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Date : 20180706


Dossier : IMM-4978-17

Référence : 2018 CF 702

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 6 juillet 2018

En présence de madame la juge Strickland

ENTRE :

SONILA ALI

SYED NOMAN ALI

IZZAH ALI (REPRÉSENTÉE PAR SA TUTRICE À L’INSTANCE, SONILA ALI)

SYED AARAZE ALI (REPRÉSENTÉ PAR SA TUTRICE À L’INSTANCE, SONILA ALI)

demandeurs

et

LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue par un agent d’immigration de la section des visas de l’Ambassade du Canada à Abou Dhabi, Émirats arabes unis, (l’agent), qui a rejeté la demande de permis d’études de la demanderesse principale, Mme Sonila Ali, ainsi que les demandes connexes des membres de sa famille immédiate.

Énoncé des faits

[2]  La demanderesse principale et les membres de sa famille sont des citoyens du Pakistan. En 2017, la demanderesse principale, alors âgée de 32 ans, a présenté une demande de permis d’études, ayant été acceptée à un programme d’études de deux ans en tourisme et gestion hôtelière et restauration au collège Seneca (Seneca) situé à Markham, en Ontario. Sur sa demande, la demanderesse principale a indiqué qu’elle a vécu aux Émirats arabes unis de 1998 à 2010, puis de 2012 à 2016, ayant accompagné son époux qui travaillait alors dans ce pays. Le plan d’études de la demanderesse principale précise qu’elle a terminé une partie de ses études secondaires aux Émirats arabes unis en 2003, puis qu’elle a terminé son niveau A (études secondaires) au Pakistan en 2007, et qu’elle a notamment suivi des cours en comptabilité, en gestion et en économie. Elle a aussi suivi un cours en design d’intérieur et deux cours en décoration de gâteaux. Elle souhaitait compléter ses études au collège Seneca, puis utiliser les nouvelles connaissances qu’elle y aurait acquises pour ouvrir sa propre chaîne de restaurants.

[3]  Elle a expliqué qu’après son mariage en 2010, la naissance de sa fille, des fausses couches, la mort de sa sœur en 2013, la naissance de son deuxième enfant en 2015 et d’autres chirurgies en 2016 ont retardé la réalisation de ses plans de venir au Canada pour étudier dans le but d’ouvrir ses propres restaurants. Elle a indiqué qu’elle a choisi le collège Seneca parce que le programme d’études qui y est offert couvre les marchés nationaux et internationaux et offre la possibilité de faire des stages dans d’autres pays. Elle a aussi examiné les programmes d’études offerts au Pakistan, mais a jugé que la qualité des programmes dans les écoles comparables et la diversité des compétences qui y étaient enseignées étaient loin de correspondre à celles du programme offert à Seneca. Dans son plan d’études, la demanderesse principale a aussi indiqué que la famille disposait de plus de 100 000 $ pour son séjour au pays, cette somme provenant de la vente d’une propriété, et qu’elle avait déjà versé 6 913,95 $ en droits de scolarité à Seneca.

Décision contestée

[4]  Dans une lettre datée du 30 octobre 2017, l’agent a informé la demanderesse principale qu’il avait été déterminé, après examen de sa demande de permis d’études et des documents à l’appui, que sa demande ne répondait pas aux exigences de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (LIPR) et qu’elle était refusée. L’agent n’était pas convaincu que la demanderesse principale quitterait le Canada à la fin de son séjour. Pour parvenir à cette conclusion, l’agent a pris en compte plusieurs facteurs qui avaient été cochés sur le formulaire standard, notamment les liens familiaux de la demanderesse principale au Canada et dans son pays de résidence, ses perspectives d’emploi dans son pays de résidence et sa situation professionnelle actuelle. Dans ses autres motifs, l’agent a indiqué qu’après examen de la demande et du caractère raisonnable du programme d’études proposé au Canada il n’était pas convaincu que la demanderesse principale suivrait réellement le programme d’études proposé et qu’il croyait que ses liens familiaux avec le Pakistan diminueraient après son départ pour le Canada.

[5]  Les notes du Système mondial de gestion des cas (SMGC) font partie des motifs de l’agent (Rahman c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 793, au paragraphe 19; Rezaeiazar c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 761, aux paragraphes 58 et 59; Veryamani c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 1268, aux paragraphes 28 à 31). L’agent a aussi noté que la demanderesse principale serait accompagnée de toute sa famille et il a pris acte des éléments de preuve de propriété, de vente de propriété et de logements locatifs appartenant à la demanderesse principale au Pakistan qui lui ont été présentés. L’agent n’était toutefois pas convaincu que le programme d’études proposé améliorerait suffisamment les perspectives de carrière de la demanderesse principale pour compenser les coûts des études à l’étranger. Le programme était d’une durée de deux ans et, sans compter les droits de scolarité, les frais de subsistance s’élèveraient à 20 000 $, uniquement pour la première année. Et bien que l’époux de la demanderesse principale ait présenté une demande de permis de travail, les éléments de preuve indiquant qu’il était assuré de trouver un emploi au Canada ou qu’il était réellement directeur de la gestion des projets immobiliers au sein de sa propre entreprise au Pakistan étaient insuffisants. L’agent n’était donc pas convaincu que les études proposées constituaient une dépense raisonnable.

[6]  L’agent a aussi noté que la demanderesse principale était actuellement en chômage et que ses liens avec son pays de résidence, comparativement à d’autres liens, s’étaient affaiblis. Il a en outre jugé que la stabilité de la famille serait compromise si tous les membres de la famille venaient au Canada. Les documents produits par les demandeurs n’ont pu démontrer que ceux-ci avaient de solides assises socioéconomiques dans leur pays de résidence; ils auraient donc peu de raisons de retourner au Pakistan, même s’ils y possédaient des propriétés. Après un examen complet de la demande, des antécédents scolaires et professionnels de la demanderesse principale et du caractère raisonnable du programme d’études proposé, l’agent n’était pas convaincu que la demanderesse principale fût une étudiante de bonne foi dont l’objectif premier est de venir faire des études au Canada. Il n’était donc pas convaincu que la demanderesse principale suivrait vraiment le programme d’études proposé ou qu’elle quitterait le Canada à la fin de la période de séjour autorisée.

[7]  Comme les demandes de l’époux et des enfants de la demanderesse principale étaient fondées sur sa demande, l’agent a aussi rejeté les demandes connexes d’autorisation d’emploi ouverte et de permis d’études, ainsi que la demande de visa de résident temporaire pour l’enfant le plus jeune.

Questions en litige et norme de contrôle

[8]  La seule question en l’espèce est de savoir si la décision de l’agent était raisonnable. Les parties font valoir, et je suis d’accord, que la norme de contrôle qui s’applique à l’examen du refus d’une demande de permis d’études par un agent des visas est la norme de la décision raisonnable (Thiruguanasambandamurthy c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1518, au paragraphe 27 (Thiruguanasambandamurthy); Solopova c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 690, au paragraphe 12 (Solopova); Onyeka c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1067, au paragraphe 9 (Onyeka).

[9]   Les décisions des agents des visas portant sur des demandes de permis d’études sont discrétionnaires et reposent principalement sur les faits. Les agents des visas possèdent l’expertise et l’expérience requises pour prendre de telles décisions et on leur doit une grande déférence. Cependant, leurs décisions n’appellent pas nécessairement un seul résultat précis et, selon la norme de la décision raisonnable, la Cour n’interviendra que si la conclusion de l’agent n’est pas transparente, justifiable ou intelligible et n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47 (Dunsmuir); Solopova, aux paragraphes 11, 12 et 33; Kwasi Obeng c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 754, au paragraphe 21 (Obeng); Onyeka, aux paragraphes 9 et 10).

Discussion

[10]  L’alinéa 20(1)b) de la LIPR exige que les ressortissants étrangers qui souhaitent devenir résidents temporaires, comme ceux qui demandent un visa d’études, établissent qu’ils quitteront le Canada à la fin de la période de séjour autorisée. De même, l’article 179 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (RIPR), exige que l’agent délivre un visa de résident temporaire s’il est établi que le demandeur quittera le Canada à la fin de la période de séjour qui lui est applicable.

[11]  En tant que ressortissante étrangère souhaitant résider temporairement au Canada, la demanderesse principale devait établir le bien-fondé de son cas selon la prépondérance des probabilités et démontrer qu’elle quitterait le Canada à la fin de la période de séjour autorisée. Il lui incombait également de fournir tous les renseignements pertinents pour convaincre l’agent qu’elle satisfaisait aux exigences de la LIPR et du RIPR (Patel c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 570, au paragraphe 12 (Patel); Solopova, au paragraphe 22; Obeng, au paragraphe 20).

[12]  Les demandeurs font valoir que l’agent n’a pas tenu compte des éléments de preuve pour conclure que les études de la demanderesse principale au Canada ne constituaient pas une dépense raisonnable, soulignant que la demanderesse principale a indiqué sur sa demande un motif clair pour suivre le programme d’études proposé, mais que l’agent ne l’a pas compris ou en a fait abstraction. Compte tenu des explications fournies par la demanderesse principale, il était selon eux tout simplement déraisonnable de rejeter le plan d’études proposé.

[13]  Ils allèguent en outre qu’en concluant que les dépenses d’études étaient déraisonnables l’agent a substitué, de façon abusive, sa propre opinion sur ce qu’une personne dans la position de la demanderesse principale devrait faire. Or, comme la demanderesse principale rêvait depuis longtemps de faire carrière dans le secteur de la restauration, les frais associés à la poursuite d’études à l’étranger semblaient un faible coût à assumer pour réaliser ce rêve. Les demandeurs soutiennent également que l’évaluation des coûts du programme a été faite sans tenir compte des moyens financiers établis des demandeurs, ni du fait que l’époux de la demanderesse principale cherchait à obtenir une autorisation d’emploi ouverte qui permettrait d’atténuer les coûts des études, et qu’il n’était pas nécessaire que son époux qui l’accompagnerait produise une offre d’emploi existante. Ils prétendent donc que l’agent n’a fourni aucun motif rationnel ni suffisant pour expliquer sa conclusion selon laquelle la demanderesse principale n’était pas une étudiante de bonne foi, et qu’il a ouvertement fait abstraction des éléments de preuve.

[14]  Les demandeurs soutiennent en outre que, bien que l’agent ait fourni deux justifications pour conclure que la demanderesse principale ne quitterait pas le Canada à la fin de son séjour autorisé – à savoir que la demanderesse principale était actuellement en chômage et que la stabilité de la famille serait compromise si tous les membres venaient au Canada –, il n’a fourni aucun autre détail; le raisonnement de l’agent ne satisfait donc pas à la norme de justification, de transparence et d’intelligibilité exigée par l’arrêt Dunsmuir. Les demandeurs allèguent que l’agent n’a pas véritablement fait d’effort pour évaluer les liens des demandeurs avec le Pakistan et qu’il a fait abstraction d’éléments de preuve pertinents, notamment les antécédents de voyage favorables de la demanderesse principale.

[15]  À mon avis, les demandeurs ne font essentiellement que répéter le contenu de la demande et du plan d’études de la demanderesse principale pour faire valoir que, puisque la demanderesse principale a présenté un plan et exposé son présumé rêve de longue date d’ouvrir une chaîne de restaurants, l’agent ne pouvait pas conclure que cela était déraisonnable. Ils allèguent donc que l’agent a dû faire abstraction des éléments de preuve présentés à l’appui par la demanderesse principale, ou qu’il a omis d’en faire une analyse adéquate. Je ne suis pas d’accord avec ces allégations des demandeurs.

[16]  À titre d’exemple, les demandeurs allèguent que l’agent n’a pas évalué les renseignements concernant les liens familiaux de la demanderesse principale avec le Pakistan et qu’il a déraisonnablement conclu que ces liens seraient affaiblis, ce qui l’a notamment amené à conclure que la demanderesse principale ne retournerait pas au Pakistan à la fin de la période d’études autorisée. L’agent a toutefois noté que la demanderesse principale est actuellement en chômage – en fait, elle n’a pas d’antécédents de travail – et qu’elle n’a pas fourni suffisamment de preuve que son époux est un gestionnaire de projets immobiliers au sein de sa propre entreprise. L’agent ne disposait donc d’aucun élément de preuve lui permettant de conclure que l’un ou l’autre aurait du travail à son retour au Pakistan, à la fin de la période d’études proposée. L’agent n’a pas fait abstraction d’éléments de preuve, ni n’en a fait une interprétation erronée, et il a pris acte des éléments de preuve sur les propriétés au Pakistan mais, en dépit de cela, il a jugé que la famille aurait très peu de raisons de retourner au Pakistan. Même s’il est vrai que l’agent n’a pas mentionné le fait que les parents et l’un des frères ou sœurs de la demanderesse principale resteraient au Pakistan, le dossier indiquait que la demanderesse principale avait un autre frère au Canada chez qui elle avait l’intention d’habiter, du moins temporairement. De plus, il ne fait aucun doute qu’une des préoccupations de l’agent était que les demandeurs formaient une famille entière, ce qui affaiblirait sensiblement leurs liens familiaux avec le Pakistan.

[17]  À mon avis, il n’est pas pertinent pour les demandeurs d’invoquer sur ce point l’affaire Zhang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1493 (Zhang). Dans cette dernière affaire, il avait été conclu que l’on n’avait pas tenu compte des liens manifestement étroits entre le demandeur et son père. Le demandeur, qui était fils unique et qui ne connaissait personne au Canada sauf l’ami de son père, avait clairement indiqué les raisons pour lesquelles il retournerait en Chine. Son père, qui finançait ses études et avait recommandé que le demandeur vienne étudier au Canada, s’attendait à ce qu’il retourne en Chine pour l’aider dans l’entreprise familiale. Cela montrait également que le but des études du demandeur était clairement lié à un emploi futur en Chine. En l’espèce, la demande de la demanderesse principale ne contient aucun élément de preuve sur la nature des liens – étroits ou autres – entre la demanderesse principale et ses parents ou frères et sœurs vivant au Pakistan. Et, comme il a été mentionné précédemment, elle serait accompagnée au Canada par tous les membres de sa famille immédiate, contrairement au demandeur dans Zhang.

[18]  Les demandeurs prétendent que l’agent n’a pas tenu compte des renseignements d’ordre financier et a omis d’en faire une évaluation, alors que ces renseignements étaient importants et qu’ils contredisaient les conclusions de l’agent. Bien qu’il soit exact de dire que l’agent n’a pas expressément mentionné le fait que les demandeurs disposaient d’économies de 100 000 $, je ne suis pas convaincue qu’il n’en ait pas tenu compte. Il est présumé que l’agent a pris en compte et soupesé tous les éléments de preuve et il n’est pas tenu de renvoyer à chaque élément constitutif de cette preuve (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, au paragraphe 16; Obeng, au paragraphe 35). Ce n’est que lorsqu’un décideur passe sous silence des éléments de preuve qui contredisent ses conclusions de façon claire que la Cour peut intervenir et inférer que le décideur n’a pas examiné la preuve contradictoire pour en arriver à sa conclusion de fait (Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 FTR 35 (CF 1re inst.), aux paragraphes 16 et 17; Solopova, au paragraphe 28).

[19]  En l’espèce, l’agent a examiné les renseignements financiers des demandeurs en tenant compte du fait que les frais de subsistance de la famille s’élèveraient à eux seuls à 20 000 $ par année. Bien que la demanderesse principale allègue rêver depuis toujours d’ouvrir une chaîne de restaurants, ses études se résument à des études secondaires, à un certificat de mérite pour un cours de cuisine (6 juillet 2009), à ce qui semblent avoir été deux semaines de cours en décoration de gâteaux (15 juillet et 2 août 2009) suivis, semble-t-il, dans un magasin, ainsi qu’à un certificat de réussite en design d’intérieur à propos duquel aucune autre précision n’a été fournie. De même, durant les dix années qui se sont écoulées entre la fin de ses études secondaires et la présentation de sa demande de permis d’études, la demanderesse principale n’a acquis aucune expérience de travail dans le secteur de la restauration, ni dans quelque autre secteur d’ailleurs. L’agent ne disposait non plus d’aucune donnée lui permettant de conclure que la demanderesse principale avait les ressources nécessaires pour lancer une chaîne de magasins ou, hormis son intention de suivre un cours au collège Seneca, que ce rêve allégué était réellement fondé. Pour cette raison, et étant donné que son époux abandonnerait le seul revenu familial pour accompagner la demanderesse principale et qu’il n’avait pas établi qu’il pourrait avoir un emploi au Canada – même si cela n’était pas nécessaire –, il n’était pas déraisonnable pour l’agent de conclure qu’il n’était pas convaincu que les études proposées amélioreraient les perspectives de carrière de la demanderesse principale à un point tel que cela compenserait les coûts des études à l’étranger, et que la stabilité de la famille serait compromise si tous les membres déménageaient au Canada.

[20]  Bien que les demandeurs allèguent que les éléments de preuve non mentionnés par l’agent, comme les économies de 100 000 $ et les antécédents de voyage favorables de la demanderesse principale, contredisent les conclusions de l’agent et constituent donc une erreur susceptible de révision, en réalité il n’y a pas de contradiction. Les demandeurs demandent en fait à la Cour de soupeser à nouveau la preuve, ce qui n’est pas son rôle (Solopova, aux paragraphes 20 à 22; Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, aux paragraphes 59 et 61; Cayanga c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1046, au paragraphe 7; Thiruguanasambandamurthy, au paragraphe 28).

[21]  Enfin, je note que, dans son plan d’études, la demanderesse principale a indiqué qu’elle était intéressée par le collège Seneca parce que le programme d’études couvre les marchés nationaux et internationaux et propose des stages à l’étranger. Elle dit avoir examiné les programmes offerts au College of Tourism and Hotel Management et au Pakistan Institute of Tourism and Hotel Management, tous deux situés à Karachi, mais elle a rejeté ces options en disant seulement que la qualité des programmes ou la diversité des compétences qui y étaient enseignées ne pouvaient se comparer à celles du collège Seneca. Aucun autre élément de preuve ou cours ni aucune comparaison de coûts n’ont été présentés. Il est également difficile de comprendre le lien entre son commentaire sur les compétences acquises dans des écoles comparables au Pakistan et sa déclaration suivante selon laquelle il est implicitement interdit aux femmes au Pakistan [traduction] « d’occuper des fonctions aussi élargies en restauration et en gestion », puisque cette déclaration fait référence à l’emploi et à non l’éducation. Et bien que les demandeurs allèguent que l’agent a déclaré qu’il existait des programmes comparables au Pakistan, sans toutefois fournir de preuve à l’appui, l’agent n’a fait aucune déclaration du genre. Qui plus est, les défendeurs semblent avoir fait une interprétation erronée du fardeau de la preuve.

[22]  Après avoir examiné la décision et le dossier, je ne suis pas convaincue que l’agent ait fait abstraction de quelque élément de preuve ou en ait fait une interprétation erronée. De plus, bien que brefs, ses motifs sont suffisamment clairs pour que je puisse comprendre pourquoi l’agent en est arrivé à la conclusion à laquelle il est parvenu. Je conviens avec le défendeur que l’évaluation que l’agent a faite du coût financier du programme d’études proposé, de ses conséquences sur la famille et des liens socioéconomiques des demandeurs avec le Pakistan était raisonnable. Par conséquent, et compte tenu du dossier dont l’agent a été saisi, il lui était loisible de conclure que la demanderesse principale ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait d’établir qu’elle quitterait le Canada à la fin du séjour autorisé et qu’elle est une étudiante de bonne foi.

[23]  Quant aux observations écrites des parties sur la double intention, comme l’a déclaré le juge Gascon dans Solopova (au paragraphe 30), la Cour a confirmé qu’une personne peut avoir la double intention d’immigrer et de respecter les règles de droit applicables au sujet du séjour temporaire (Kachmazov c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 53, au paragraphe 15). Les deux intentions sont complémentaires et non contradictoires (Loveridge c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 694, au paragraphe 18 [Loveridge]). Il incombe toutefois à la demanderesse de démontrer d’abord qu’elle quittera le Canada à la fin de sa période d’études (Loveridge, au paragraphe 20; Wang c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 619, au paragraphe 14). Dans Solopova, tout comme en l’espèce, cette exigence fondamentale n’a pas été satisfaite.


JUGEMENT dans le dossier IMM-4978-17

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Il n’y aura pas d’adjudication des dépens.

  3. Aucune question n’est certifiée.

« Cecily Y. Strickland »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-4978-17

 

INTITULÉ :

SONILA ALI, SYED NOMAN ALI, IZZAH ALI (REPRÉSENTÉE PAR SA TUTRICE À L’INSTANCE, SONILA ALI) et SYED AARAZE ALI (REPRÉSENTÉ PAR SA TUTRICE À L’INSTANCE, SONILA ALI) c. LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 25 juin 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE STRICKLAND

 

DATE DES MOTIFS :

Le 6 juillet 2018

 

COMPARUTIONS :

Natalie Domazet

 

Pour les demandeurs

 

Modupe Oluyomi

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mamann, Sandaluk & Kingwell LLP

Avocats

TORONTO (ONTARIO)

 

Pour les demandeurs

 

Procureur général du Canada

TORONTO (ONTARIO)

 

Pour le défendeur

 

 

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