-vous? ». Mme Nikolova soutient que le témoignage auquel la Section d’appel des réfugiés fait référence concernait sa réponse à une question alambiquée sur ses grands-parents et la demanderesse renvoie la Cour à une partie de l’enregistrement audio de son audience devant la Section de la protection des réfugiés, dans laquelle elle déclare qu’elle comprend le romani. J’ai écouté ce passage de l’enregistrement audio et la partie où la Section de la protection des réfugiés a posé la question sur les grands-parents de Mme Nikolova. Bien que la déclaration sur sa compréhension du romani ne soit pas particulièrement claire dans l’enregistrement, je retiens, aux fins de la présente discussion, qu’elle a déclaré comprendre la langue. Cependant, cette déclaration a été faite peu après que Mme Nikolova a témoigné qu’elle reconnaît certains mots, même si elle ne peut pas parler la langue. Après ces deux parties du témoignage, la Section de la protection des réfugiés a interrogé Mme Nikolova sur les mots qu’elle reconnaît. C’est à ce moment qu’elle a mentionné les mots [traduction] « oie » et [traduction] « agneau ». Ainsi, l’enregistrement ne soutient pas son argument portant que la déclaration selon laquelle elle comprend le romani n’a pas été prise en compte. Les éléments de preuve démontraient plutôt une compréhension d’un nombre très limité de mots.

[19]  En outre, je ne suis pas d’accord lorsqu’elle qualifie d’alambiquée la question qu’on lui a posée concernant ses grands-parents. La Section de la protection des réfugiés lui a demandé si elle était capable d’utiliser des termes conversationnels de salutation en romani, par exemple, des mots qu’un Canadien qui ne parle pas français couramment pourrait employer pour communiquer avec des grands-parents francophones. Elle a répondu que ses grands-parents étaient décédés et que sa mère insistait pour parler bulgare, puisqu’elle ne parlait pas le romani. Encore une fois, je ne trouve aucune erreur dans le fait que la Section d’appel des réfugiés en a conclu que Mme Nikolova a peu de connaissances du romani.

[20]  Mme Nikolova conteste également la déclaration de la Section d’appel des réfugiés selon laquelle elle travaillait dans un quartier rom où la majorité des clients parlaient le romani, ce qui a permis à la Section d’appel des réfugiés de conclure qu’il était raisonnable de s’attendre à ce qu’elle connaisse des formules de salutation simples dans cette langue. Elle déclare qu’elle travaillait près d’un quartier rom où elle avait grandi, et non dans un quartier rom, et qu’elle n’a pas indiqué dans son témoignage la langue parlée par les personnes dans le quartier, mais plutôt que la plupart des jeunes Roms ne parlent pas le romani.

[21]  Je retiens que l’affirmation de Mme Nikolova, comme elle l’a indiqué dans son formulaire Fondement de la demande d’asile, veut qu’elle ait travaillé comme serveuse dans un restaurant à proximité d’un quartier rom, plutôt que dans ledit quartier, et qu’elle n’a pas témoigné de la langue parlée par les clients du restaurant. Cependant, elle a bel et bien déclaré que le propriétaire du restaurant et la plupart des clients étaient d’origine rome. Comme le défendeur l’a souligné, la Section de la protection des réfugiés a conclu, à partir d’éléments de preuve documentaire, que 85 % de la population rome en Bulgarie parle le romani et, par conséquent, elle n’a pas jugé crédible que Mme Nikolova ait pu travailler dans un café rom sans apprendre des formules de salutations générales, alors qu’elle allègue avoir beaucoup fréquenté la communauté rome. La Section d’appel des réfugiés a examiné les réponses de Mme Nikolova aux questions posées par la Section de la protection des réfugiés sur sa connaissance de termes conversationnels et elle a conclu qu’il était raisonnable de s’attendre, vu l’endroit où elle travaillait, à ce qu’elle possède de telles aptitudes linguistiques. Cet examen est fondé sur le fait que les clients du restaurant étaient d’origine rome. Le fait que le restaurant se trouvait à proximité d’un quartier rom, plutôt que dans ce quartier, ne mine pas le caractère raisonnable de cet examen.

3)  Lettres d’une employée travaillant à l’établissement des Roms

[22]  Les éléments de preuve documentaire que Mme Nikolova a présentés à la Section de la protection des réfugiés comprenaient une lettre d’une employée travaillant à l’établissement des Roms au sein d’un organisme canadien appelé CultureLink. La lettre contenait une déclaration de son auteure portant que Mme Nikolova [traduction] « est considérée comme appartenant à la communauté rome, compte tenu de ses antécédents culturels et de la langue romani ». Mme Nikolova a indiqué, lors de l’audition devant la Section de la protection des réfugiés, l’erreur contenue dans cette lettre concernant sa connaissance de la langue romani, de sorte que la Section de la protection des réfugiés a demandé des précisions à l’auteure de la lettre.

[23]  L’employée travaillant à l’établissement des Roms a confirmé dans une deuxième lettre qu’elle n’aurait pas dû indiquer que Mme Nikolova était considérée comme appartenant à la communauté rome en raison de sa langue, mais qu’elle aurait plutôt dû faire référence à la langue de ses ancêtres. Cette lettre indiquait également d’autres fondements soutenant la conclusion de l’auteure selon laquelle Mme Nikolova est d’origine rome. Cependant, bien que la Section d’appel des réfugiés ait noté la déclaration de l’auteure portant qu’elle avait commis une erreur, elle avait des réserves concernant la contradiction entre les deux lettres, compte tenu de l’absence d’une explication pour l’erreur commise. Par conséquent, la Section d’appel des réfugiés n’a accordé aucune valeur probante aux éléments de preuve présentés par l’employée travaillant à l’établissement des Roms.

[24]  Mme Nikolova conteste cet examen en soutenant que la demande de renseignements de la Section de la protection des réfugiés auprès de l’employée travaillant à l’établissement des Roms ne demandait pas de fournir une explication pour l’erreur. La Section de la protection des réfugiés a noté que l’employée travaillant à l’établissement des Roms avait indiqué que sa conclusion était fondée sur [traduction] « les antécédents culturels et la langue romani », de Mme Nikolova, et le tribunal a demandé à cette employée comment elle avait été en mesure d’établir ces renseignements sur la demanderesse, y compris les questions posées, les recherches effectuées et les évaluations réalisées.

[25]  Après avoir reçu la réponse décrite ci-dessus, la Section d’appel des réfugiés a noté que la deuxième lettre ne contenait aucune explication quant à la manière dont l’erreur s’était glissée dans la première lettre. L’examen du tribunal portait qu’il était raisonnable de s’attendre à ce qu’une explication soit fournie et, par conséquent, il n’a accordé aucune valeur probante à la lettre. Je ne peux conclure que la formulation de la demande d’explication de la Section de la protection des réfugiés mine le caractère raisonnable de l’examen de la Section d’appel des réfugiés. Dans sa deuxième lettre, l’employée travaillant à l’établissement des Roms a fourni une explication différente pour sa conclusion sur l’origine ethnique de Mme Nikolova, sans expliquer ce changement, sauf pour dire qu’elle avait commis une erreur, et il n’était pas déraisonnable de la part de la Section d’appel des réfugiés de tenir compte de cette absence d’explication dans son examen.

[26]  Mme Nikolova note également que dans la première décision de la Section d’appel des réfugiés (celle qui a été renvoyée à la Section d’appel des réfugiés pour nouvelle détermination, sur consentement), cette dernière a retenu l’explication de l’employée travaillant à l’établissement des Roms et elle a conclu que la lettre soutenait l’allégation de Mme Nikolova concernant son origine ethnique rome. La demanderesse n’explique pas comment ce point nuit au caractère raisonnable de la dernière décision de la Section d’appel des réfugiés, et je conclus qu’il n’y nuit pas. Lorsque l’affaire a été renvoyée, sur consentement, à la Section d’appel des réfugiés pour nouvelle détermination, la nouvelle formation de la Section d’appel des réfugiés a été tenue de tirer ses propres conclusions concernant les éléments de preuve. Cette formation n’était pas liée par les conclusions de la formation précédente de la Section d’appel des réfugiés.

4)  Lettre de M. Ivaylo Vasilev

[27]  À la suggestion de la Section de la protection des réfugiés, Mme Nikolova a obtenu et présenté une lettre rédigée par M. Ivaylo Vasilev, un ami de son père et un membre du conseil des aînés roms, selon la demanderesse. Elle conteste la conclusion de la Section d’appel des réfugiés selon laquelle aucun poids ne devrait être accordé à cette lettre, parce que le tribunal s’attendait à ce qu’une lettre écrite par un membre du conseil des aînés roms comprenne des renseignements pertinents indiquant que l’auteur était bel et bien membre de ce conseil. Elle note que l’auteur indique dans la lettre qu’il est un membre du tribunal meshere pour le quartier Filipovtsi.

[28]  Il ressort de la lecture de la décision de la Section d’appel des réfugiés que cette dernière a adopté la même analyse que la Section de la protection des réfugiés, en notant que la lettre avait été rédigée à la main et, plus important encore, qu’elle ne contenait aucun renseignement essentiel, comme un en-tête, qui indiquerait qu’elle a été rédigée par un membre du conseil. C’est l’absence de ce type d’éléments objectifs concernant le rôle de l’auteur qui a mené la Section d’appel des réfugiés à n’accorder aucun poids au document. Je ne vois aucune erreur susceptible de révision dans le traitement que la Section d’appel des réfugiés a réservé à ce document.

5)  Connaissances culturelles

[29]  La Section d’appel des réfugiés n’a accordé aucun poids à la réponse de Mme Nikolova concernant la question de la Section de la protection des réfugiés sur les musiciens et la musique roms qu’elle écoutait, parce qu’elle a mentionné un chanteur rom au sein d’un groupe bulgare qui ne joue pas de musique rome. En outre, la Section d’appel des réfugiés n’a pas accordé de poids à sa désignation des célébrations romes, puisqu’elle avait pu obtenir facilement ces renseignements dans les médias publics.

[30]  Mme Nikolova affirme que la Section de la protection des réfugiés a interrompu son témoignage sur les musiciens et les célébrations roms et, qu’en conséquence, elle a nommé qu’un musicien et fourni des précisions sur seulement deux des trois célébrations qu’elle avait désignées. Je conclus que cet argument n’a aucun fondement. Comme je l’ai déjà mentionné, il incombait à Mme Nikolova de démontrer son appartenance à la communauté rome. Comme le prétend le défendeur, elle était représentée par un avocat lors de l’audition devant la Section de la protection des réfugiés, et elle aurait pu compléter son témoignage concernant ses connaissances culturelles avant de clore sa preuve.

6)  Présomption de véracité

[31]  Enfin, Mme Nikolova invoque la décision Maldonado c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1980] 2 CF 302 (CF 1re inst.) [Maldonado], qui énonce le principe selon lequel le témoignage d’un demandeur d’asile est réputé vrai. Elle soutient que la Section de la protection des réfugiés et la Section d’appel des réfugiés auraient dû, par conséquent, retenir son témoignage quant à ses origines romes.

[32]  Cependant, comme l’a prétendu le défendeur, la présomption de véracité s’applique en l’absence d’un motif de douter de la crédibilité du demandeur. Les divers critères examinés par la Section d’appel des réfugiés, qui l’ont mené à conclure que Mme Nikolova n’avait pas démontré ses origines romes, constituent des réserves qui réfutent cette présomption. J’ai conclu que l’examen de ces facteurs par la Section d’appel des réfugiés était raisonnable. Par conséquent, la présomption de la décision Maldonado ne nuit pas au caractère raisonnable de la décision de la Section d’appel des réfugiés.

VI.  Conclusion

[33]  Comme j’ai conclu que les observations de la demanderesse ne démontrent aucune erreur commise par la Section d’appel des réfugiés qui rendrait sa décision déraisonnable, la présente demande de contrôle judiciaire doit être rejetée. Aucune des parties n’a proposé de question aux fins de certification, et aucune question n’est mentionnée.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-4195-17

LA COUR rejette la présente demande de contrôle judiciaire.

« Richard F. Southcott »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 29e jour d’octobre 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-4195-17

INTITULÉ :

MARIA NIKOLOVA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 28 MARS 2018

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE SOUTHCOTT

DATE DES MOTIFS :

LE 9 AVRIL 2018

COMPARUTIONS :

Mary E.E. Boyce

POUR LA DEMANDERESSE

Sally Thomas

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mary E.E. Boyce

Avocate

Toronto (Ontario)

POUR LA DEMANDERESSE

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.