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Date : 20180427


Dossier : T-1479-16

Référence : 2018 CF 453

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 27 avril 2018

En présence de monsieur le juge Gleeson

ENTRE :

MOHAMED KARIM

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA ET KAIROS PNEUMA CHAPLAINCY SERVICES ET LE PÈRE MARK MCGHEE

défendeurs

ORDONNANCE ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  Les défendeurs, Kairos Pneuma Chaplaincy Services (KPC) et le père Mark McGee (collectivement les requérants), introduisent la présente requête en application des alinéas 221(1)a) et f) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, afin que soient radiées les demandes déposées contre eux. Ils soutiennent qu’aux termes de l’article 17 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F-7 (la Loi), la Cour n’a pas compétence concernant les demandes déposées contre eux en l’espèce.

[2]  Pour les motifs qui suivent, la requête est rejetée et les requérants doivent répondre à la déclaration dans les 30 jours suivant la date de la présente ordonnance.

II.  Contexte

A.  La demande sous-jacente

[3]  Le demandeur, Mohamed Karim, est un délinquant et un détenu incarcéré à l’Établissement de Grande Cache, un établissement à sécurité moyenne administré par le Service correctionnel du Canada (SCC).

[4]  En 2013, des fonctionnaires du SCC ont décidé de transformer le modèle utilisé pour la prestation des services d’aumônerie offerts aux délinquants fédéraux. Le SCC a entamé un processus afin de trouver un fournisseur de services unique qui se chargerait de la prestation des services religieux et spirituels. En avril 2014, le SCC a accordé un contrat à KPC, qui devait fournir ces services conjointement avec le SCC; le père McGee était un sous-traitant de KPC.

[5]  Le demandeur allègue avoir été harcelé et privé de sa liberté de religion. Les demandes déposées contre les requérants sont fondées sur le statut de ces derniers en tant que préposés ou mandataires de la Couronne.

B.  La position des requérants, KPC et le père McGee

[6]  Les requérants affirment que la Cour n’a pas compétence pour entendre les demandes déposées contre eux. Ils affirment en outre que les demandes du demandeur constituent une contestation incidente et un abus de procédure, car elles ont déjà été tranchées par d’autres tribunaux et ces décisions n’ont pas été contestées en cour. Ils demandent que : 1) leur nom soit radié de l’intitulé; 2) toute référence à eux à titre de mandataires de la Couronne, de défendeurs, ou quant à leur responsabilité personnelle, soit radiée de la déclaration; 3) toute référence à un traitement discriminatoire, présumé ou non, soit radiée. À titre subsidiaire, ils demandent un délai de 30 jours à compter de la date de la présente ordonnance pour répondre à la déclaration.

1)  Le critère énoncé dans l’arrêt ITO n’est pas satisfait.

[7]  Les requérants affirment que, suivant la décision de la Cour suprême du Canada dans ITO-Int’l Terminal Operators c Miida Electronics, [1986] 1 RCS 752, 28 DLR (4th) 641 [ITO], la Cour a compétence uniquement lorsque les trois volets du « critère ITO » sont satisfaits : 1) une attribution de compétence par une loi du Parlement fédéral; 2) l’existence d’un ensemble de règles de droit fédérales essentiel à la solution du litige et qui constitue le fondement de l’attribution légale de compétence; et 3) la loi invoquée dans l’affaire doit être « une loi du Canada » au sens où l’expression est employée à l’article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867.

[8]  Ils soutiennent également que la compétence de la Cour fédérale s’étend aux fonctionnaires, préposés ou mandataires de la Couronne. Ils affirment qu’ils ne sont ni des fonctionnaires, ni des préposés, ni des mandataires de la Couronne. Ils soutiennent en fait que les services ont été fournis en application des modalités d’un contrat d’entreprise. Les requérants reconnaissent que, dans de telles circonstances, la Couronne peut exercer un contrôle suffisant pour permettre de conclure qu’une relation de droit existe entre la Couronne et le mandataire. Par contre, ils affirment que les requérants ont exercé un pouvoir discrétionnaire substantiel dans la prestation des services d’aumônerie au SCC, et qu’il ne peut être affirmé qu’ils sont des mandataires de la Couronne en raison de ce contrôle de droit.

[9]  Les requérants ajoutent que la deuxième condition du critère ITO n’est pas satisfaite. Ils soutiennent que la demande relève du droit de la responsabilité délictuelle. Ils affirment qu’il n’existe aucune règle de droit fédérale qui confère explicitement compétence à la Cour fédérale d’entendre des causes touchant à des délits de common law. De même, ils affirment qu’en ce qui concerne la demande de dommages-intérêts du demandeur fondée sur le paragraphe 24(1) de la Charte, la Charte ne confère pas compétence à la Cour fédérale d’accorder une réparation constitutionnelle, en l’absence d’une source de compétence externe.

2)  La contestation incidente ou l’abus de procédure

[10]  Les requérants soutiennent que la déclaration conteste indirectement une décision relative à un grief et une décision de la Commission canadienne des droits de la personne, rendues à la suite des plaintes du demandeur. Ces décisions n’ont pas été contestées au moyen des procédures de contrôle habituelles. Ils soutiennent qu’accueillir cette demande en fonction de ces faits constituerait un abus de procédure et une contestation incidente de ces décisions.

C.  La thèse du demandeur

[11]  Le demandeur soutient que les demandes ne peuvent être radiées que si elles n’ont aucune chance raisonnable d’être accueillies. Il affirme que, si on applique le critère ITO, il n’est ni évident ni manifeste que la Cour n’a pas compétence, puisque les services fournis par les requérants découlent des obligations du SCC à l’égard des détenus énoncées dans la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, LC 1992, c 20, et le Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, DORS/92-620. Il soutient en outre que la présente action n’est ni une contestation incidente, ni un abus de procédure.

1)  Le critère ITO est satisfait – les requérants sont des préposés ou mandataires de la Couronne

[12]  Le demandeur affirme que, dans le cadre de leurs fonctions, les requérants s’acquittent d’une obligation du SCC, soit de permettre aux détenus de pratiquer leur religion et d’exprimer leur spiritualité. La Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, et son Règlement, obligent les requérants à respecter tous les droits des détenus qui ne sont pas, légitimement ou par nécessité, restreints par leur emprisonnement, et à se familiariser avec toutes les politiques du SCC liées à leurs devoirs. Le Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition prévoit également que les détenus peuvent intenter des recours civils contre des membres du personnel du SCC en plus de toute procédure de grief autorisée.

[13]  Le demandeur soutient que les requérants sont des représentants du SCC et des préposés de la Couronne ou, en raison du contrôle de droit exercé, des mandataires de la Couronne. Il affirme qu’en dépit de toute autorité professionnelle que les requérants pourraient avoir concernant la prestation de services religieux, ils demeuraient soumis à un contrôle important de la part du SCC. Il soutient que les trois volets du critère ITO sont satisfaits et que la Cour a compétence pour l’application de l’alinéa 17(5)b) de la Loi. En outre, le demandeur affirme que la Charte s’applique, puisque les activités des requérants sont manifestement de nature gouvernementale.

2)  La contestation incidente ou l’abus de procédure

[14]  Le demandeur affirme qu’aucun élément de preuve au dossier ne permet de démontrer que des décisions ont été rendues par d’autres tribunaux concernant les plaintes sous-jacentes à la présente demande. De plus, il affirme que l’article 81 du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition permet aux détenus d’engager des actions en justice en plus de présenter une plainte ou un grief selon la procédure de grief prévue. Le demandeur soutient qu’il n’y a pas abus de procédure.

D.  La position du défendeur, le procureur général du Canada

[15]  Le procureur général soutient que la Cour n’a pas compétence, étant donné que le premier volet du critère ITO n’est pas satisfait. Le procureur général soutient également qu’aucun élément de preuve au dossier ne permet à la Cour de se pencher sur les observations des requérants, selon lesquelles l’action sous-jacente constitue une contestation incidente ou un abus de procédure.

1)  Le critère ITO n’est pas satisfait – les requérants ne sont pas des préposés ou des mandataires de la Couronne

[16]  Le procureur général fait valoir que le droit fédéral joue un rôle suffisamment important dans les demandes du demandeur pour soutenir l’attribution d’une compétence fédérale énoncée dans le critère ITO. Les Cours fédérales peuvent se pencher sur des délits de common law qui se fondent sur le droit fédéral, lorsqu’il existe un cadre législatif détaillé. Toutefois, le procureur général soutient qu’il n’y a pas attribution de compétence par une loi du Parlement fédéral, parce que les requérants ne sont ni des mandataires ni des préposés de la Couronne, conformément à ce qu’exige l’alinéa 17(5)b) de la Loi.

[17]  Le procureur général affirme que pour que les requérants soient reconnus à titre de mandataires de la Couronne, il doit être démontré que : 1) le Parlement reconnaissait les requérants comme des mandataires; ou 2) la Couronne exerce un contrôle de droit sur les requérants. En l’espèce, le procureur général soutient que seule la deuxième option peut être débattue.

[18]   Le procureur général reconnaît la relation contractuelle liant la Couronne et KPC, mais soutient que la Couronne n’exerce aucun contrôle sur la manière dont KPC remplit ses obligations. Selon les modalités du contrat, le rôle du SCC concernant la supervision et le contrôle de KPC se limite à la fourniture 1) d’un lieu de culte dans l’établissement, 2) d’un espace de travail et d’un ordinateur pour les aumôniers, et 3) d’un accès à toutes les parties de l’établissement où les aumôniers doivent exercer leur ministère. La Couronne n’exerce pas un contrôle important sur KPC et, par conséquent, n’exerce pas un contrôle de droit.

[19]  Le procureur général soutient également que le père McGee est un sous-traitant de KPC. Le père McGee et la Couronne ne sont pas liés par une relation contractuelle et, par conséquent, l’affirmation selon laquelle il est un mandataire de la Couronne ne peut être accueillie.

2)  La contestation incidente ou l’abus de procédure

[20]  Le procureur général souligne qu’une contestation incidente est une tentative visant à annuler une décision sans passer par la procédure d’appel appropriée, alors qu’un abus de procédure est une tentative visant à remettre en litige les mêmes questions déjà soulevées, et pouvant entraîner par le fait même des décisions incohérentes. Le procureur général soutient que conclure à l’une ou à l’autre obligerait la Cour à se prononcer sur le fond de l’affaire.

III.  Dispositions législatives applicables

1)  Requête en radiation

[21]  Les alinéas 221a) et f) des Règles régissent la requête en radiation des requérants :

221 (1) À tout moment, la Cour peut, sur requête, ordonner la radiation de tout ou partie d’un acte de procédure, avec ou sans autorisation de le modifier, au motif, selon le cas :

a) qu’il ne révèle aucune cause d’action ou de défense valable;

f) qu’il constitue autrement un abus de procédure.

Elle peut aussi ordonner que l’action soit rejetée ou qu’un jugement soit enregistré en conséquence.

221 (1) On motion, the Court may, at any time, order that a pleading, or anything contained therein, be struck out, with or without leave to amend, on the ground that it

(a) discloses no reasonable cause of action or defence, as the case may be

(f) is otherwise an abuse of the process of the Court

and may order the action be dismissed or judgment entered accordingly.

[22]  La Cour suprême du Canada a exposé le critère à appliquer à une requête en radiation pour absence de cause d’action valable : « l’action ne sera rejetée que s’il est évident et manifeste, dans l’hypothèse où les faits allégués seraient avérés, que la déclaration ne révèle aucune cause d’action raisonnable » (R. c Imperial Tobacco Canada Ltée, 2011 CSC 42, au paragraphe 17, citant Hunt c Carey Canada Inc., [1990] 2 RCS 959) [Imperial]). Le critère applicable n’est pas contesté.

[23]  En l’espèce, l’argument des requérants, selon lequel les actes de procédure ne révèlent aucune cause d’action raisonnable, est fondé sur un défaut de compétence. Lorsqu’une requête en radiation soulève la question de la compétence de notre Cour, cette dernière doit décider si les actes de procédure ou les affidavits déposés établissent que « des faits juridictionnels ou des allégations de tels faits étayent une attribution de compétence » (Mil Davie Inc. c Société d’Exploitation et de Développement d’Hibernia Ltée (1998), 226 NR 369, 85 C.P.R. (3d) 320, au paragraphe 8 (CAF)).

[24]  En termes clairs, ma tâche n’est pas de déterminer si la Cour a compétence ou non en l’espèce. En fait, à ce stade préliminaire des procédures, les demandes du demandeur ne seront radiées que si le défaut de compétence de la Cour est évident et manifeste.

2)  Le critère relatif à la compétence de la Cour fédérale

[25]  Les parties conviennent que le critère approprié permettant de déterminer si la Cour fédérale a compétence sur une question est énoncé par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt ITO :

  1. Il doit y avoir attribution de compétence par une loi du Parlement fédéral.

  2. Il doit exister un ensemble de règles de droit fédérales qui soit essentiel à la solution du litige et constitue le fondement de l’attribution légale de compétence.

  3. La loi invoquée dans l’affaire doit être « une loi du Canada » au sens où l’expression est employée à l’article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867.

[26]  La Cour fédérale a compétence uniquement lorsque les trois volets du critère ITO sont satisfaits. Par conséquent, si les requérants démontrent que la demande ne satisfait pas à un des volets, de manière évidente et manifeste, la demande du demandeur contre eux sera radiée.

[27]  La Cour suprême du Canada s’est récemment penchée sur le critère ITO dans l’arrêt Windsor (City) c Canadian Transit Co., 2016 CSC 54 [Windsor (City)]. Cette affaire portait sur un litige relatif à un certain nombre de propriétés résidentielles vacantes appartenant à la société Canadian Transit Company, qui possède et exploite la moitié canadienne du pont Ambassador. Les maisons vacantes étaient délabrées et la Ville de Windsor avait donné des ordres de réparation visant ces propriétés. Canadian Transit Company avait demandé une déclaration selon laquelle elle n’était pas visée par les règlements municipaux, parce que les propriétés touchaient à un ouvrage fédéral, le pont Ambassador. La Ville de Windsor avait demandé la radiation de l’avis de demande de la Société.

[28]  La question de la compétence dans l’arrêt Windsor (City) a été soulevée dans le contexte de l’article 23 de la Loi, lequel prévoit que la Cour fédérale a compétence dans tous les cas de « […] demande de réparation ou d’autre recours exercé sous le régime d’une loi fédérale ou d’une autre règle de droit […] ». La juge Karakatsanis, s’exprimant au nom de la majorité, a déclaré ce qui suit aux paragraphes 25 à 27 :

[25]  Afin de décider si la Cour fédérale a compétence sur une demande, il est nécessaire de déterminer la nature ou le caractère essentiel de cette demande (JP Morgan Asset Management (Canada) Inc. c. Canada (Revenu national), 2013 CAF 250, [2014] 2 R.C.F. 557, par. 50; Canada (Revenu national) c. Sifto Canada Corp., 2014 CAF 140, par. 25 (CanLII)). Comme je l’explique en détail ci-après, l’al. 23c) de la Loi sur les Cours fédérales confère compétence à la Cour fédérale uniquement à l’égard d’une demande de réparation ou d’un autre recours exercé « sous le régime d’une loi fédérale ou d’une autre règle de droit ». L’attribution de compétence dépend de la nature de la demande ou du recours exercé. Le fait de déterminer la nature essentielle de la demande permet au tribunal de décider si celle-ci relève de l’al. 23c). La compétence ne s’apprécie pas au cas par cas ou au regard d’une question litigieuse à la fois.

[26]  Il faut dégager la nature essentielle de la demande selon « une appréciation réaliste du résultat concret visé par le demandeur » (Canada c. Domtar Inc., 2009 CAF 218, par. 28 (CanLII), la juge Sharlow). La « déclaration [du demandeur] ne doit pas être prise au pied de la lettre » (Roitman c. Canada, 2006 CAF 266, par. 16 (CanLII), le juge Décary). Le tribunal doit plutôt « aller au-delà des termes employés, des faits allégués et de la réparation demandée, et il doit s’assurer que la déclaration ne constitue pas une tentative déguisée visant à obtenir devant la Cour fédérale un résultat qui ne peut par ailleurs pas être obtenu de cette cour » (ibid., voir aussi Canadian Pacific Railway c. R., 2013 CF 161, [2014] 1 C.T.C. 223, par. 36; Verdicchio c. Canada, 2010 CF 117, par. 24 (CanLII)).

[27]  Par ailleurs, de véritables choix stratégiques ne devraient pas être dénigrés sous prétexte qu’ils constituent d’astucieux arguments. La question consiste à se demander si la cour a compétence à l’égard de la demande précise que le demandeur a choisi d’introduire, et non pas à l’égard d’une demande similaire que, de l’avis du défendeur, le demandeur aurait plutôt dû présenter, pour une raison ou une autre.

[29]  Les parties n’ont pas mentionné l’arrêt Windsor (City) dans leurs observations originales. Des observations supplémentaires ont été demandées et déposées.

IV.  Questions en litige :

[30]  La requête soulève les questions suivantes :

  1. Est-il évident et manifeste que la Cour fédérale n’a pas compétence pour entendre la demande déposée contre les requérants? Cette question soulève deux questions secondaires :

  1. En ce qui concerne la question de la compétence, est-il nécessaire de déterminer d’abord la nature essentielle de la demande?

  2. Est-il évident et manifeste que la demande déposée contre les requérants ne satisfait pas au critère ITO?

  1. L’action équivaut-elle à une contestation incidente ou à un abus de procédure?

V.  Discussion

A.  La Cour fédérale a-t-elle compétence pour entendre la demande déposée contre les requérants?

1)  Est-il nécessaire de déterminer d’abord la nature essentielle de la demande?

[31]  Les requérants soutiennent que l’arrêt Windsor (City) modifie le critère ITO en rendant obligatoire, à titre d’étape préliminaire, le fait de devoir déterminer la nature essentielle de la demande avant de se pencher sur le critère à trois volets énoncé dans l’arrêt ITO. Ils soutiennent que cette condition préliminaire ne se limite pas uniquement aux demandes soulevant une question de compétence aux termes de l’article 23 de la Loi; ils s’appuient sur de récentes décisions de notre Cour dans Apotex Inc. c Ambrose, 2017 CF 487 [Ambrose] et 744185 Ontario Incorporation c Canada (Transports), 2017 CF 764 [744185].

[32]  Le demandeur soutient qu’il est difficile d’établir clairement si l’obligation de dégager la nature essentielle de la demande s’ajoute à l’analyse fondée sur le critère ITO en l’espèce. Le procureur général fait valoir que contrairement à la situation dans l’arrêt Windsor (City), où la Cour suprême a interprété l’alinéa 23c) de la Loi, en l’espèce, la Cour interprète l’alinéa 17(5)b). Le procureur général soutient que le raisonnement dans l’arrêt Windsor (City) n’est pas directement pertinent pour décider si le demandeur a satisfait aux volets du critère ITO en ce qui concerne les requérants.

[33]  La décision Ambrose portait sur une requête en radiation d’une action déposée contre des défendeurs désignés individuellement, qui ont joué un rôle dans la réglementation de la vente de produits pharmaceutiques au Canada et ont fait des déclarations publiques présumément diffamatoires à l’endroit d’Apotex. La question que devait trancher la Cour dans cette requête en radiation était de déterminer si la Cour fédérale avait compétence pour entendre les demandes déposées contre les personnes. Dans la décision Ambrose, les parties ont convenu que l’alinéa 17(5)b) de la Loi créait une attribution légale de compétence spéciale, satisfaisant ainsi au premier volet du critère ITO.

[34]  Dans la décision Ambrose, le juge Michael Manson s’est penché sur la nécessité de déterminer la nature essentielle d’une demande avant d’appliquer le critère ITO dans le cadre d’une action découlant de l’alinéa 17(5)b). Après avoir cité la décision majoritaire de l’arrêt Windsor (City), le juge Manson a conclu, au paragraphe 48, que l’arrêt Windsor (City) rendait obligatoire la caractérisation de la nature essentielle de la demande dans le but d’« établir les faits substantiels nécessaires pour évaluer si la demande relève de l’attribution légale de compétence déterminée à la première étape du critère de l’arrêt ITO ».

[35]  Comme je l’ai souligné plus haut, l’arrêt Windsor (City) portait sur l’interprétation de l’article 23 de la Loi, lequel prévoit que la Cour fédérale a compétence dans les cas où une demande de réparation est présentée « sous le régime d’une loi fédérale ou d’une autre règle de droit ». C’est en interprétant ces termes que la majorité a conclu que le droit de demander réparation doit découler directement d’une loi fédérale, et non être simplement lié au droit fédéral. Il n’existe pas de telle limite à l’alinéa 17(5)b) de la Loi (Ambrose, au paragraphe 50).

[36]  Il n’est pas non plus contesté que la loi confère à la Cour fédérale le pouvoir de statuer sur des demandes en responsabilité délictuelle qui sont dûment présentées à la Cour aux termes de l’article 17 de la Loi. Lorsqu’une demande en responsabilité délictuelle relève de l’article 17, cet article crée une compétence partagée entre la Cour fédérale et les cours provinciales, donnant ainsi au demandeur le choix du tribunal (Ambrose, aux paragraphes 52, 53 et 57, citant Canada (Procureur général) c TeleZone Inc., 2010 CSC 62, aux paragraphes 58 et 59).

[37]  Je suis donc d’accord avec la conclusion du juge Manson dans la décision Ambrose et la fais mienne : lorsque la compétence de la Cour relève de l’article 17 de la Loi, l’arrêt Windsor (City) rend obligatoire la caractérisation de la nature essentielle de la demande dans le but d’« établir les faits substantiels nécessaires pour évaluer si la demande relève de l’attribution légale de compétence déterminée à la première étape du critère de l’arrêt ITO ».

a)  Quelle est la nature essentielle de la demande?

[38]  Pour dégager la nature essentielle d’une demande, une cour doit avoir « une appréciation réaliste du résultat concret visé par le demandeur » (Windsor (City), au paragraphe 26, citant Canada c Domtar Inc., 2009 CAF 218, 392 N.R. 200, au paragraphe 28, la juge Sharlow). Les requérants soutiennent que la nature essentielle de la demande déposée contre eux concerne la [traduction] « conduite négligente, malveillante et intentionnelle » du père McGee, et la responsabilité du fait d’autrui de KPC. Bien que je ne sois pas en désaccord avec cette affirmation, elle demeure incomplète. Je qualifierais la demande déposée contre eux de demande découlant de leur conduite négligente, malveillante et intentionnelle liée à leurs fonctions à titre de mandataires de la Couronne.

[39]  Il est allégué, au paragraphe 3 de la déclaration, que les requérants sont des préposés ou des mandataires de la Couronne. Il a été plaidé que le fait attributif de compétence fait en sorte que les requérants relèvent du champ d’application de l’attribution légale de compétence énoncée à l’alinéa 17(5)b). Après avoir examiné la déclaration et tenu compte du résultat concret visé par le demandeur, j’estime que la nature essentielle de la demande concerne des allégations d’actes de négligence ou d’actes fautifs intentionnels de la part de préposés ou de mandataires de la Couronne dans le cadre de leurs fonctions, telles qu’elles sont définies dans les lois et règlements fédéraux.

2)  Est-il évident et manifeste que le critère ITO n’est pas satisfait?

a)  Première étape : y a-t-il attribution de compétence par une loi?

(i)  Les requérants sont-ils des mandataires de la Couronne?

[40]  Dans les observations présentées, la question du statut des requérants en tant que fonctionnaires ou préposés de la Couronne n’a pas été sérieusement envisagée. La question est de savoir s’ils sont des mandataires de la Couronne au sens de l’alinéa 17(5)b) de la Loi.

[41]  Comme je l’ai déjà mentionné, il est allégué dans la déclaration que les requérants sont des mandataires de la Couronne. Lors d’une requête en radiation, je dois présumer que les faits plaidés sont avérés (Imperial, au paragraphe 17). Les requérants demandent toutefois à la Cour de radier les actes de procédure au motif qu’ils ne sont pas des mandataires de la Couronne.

[42]  Il n’est pas simple de conclure que les requérants ne sont pas des mandataires de la Couronne, contrairement au plaidoyer du demandeur. Cela nécessite un examen détaillé du dossier. Les parties ont relevé un certain nombre de considérations pertinentes :

  1. Une entité peut devenir un mandataire de la Couronne : 1) lorsque le législateur désigne expressément l’entité mandataire de l’État, ou 2) lorsque la Couronne exerce sur elle un contrôle suffisant, pour que l’on puisse dire qu’elle est soumise à un contrôle de droit.

  2. En l’espèce, les requérants n’ont pas été désignés mandataires par le législateur; par conséquent, la Cour doit décider si la Couronne exerce sur eux un contrôle de droit. Cela signifie qu’un examen attentif de la relation entre la Couronne et l’entité est nécessaire (Nova Scotia Power Inc. c Canada, 2004 CSC 51, aux paragraphes 12 et 13). Plus le contrôle est important, plus il y a de chance que l’entité soit considérée comme un mandataire de la Couronne. Dans l’examen de la relation, il ne s’agit pas de savoir à quel point l’entité est autonome en fait, mais de savoir quelle mesure d’autonomie elle peut revendiquer d’après les arrangements entre la Couronne et elle-même (R. c Eldorado Nucléaire Ltée; R. c Uranium Canada Ltée, [1983] 2 RCS 551, 4 DLR (4th) 193, au paragraphe 42 [Eldorado]).

  3. Pour décider du degré de contrôle pouvant être exercé en fonction des modalités de la relation entre la Couronne et l’autre partie, il faut examiner le cadre législatif et réglementaire.

[43]  Dans ces circonstances, l’article 75 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition exige que le SCC offre un soutien et des services à tous les détenus fédéraux, quelles que soient leurs croyances religieuses :

75 Dans les limites raisonnables fixées par règlement pour assurer la sécurité de quiconque ou du pénitencier, tout détenu doit avoir la possibilité de pratiquer librement sa religion et d’exprimer sa spiritualité.

75. An inmate is entitled to reasonable opportunities to freely and openly participate in, and express, religion or spirituality, subject to such reasonable limits as are prescribed for protecting the security of the penitentiary or the safety of persons.

[44]  En outre, les articles 100 et 101 du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition définissent les responsabilités et obligations du SCC en lien avec les services religieux et spirituels à fournir aux détenus :

100 (1) Tout détenu a droit de pratiquer sa religion ou sa vie spirituelle conformément à l’article 75 de la Loi, dans la mesure où cette pratique ou cette vie spirituelle :

100 (1) Every inmate shall be entitled to express the inmate’s religion or spirituality in accordance with section 75 of the Act to the extent that the expression of the inmate’s religion or spirituality does not

a) ne compromet pas la sécurité du pénitencier ou de quiconque;

(a) jeopardize the security of the penitentiary or the safety of any person; or

b) ne comporte pas d’objets interdits.

(b) involve contraband.

(2) Les articles 98 et 99 s’appliquent à toute réunion de détenus ayant pour objet la pratique de la religion ou de vie spirituelle.

(2) Sections 98 and 99 apply in respect of any assembly of inmates held for the purpose of expressing a religion or spirituality.

101 Dans la mesure du possible, le Service doit veiller à ce que soit mis à la disposition du détenu, exception faite des objets interdits, ce qui est raisonnablement nécessaire pour sa religion ou sa vie spirituelle, y compris :

101 The Service shall ensure that, where practicable, the necessities that are not contraband and that are reasonably required by an inmate for the inmate’s religion or spirituality are made available to the inmate, including

a) un service d’aumônerie interconfessionnel;

(a) interfaith chaplaincy services;

b) des locaux pour la pratique religieuse ou la vie spirituelle;

(b) facilities for the expression of the religion or spirituality;

c) le régime alimentaire particulier imposé par la religion ou la vie spirituelle du détenu;

(c) a special diet as required by the inmate’s religious or spiritual tenets; and

d) ce qui est nécessaire pour les rites religieux ou spirituels particuliers du détenu.

(d) the necessities related to special religious or spiritual rites of the inmate.

[45]  Le législateur a donné la responsabilité d’offrir aux détenus une possibilité raisonnable de pratiquer leurs rites religieux au SCC, et non à KPC. Il n’est pas du tout évident de conclure que cette responsabilité peut être confiée à un tiers. Je reconnais que les fournisseurs de services professionnels vont généralement exiger un contrôle professionnel important sur le contenu des services offerts, mais on doit se demander si le contrôle professionnel équivaut à l’absence de contrôle de droit sur la prestation de services obligatoires en vertu d’une loi.

[46]  L’énoncé des travaux (EDT) inclus dans le dossier de requête des requérants décrit sous l’intitulé [traduction] « Contexte », les responsabilités du SCC en ce qui concerne la prestation de services religieux et spirituels. On y lit ensuite ce qui suit :

[traduction] En 2013, des fonctionnaires du SCC ont décidé de transformer le modèle utilisé pour la prestation des services d’aumônerie, en un modèle à fournisseur de services unique chargé de la prestation de tous les services religieux et spirituels, en collaboration avec le SCC.

[47]  L’EDT ne fait pas mention d’une renonciation au contrôle ou à la responsabilité concernant la prestation des services religieux et spirituels; il souligne plutôt la mise en œuvre d’un modèle de prestation différent. L’EDT fait plus de 5 pages de long. Il décrit les heures qui seront travaillées, les services qui seront fournis, incluant les ressources nécessaires aux services religieux et spirituels, suivant les directives du [traduction] « chargé de projet ». Il précise ce qui doit être fourni en ce qui concerne le culte, l’éducation, l’engagement communautaire et l’intégration de l’aumônerie aux processus de gestion du personnel du SCC. Il souligne que les fournisseurs de services d’aumônerie doivent avoir une présence visible tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des établissements du SCC. Il précise également les qualifications minimales que doivent posséder les fournisseurs de services d’aumônerie. L’espace de travail et les ordinateurs sont fournis par le SCC, et la prestation des services dépend des horaires de l’établissement et des exigences en matière de sécurité. L’EDT n’indique pas clairement que le SCC a renoncé à son contrôle sur la prestation de services religieux et spirituels.

[48]  Les requérants soulèvent différents facteurs concernant la relation contractuelle entre le SCC et KPC pour appuyer leur argument selon lequel le SCC n’exerce aucun contrôle de droit, notamment :

  1. il n’y a eu aucune négociation contractuelle entre KPC et la Couronne avant la signature du contrat pour la prestation de services d’aumônerie, ni de discussion sur la manière d’offrir ces services;

  2. selon les modalités du contrat, KPC devait se conformer au code de déontologie des aumôniers du SCC, mais ni le SCC ni le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux ne lui a fourni un tel code;

  3. le contrat prévoyait la tenue de réunions trimestrielles entre le SCC et KPC, mais seulement deux de ces réunions ont eu lieu entre 2014 et 2016;

  4. KPC a engagé tous les aumôniers contractuels directement en vertu de contrats de travail individuels, et KPC en a donc déduit qu’elle était chargée de donner des directives à ses employés; KPC a mis en œuvre une structure hiérarchique exigeant que les commentaires relatifs aux services d’aumônerie régionaux soient acheminés au président de KPC, qui à son tour devait les transmettre au directeur régional de KPC afin de s’assurer que les problèmes puissent être réglés;

  5. le SCC a décidé qu’aux termes de la relation contractuelle avec KPC, seules les heures travaillées seraient rémunérées; le perfectionnement professionnel ne devait pas être facturé;

  6. le SCC a uniquement exigé que les employés de KPC lui fournissent un rapport statistique mensuel de leurs responsabilités, rapports qui étaient transmis au SCC par les directeurs régionaux de KPC en même temps que les factures mensuelles.

[49]  Les requérants affirment que l’absence de négociations contractuelles et le fait que le SCC n’exerçait pas un certain pouvoir aux termes des modalités de leur relation soutiennent l’idée qu’il y a absence de contrôle de droit. Je ne suis pas d’accord. L’imposition de modalités en l’absence de négociations n’est au plus qu’un facteur neutre et, comme je l’ai déjà mentionné, le contrôle de droit doit être examiné en fonction du degré de contrôle possible aux termes des modalités de leur relation, et non en fonction de leur autonomie réelle (Eldorado).

[50]  Dans ses observations écrites, le procureur général a affirmé que le père McGee n’est pas lié à la Couronne par une relation contractuelle, et qu’il ne peut donc pas être considéré comme un mandataire de la Couronne. Le procureur général ne cite aucune jurisprudence pour appuyer cet argument. En outre, les requérants n’affirment pas que le père McGee puisse avoir un statut différent de celui de KPC.

[51]  En somme, à la lumière de la preuve dont je dispose, il n’est ni évident ni manifeste que les requérants ne sont pas des mandataires de la Couronne.

(ii)  Conclusion concernant la première étape du critère ITO

[52]  Les requérants n’ont pas établi que la demande ne satisfait pas au premier volet du critère ITO. Le demandeur soutient — et les requérants n’ont pas établi que cet argument est évidemment et manifestement faux — que les requérants sont des mandataires de la Couronne au sens de l’alinéa 17(5)b) de la Loi.

b)  Deuxième étape : existe-t-il un ensemble de règles de droit fédérales qui soit essentiel à la solution du litige et constitue le fondement de l’attribution légale de compétence?

[53]  Les requérants soutiennent qu’aucune règle de droit fédérale ne confère à la Cour fédérale la compétence pour statuer sur des cas de responsabilité délictuelle découlant de la common law. Ils affirment que le simple fait qu’un délit ait eu lieu dans un établissement carcéral fédéral n’est pas suffisant pour conclure qu’il existe un ensemble de règles de droit fédérales constituant le fondement de l’attribution de compétence.

[54]  L’absence d’une attribution de compétence explicite n’est pas déterminante en ce qui concerne le second volet du critère ITO, lorsque les questions soulevées, de par leur caractère véritable, sont essentiellement fondées sur une loi fédérale (Peter G. White Management Ltd. c Canada, 2006 CAF 190, [Peter G. White]). Les requérants cherchent à établir une distinction entre la présente affaire et les affaires Ambrose, 744185 et Peter G. White, au motif que ces demandes portaient sur des actions relevant de régimes réglementaires fédéraux détaillés. À mon avis, il n’y a pas lieu de faire une telle distinction. Les droits en cause en l’espèce sont énoncés dans les lois et règlements fédéraux.

[55]  Les requérants s’appuient sur la décision Robinson c Canada, [1996] 2 CF 624, 110 FTR 271 (CF) [Robinson], et demandent à la Cour d’adopter le point de vue exprimé dans cette affaire; le cadre réglementaire en cause ne constituait pas le fondement de l’attribution de compétence, parce qu’il visait à établir les responsabilités des employés du système correctionnel et non à conférer des droits aux détenus. Je me refuse à le faire, car la décision Robinson est clairement distincte. Premièrement, la décision Robinson portait sur l’ancienne Loi sur les pénitenciers et son règlement, et non sur la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Deuxièmement, les questions soulevées en l’espèce portent sur le droit individuel du demandeur de pratiquer sa religion et d’exprimer sa spiritualité, un droit expressément reconnu dans la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et le Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. L’article 75 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, et les articles 101 et 102 du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, traitent de ces droits de manière substantielle. En l’espèce, le cadre législatif et règlementaire sera essentiel pour statuer sur les demandes déposées par le demandeur, y compris sur les manquements allégués à la Charte. La demande porte sur une violation alléguée de droits expressément reconnus.

[56]  Il n’est ni évident ni manifeste que la demande ne satisfait pas au deuxième volet du critère ITO.

c)  Troisième étape : la loi invoquée dans l’affaire est-elle « une loi du Canada » au sens où cette expression est employée à l’article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867?

[57]  À mon avis, la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et le Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition sont essentiels à la solution du litige et constituent le fondement de l’attribution légale de compétence. Le troisième volet du critère ITO exige que je détermine si la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et le Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition sont des textes législatifs fédéraux valides. Cette question n’est pas contestée. Le troisième volet du critère ITO est satisfait.

[58]  En fonction de ce qui précède, il n’est ni évident ni manifeste que la Cour fédérale n’a pas compétence pour entendre les demandes déposées contre les requérants et rendre une décision.

B.  L’action équivaut-elle à une contestation incidente ou à un abus de procédure?

[59]  Rien dans le dossier de requête n’établit quelles conclusions (le cas échéant) a tirées la Commission canadienne des droits de la personne, ni quelle a été l’issue de la plainte du demandeur déposée dans le cadre de la procédure de grief des délinquants. L’argument des requérants, selon lequel la demande du demandeur constitue une contestation incidente ou un abus de procédure, n’est pas fondé. La Cour ne peut radier les actes de procédure d’une partie en raison d’une simple affirmation.

VI.  Dépens

[60]  Le demandeur souhaite obtenir, et recevra, des dépens quelle que soit l’issue de la cause.


ORDONNANCE DANS LE DOSSIER T-1479-16

LA COUR ORDONNE ce qui suit :

  1. La requête est rejetée.

  2. Les requérants ont 30 jours à compter la date de la présente ordonnance pour répondre à la déclaration.

  3. Les dépens sont adjugés au demandeur, quelle que soit l’issue de la cause.

« Patrick Gleeson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 24e jour de février 2020

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1479-16

INTITULÉ :

MOHAMED KARIM c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA ET KAIROS PNEUMA CHAPLAINCY SERVICES ET LE PÈRE MARK MCGHEE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 14 novembre 2017

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE GLEESON

DATE DES MOTIFS :

Le 27 avril 2018

COMPARUTIONS :

J. Todd Sloan

Pour le demandeur

Patrick Bendin

Pour le défendeur

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

George G. Vuicic

Anne M. Lemay

Pour les défendeurs

KAIROS PNEUMA CHAPLAINCY SERVICES

ET LE PÈRE MARK MCGEE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

J. Todd Sloan

Avocat

Kanata (Ontario)

Pour le demandeur

Procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

Pour le défendeur

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

Hicks Morley Hamilton Stewart Storie LLP

Ottawa (Ontario)

Pour les défendeurs

KAIROS PNEUMA CHAPLAINCY SERVICES

ET LE PÈRE MARK MCGEE

 

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