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Date : 20160719


Dossier : T-340-99

Référence : 2016 CF 817

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 19 juillet 2016

En présence de monsieur le juge Phelan

ENTRE :

LA NATION KAINAIWA (TRIBU DES BLOOD) ET LE CHEF CHRIS SHADE, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA TRIBU DES BLOOD/KAINAIWA

LA NATION PEIGAN ET LE CHEF PETER STRIKES WITH A GUN, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA NATION PEIGAN

LA NATION SIKSIKA ET LA CHEF DARLENE YELLOW OLD WOMAN MUNROE, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA NATION SIKSIKA

LA NATION TSUU T’INA ET LE CHEF ROY WHITNEY, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA NATION TSUU T’INA

LA BANDE BEARSPAW ET LE CHEF DARCY DIXON, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA BANDE BEARSPAW

LA BANDE CHINIKI ET LE CHEF PAUL CHINIQUAY, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA BANDE CHINIKI

LA BANDE WESLEY ET LE CHEF JOHN SNOW PÈRE, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA BANDE WESLEY

demandeurs (intimés)

et

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA

défenderesse (intimée)

et

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DE L’ALBERTA

mise en cause proposée (demanderesse)

ORDONNANCE ET MOTIFS

(Objet : ordonnance de mise en cause)

I.  Introduction

[1]  Voici les motifs à l’égard de l’appel d’une décision d’une protonotaire, rendue le 9 juin 2015, visant à ajouter Sa Majesté la Reine du chef de l’Alberta [l’Alberta] à titre de mise en cause dans la présente action.

Le présent appel a été entendu par la Cour en même temps qu’un appel de la même décision d’une protonotaire, rendue le 11 juin 2015, rejetant une requête en vue d’obtenir l’ajout de l’Alberta à titre de défenderesse dans cette même action.

Comme les questions font l’objet de deux ordonnances distinctes, les appels comportent leurs propres motifs, et les ordonnances peuvent être lues ensemble de manière à situer le contexte.

[2]  L’ordonnance portée en appel (ordonnance de mise en cause) a accueilli la requête de Sa Majesté la Reine du chef du Canada [le Canada] visant à ajouter l’Alberta à titre de mise en cause.

II.  Historique des procédures

[3]  L’action a été intentée le 26 février 1999 contre le Canada et l’Alberta. Les demandeurs allèguent que le Canada et l’Alberta ont manqué à diverses obligations fiduciaires découlant de la Proclamation royale de 1793, du Rupert’s Land and North-Western Territory Order (décret sur la terre de Rupert et le Territoire du NordOuest), des Lois constitutionnelles de 1867 et de 1982, de la Loi sur les Indiens et du Traité no 7.

Ils soutiennent qu’ils n’ont pas renoncé au titre ancestral lié au territoire visé par le Traité no 7 et contestent le transfert fait par le Canada à l’Alberta du territoire et des droits sur ses ressources, en vertu de l’Accord de transfert des ressources naturelles de 1930.

[4]  Le 29 octobre 2001, le protonotaire Hargrave a accueilli la requête de l’Alberta visant à obtenir l’annulation de l’action intentée à son égard et à la retirer comme défenderesse, en raison de l’absence de compétence de la Cour fédérale pour entendre la demande déposée contre elle par les demandeurs. Le Canada n’a pas pris position concernant la requête. La décision n’a pas été portée en appel.

[5]  Suivant cette décision et le consentement des parties, le contentieux a été mis en suspens.

[6]  Le 7 mai 2009, l’avocat de la bande de Stoney a exigé que le Canada fournisse une défense, sans quoi il indiquerait le défaut de dépôt de défense de la part du Canada.

[7]  Entre temps, trois des demandeurs ont intenté une action distincte devant la Cour du banc de la Reine de l’Alberta à l’encontre du Canada et de l’Alberta. Le 22 octobre 2009, le Canada a avisé la Cour fédérale qu’une action avait été intentée par la bande de Stoney devant la Cour du banc de la Reine de l’Alberta qui soulevait des questions de nature presque identique.

[8]  Le Canada a avisé la Cour fédérale de son intention de demander une suspension de l’action en raison du chevauchement des demandes faisant l’objet d’un contentieux et de l’absence de compétence de la Cour fédérale pour instruire l’affaire.

[9]  Le 10 novembre 2009, la protonotaire Milczynski a ordonné au Canada de déposer son avis de requête à cet égard au plus tard le 31 mars 2010. L’avis de requête a été déposé le 31 mars 2010.

[10]  Le 9 avril 2010, le Canada a déposé une déclaration devant la Cour du banc de la Reine de l’Alberta en vue d’obtenir une contribution et une indemnisation de la part de l’Alberta dans l’éventualité où le Canada serait condamné à verser des dommages-intérêts dans le cadre de l’action.

[11]  La demande de sursis du Canada, qui devait initialement être entendue les 18 et 19 mai 2010, a été reportée lorsque la Cour a été avisée que certains demandeurs achevaient des instructions visant à se prononcer sur la demande. La requête a été reportée aux 23 et 24 février 2012.

[12]  Le 24 juillet 2012, la requête en sursis de l’instance du Canada a été rejetée, sans que la question de la compétence ait été tranchée. Un appel de cette décision a été déposé le 2 août 2012. La décision a été maintenue par le juge Harrington le 25 juin 2013.

[13]  Le 13 décembre 2013, le Canada a déposé sa défense en l’espèce et a envoyé à l’Alberta, mise en cause proposée, une copie de la mise en cause. L’Alberta a par la suite avisé le Canada d’obtenir une autorisation de signifier et de déposer la mise en cause.

[14]  Le 18 février 2014, le Canada a déposé une requête pour obtenir une ordonnance l’autorisant à introduire une mise en cause à l’égard de l’Alberta.

[15]  Le 11 juin 2014, Kainaiwa a déposé une requête pour obtenir une ordonnance l’autorisant à ajouter l’Alberta comme partie défenderesse.

[16]  Le 9 juin 2015, la protonotaire Milczynski a accueilli la demande d’autorisation du Canada d’introduire une mise en cause contre l’Alberta. Le 19 juin 2015, l’Alberta a déposé un avis de requête en vue d’interjeter appel de cette décision Les présents motifs portent sur cette question.

[17]  Le 11 juin 2015, la protonotaire Milczynski a rejeté la requête de Kainaiwa dans laquelle elle demandait la permission d’ajouter l’Alberta comme partie défenderesse. Le 19 juin 2015, Kainaiwa a déposé un avis de requête en vue d’interjeter appel de cette décision. C’est l’objet de la décision Nation Kainaiwa (Tribu des Blood) c. Canada, 2016 CF 818.

III.  Contexte

A.  Dispositions législatives pertinentes

[18]  Les dispositions pertinentes sont les suivantes :

Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7

19 Lorsqu’une loi d’une province reconnaît sa compétence en l’espèce, — qu’elle y soit désignée sous le nom de Cour fédérale, Cour fédérale du Canada ou Cour de l’Échiquier du Canada — la Cour fédérale est compétente pour juger les cas de litige entre le Canada et cette province ou entre cette province et une ou plusieurs autres provinces ayant adopté une loi semblable.

19 If the legislature of a province has passed an Act agreeing that the Federal Court, the Federal Court of Canada or the Exchequer Court of Canada has jurisdiction in cases of controversies between Canada and that province, or between that province and any other province or provinces that have passed a like Act, the Federal Court has jurisdiction to determine the controversies.

Règles des Cours fédérales, DORS/98-106

8 (1) La Cour peut, sur requête, proroger ou abréger tout délai prévu par les présentes règles ou fixé par ordonnance.

8 (1) On motion, the Court may extend or abridge a period provided by these Rules or fixed by an order.

(2) La requête visant la prorogation d’un délai peut être présentée avant ou après l’expiration du délai.

(2) A motion for an extension of time may be brought before or after the end of the period sought to be extended.

...

...

193 Un défendeur peut mettre en cause un codéfendeur ou toute personne qui n’est pas partie à l’action et dont il prétend qu’ils ont ou peuvent avoir une obligation envers lui à l’égard de tout ou partie de la réclamation du demandeur.

193 A defendant may commence a third party claim against a co-defendant, or against a person who is not a party to the action, who the defendant claims is or may be liable to the defendant for all or part of the plaintiff’s claim.

194 Un défendeur peut, avec l’autorisation de la Cour, mettre en cause une personne — qu’elle soit ou non un codéfendeur dans l’action — dont il prétend :

194 With leave of the Court, a defendant may commence a third party claim against a co-defendant, or against another person who is not a defendant to the action, who the defendant claims

a) soit qu’elle lui est ou peut lui être redevable d’une réparation, autre que celle visée à la règle 193, liée à l’objet de l’action;

(a) is or may be liable to the defendant for relief, other than that referred to in rule 193, relating to the subject-matter of the action; or

b) soit qu’elle devrait être liée par la décision sur toute question en litige entre lui et le demandeur.

(b) should be bound by the determination of an issue between the plaintiff and the defendant.

195 Lorsqu’un défendeur entend mettre en cause un codéfendeur dans l’action, la mise en cause est signifiée et déposée dans les 10 jours suivant le dépôt de la défense.

195 A third party claim against a co-defendant shall be served and filed within 10 days after the filing of the statement of defence.

196 (1) Lorsqu’un défendeur entend mettre en cause une personne qui n’est pas un codéfendeur dans l’action, la mise en cause :

196 (1) A third party claim against a person who is not already a party to the action shall be

a) est délivrée dans le délai prévu à la règle 204 pour la signification et le dépôt d’une défense;

(a) issued within the time set out in rule 204 for the service and filing of a statement of defence; and

b) est signifiée dans les 30 jours suivant sa délivrance.

(b) served within 30 days after it is issued.

(2) La mise en cause visée au paragraphe (1) est signifiée à la tierce partie avec une copie de tous les actes de procédure déjà déposés.

(2) A third party claim served on a person who is not already a party to the action shall be accompanied by a copy of all pleadings filed in the action.

Accord de transfert des ressources naturelles, S.C. 1930, ch. 3

1 Afin que la province puisse être traitée à l’égal des provinces constituant originairement la Confédération, sous le régime de l’article cent neuf de l’Acte de l’Amérique britannique du Nord, 1867, l’intérêt de la Couronne dans toutes les terres, toutes les mines, tous les minéraux (précieux et vils) et toutes les redevances en découlant à l’intérieur de la province ainsi que l’intérêt de la Couronne dans les eaux et les forces hydrauliques à l’intérieur de la province, visées par l’Acte d’irrigation du Nord-Ouest, 1898, et par la Loi des forces hydrauliques du Canada, qui appartiennent à la Couronne, et toutes les sommes dues ou payables pour ces mêmes terres, mines, minéraux ou redevances, ou pour les intérêts dans l’utilisation de ces eaux ou forces hydrauliques ou pour les droits y afférents, doivent, à compter de l’entrée en vigueur de la présente convention, et sous réserve des dispositions contraires de la présente convention appartenir à la province, subordonnément à toutes les fiducies existant à leur égard et à tout intérêt autre que celui de la Couronne dans ces ressources naturelles, et ces terres, mines, minéraux et redevances seront administrés par la province pour ces fins, sous réserve, jusqu’à ce que l’Assemblée législative de la province prescrive autrement, des dispositions de toute loi rendue par le Parlement du Canada concernant cette administration; tout payement reçu par le Canada à l’égard de ces terres, mines, minéraux ou redevances avant que la présente convention soit exécutoire continue d’appartenir au Canada, qu’il soit payé d’avance ou autrement, l’intention de la présente convention étant que, sauf dispositions contraires spécialement prévues aux présentes, le Canada ne soit pas obligé de rendre compte à la province d’un payement effectué à l’égard de ces terres, mines, minéraux ou redevances, avant la mise en vigueur de la présente convention, et que la province ne soit pas obligée de rendre compte au Canada d’un pareil payement effectué postérieurement à la présente convention.

1 In order that the Province may be in the same position as the original Provinces of Confederation are in virtue of section one hundred and nine of the British North America Act, 1867, the interest of the Crown in all Crown lands, mines, minerals (precious and base) and royalties derived therefrom within the Province and the interest of the Crown in the waters and water-powers within the Province under the North-west Irrigation Act, 1898, and the Dominion Water Power Act, and all sums due or payable for such lands, mines, minerals or royalties, or for interests or rights in or to the use of such waters or water-powers, shall, from and after the coming into force of this agreement and subject as therein otherwise provided, belong to the Province, subject to any trusts existing in respect thereof, and to any interest other than that of the Crown in the same, and the said lands, mines, minerals and royalties shall be administered by the Province for the purposes thereof, subject, until the Legislature of the Province otherwise provides, to the provisions of any Act of the Parliament of Canada relating to such administration; any payment received by Canada in respect of any such lands, mines, minerals or royalties before the coming into force of this agreement shall continue to belong to Canada whether paid in advance or otherwise, it being the intention that, except as herein otherwise specially provided, Canada shall not be liable to account to the Province for any payment made in respect of any of the said lands, mines, minerals or royalties before the coming into force of this agreement, and that the Province shall not be liable to account to Canada for any such payment made thereafter.

...

...

10 Toutes les terres faisant partie des réserves indiennes situées dans la province, y compris celles qui ont été choisies et dont on a mesuré la superficie, mais qui n’ont pas encore fait l’objet d’une ratification, ainsi que celles qui en ont été l’objet, continuent d’appartenir à la Couronne et d’être administrées par le gouvernement du Canada pour les fins du Canada, et, à la demande du surintendant général des Affaires indiennes, la province réservera, au besoin, à même les terres de la Couronne inoccupées et par les présentes transférées à son administration, les autres étendues que ledit surintendant général peut, d’accord avec le ministre approprié de la province, choisir comme étant nécessaires pour permettre au Canada de remplir ses obligations en vertu des traités avec les Indiens de la province, et ces étendues seront dans la suite administrées par le Canada de la même manière à tous égards que si elles n’étaient jamais passées à la province en vertu des dispositions des présentes.

10 All lands included in Indian reserves within the Province, including those selected and surveyed but not yet confirmed, as well as those confirmed, shall continue to be vested in the Crown and administered by the Government of Canada for the purposes of Canada, and the Province will from time to time, upon the request of the Superintendent General of Indian Affairs, set aside, out of the unoccupied Crown lands hereby transferred to its administration, such further areas as the said Superintendent General may, in agreement with the appropriate Minister of the Province, select as necessary to enable Canada to fulfil its obligations under the treaties with the Indians of the Province, and such areas shall thereafter be administered by Canada in the same way in all respects as if they had never passed to the Province under the provisions hereof.

Judicature Act, RSA 2000, c J-2 (Loi sur la magistrature de l’Alberta)

[Traduction]
27  Conformément à la Loi sur la Cour suprême (Canada) et à la Loi sur les Cours fédérales (Canada), la Cour suprême du Canada seule ou la Cour suprême du Canada et la Cour fédérale du Canada ont compétence :

a)  pour entendre les différends survenant entre le Canada et l’Alberta;

[...]

[Non souligné dans l’original.]

B.  Ordonnance contestée

[19]  La protonotaire Milczynski énonce les motifs allégués par le Canada pour déposer une requête en vue d’obtenir que l’Alberta soit ajoutée à titre de mise en cause :

  • l’Alberta est une partie essentielle à l’instance puisque les terres et les ressources revendiquées par les demandeurs dans l’instance se trouvent toutes en Alberta;

  • la Cour fédérale a compétence pour entendre la requête visant la mise en cause de l’Alberta;

  • le Canada a une mise en cause légitime à l’égard de l’Alberta en vertu des articles 1 et 10 de l’Accord de transfert des ressources naturelles;

  • le Canada peut légitimement prétendre à une contribution et à une indemnisation auprès de l’Alberta;

  • la volonté du Canada d’ajouter l’Alberta à titre de mise en cause est réelle.

[20]  La protonotaire Milczynski a énoncé le critère à trois volets de l’arrêt ITO-Int’l Terminal Operators c. Miida Electronics, [1986] 1 RCS 752 [ITO], afin de déterminer si la Cour fédérale a compétence, elle est fonction : (1) d’une attribution de compétence par une loi du Parlement fédéral; (2) de l’existence d’un ensemble de règles de droit fédérales essentiel à la solution du litige et constitue le fondement de l’attribution légale de compétence; et (3) la loi invoquée dans l’affaire doit être « une loi du Canada » au sens où l’expression est employée à l’article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867.

[21]  Dans la décision d’appel de la décision Southwind v Canada, 2011 FC 351, 386 FTR 265 [Southwind], à l’égard d’une requête similaire, notre Cour a déterminé que la norme appliquée consistait à savoir s’il était [traduction] « évident et manifeste » que la Cour n’avait pas compétence pour entendre la demande.

C.  Il doit y avoir attribution de compétence par une loi du Parlement fédéral

[22]  La protonotaire Milczynski a reproduit l’article 19 de la Loi sur les Cours fédérales [la Loi], et a mentionné que l’Alberta avait adopté une loi, prévue en vertu par cet article (voir l’alinéa 27a) de la Judicature Act de l’Alberta, lequel accorde compétence à la Cour fédérale pour entendre les [traduction] « différends survenant entre le Canada et l’Alberta »).

[23]  L’Alberta a prétendu qu’il n’existe pas de différend réel entre le Canada et elle-même qui permettrait d’avoir recours à l’article 19 de la Loi, puisque la mise en cause proposée ne soutient pas qu’une demande de l’Alberta concernant un transfert de terre ait été présentée ou rejetée. La mise en cause proposée indique plutôt une simple responsabilité potentielle, conditionnelle à ce que le Canada soit déclaré responsable.

[24]  La protonotaire Milczynski a conclu que la mise en cause proposée ne présente pas de différend aux fins de l’article 19. La Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Canada v Prince Edward Island, 1977 CarswellNat 122 (FCA) [PEI], a défini les [traduction] « différends » comme [traduction] « tout type de droit, d’obligation ou de responsabilité juridique qui pourrait exister entre des gouvernements ».

[25]  La Cour d’appel fédérale a également conclu que le terme est [traduction] « certainement assez large pour comprendre un litige portant sur la question de savoir si un gouvernement est passible de dommages-intérêts envers un autre » (au paragraphe 67).

[26]  Si les demandeurs obtiennent gain de cause, et qu’il est déterminé que le Traité no 7 n’a pas annulé le titre et l’intérêt visant la terre, alors la mise en cause entre le Canada et l’Alberta serait nécessaire pour établir quelle terre a été transférée à l’Alberta, en vertu de l’Accord de transfert des ressources naturelles, et si des obligations continues existent, en vertu des articles 1 et 10 de l’Accord de transfert des ressources naturelles.

[27]  En conséquence, la protonotaire Milczynski a conclu à la présence d’un différend possible entre le Canada et l’Alberta, et qu’il n’était donc pas évident et manifeste que la Cour fédérale n’avait pas compétence.

[28]  La protonotaire Milczynski a noté que, lorsque l’article 19 de la Loi est respecté, il n’est pas nécessaire d’examiner les deuxième et troisième éléments du critère énoncé dans l’arrêt ITO (décision Southwind, au paragraphe 34). Cependant, elle a poursuivi en mentionnant que l’action concerne le titre ancestral, l’obligation fiduciaire envers les Autochtones et les effets de l’Accord de transfert des ressources naturelles, questions qui, selon ce qu’affirme le Canada, relèvent toutes d’une loi fédérale et sont suffisantes pour satisfaire aux deuxième et troisième éléments du critère de l’arrêt ITO. La protonotaire Milczynski ne se prononce pas expressément sur ces éléments du critère.

[29]  La protonotaire Milczynski a donc conclu que la Cour fédérale avait compétence et que l’autorisation d’introduire la mise en cause devait être accordée au Canada. Elle a mentionné que la défense fondée sur la prescription de même que d’autres défenses seront soulevées à juste titre après le dépôt de la mise en cause, plutôt que dans la présente requête.

[30]  La protonotaire a également accordé une prorogation, nécessaire pour ne pas retarder la requête, en mentionnant que le Canada avait justifié le retard et démontré son intention constante de poursuivre la mise en cause. Le Canada a également confirmé son intention de se désister de la demande de contribution et d’indemnité à la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta. Puisque les questions en litige dans la demande à la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta sont essentiellement les mêmes que celles de la mise en cause, l’Alberta avait effectivement été avisée des questions en litige, et il n’existe pas de préjudice important.

IV.  Analyse

[31]  Les questions soulevées dans le présent appel sont les suivantes :

  • a) La protonotaire Milczynski a-t-elle commis une erreur en établissant qu’il n’était pas évident et manifeste que notre Cour n’avait pas compétence quant à la mise en cause proposée contre l’Alberta?

  • b) La protonotaire Milczynski a-t-elle commis une erreur en accordant une prorogation au Canada pour lui permettre de signifier et de déposer la mise en cause?

A.  Norme de contrôle

[32]  Il est constant, et je suis d’accord, que la norme de contrôle applicable à l’ordonnance discrétionnaire d’un protonotaire a été établie dans l’arrêt Merck & Co., Inc. c. Apotex Inc., 2003 CAF 488, au paragraphe 19, [2004] 2 RCF 459, et selon laquelle le juge saisi de l’appel contre l’ordonnance discrétionnaire d’un protonotaire ne doit pas intervenir sauf dans les deux cas suivants :

a)  l’ordonnance porte sur des questions ayant une influence déterminante sur l’issue du principal,

b)  l’ordonnance est entachée d’erreur flagrante, en ce sens que le protonotaire a exercé son pouvoir discrétionnaire en vertu d’un mauvais principe ou d’une mauvaise appréciation des faits.

[33]  Si l’une ou l’autre des conditions est satisfaite, la Cour peut intervenir afin de rendre l’ordonnance qui aurait dû être accordée.

B.  Question 1 – Aspect évident et manifeste/Compétence

[34]  Concernant la question de la compétence, elle ne requiert pas d’être tranchée à ce stade et elle ne doit pas l’être. La Cour n’a pas à rendre de décision définitive concernant la compétence, cette question devrait être entendue en première instance ou lors d’autres instances, où des faits relatifs à la compétence pourraient être présentés en preuve.

[35]  À ce stade, la Cour doit seulement déterminer s’il est évident et manifeste que notre Cour n’a pas pleine compétence (Hodgson c. Ermineskin Indian Band No 942, [2000] ACF no 2042 (CAF), au paragraphe 5, 102 ACWS (3d) 2).

[36]  L’Alberta invoque à tort la décision Southwind pour faire valoir que les questions relatives à la compétence ont une influence déterminante à ce stade. L’affaire est raisonnablement similaire, et notre Cour l’a examinée de novo à titre subsidiaire, compte tenu des positions adoptées par les parties. La Cour a souligné que le critère juridique à ce stade démontrait qu’il était « évident et manifeste » que la Cour fédérale n’avait pas compétence.

[traduction]
[24]  Afin de déterminer si la conclusion du protonotaire concernant la compétence a une influence déterminante, il est important de prendre en considération le critère à satisfaire. Le protonotaire n’avait pas à trancher la question de la compétence de manière définitive. Dans l’arrêt Hodgson c. Ermineskin Indian Band No 942, [2000] ACF 2042 (CAF), la Cour d’appel fédérale a appliqué le critère afin de déterminer s’il était « évident et manifeste » que la Cour fédérale n’avait pas compétence.

[25]  Vu ce critère, la question de la compétence reste toujours à trancher au procès. On peut donc soutenir que la question n’a pas une influence déterminante, bien que les deux parties soutiennent le contraire. Quoi qu’il en soit, j’ai tenu compte de la question de la compétence de novo, attendu que la décision concernant la prorogation est discrétionnaire.

[37]  Vu la position adoptée par le Canada selon laquelle la question n’a pas une influence déterminante, j’appliquerai le principe directeur du caractère « évident et manifeste ».

[38]  Un élément essentiel des observations de l’Alberta consistait à prétendre qu’il n’existait pas de « différend » entre le Canada et l’Alberta qui ferait entre en jeu l’article 27 de la Judicature Act de l’Alberta.

[39]  Il s’ensuit logiquement que s’il existe un différend (ou plus justement – s’il n’est pas évident et manifeste qu’il n’y pas de différend), l’argument relatif à la compétence est sérieusement miné.

[40]  La position de l’Alberta se fonde sur des commentaires émis par le juge Harrington dans ses motifs à l’égard d’une demande de sursis, dans lesquels il a indiqué que « [d]ouze années plus tard, on n’a toujours rien présenté à la Cour au sujet d’un différend entre le Canada et l’Alberta ».

[41]  Toutefois, ces commentaires doivent être interprétés dans le contexte du paragraphe 30 des motifs du juge Harrington :

[...] Une nouvelle requête pourrait être examinée ultérieurement. La Cour est actuellement en présence d’un vide factuel d’une ampleur telle qu’elle se trouve dans l’incapacité d’agir.

[42]  Comme l’a mentionné la protonotaire, la mise en cause ne présente pas un différend aux fins de l’article 19. Tel que cela a clairement été présenté à la protonotaire ainsi qu’à la Cour dans la requête, la situation est nettement différente de celle présentée au juge Harrington. À ce moment-là, le Canada n’a pas pris position sur la requête de la nation Kainaiwa visant à ajouter l’Alberta.

[43]  Conformément aux principes d’interprétation modernes, le terme « différend » doit être interprété de la manière la plus équitable et la plus large qui soit compatible avec l’application de l’objet et de l’intention de la disposition. Dans l’arrêt PEI, une affaire portant sur le service de traversier et les conditions de l’union entre le Canada et l’Île-du-Prince-Édouard, la Cour a conclu que les différends correspondaient à [traduction] « tout type de droit, d’obligation ou de responsabilité juridique qui pourrait exister entre des gouvernements ».

[44]  La Cour a de plus conclu, au paragraphe 67, que le terme était [traduction] « certainement assez large pour comprendre un litige portant sur la question de savoir si un gouvernement est passible de dommages-intérêts envers un autre ».

[45]  Il ne fait aucun doute que l’Alberta et le Canada auraient d’importantes divergences de points de vue quant à leurs responsabilités, obligations et droits respectifs dans l’éventualité où les demandeurs auraient gain de cause au motif que le Traité no 7 n’a pas annulé le titre et l’intérêt visant la terre.

[46]  Il n’est pas évident et manifeste qu’il n’existe pas de différend. En outre, je souscris à l’analyse de la protonotaire Milczynski à l’égard des questions de compétence, dans le contexte du caractère « évident et manifeste ». Toute autre observation que peut ajouter la Cour est du verbiage inutile.

[47]  Les passages suivants de la décision Southwind résument la question de la compétence :

[traduction]
[33]  La question de savoir si un substrat de règles de droit fédérales existe (les éléments 2 et 3 de l’arrêt ITO) est mise en doute, et il ne s’agit certainement pas d’une question évidente et manifeste. La Cour d’appel fédérale, dans l’arrêt Fairford First Nation v Canada (Attorney General), [1996] FCJ No. 1242, a conclu que l’article 19 de la Loi sur les Cours fédérales et l’article 1 de la Loi sur la compétence des tribunaux fédéraux avaient un caractère suffisamment unique pour régler complètement la question de la compétence.

1  Le juge Hugessen : — Nous souscrivons dans l’ensemble aux motifs du juge des requêtes. Plus précisément, nous convenons que l’effet de l’article 19 de Loi sur les Cours fédérales et de l’article 1 de la Loi sur la compétence des tribunaux fédéraux du Manitoba visait à conférer compétence à notre Cour quant à la mise en cause proposée par l’appelant à l’égard de la province du Manitoba. En admettant, ce dont nous doutons, que l’article 19 exige un substrat de règles de droit fédérales différent de celui de l’article 19 lui-même, nous sommes également d’accord avec le juge pour dire que l’action des intimés à l’encontre de l’appelant portera principalement sur les questions du titre ancestral, de la Loi sur les Indiens et de l’obligation fiduciaire de la Couronne envers les peuples autochtones, soit toutes indéniablement des questions de droit fédéral. Enfin, il est entendu que le juge a bien distingué la décision dans l’arrêt Union Oil Co. of Canada Ltd. v. The Queen in Right of Canada et al.

[34]  Comme l’a indiqué le juge Strayer dans la décision Montana Band v Canada, [1991] 2 FC 273, au paragraphe 9, il n’est pas nécessaire que chacune des trois conditions du critère établi dans l’arrêt ITO soit considérée comme des compartiments étanches. Si deux conditions peuvent être satisfaites en vertu des mêmes dispositions, rien ne justifie que les trois conditions ne puissent pas aussi être satisfaites ou établies en vertu d’une disposition, notamment l’article 19. Il y a une différence importante entre une disposition contenue dans la Loi sur les Cours fédérales, qui confère une compétence concomitante dans les cas où la recherche d’un droit fédéral constituant le fondement de l’attribution de compétence est nécessaire afin de s’assurer que la question est véritablement de compétence fédérale, et une disposition particulière (pragmatique sur le plan constitutionnel) visant à accorder une compétence, sur consentement de la province, pour traiter des différends entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux.

[48]  Par conséquent, la Cour rejettera l’appel à l’égard de cette question.

C.  Question 2 – Prorogation

[49]  Cet aspect de l’appel concerne la décision de la protonotaire Milczynski d’accorder un délai au Canada pour lui permettre de signifier et de déposer la mise en cause.

[50]  Par ailleurs, il est très préoccupant de constater qu’une affaire peut demeurer devant notre Cour pendant près de 15 ans. La Cour comprend la complexité des affaires liées aux Autochtones, l’incertitude du droit et son évolution, de même que les impératifs politiques changeants de toutes les parties.

[51]  Toutefois, contrairement au vin, les affaires ne tendent pas à s’améliorer avec le temps. Les affaires qui s’éternisent s’apparentent davantage à une plaie qui suppure.

[52]  Je n’attribue aucune faute à quelque partie que ce soit, mais en la présente affaire, conformément à des normes plus récentes, sera placée en gestion des instances, comme indiqué par le juge en chef.

[53]  La protonotaire Milczynski a accordé une prorogation, mentionnant en particulier que le Canada avait fourni une explication satisfaisante relativement au retard. Le Canada a indiqué qu’il se désisterait de sa demande de contribution et d’indemnisation à la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta.

[54]  Les principes s’appliquant à l’examen d’une décision discrétionnaire d’un protonotaire ont été énoncés plus tôt.

[55]  Bien que la protonotaire Milczynski ne se soit pas concentrée précisément sur l’article 8, elle a appliqué le critère à quatre volets énoncé dans l’arrêt Canada (Procureur Général) c. Hennelly, [1999] ACF no 846 (CAF), au paragraphe 3, 89 ACWS (3d) 376 :

  1. une intention constante de poursuivre la demande;

  2. une demande bien fondée;

  3. une absence de préjudice;

  4. une explication raisonnable.

[56]  En dépit de la critique de l’Alberta, la protonotaire Milczynski a abordé les quatre volets. Bien que les parties aient également choisi d’avoir recours aux tribunaux de l’Alberta, il n’en demeure pas moins que le Canada a l’intention de tenir l’Alberta responsable devant la Cour, si le Canada devait être tenu responsable à l’égard des demandeurs. La protonotaire Milczynski disposait d’une preuve à l’appui de sa conclusion sur la présente question, de même que sur les autres questions.

[57]  L’Alberta n’a pas été en mesure de faire valoir, de manière significative, et encore moins d’établir un préjudice résultant du retard.

[58]  Quant au bien-fondé, le Canada n’a qu’à démontrer qu’il a une cause défendable, ce dont la protonotaire Milczynski a tenu compte. Le Canada demande une exécution en nature, une contribution et une indemnisation précises, et il invoque des dispositions particulières de l’Accord de transfert des ressources naturelles. Bien que certains de ces plaidoyers reposent sur la common law, il n’en demeure pas moins que le Canada allègue que si ces terres sont détenues en fiducie, l’Alberta les a acquises sous réserve des conditions stipulées dans la fiducie. L’article 10 de l’Accord de transfert des ressources naturelles exige que l’Alberta garde des terres en réserve de manière à permettre au Canada de respecter ses obligations en vertu de traités. Par conséquent, on peut soutenir que le Canada a une demande à faire valoir contre l’Alberta à cet égard.

[59]  La protonotaire Milczynski était clairement consciente de la question du « bien-fondé ».

[60]  Par conséquent, je ne vois aucune raison de modifier la décision de la protonotaire Milczynski sur la prorogation.

V.  Conclusion

[61]  Pour ces motifs, l’appel sera rejeté avec dépens.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que l’appel soit rejeté avec dépens.

« Michael L. Phelan »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-340-99

 

INTITULÉ :

LA NATION KAINAIWA (TRIBU DES BLOOD) ET LE CHEF CHRIS SHADE, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA TRIBU DES BLOOD/KAINAIWA, LA NATION PEIGAN ET LE CHEF PETER STRIKES WITH A GUN, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA NATION PEIGAN, LA NATION SIKSIKA ET LA CHEF DARLENE YELLOW OLD WOMAN MUNROE, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA NATION SIKSIKA, LA NATION TSUU T’INA ET LE CHEF ROY WHITNER, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA NATION TSUU T’INA, LA BANDE BEARSPAW ET LE CHEF DARCY DIXON, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA BANDE BEARSPAW, LA BANDE CHINIKI ET LE CHEF PAUL CHINIQUAY, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA BANDE CHINIKI, LA BANDE WESLEY ET LE CHEF JOHN SNOW PÈRE, EN SON PROPRE NOM ET AU NOM DES MEMBRES DE LA BANDE WESLEY c. SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA et SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DE L’ALBERTA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Calgary (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 8 décembre 2015

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE PHELAN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 19 juillet 2016

 

COMPARUTIONS :

Casey Smith

 

Pour la demanderesse (INTIMÉE),

La nation kainaiwa (tribu des Blood)

 

Michael Pflueger

POUR LA DEMANDERESSE (INTIMÉE),

LA NATION PIIKANI

Leah Pence

POUR LA DEMANDERESSE (INTIMÉE),

LA NATION SIKSIKA

Terry Braun

POUR LA DEMANDERESSE (INTIMÉE),

LA NATION TSUU T’INA

Brooke Barrett

POUR LA DEMANDERESSE (INTIMÉE),

LES BANDES STONEY

Shane Martin

 

POUR LA DÉFENDERESSE (intimée)

 

Sandra Folkins

Lisa Semenchuk

POUR LA MISE EN CAUSE PROPOSÉE (demanderesse)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Walsh LLP

Avocats

Calgary (Alberta)

 

Pour la demanderesse (INTIMÉE),

LA NATION KAINAIWA (TRIBU DES BLOOD)

 

Michael Pflueger

Avocat

Brocket (Alberta)

 

POUR LA DEMANDERESSE (INTIMÉE),

LA NATION PIIKANI

Mandell Pinder LLP

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LA DEMANDERESSE (INTIMÉE),

LA NATION SIKSIKA

Terry Braun

Avocat

Tsuu T’ina (Alberta)

 

POUR LA DEMANDERESSE (INTIMÉE),

LA NATION TSUU T’INA

Rae & Company

Avocats

Calgary (Alberta)

 

POUR LA DEMANDERESSE (INTIMÉE),

LES BANDES STONEY

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Calgary (Alberta)

 

POUR LA DÉFENDERESSE (intimée)

 

Ministre de la Justice et Solliciteur général de l’Alberta

Droit autochtone et droit de l’environnement

Calgary/Edmonton (Alberta)

POUR LA MISE EN CAUSE PROPOSÉE (DEMANDERESSE)

 

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