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Date : 20180426


Dossier : IMM-3503-17

Référence : 2018 CF 454

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 26 avril 2018

En présence de monsieur le juge Gleeson

ENTRE :

ZVIAD KHRIKADZE

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  Le demandeur, M. Zviad Khrikadze, est un citoyen de la Géorgie. Il s’est enfui de la Géorgie et est entré au Canada en 2012. Il avait initialement demandé l’asile, invoquant la crainte d’être persécuté en raison de ses opinions politiques. À la suite d’un changement de gouvernement en Géorgie, M. Khrikadze a modifié sa demande affirmant qu’il craignait aussi un chef de police à Tbilisi qui menait une vendetta personnelle contre lui.

[2]  La Section de la protection des réfugiés a conclu que : 1) M. Khrikadze n’a pas réussi à établir une crainte justifiée d’être persécuté à l’avenir en raison de ses opinions politiques; 2) les éléments de preuve n’ont pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que la supposée vendetta personnelle était liée à ses opinions politiques ou tout autre motif prévu par la Convention; et 3) M. Khrikadze n’a pas réussi à présenter des éléments de preuve fiables et crédibles selon lesquels il était exposé à une menace à sa vie ou au risque de traitements et peines cruels et inusités découlant de la supposée vendetta personnelle. La Section de la protection des réfugiés a conclu que le demandeur n’a ni la qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger au sens des articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR).

[3]  M. Khrikadze sollicite le contrôle judiciaire de la décision en application du paragraphe 72(1) de la LIPR. Il soutient que plusieurs des conclusions défavorables tirées sur la crédibilité et l’invraisemblance par la Section de la protection des réfugiés sont déraisonnables, et que le fait que la Section de la protection des réfugiés ne l’a pas informé de préoccupations à l’égard de la disponibilité des membres de sa famille à témoigner a violé son droit à l’équité procédurale.

[4]  Pour les motifs qui suivent, je suis incapable de conclure que les conclusions défavorables de la Section de la protection des réfugiés quant à la crédibilité du demandeur ont été déraisonnables ni qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

II.  Résumé des faits

A.  Généralités

[5]  M. Khrikadze affirme qu’il est entré au Canada après deux tentatives infructueuses de fuir la Géorgie. Son épouse et son fils sont restés en Géorgie. Sa première demande d’asile était fondée sur sa crainte d’être persécuté en raison d’opinions politiques. Cependant, peu après son arrivée au Canada, le gouvernement géorgien qu’il disait craindre a été remplacé par un nouveau gouvernement qui s’inscrivait dans ses convictions politiques.

[6]  Avant son audience devant la Section de la protection des réfugiés en 2017, il avait modifié sa demande d’asile pour y inclure une allégation selon laquelle un chef de police à Tbilisi menait une vendetta personnelle contre lui selon la croyance qu’il avait eu une aventure avec son épouse.

[7]  En avril 2017, le ministre avait avisé la Cour de son intention d’intervenir durant l’audience pour [traduction] « présenter ses observations sur des questions relatives à l’intégrité et à la crédibilité du programme ». Le ministre ne s’est pas présenté à l’audience, mais a présenté des observations écrites avant l’audience.

B.  Décision faisant l’objet du contrôle

[8]  Le tribunal a admis que le demandeur avait établi son identité selon la prépondérance des probabilités à titre de ressortissant géorgien.

[9]  Dans son évaluation de la demande présentée en application de l’article 96 de la LIPR, la Section de la protection des réfugiés a souligné que le cousin du demandeur s’était également enfui de la Géorgie, et a été accepté à titre de réfugié au sens de la Convention au Canada en raison de ses opinions politiques. La Section de la protection des réfugiés a ensuite souligné qu’une élection ayant eu lieu peu après le départ de M. Khrikadze de la Géorgie a porté un nouveau parti au pouvoir, et que [traduction] « [i]l y a très peu d’éléments de preuve portant que les personnes désireuses d’un renouveau politique, et qui l’ont obtenu avec l’arrivée au pouvoir du Rêve géorgien (RG), avaient raison de craindre d’être victime de harcèlement, de discrimination ou de persécution en Géorgie en raison de leurs opinions politiques à la suite de l’élection de 2012 ».

[10]  C’est sur ce fondement que la Section de la protection des réfugiés a conclu que M. Khrikadze n’avait aucune crainte justifiée de persécution. La Section de la protection des réfugiés a également conclu que tout lien entre les opinions politiques du demandeur et la vendetta personnelle alléguée était hypothétique et n’avait pas été établi selon la prépondérance des probabilités.

[11]  La Section de la protection des réfugiés a ensuite abordé la vendetta personnelle alléguée conformément au risque présumé auquel était exposé M. Khrikadze aux termes de l’article 97 de la LIPR. La Section de la protection des réfugiés a conclu que les antécédents personnels et professionnels de M. Khrikadze étaient pertinents à la demande fondée sur l’article 97. Elle a souligné un récit changeant quant à l’affirmation de M. Khrikadze selon laquelle il était un joueur de soccer professionnel, en concluant que [traduction] « [l]e demandeur n’était pas un témoin crédible en ce qui a trait à ses antécédents personnels et professionnels en Géorgie ». La Section de la protection des réfugiés a aussi conclu que les éléments de preuve présentés par M. Khrikadze concernant son commerce automobile ne concordaient pas avec les renseignements contenus sur son Formulaire de renseignements personnels.

[12]  La Section de la protection des réfugiés a soulevé la saisie déclarée par les autorités géorgiennes de plus de 95 000 dollars américains à l’endroit de M. Khrikadze, menant encore une fois à la conclusion que le demandeur n’avait pas été franc à propos de ses antécédents personnels et de ses opérations financières. La Section de la protection des réfugiés a soulevé que : 1) le demandeur avait payé de nombreux passeurs pour l’aider à s’enfuir de la Géorgie, et avait été en mesure de subvenir à ses besoins au Canada pendant plusieurs années avant que ses biens ne soient saisis; 2) les éléments de preuve concernant ses opérations commerciales ne concordaient pas avec le présumé montant saisi par les autorités géorgiennes; 3) M. Khrikadze n’a déclaré aucun travail substantiel à la suite de l’échec financier et opérationnel de ses opérations commerciales; 4) son affirmation selon laquelle il avait reçu un prêt de son père, lequel travaillait dans une usine de traitement des viandes, pour ouvrir un commerce ne concordait pas avec le fait qu’il avait amassé des économies importantes avant de s’engager dans ses deux opérations commerciales; et 5) en dépit de ces facteurs, M. Khrikadze affirmait posséder d’importantes économies.

[13]  La Section de la protection des réfugiés a également exprimé des doutes en ce qui concerne le récit de M. Khrikadze à propos de la supposée vendetta personnelle. Elle a fait remarquer que le demandeur a affirmé que l’auteur du préjudice était l’époux d’une femme qui était à son emploi dans sa boulangerie, commerce qui, selon lui, a fermé ses portes en 2011. Cependant, il raconte que l’auteur du préjudice n’a pris aucune mesure avant 2013, alors qu’il aurait prétendument enlevé le père de M. Khrikadze pour tenter de localiser M. Khrikadze. La Section de la protection des réfugiés a admis qu’elle ne pouvait qu’émettre une hypothèse pour expliquer la raison pour laquelle il y aurait eu un si long laps de temps entre la supposée aventure et le moment où l’auteur du préjudice en a pris connaissance. Néanmoins, la Section de la protection des réfugiés a conclu que la crédibilité des allégations était plutôt entachée puisqu’elles n’avaient pas été incluses dans les déclarations initiales du demandeur, et la demande n’avait pas été modifiée dès qu’il en avait eu l’occasion.

[14]  La Section de la protection des réfugiés a affirmé que le supposé enlèvement de 2013 était un point essentiel de la demande, faisant remarquer que M. Khrikadze n’était pas présent lorsque l’événement a prétendument eu lieu. La Section de la protection des réfugiés a conclu que la vraisemblance de cet événement a été mise en doute par de nombreuses incohérences tant dans les éléments de preuve documentaire corroborants qu’entre eux, plus particulièrement entre les lettres soumises par le père de M. Khrikadze et la version des événements de M. Khrikadze.

[15]  La Section de la protection des réfugiés a également rejeté les allégations de M. Khrikadze selon lesquelles sa famille se cachait dans la maison de son beau-frère, qu’elle ne pouvait pas quitter et qu’il ne pouvait communiquer avec elle parce que l’auteur du préjudice, par l’intermédiaire de la police, viendrait à savoir où elle se trouvait. En rejetant ces allégations, la Section de la protection des réfugiés a indiqué ce qui suit : 1) l’épouse et le père du demandeur ont tous deux présenté une demande de documents d’identification émis par le gouvernement et reçu ces documents, et son père reçoit toujours sa pension; 2) les affidavits ne contiennent aucune déclaration de la famille quant à leurs conditions de vie; 3) le fait d’habiter dans la maison d’un membre de la famille ne suggère pas une tentative véritable de fuite si, tel que l’allègue M. Khrikadze, l’auteur du préjudice est en mesure de corrompre les autorités judiciaires et d’user de violence en toute impunité; 4) M. Khrikadze n’a pas expliqué de quelle façon les autorités pouvaient tracer les communications des membres de sa famille; et 5) les membres de sa famille ont été en mesure d’habiter dans la maison d’un membre de la famille pendant des années sans être retracés.

[16]  La Section de la protection des réfugiés a conclu que l’incapacité de communiquer avec les membres de sa famille a été inventée par le demandeur pour faire en sorte qu’ils ne puissent être appelés à témoigner, indiquant : [traduction] « le demandeur ne peut offrir personnellement que très peu de renseignements et son explication du manque de communication avec les membres de sa famille n’est pas raisonnable ».

[17]  La Section de la protection des réfugiés a également conclu que les allégations de M. Khrikadze selon lesquelles son fils avait été blessé par la police alors qu’elle était à sa recherche, et une deuxième supposée attaque contre le père de M. Khrikadze quelques jours seulement avant l’audience – après quatre ans sans aucunes représailles – n’ont pas été étayées par les éléments de preuve.

III.  Question préliminaire – Intitulé de la cause

[18]  M. Khrikadze a nommé le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté comme le défendeur en l’espèce. Le défendeur devrait être le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22, au paragraphe 5(2) et LIPR, au paragraphe 4(1)). En conséquence, le défendeur figurant à l’intitulé est modifié et remplacé par le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration.

IV.  Questions en litige

[19]  La présente demande soulève les questions suivantes :

  1. La conclusion de la Section de la protection des réfugiés aux termes de l’article 97 de la LIPR était-elle raisonnable?

  2. La Section de la protection des réfugiés a-t-elle violé le droit de M. Khrikadze à l’équité procédurale?

V.  Norme de contrôle

[20]  La demande déposée par M. Khrikadze en application de l’article 97 de la LIPR concerne des questions de fait et de droit devant être examinées selon la norme de contrôle de la décision raisonnable. Les cours de révision ne peuvent intervenir dans la mesure où une décision est justifiée, transparente et intelligible et qu’elle appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, aux paragraphes 47, 51 et 53; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 59; Velez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 923, aux paragraphes 22 et 23).

[21]  En considérant la question de l’équité procédurale, la Cour doit déterminer si l’obligation d’agir équitablement a été respectée selon le contexte particulier de chaque cas (Moreau-Bérubé c Nouveau-Brunswick (Conseil de la magistrature), 2002 CSC 11, au paragraphe 75, citant Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, au paragraphe 21, 174 DLR (4th) 193).

VI.  Discussion

A.  La conclusion de la Section de la protection des réfugiés aux termes de l’article 97 de la LIPR était-elle raisonnable?

[22]   M. Khrikadze soutient que les conclusions défavorables de la Section de la protection des réfugiés quant à la vraisemblance de sa carrière de joueur professionnel de soccer ont découlé d’un examen microscopique des éléments de preuve présentés. Il affirme que lors de l’interrogatoire, il avait clairement de la difficulté à répondre aux questions relatives à la période où il jouait au soccer professionnellement puisque sa mémoire faisait défaut, et il était donc déraisonnable que la Section de la protection des réfugiés mette en doute certaines incohérences. Il soutient également que ces renseignements ne sont pas pertinents en l’espèce.

[23]  Je ne peux être d’accord avec les observations de M. Khrikadze à cet égard. M. Khrikadze n’a cité aucune jurisprudence à l’appui de son argument selon lequel un décideur doit limiter son examen à une preuve directement pertinente à l’égard d’une demande lorsqu’il en évalue la crédibilité. La Section de la protection des réfugiés n’était pas limitée de la manière proposée. En outre, la Section de la protection des réfugiés affirme expressément les raisons pour lesquelles la carrière de joueur de soccer professionnel de M. Khrikadze et ses antécédents professionnels ont été considérés comme étant une preuve pertinente :

[traduction] Je juge que la situation du demandeur est pertinente, puisqu’il allègue être ciblé par un agent de l’État et qu’il ne peut se tourner vers les autorités, et qu’il avait un certain profil d’athlète selon ses déclarations initiales, mais on ne sait pas précisément dans quelle mesure.

De plus, ces questions sont pertinentes, puisque son expérience professionnelle confirme la question entourant la saisie de ses biens; le demandeur allègue que les autorités ont injustement saisi plus de 95 000 $ US.

[24]  M. Khrikadze soutient également que la Section de la protection des réfugiés a mal interprété les éléments de preuve présentés concernant son commerce automobile en concluant qu’il a tenté [traduction] « d’embellir » les éléments de preuve, et que la Section de la protection des réfugiés a commis une erreur en concluant qu’il avait changé son témoignage à propos de la nature de son commerce. Alors que M. Khrikadze n’est pas d’accord avec l’interprétation des éléments de preuve par la Section de la protection des réfugiés, la Cour doit faire preuve d’une grande retenue à l’égard des conclusions tirées par la Section de la protection des réfugiés (Aguilar Zacarias c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1155, au paragraphe 9 [Zacarias]). J’ai relu la transcription de l’audience et je ne peux conclure que la Section de la protection des réfugiés a commis une erreur dans son interprétation.

[25]  M. Khrikadze soulève également la conclusion de la Section de la protection des réfugiés selon laquelle son témoignage concernant la nature de son commerce automobile avait changé. À cet égard, je suis persuadé que la Section de la protection des réfugiés a effectivement commis une erreur en concluant que le fond de son témoignage avait changé. Cependant, une conclusion de fait erronée à elle seule ne justifie pas l’intervention de la Cour par voie de contrôle judiciaire. La Cour doit être convaincue que le décideur a fondé sa décision sur l’erreur de fait, et que l’erreur a été « tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont [la SPR] dispose » (Loi sur les Cours fédérales, LRC (1985), c F-7, alinéa 18.1(4)d)). En l’espèce, la préoccupation de la Section de la protection des réfugiés concernant la description faite par M. Khrikadze de son commerce automobile n’était qu’un exemple parmi tant d’autres cités par la Section de la protection des réfugiés de l’incohérence du témoignage, et la conclusion selon laquelle le témoignage a changé n’était pas déterminante en l’espèce. L’erreur ne mine pas le caractère raisonnable de la décision de la Section de la protection des réfugiés.

[26]  La Section de la protection des réfugiés a conclu que le témoignage de M. Khrikadze selon lequel il avait des économies de 95 000 dollars américains ne concordait pas avec ses antécédents de travail. M. Khrikadze soutient qu’il s’agissait d’une conclusion d’invraisemblance inappropriée. Je ne conteste pas la position de M. Khrikadze selon laquelle les conclusions d’invraisemblance doivent être limitées aux cas les plus évidents où les éléments de preuve permettent de déterminer la question avec certitude (Ansar c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1152, au paragraphe 17; Zacarias, au paragraphe 10). Cependant, en l’espèce, la Section de la protection des réfugiés s’est livrée à un examen approfondi de la preuve, y compris la nature brève des opérations commerciales de M. Khrikadze et son témoignage selon lequel ses opérations commerciales ont été des échecs financiers et opérationnels, et il a dû emprunter de l’argent de son père pour démarrer son commerce automobile. La conclusion raisonnable de la Section de la protection des réfugiés selon laquelle un montant d’économies de 95 000 dollars américains ne concordait pas avec les antécédents de travail de M. Khrikadze reposait sur un fondement probatoire clair.

[27]   Enfin, M. Khrikadze soutient que les préoccupations de la Section de la protection des réfugiés concernant le moment où il a modifié sa demande et le défaut de considérer l’explication de son avocat quant au contenu des lettres d’appui de son père rendent la décision déraisonnable. Là encore, je ne suis pas d’accord.

[28]  Il n’était pas déraisonnable pour la Section de la protection des réfugiés de soulever le moment où M. Khrikadze a modifié sa demande au motif qu’un demandeur aurait [traduction« une motivation importante de modifier ses allégations sachant que ses allégations politiques ne seraient plus suffisantes comme fondement de sa demande ». Alors que M. Khrikadze n’était aucunement tenu de modifier sa demande plus tôt qu’il ne l’a fait, la Section de la protection des réfugiés n’a pas commis une erreur en interprétant que ce retard aurait pu être pertinent à l’évaluation de la crédibilité, compte tenu de l’importance fondamentale de la nature de la modification de la demande.

[29]  En ce qui concerne les observations de l’avocat, je soulignerais simplement que le fait qu’un décideur décide de ne pas faire référence « à tous les arguments, dispositions législatives, précédents ou autres détails que le juge siégeant en révision aurait voulu y lire [...] ne met pas en doute leur validité ni celle du résultat au terme de l’analyse du caractère raisonnable de la décision » (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, au paragraphe 16).

[30]  Les motifs en l’espèce me permettent de comprendre les raisons pour lesquelles la Section de la protection des réfugiés en est arrivée à cette décision et de conclure que la décision appartient aux issues possibles acceptables. La décision de la Section de la protection des réfugiés, aux termes de l’article 97 de la LIPR, est raisonnable.

B.  La Section de la protection des réfugiés a-t-elle violé le droit de M. Khrikadze à l’équité procédurale?

[31]  La Section de la protection des réfugiés a fait remarquer l’absence de témoignage personnel direct concernant la supposée vendetta personnelle, une vendetta qui, selon le témoignage de M. Khrikadze, n’a vu le jour qu’après son départ de la Géorgie. La Section de la protection des réfugiés a conclu que l’absence d’une telle preuve a contribué à miner davantage la crédibilité des allégations de M. Khrikadze. Ce dernier soutient que le fait que la Section de la protection des réfugiés ne l’a pas avisé qu’elle souhaitait interroger des membres de sa famille a enfreint l’équité procédurale en l’espèce.

[32]  Dans la présente cause, le demandeur a été avisé le 18 avril 2017 que le ministre avait l’intention d’intervenir lors de son audience pour [traduction] « présenter ses observations sur des questions relatives à l’intégrité et à la crédibilité du programme ». M. Khrikadze a été avisé que des questions de crédibilité étaient en jeu avant le début de l’audience.

[33]  Les déclarations dans le dossier des membres de la famille ne contiennent que peu de détails concernant la supposée vendetta personnelle. Les brèves déclarations écrites présentées par l’épouse, le beau-frère et les enfants de M. Khrikadze ne permettent pas d’identifier l’auteur du préjudice.

[34]  Le fardeau et l’obligation reposaient sur M. Khrikadze de présenter les meilleurs arguments possibles à l’appui de sa demande d’asile. Il a été avisé que la crédibilité en l’espèce posait un problème. La Section de la protection des réfugiés a respecté son obligation d’agir de façon équitable selon les circonstances en l’espèce.

VII.  Conclusion

[35]  La décision de la Section de la protection des réfugiés est transparente, justifiée et intelligible et elle appartient aux issues possibles acceptables fondées sur les faits et le droit. Je conclus qu’il n’y a pas eu de manquement à l’équité procédurale.

[36]  Les parties n’ont pas relevé de question de portée générale aux fins de certification et aucune question n’a été soulevée.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Aucune question n’est certifiée.

  3. L’intitulé de la cause est modifié de façon à ce que le seul défendeur désigné soit le ministre de l’Immigration et de la Citoyenneté;

« Patrick Gleeson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 18e jour d’octobre 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3503-17

INTITULÉ :

ZVIAD KHRIKADZE c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Calgary (Alberta)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 30 janvier 2018

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE GLEESON

DATE DES MOTIFS :

Le 26 avril 2018

COMPARUTIONS :

Bjorn Harsanyi

Pour le demandeur

Cailen Brust

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Stewart Sharma Harsanyi

Avocats

Calgary (Alberta)

Pour le demandeur

Procureur général du Canada

Calgary (Alberta)

Pour le défendeur

 

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