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Date : 20181019


Dossier : T-1127-10

Référence : 2018 CF 1039

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 19 octobre 2018

En présence de monsieur le juge Fothergill

ENTRE :

SANDHU SINGH HAMDARD TRUST

demanderesse

et

NAVSUN HOLDINGS LTD. ET 6178235 CANADA INC.

défenderesses

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  La demanderesse, Sadhu Singh Hamdard Trust (Hamdard), publie le Daily Ajit, un journal fondé en 1955 au Pendjab, en Inde. Le Daily Ajit est un journal respecté et lu par un grand nombre de personnes en Inde. Depuis 1984, le Daily Ajit utilise un logo dans la cartouche de titre. Le logo est composé du mot « Ajit », qui signifie « indomptable » ou « invincible » en pendjabi, en texte stylisé.

[2]  Les défenderesses et les demanderesses par demande reconventionnelle, Navsun Holdings Ltd et 6178235 Canada Inc. (collectivement ci-après Navsun), publient un journal distinct appelé le Ajit Weekly. Le Ajit Weekly est un journal gratuit distribué à Vancouver, à Montréal et dans la région du Grand Toronto par l’entremise de boîtes dans les épiceries, les supermarchés, les restaurants, les temples et les kiosques à journaux. Depuis sa création en 1993 jusqu’à 2010, un logo (le logo original) très semblable à celui qui figure dans la cartouche de titre du Daily Ajit figurait dans la cartouche de titre du Ajit Weekly.

[3]  En septembre 2007, conformément à un accord de règlement partiel conclu en vertu des lois de l’État de New York, aux États-Unis, Navsun a adopté un nouveau logo (le nouveau logo). Hamdard a reconnu que le nouveau logo de Navsun ne violait pas son droit d’auteur.

[4]  Hamdard a intenté la présente action au moyen de la déclaration déposée le 1er juillet 2010, dans laquelle elle allègue la commercialisation trompeuse et la contrefaçon de la marque de commerce, la dépréciation de l’achalandage et la violation du droit d’auteur. En avril 2014, Hamdard a présenté une requête en jugement sommaire ou en procès sommaire conformément aux articles 215 et 216 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106. Navsun a répondu en présentant sa propre requête par laquelle elle souhaite obtenir le rejet de l’action de Hamdard et une déclaration selon laquelle l’enregistrement de la marque de commerce de Hamdard est nul ab initio.

[5]  Dans l’arrêt Sadhu Singh Hamdard Trust c Navsun Holdings Ltd, 2014 CF 1139 (Hamdard CF), la Cour a conclu que l’affaire pouvait faire l’objet d’un procès sommaire, et a rejeté la demande de Hamdard ainsi que la demande reconventionnelle de Navsun. Hamdard a interjeté appel. La Cour d’appel fédérale a accueilli l’appel concernant l’action, mais n’a pas infirmé le rejet de la demande reconventionnelle de Navsun (Fiducie Sadhu Singh Hamdard c Navsun Holdings Ltd, 2016 CAF 69 (Hamdard CAF)). Les requêtes en jugement sommaire ou en procès sommaire ont été renvoyées à la Cour pour nouvel examen.

[6]  Pour les motifs qui suivent, Hamdard a prouvé ses allégations de commercialisation trompeuse, de dépréciation de l’achalandage et de violation du droit d’auteur, mais uniquement en ce qui concerne le logo original de Navsun. En raison des délais de prescription et des moyens de défense utilisés, Hamdard ne peut réclamer des dommages-intérêts que pour la période de juillet 2007 à septembre 2009. Hamdard ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait d’établir la commercialisation trompeuse, la contrefaçon de la marque de commerce, la dépréciation de l’achalandage ou la violation du droit d’auteur pour ce qui est du nouveau logo de Navsun. Ces revendications sont donc rejetées.

II.  Contexte

A.  Les parties

[7]  Hamdard est une fiducie caritative à caractère public constituée sous le régime du droit indien et établie à Jalandhar, au Pendjab. Elle a été créée en 1977 dans le but de publier le quotidien Daily Ajit.

[8]  Navsun est formée de deux sociétés constituées sous le régime des lois de l’Ontario. Elle est basée à Mississauga, en Ontario. À l’origine, le journal Ajit Weekly était exploité par la famille Bains sous forme d’entreprise individuelle. En 2005, la famille a constitué une société appelée Ajit Newspaper Advertising, Marketing and Communications Inc (ANAMCI), et a transféré tous les actifs du Ajit Weekly à ANAMCI. En avril 2005, ANAMCI a pris le nom de Navsun Holdings Inc.

[9]  Depuis janvier 2004, Navsun concède une licence pour sa marque de commerce à 6178235 Canada Inc. Cette société publie le Ajit Weekly et exploite le site Web www.ajitweekly.com.

B.  Exposé des faits

[10]  Le Daily Ajit a été fondé en 1955. Le journal a été transféré à Hamdard en 1977. Selon Hamdard, le Daily Ajit est très bien connu des lecteurs pendjabi. Les membres de la collectivité pendjabi au Canada lisent le Daily Ajit en ligne à l’aide d’un ordinateur ou d’une application sur leurs téléphones ou leurs tablettes.

[11]  Navsun soutient que le Daily Ajit est disponible à l’extérieur de l’Inde uniquement par abonnement. Selon la source qui a effectué les estimations, les abonnements au Canada ont atteint un sommet de 21 (ou 43) en 1991, ont diminué à 19 (ou 23) en 1993 et ont chuté à 7 en 2010. Navsun affirme qu’il n’existe aucune preuve d’abonnements après 2010.

[12]  Depuis 1984, le logo du Daily Ajit figure en première page ainsi qu’à plusieurs autres endroits dans le journal. Hamdard affirme qu’un de ses employés a conçu le logo. Le logo est de couleur rouge et ressemble à ceci :

[13]  En 2015, Hamdard a enregistré le logo comme dessin de marque au Canada qui sera, entre autres, utilisé en rapport avec les journaux et les publications en ligne. L’enregistrement n’a pas été contesté. Hamdard fait valoir que son logo est un dessin original, et pas seulement le mot « Ajit » saisi au moyen d’une police de caractères particulière.

[14]  Hamdard a lancé son site Web ajitjalandhar.com en mai 2002.

[15]  Le 11 janvier 2016, Hamdard a présenté une demande d’enregistrement du mot-symbole AJIT. Navsun s’est toutefois opposée avec succès à la demande en raison du manque de caractère distinctif (Trust c Navsun Holdings Ltd, 2018 CF 42).

[16]  Le logo original du Ajit Weekly est apparu en plusieurs couleurs, y compris en rouge, et ressemblait à ceci :

[17]  En 1998, Navsun a lancé le site Web www.ajitweekly.com et a commencé à utiliser le mot « Ajit » en rapport avec des services électroniques.

[18]  Navsun a enregistré son logo original comme marque de commerce au Canada en 2005. En 2010, Hamdard a présenté une demande de radiation de l’enregistrement de Navsun fondée sur ses droits antérieurs à l’égard de la marque de commerce. Navsun a annulé son enregistrement, et la demande de radiation de Hamdard a été rejetée au motif de sa caducité.

[19]  En 2004, Hamdard a intenté une action à l’encontre de Navsun dans l’État de New York pour contrefaçon de la marque de commerce et violation du droit d’auteur. Navsun a obtenu gain de cause quant à la question de la marque de commerce (Sadhu Singh Hamdard Trust v Ajit Newspaper Adv, 503 F Supp (2d) 577 (ED NY 2007)). Le volet droit d’auteur a été réglé au moyen d’un accord de règlement partiel; partiel parce que l’accord ne portait que sur la question du droit d’auteur. En vertu de l’accord de règlement partiel, Navsun devait apporter certaines modifications à son logo. Le logo de Navsun est maintenant de couleur verte et ressemble à ceci :

[20]  Le journal Ajit Weekly de Navsun publie des annonces se rapportant à la sorcellerie et à la magie, ainsi qu’à des cliniques de choix du sexe du fœtus et à la vente de comprimés. Hamdard estime que ces annonces sont offensantes pour les lecteurs du Daily Ajit, et qu’elles ternissent son image de marque.

C.  Accord de règlement partiel

[21]  De nombreux différends opposent les parties depuis longtemps au Canada, aux États-Unis et au Royaume-Uni. Une des actions aux États-Unis a donné lieu à l’accord de règlement partiel, qui a été incorporé dans une ordonnance de la Cour de district des États-Unis pour le district Est de New York rendue le 1er octobre 2009. L’accord de règlement partiel a accordé une licence d’utilisation restreinte à Navsun de son logo original pour le reste de l’année 2009. Après quoi, Navsun obtenait une licence lui permettant d’utiliser une variante approuvée de son logo conformément aux modalités énoncées dans l’accord. L’une des dispositions stipule que la licence [traduction] « ne doit en aucun cas avoir d’incidence sur la marque de commerce revendiquée par chaque partie et sur tout autre droit dans tout ressort ».

[22]  L’accord de règlement partiel ne comprend aucune renonciation aux réclamations liées aux violations du droit d’auteur antérieures à la signature de l’accord. Toutefois, l’accord de règlement partiel constitue un moyen de défense absolu contre toute demande fondée sur la violation du droit d’auteur sur la base des licences accordées par l’accord.

[23]  L’accord de règlement partiel précise qu’il est régi par le droit de New York et que les tribunaux de New York sont compétents quant à l’interprétation et la mise en œuvre de l’accord. Toutefois, étant donné que la violation présumée s’est produite au Canada, la Cour d’appel fédérale a établi dans Hamdard CAF, au paragraphe 17, que la Cour fédérale avait la compétence d’entendre la demande fondée sur le droit d’auteur, conformément au paragraphe 20(2) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch F-7, et à l’article 41.24 de la Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. (1985), ch C-42.

III.  La preuve

[24]  Le 24 octobre 2017, le protonotaire Kevin Aalto a permis à Hamdard de déposer une requête en jugement sommaire, et de déposer une déclaration modifiée trois fois, un avis de requête modifié ainsi que d’autres éléments de preuve. Navsun a obtenu l’autorisation de déposer une nouvelle défense modifiée et d’autres éléments de preuve.

[25]  Un aperçu des éléments de preuve pertinents présentés par les parties dans les requêtes initiales en jugement sommaire ou en procès sommaire se trouve dans Hamdard CF, aux paragraphes 32 à 57. Ni la Cour d’appel fédérale ni les parties n’ont exprimé de réserves quant aux conclusions antérieures de la Cour fondées sur la preuve, et ces conclusions ont été intégrées aux présents motifs de jugement.

[26]  Voici un résumé des affidavits complémentaires présentés par Hamdard.

  • a) Affidavit souscrit le 17 octobre 2016 par M. Barjinder Singh Hamdard : M. Hamdard est citoyen de l’Inde et rédacteur en chef du Daily Ajit. M. Hamdard décrit l’historique et l’expansion du Daily Ajit. Il dépose également une liste du nombre d’abonnés au Daily Ajit au Canada de 1990 à 2010, ainsi qu’une liste d’environ 160 lettres à la rédaction provenant lecteurs pendjabi au pays. Il discute du logo du Daily Ajit et déclare que le « crochet » au-dessus du mot est l’élément le plus distinctif du logo. M. Hamdard explique comment il a appris l’existence du Ajit Weekly lors d’une visite au Canada en avril 1995. Il a fait une déclaration selon laquelle Hamdard n’avait aucun lien avec le Ajit Weekly. Il indique que M. Bains connaissait le Daily Ajit ainsi que son style et son contenu. M. Hamdard soutient également que l’utilisation abusive du nom « Ajit » par le Ajit Weekly a nui à la capacité de Hamdard d’élargir sa clientèle au Canada. Il dit que Hamdard ne pouvait pas s’opposer à la demande de Navsun concernant la marque de commerce en 2004, parce que le registraire n’a pas tenu compte de sa demande en prorogation du délai. Hamdard a demandé la radiation de la marque de commerce déposée de Navsun en 2010, ce qui a amené Navsun à l’annuler.

  • b) Affidavit souscrit le 14 octobre 2016 par Jasjit Singh Dhami : M. Dhami est correspondant au Daily Ajit depuis 1995. Il est venu au Canada en 2005. Il indique que le Daily Ajit est bien connu au sein de la collectivité pendjabi au Canada. Lorsque les membres de la collectivité pendjabi canadienne étaient informés qu’il travaillait pour le Daily Ajit, automatiquement ces derniers croyaient qu’il travaillait pour le Ajit Weekly. Les Pendjabis canadiens supposent que le Daily Ajit et le Ajit Weekly sont reliés, et lui ont demandé pourquoi le Daily Ajit publiait des annonces offensantes.

  • c) Affidavit souscrit le 18 octobre 2016 par Narinderjit Kaur Kanwal : Mme Kanwal est une employée de restaurant qui a immigré au Canada en 1988. Elle a lu le Daily Ajit en Inde, et elle a cru que le Ajit Weekly était relié au Daily Ajit lorsqu’elle a vu la publication en magasin. Elle trouve déroutantes les différences de contenu entre les deux publications.

  • d) Affidavit souscrit le 15 octobre 2016 par Baldev Singh : M. Singh est prédicateur et camionneur. Il a lu le Daily Ajit en Inde. Après son arrivée au Canada en 2002, il croyait initialement que le Ajit Weekly était un produit du Daily Ajit.

  • e) Affidavit souscrit le 15 octobre 2016 par Gurdial Singh Kanwal : M. Kanwal est un éditeur, auteur et journaliste à la retraite et l’actuel président de la Canadian International Punjab Sahit Academy. Il connaît le Daily Ajit depuis 1964 et, après avoir immigré au Canada, il a utilisé le Daily Ajit comme source d’information pour son propre journal. Il croyait que le Ajit Weekly était un produit du Daily Ajit, et s’est seulement rendu compte qu’ils étaient distincts lorsqu’il a entendu parler du litige qui les opposait. M. Bains lui a dit que M. Hamdard était son ami.

  • f) Affidavit souscrit le 15 octobre 2016 par Amritpal Singh Saini : M. Saini est correspondant au Daily Ajit depuis 2009. Il a immigré au Canada en 2000 et croyait que le Ajit Weekly était le Daily Ajit. Il dit que la collectivité pendjabi canadienne connaît et respecte le journal ainsi que le site Web du Daily Ajit. Depuis qu’il a commencé à travailler pour le Daily Ajit, les gens lui demandent s’il travaille également pour le Ajit Weekly, supposant à tort que les deux sont liés.

  • g) Affidavit souscrit le 15 octobre 2016 par Surjit Kaur Saini : Mme Saini est une opératrice de machinerie lourde, et a immigré au Canada en 2004. Elle a lu le Daily Ajit en Inde, et quand elle a vu le Ajit Weekly pour la première fois au Canada, elle a pensé qu’il s’agissait du Daily Ajit. Elle lit le Daily Ajit en ligne depuis de nombreuses années.

  • h) Affidavit souscrit le 15 octobre 2016 par Karnail Singh : M. Singh est un camionneur et un prédicateur bénévole de religion sikhe. Il vit au Canada depuis 2005. Il a connu le Daily Ajit alors qu’il vivait en Inde. À son arrivée au Canada, il croyait que le Ajit Weekly était publié par le Daily Ajit ou Hamdard. Il a été choqué par les annonces offensantes publiées dans le Ajit Weekly. Il a appelé un correspondant canadien du Daily Ajit, et ce n’est qu’à ce moment qu’il a appris la distinction entre les deux.

  • i) Affidavit souscrit le 15 octobre 2016 par Rajinder Kaur : Mme Kaur travaille dans une usine et vit au Canada depuis 2009. Elle était une lectrice passionnée du Daily Ajit alors qu’elle vivait en Inde, et se demandait si le Ajit Weekly et le Daily Ajit étaient liés.

  • j) Affidavit souscrit le 15 octobre 2016 par Sukhjinder Singh Dhariwal : M. Dhariwal est un camionneur qui a immigré au Canada en 2005. Il lit le Daily Ajit depuis la cinquième année. Il a appris que le Daily Ajit et le Ajit Weekly avaient des propriétaires différents après deux ou trois ans, en entendant parler du litige. Lui et ses amis lisent le Daily Ajit en ligne.

  • k) Affidavit souscrit le 15 octobre 2016 par Karmjeet Kaur Chahal : Mme Chahal a immigré au Canada en 2003. En Inde, sa famille était abonnée au Daily Ajit. Elle a trouvé que la similitude entre le nom et le logo du Daily Ajit et du Ajit Weekly était déroutante.

  • l) Affidavit souscrit le 15 octobre 2016 par Satinderpal Singh Chahal : M. Chahal a immigré au Canada en 2000 et est propriétaire et exploitant d’une entreprise de messagerie. Il a connu l’existence du Daily Ajit alors qu’il était en Inde, et dit que le journal est bien connu. Il croyait que le Ajit Weekly était publié par le Daily Ajit lorsqu’il a vu le journal pour la première fois. Il a été offensé par les annonces publiées dans le Ajit Weekly. Il a découvert qu’il n’y avait aucun lien entre les deux en appelant un correspondant du Daily Ajit.

  • m) Affidavit souscrit le 28 janvier 2017 par Satpaul Singh Johal : M. Johal est journaliste et correspondant du Daily Ajit. Il joint ce qui est censé être des parties d’un journal en langue hindi de 2010 appelé Ajeet Patrika, et affirme que la langue hindi diffère du pendjabi et possède un alphabet différent. Une personne pendjabi ne pourrait pas lire un journal de langue hindi à moins de bien connaître l’hindi écrit. Hamdard ignorait l’existence du Ajeet Patrika jusqu’à ce que M. Bains en fasse mention dans le litige. Hamdard a été incapable de trouver le journal à la suite de sa propre enquête. Il semble que le journal Ajeet Patrika ait été enregistré dans un autre État et qu’il n’ait pas présenté les déclarations annuelles requises depuis longtemps.

  • n) Affidavit souscrit le 17 octobre 2016 par Sukhvinder Singh : M. Singh est directeur du marketing du Daily Ajit depuis deux ans. Il exploite le site Web www.ajitjalandhar.com. Le quotidien Daily Ajit est publié en entier sur le site Web depuis 2002. Il surveille le trafic sur le site Web à l’aide de Google Analytics et a joint des dossiers qui démontrent qu’il y a eu 909 405 visites sur le site Web en provenance du Canada entre le 11 mai 2008 et le 31 août 2008. Il joint également les rapports de 2013 à 2015.

  • o) Affidavit souscrit le 21 septembre 2017 par Satpaul Singh Johal : M. Johal est journaliste et correspondant au Daily Ajit depuis 2001. Il affirme que le Daily Ajit publie des articles d’intérêt pour les Pendjabis qui vivent au Canada. En décembre 2012, Hamdard a lancé des applications pour appareils numériques mobiles. M. Johal produit un tableau montrant l’historique des téléchargements. Il dit que le logo du Daily Ajit n’est pas produit au moyen d’une police de caractères, et que les lettres se chevauchent.

[27]  Navsun a déposé l’affidavit souscrit le 13 décembre 2017 par Kanwar (Sunny) Bains. M. Bains affirme ce qui suit :

  • a) M. Bains est actionnaire et directeur de Navsun. Il déclare qu’en juin 2010, Hamdard a présenté une demande pour enregistrer la marque de commerce AJIT. En 2015, Navsun s’est opposée avec succès à la demande présentée à la Commission des oppositions des marques de Commerce au motif d’absence d’un caractère distinctif.

  • b) Hamdard a présenté une demande d’enregistrement de son dessin de marque, et Navsun ne s’y est pas opposée. Hamdard a cependant présenté une deuxième demande d’enregistrement de son mot-symbole, ce à quoi Navsun s’oppose. M. Bains prétend que Navsun cherche à obtenir la radiation de la marque de Hamdard pour la seule raison que Hamdard allègue la contrefaçon et fait de fausses déclarations au sujet de la première utilisation. M. Bains soutient que Hamdard n’aurait pas pu utiliser sa marque en association avec des biens et des services électroniques depuis 1984, puisque le lancement de son site Web n’a pas eu lieu avant 2002, que Hamdard ne publie pas de magazines et que le mot « Ajit » est très courant en pendjabi et est utilisé dans de nombreuses dénominations sociales.

  • c) Le site Web du Ajit Weekly accueille de 12 500 à 30 000 visiteurs par mois. Le journal est tiré à environ 12 000 exemplaires par semaine à Vancouver et à Toronto.

  • d) M. Bains n’est pas au courant de l’existence d’une confusion entre les deux sites Web ou journaux. Il croit que les immigrants peuvent lire le mot anglais « Weekly » dans la marque de Navsun, et qu’ils sont donc en mesure de faire la distinction entre les deux publications.

IV.  Questions en litige

[28]  Ces requêtes pour jugement sommaire ou procès sommaire soulèvent les questions suivantes :

  1. Navsun a-t-elle eu recours à une pratique de commercialisation trompeuse?

  2. Navsun a-t-elle violé la marque de commerce de Hamdard?

  3. Y a-t-il eu dépréciation de l’achalandage de Hamdard conformément à l’article 22 de la Loi sur les marques de commerce?

  4. Navsun a-t-elle violé le droit d’auteur de Hamdard?

  5. Une injonction interlocutoire devrait-elle être accordée?

  6. Navsun peut-elle poursuivre sa demande reconventionnelle?

V.  Analyse

A.  Navsun a-t-elle eu recours à une pratique de commercialisation trompeuse?

[29]  Pour obtenir gain de cause dans une action pour commercialisation trompeuse en common law et fondée sur l’alinéa 7b) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch T-13, le demandeur doit établir l’existence d’un achalandage, le fait que le public a été induit en erreur par une fausse déclaration et le préjudice réel ou possible pour le demandeur (Kirkbi AG c Gestions Ritvik Inc., 2005 CSC 65, aux paragraphes 66 à 69 (Kirkbi)). La Cour doit donc examiner quatre questions distinctes, soit l’achalandage, la confusion, les dommages ainsi que tout moyen de défense qui pourrait être disponible.

(1)  Achalandage

[30]  L’existence de l’achalandage est vérifiée en déterminant si la partie a établi que ses marchandises étaient connues sur le marché en raison d’un élément distinctif (Kirkbi, au paragraphe 67). La date pertinente pour déterminer l’existence de l’achalandage est 1993, lorsque Navsun a commencé à publier le Ajit Weekly.

[31]  Hamdard affirme qu’à compter de 1993, le Daily Ajit était le plus grand journal publié en pendjabi au monde, tandis que le journal de Navsun était inconnu. Hamdard affirme que l’achalandage au Canada peut découler du fait que le journal était connu à l’étranger, et qu’aucune vente au Canada n’est requise (bien que le Daily Ajit ait été vendu au Canada en tout temps durant la période pertinente). Hamdard fait donc valoir que la réputation internationale du Ajit Daily était suffisante pour appuyer l’existence de l’achalandage au Canada en 1993 (Hamdard CAF, au paragraphe 25).

[32]  Navsun soutient qu’en 1993, la marque de Hamdard n’était pas suffisamment bien connue au Canada pour générer de l’achalandage. Les marques étrangères ne sont pas protégées du seul fait qu’elles sont connues des personnes qui émigrent d’un autre pays. Plutôt, « l’achalandage peut résulter de l’usage d’une marque de commerce au Canada et de l’usage d’une marque de commerce dans un autre pays lorsque cette marque est portée à l’attention des Canadiens, soit par son usage soit par la publicité atteignant les Canadiens » (Enterprise Rent-A-Car Co. c Singer, [1996] 2 CF 694) Navsun fait remarquer que le nombre d’abonnés de Hamdard était très faible en 1993, qu’il n’y a pas suffisamment de preuve d’une notoriété auprès des personnes qui ont émigré du Pendjab, qu’aucune édition du Daily Ajit ne ciblait le public canadien ou un public international, et que Hamdard n’a jamais fait de publicité du Daily Ajit au Canada en 1993 ou avant.

[33]  De plus, Navsun affirme que le dessin de marque de Hamdard n’a été utilisé que pour quelques abonnements, qu’il n’y a pas de preuve de pénétration du marché au Canada, seulement quelques preuves anecdotiques par affidavit, qu’il n’y a pas de preuve démontrant que le dessin de marque était célèbre ou qu’il présentait une qualité particulière, et que le caractère distinctif du dessin de marque a toujours été faible.

[34]  Navsun affirme que l’existence de l’achalandage de Hamdard au Canada à compter de 1993 doit être établie en fonction des facteurs suivants (citant l’arrêt Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot ltée, 2006 CSC 23, au paragraphe 54 (Veuve Clicquot)) :

Bien que l’art. 22 n’exige pas la preuve de la « célébrité », le tribunal appelé à déterminer s’il existe un achalandage susceptible d’être déprécié par un emploi qui ne crée pas de confusion (comme en l’espèce) tiendra compte de cet élément, comme de facteurs plus généraux tels le degré de reconnaissance de la marque par les consommateurs de la population de référence, le volume des ventes et le degré de pénétration du marché des produits associés à la marque de la demanderesse, l’étendue et la durée de la publicité accordée à la marque de la demanderesse, sa portée géographique, l’importance de son caractère distinctif inhérent ou acquis, le fait que les produits associés à la marque de la demanderesse soient confinés à une voie de commercialisation restreinte ou spécialisée ou qu’ils empruntent des voies multiples, ainsi que la mesure dans laquelle les marques sont perçues comme un gage de qualité.

[35]  L’arrêt Veuve Clicquot portait sur l’article 22 de la Loi sur les marques de commerce, qui interdit l’emploi d’une marque de commerce déposée par une autre personne d’une manière susceptible d’entraîner la diminution de la valeur de l’achalandage attaché à cette marque de commerce. En supposant que des facteurs semblables puissent être utilisés pour déterminer l’existence de l’achalandage dans une action pour commercialisation trompeuse, leur application en l’espèce peut être résumée comme suit :

  • a) le degré de reconnaissance de la marque par les consommateurs de la population de référence : la marque de Hamdard est bien connue au sein de la collectivité Pendjabi canadienne, la population de référence;

  • b) le volume des ventes et le degré de pénétration du marché des produits associés à la marque de la demanderesse; ceux-ci sont peu élevés pour la marque de Hamdard;

  • c) l’étendue et la durée de la publicité accordée à la marque de la demanderesse, de sa portée géographique, qui sont peu élevés pour la marque de Hamdard;

  • d) l’importance de son caractère distinctif inhérent ou acquis : le Daily Ajit de Hamdard est le seul journal au monde nommé « Ajit », à l’exception du Ajit Weekly de Navsun (Navsun prétend qu’il existe un journal en hindi portant un nom semblable, mais on ignore si la publication existe); et

  • e) si les produits associés à la marque de la demanderesse sont confinés à une voie de commercialisation restreinte ou spécialisée ou s’ils empruntent des voies multiples : les produits de Hamdard se limitent aux journaux et à la publicité.

[36]  Tout bien pensé, j’estime que le degré élevé de reconnaissance par les consommateurs de la population de référence, ainsi que le caractère distinctif et la voie de commercialisation restreinte et spécialisée de la marque de Hamdard appuient la conclusion selon laquelle Hamdard jouissait, à compter de 1993, d’un achalandage suffisant au Canada pour étayer une demande fondée sur la commercialisation trompeuse. Comme je l’explique ci-après, Navsun n’a pas donné d’explications crédibles quant à sa décision d’utiliser le mot « Ajit » dans le nom de son journal Ajit Weekly qu’elle a lancé en 1993. Sa décision d’utiliser le mot « Ajit » dans le nom du journal appuie l’inférence selon laquelle le nom avait une valeur commerciale au Canada à l’époque (Orkin Exterminating Co Inc c Pestco Co of Canada Ltd (1985), 50 OR (2d) 726 (ONCA), au paragraphe 56 (Orkin)).

(2)  Confusion

[37]  Le deuxième élément de la représentation trompeuse est satisfait si la demanderesse prouve que la défenderesse a utilisé une marque qu’on était susceptible de confondre avec la marque distinctive la demanderesse (Ciba-Geigy Canada Ltd. c Apotex Inc., [1992] 3 RCS 120, aux paragraphes 136-137 et 140). Les facteurs non exhaustifs à prendre en considération sont énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi sur les marques de commerce :

6(5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, se lon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris :

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

c) le genre de produits, services ou entreprises;

d) la nature du commerce;

e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent.

6(5) In determining whether trade-marks or trade-names are confusing, the court or the Registrar, as the case may be, shall have regard to all the surrounding circumstances including:

(a) the inherent distinctiveness of the trade-marks or trade-names and the extent to which they have become known;

(b) the length of time the trade-marks or trade-names have been in use;

(c) the nature of the goods, services or business;

(d) the nature of the trade; and

(e) the degree of resemblance between the trade-marks or trade-names in appearance or sound or in the ideas suggested by them.

[38]  Le facteur le plus important est souvent degré de ressemblance entre les marques de commerce (Masterpiece Inc. c Alavida Lifestyles Inc., 2011 CSC 27, au paragraphe 49). Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé (Veuve Clicquot, au paragraphe 20).

[39]  Hamdard affirme que ses affidavits démontrent qu’il existe bel et bien une confusion. À titre subsidiaire, Hamdard soutient qu’il existe une probabilité de confusion. Les marques associées au Ajit Weekly sont semblables à la marque du Daily Ajit au point de créer de la confusion. Les deux journaux offrent les mêmes produits et services (nouvelles du Pendjab) et ont les mêmes clients (lecteurs de langue pendjabi). Les deux publications sont presque entièrement écrites en pendjabi, et les marques sont à peu près de la même taille. Les différences entre les marques sont très légères. L’inclusion du mot « Weekly » dans la marque de Navsun n’est pas pertinente, car le mot « Ajit » écrit en pendjabi est la caractéristique dominante. Le mot est mis en évidence par sa taille, son style et sa langue, et est perçu et prononcé sans les mots anglais ajoutés. De plus, Navsun n’a pris aucune mesure pour différencier ses produits et services, et son entreprise dépend de l’exploitation de la réputation de la marque Ajit.

[40]  Navsun répondent que « Ajit » est une marque faible, parce qu’il s’agit d’un mot souvent utilisé pour désigner des particuliers et des dénominations sociales d’entreprises en Inde. Bien que Hamdard ait utilisé sa marque pendant une longue période de temps, il faudrait accorder peu de poids à cette notion parce que son utilisation au Canada est faible. De plus, les consommateurs du Ajit Weekly ne se limitent pas à ceux qui peuvent lire la langue pendjabi. L’anglais est utilisé dans le logo du Ajit Weekly, et la publication a d’autres contenus en anglais. Par conséquent, Navsun affirme que le consommateur occasionnel aurait probablement une certaine connaissance des deux langues et comprendrait que le mot « Weekly » distingue le Ajit Weekly du Daily Ajit.

[41]  Selon Navsun, en 1993, Internet en était à ses balbutiements et tous les journaux avaient foncièrement un caractère local. Le Ajit Weekly ciblait la collectivité pendjabi de Toronto, tandis que le Daily Ajit ne s’adressait qu’au très petit nombre de Canadiens qui s’y étaient abonnés. De plus, Hamdard qualifie le Daily Ajit de « journal professionnel », tandis que le Ajit Weekly est un journal gratuit disponible en épicerie.

[42]  Navsun soutient que les éléments de preuve relatifs à la confusion présentés par Hamdard ne résistent pas à un examen minutieux. Les éléments de preuve sont anecdotiques. Les déclarants sont des amis des correspondants de Hamdard au Canada et manquent de crédibilité. Le témoignage de M. Johal selon lequel les gens pensent qu’il est un correspondant au Ajit Weekly au lieu du Daily Ajit ne constitue pas de la confusion sur le marché.

[43]  En ce qui concerne le nom de domaine Internet, www.ajitweekly.com, Navsun fait remarquer que Hamdard n’a lancé son site Web que quatre ans après le lancement du site Web du Ajit Weekly. De plus, l’inclusion du mot « Weekly » dans le nom de domaine rejette toute association avec Hamdard.

[44]  En ce qui concerne son nouveau logo, Navsun indique qu’elle utilise une police de caractères différente et de couleur verte et qu’il comprend un mot anglais. Encore une fois, Navsun soutient que l’inclusion du mot « Weekly » distingue ses services de ceux offerts par Hamdard.

[45]  Navsun n’a pas donné d’explications satisfaisantes quant à la manière dont son logo original a été produit. À un certain moment, Navsun a laissé entendre qu’il s’agissait simplement du mot « Ajit » écrit avec une police de caractères disponible sur le marché, plus précisément la police « Nanak Heavy ». La Cour d’appel fédérale a déclaré ce qui suit au sujet de l’originalité de la marque de Hamdard (Hamdard CAF, au paragraphe 30) :

[...] les éléments de preuve présentés à la Cour fédérale indiquent que la version stylisée du mot « Ajit » utilisée comme titre du journal Ajit Daily a été conçue par un employé de la fiducie Hamdard et que le droit d’auteur pour la police « Nanak heavy » n’a été acquis qu’en 1995, soit deux ans après que le journal Ajit Weekly eut commencé à utiliser le logo du journal Ajit Daily au Canada. Ces faits appuient le caractère original de la marque de commerce stylisée du journal Ajit Daily. S’il s’agit d’une marque de commerce originale, il est plus probable que son utilisation par [Navsun] découle d’une tentative délibérée de la copier, ce qui aurait bien pu entraîner de la confusion. [...]

[46]  La Cour d’appel fédérale a également souligné la nécessité d’examiner la preuve relative à la réputation dont jouissait le journal Daily Ajit, ce qui aurait pu contribuer à l’établissement du caractère distinctif de la marque.

[47]  Je n’hésite pas à conclure que le logo de Hamdard qui figure dans la cartouche de titre du journal Daily Ajit, en particulier avec son « crochet » stylisé, est original et distinctif. Le logo original de Navsun était à la fois semblable au point de créer de la confusion, et est probablement une copie du logo de Hamdard. Comme l’a fait remarquer la Cour d’appel fédérale dans Hamdard CAF, au paragraphe 28, « les marques de commerce en l’espèce ne se résument donc pas simplement au mot « Ajit », mais plutôt au mot et à l’écriture stylisée de celui‑ci, que les deux journaux utilisent comme logo ».

[48]  Cependant, je ne suis pas convaincu que le nouveau logo de Navsun ressemble également à celui de Hamdard au point de créer de la confusion. Le seul élément de preuve dont la Cour est saisie au sujet du caractère distinctif du logo de Hamdard est le « crochet » au-dessus du mot, qui s’étend plus à gauche que si le mot « Ajit » avait été écrit avec une police standard. Hamdard a admis dans l’accord de règlement partiel que le nouveau logo de Navsun était suffisamment distinct aux fins du droit d’auteur.

[49]  Le nouveau logo de Navsun s’est défait du « crochet » stylisé de la marque de Hamdard, et est maintenant vert. Si le nouveau logo est suffisamment différent pour éviter de violer le droit d’auteur de Hamdard sur l’image, il est donc contre-intuitif de laisser entendre qu’il n’est pas suffisamment différent pour éviter la confusion sur le marché. Je suis d’accord avec Navsun pour dire qu’il est incohérent pour Hamdard de permettre l’utilisation du nouveau logo sur la base du droit d’auteur, mais de s’y opposer sur la base de commercialisation trompeuse. Je ne suis donc pas convaincu que Hamdard se soit acquitté du fardeau qui lui incombait de démontrer que le nouveau logo de Navsun est semblable à celui de Hamdard au point de créer de la confusion.

[50]  Le nom de domaine Internet de Navsun, www.ajitweekly.com, porte encore moins à confusion. Il se compose uniquement de mots, et le mot « Ajit » n’est pas écrit de façon stylisée, ce que la Cour d’appel fédérale a reconnu comme l’un des aspects importants des marques en cause. Encore une fois, je ne suis pas convaincu que Hamdard s’est acquitté du fardeau qui lui incombait de démontrer que le nom de domaine Internet de Navsun est semblable à celui de Hamdard au point de créer de la confusion.

(3)  Dommages-intérêts

[51]  Dans l’arrêt Hamdard CAF, la Cour d’appel fédérale a conclu que la présence du préjudice requis pour présenter une demande fondée sur la commercialisation trompeuse peut être établie au moyen d’une preuve de la perte de contrôle sur la réputation, l’image ou l’achalandage (citant Cheung c Target Event Production Ltd., 2010 CAF 255, aux paragraphes 24, 27 et 28; Orkin, aux paragraphes 48 et 49). Hamdard allègue qu’il n’est pas nécessaire de prouver de préjudice réel. Le risque de préjudice est suffisant.

[52]  Hamdard soutient que le Ajit Weekly est un concurrent direct du Daily Ajit, parce que les deux se font concurrence pour des publicités. Le détournement des lecteurs du Daily Ajit au Ajit Weekly ne peut avoir eu pour effet que de faire baisser les prix que Hamdard peut facturer pour la publicité. Hamdard prétend que la présence du Ajit Weekly a nui à la possibilité du Daily Ajit d’élargir sa clientèle au Canada. Hamdard n’a offert que peu d’éléments de preuve à l’appui de l’une ou l’autre des demandes.

[53]  Hamdard soutient également que l’image de marque du Daily Ajit est ternie par les annonces se rapportant à la sorcellerie, à la magie et à des services relatifs au choix du sexe du fœtus et à la vente de comprimés dans le Ajit Weekly, ainsi que par la publicité négative qu’il a reçue à la suite d’une descente dans ses locaux et d’accusations criminelles en Inde. Navsun s’oppose aux éléments de preuve relative à une procédure criminelle en Inde parce qu’elle n’est pas fiable, n’est pas vérifiée et est très préjudiciable.

[54]  Hamdard affirme que les différences de ton, de sujet, de perspective, de longueur et de perspective entre les deux publications confirment le préjudice causé à l’image de marque du Daily Ajit. Comme Navsun représente faussement leur journal comme un journal publié par Hamdard, le contenu du journal ne répond pas du tout aux attentes des lecteurs.

[55]  Hamdard reconnaît qu’il est difficile de quantifier les dommages-intérêts avec précision, et invite la Cour à déterminer le montant approprié.

[56]  Navsun soutient que Hamdard n’a subi aucun préjudice. Gurvinder Johal et Narinderjit Kanwal ont été contre-interrogés sur les annonces prétendument offensantes dans le Ajit Weekly, et ont tous deux admis avoir continué de lire le journal malgré les annonces en question. Satpaul Johal et Gurdial Kanwal ont reconnu que de nombreux membres de la population pendjabi ne sont pas offensés par les annonces. Le Daily Ajit et le Ajit Weekly ne sont pas des concurrents directs, mais plutôt des publications complémentaires; plusieurs témoins ont admis lire les deux, et des particuliers placent souvent des petites annonces dans les deux. Le Ajit Weekly ne nuit pas aux abonnements du Daily Ajit ni à la disponibilité de son site Web au Canada. Advenant que le Daily Ajit soit offert au Canada, M. Hamdard indique clairement qu’il ne serait jamais distribué dans une épicerie à côté du Ajit Weekly.

[57]  Bien qu’il existe de la jurisprudence pour guider la quantification des dommages-intérêts en vertu de l’article 22 de la Loi sur les marques de commerce, les tribunaux ont moins à dire au sujet des dommages-intérêts pour la dépréciation de l’achalandage dans les actions fondées sur la commercialisation trompeuse. Les dossiers de contrefaçon de la marque de commerce où il y a « [...] absence d’une preuve précise du préjudice dans les affaires » (Ragdoll Productions (UK) Ltd. c Personnes inconnues, 2002 CFPI 918, au paragraphe 43 (Ragdoll)) peuvent être utiles, car le pouvoir d’accorder une réparation en vertu de la Loi sur les marques de commerce s’étend à tout « acte [qui] a été accompli contrairement à la présente loi », y compris la contrefaçon de marques de commerce et le transfert de marques de commerce (paragraphe 53.2(1)).

[58]  Dans l’arrêt Ragdoll, le juge Denis Pelletier cite la décision Aluminum Co of Canada Ltd et al c Tisco Home Building Products (Ontario) Ltd. et al (1977), 33 CPR (2d) 145 (CFPI), au paragraphe 40, et a reproduit l’extrait suivant tiré de l’ouvrage de Fox intitulé Canadian Law of Trade Marks and Unfair Competition :

Pour calculer les dommages-intérêts, on considère que le défendeur est responsable de toute perte réellement subie par le demandeur, qui est la conséquence naturelle et directe des actes illégaux du défendeur, y compris toute perte de commerce provenant directement ou indirectement de ces actes ou leur étant imputable, qui constituent une atteinte à la réputation, à l’entreprise, à l’achalandage ou au commerce du demandeur. Il faut supprimer du calcul les dommages-intérêts spéculatifs et non prouvés. Le tribunal estimera les dommages sur la même base que le ferait un jury et son estimation pourra tenir compte du préjudice causé à l’achalandage du demandeur, car le tribunal agissant comme jury et faisant preuve d’une connaissance normale des affaires et de bon sens, a le droit de considérer qu’il ne peut pas y avoir de commerce trompeur sans que l’achalandage en pâtisse dans une certaine mesure. Les difficultés que le calcul des dommages-intérêts présente ne dispensent pas le tribunal de l’obligation d’y procéder du mieux qu’il peut. Il a le droit de déduire des actes accomplis par les parties, leurs résultats probables. S’il ne peut pas calculer avec exactitude les dommages-intérêts, il doit s’en tenir à l’estimation la plus raisonnable.

[59]  Un examen des cas antérieurs portant sur la dépréciation de l’achalandage dans des circonstances où il était difficile de quantifier les dommages-intérêts donne à penser que le montant est généralement modeste :

British Columbia Automobile Assn c OPEIU, Local 378, [2001] 4 WWR 95 (BCSC)

2 500 $

Rose et al. c Interprovincial Brotherhood of Electrical Workers (1984), 1 CPR (3d) 34 (CFPI)

3 500 $

Marc-Aurele c Ducharme (1976), 34 CPR (2d) 155 (CFPI)

3 000 $

Ragdoll

6 0000 $

Teavana Corporation c Teayama Inc, 2014 CF 372

10 0000 $

Maxwell Realty Inc c Omax Realty Ltd, 2016 CF 1122

10 0000 $

Société pour l’expansion des tissus fins c Marimac, Inc (1984), 78 CPR (2d) 112 (C.S. Qué.) (Marimac)

25 000 $

[60]  Les dommages-intérêts accordés dans ces affaires ne visaient pas seulement à reconnaître la dépréciation de l’achalandage. Ils reflétaient également les estimations des tribunaux des dommages-intérêts compensatoires dus aux demandeurs ou des profits obtenus à tort par les défendeurs. Dans deux de décisions susmentionnées, les tribunaux ont accordé 10 000 $ parce que les défendeurs n’étaient pas représentés, et les demandeurs n’avaient pas accès aux documents qui auraient pu permettre une estimation plus précise de leurs dommages-intérêts ou des profits des défendeurs (Clearview Plumbing & Heatings Ltd c Clockwork IP, LLC, 2018 CF 169, au paragraphe 50). Dans la décision Marimac, des dommages-intérêts de 25 000 $ ont été accordés au demandeur sur la base d’une estimation des pertes commerciales encourues par le demandeur en raison des activités de contrefaçon du défendeur.

[61]  En l’espèce, il n’y a aucune preuve directe ou circonstancielle que les activités de Navsun ont eu un impact réel sur les activités commerciales de Hamdard. Les dommages-intérêts auxquels Hamdard a droit ne concernent que la dépréciation de l’achalandage, et devraient se situer au bas de l’échelle. Je fixe donc ces dommages-intérêts à 5 000 $.

[62]  Hamdard demande également des dommages-intérêts punitifs équivalant à deux années de revenus de Navsun (environ 1,5 million de dollars) à titre d’exemple dissuasif pour toute autre personne qui serait tentée d’adopter des comportements semblables. Hamdard soutient que Navsun s’est livrée à un stratagème délibéré pour profiter de l’achalandage d’une institution de bienfaisance pendjabi au détriment d’une population vulnérable, soit les immigrants pendjabi, et que cela devrait choquer le sens de la dignité de la Cour.

[63]  Dans l’arrêt Bauer Hockey Corp c Sport Maska inc. (Reebok-CCM Hockey), 2014 CAF 158, la Cour d’appel fédérale a déclaré ce qui suit au sujet de la disponibilité de dommages-intérêts punitifs dans le cadre d’actions en contrefaçon de marque de commerce :

[26] Les dommages-intérêts punitifs « sont vraiment l’exception et non la règle » et il faut y recourir « uniquement dans les cas exceptionnels et faire alors preuve de modération ». Les dommages de cette nature ne doivent être accordés que lorsqu’il ressort des éléments de preuve qu’il y a eu conduite abusive, malveillante, arbitraire ou extrêmement répréhensible, qui déroge nettement aux normes ordinaires de bonne conduite. Il s’agit d’un critère très exigeant, qui restreint considérablement les circonstances donnant ouverture à une condamnation à des dommages‑intérêts punitifs. [Références omises.]

[64]  Je ne suis pas convaincu que la conduite de Navsun en l’espèce ait été suffisamment répréhensible pour justifier l’octroi de dommages-intérêts punitifs.

(4)  Moyens de défense

[65]  Navsun invoque la défense fondée sur la préclusion par convention et licence.

[66]  La préclusion par convention survient lorsque [traduction] a) les parties à un contrat ajoutent une interprétation particulière à l’entente au cours de leurs rapports sur la foi de présuppositions communes de fait ou de droit, que ces présuppositions soient fondées ou non; b) le contrat, tel qu’il est compris par les parties, a régi leurs rapports ultérieurs et c) il serait injuste ou inadmissible que l’une des parties renonce à la convention et s’appuie sur le strict libellé du contrat (Capro Investments Ltd c Tartan Development Corp, [1998] OJ No 1763 (C.J. Ont.), au paragraphe 31).

[67]  Navsun prétend avoir obtenu une licence rétroactive dans le cadre de l’accord de règlement partiel lui permettant d’utiliser son logo original au Canada et aux États-Unis. Selon Navsun, il serait absurde pour Navsun de modifier son logo au Canada et d’accepter de ne pas contester le droit d’auteur de Hamdard dans tout autre ressort, tout en ouvrant la voie à la possibilité d’être poursuivie pour commercialisation trompeuse au Canada.

[68]  Hamdard répond que l’accord de règlement partiel préserve explicitement son droit d’intenter des recours pour toute cause d’action que ce soit, sauf dans les cas prévus dans l’accord. L’accord de règlement partiel visait uniquement l’allégation de Hamdard concernant la violation du droit d’auteur, et n’exclut donc pas le recours à une action fondée sur la commercialisation trompeuse.

[69]  Même si j’accepte le fait que Navsun a obtenu une licence d’utilisation de son logo original au Canada jusqu’au 31 décembre 2009, cette licence est entrée en vigueur le 15 septembre 2009, date de la signature de l’accord par les parties. L’article C stipule clairement que la licence entre en vigueur au moment de [traduction] « la signature » de l’accord de règlement partiel. La licence ne se veut pas rétroactive :

[traduction]

À la signature du présent accord de règlement partiel, les défenderesses bénéficieront d’une licence restreinte, non transférable et sans frais pour utiliser le logo du Daily Ajit. Ladite licence prend fin le 31 décembre 2009 à 23 h 59, heure normale de l’Est.

[70]  L’action intentée par Hamdard fondée sur la commercialisation trompeuse porte sur la période s’échelonnant de juillet 2007, soit trois ans avant le début de la présente action, à janvier 2010, date à laquelle Navsun a adopté son nouveau logo. Navsun peut s’appuyer sur la licence d’utilisation de son logo original accordée dans le cadre de l’accord de règlement partiel seulement pour la période du 15 septembre 2009 au 31 décembre 2009. Cela ne constitue qu’un moyen de défense partiel à l’égard de l’action de Hamdard fondée sur la commercialisation trompeuse pour la période de juillet 2007 au 15 septembre 2009. Étant donné sa courte durée, la licence ne modifierait pas l’évaluation des dommages-intérêts par la Cour.

[71]  J’ai rejeté la demande de Hamdard fondée sur la commercialisation trompeuse pour ce qui est du nouveau logo de Navsun, et il n’est donc pas nécessaire à Navsun de recourir aux défenses de préclusion par convention ou par licence pour ce qui est du nouveau logo. Je remarque toutefois qu’à la suite de l’adoption de son nouveau logo, Navsun a recouvert son logo original apposé sur ses boîtes de journaux canadiens avec des autocollants sur lesquels figure le nouveau logo. Avec le temps, certains autocollants se sont décollés, révélant le logo original. Hamdard a fait parvenir une lettre à Navsun alléguant que cela allait à l’encontre de l’accord de règlement partiel, et a exigé le retrait des logos fautifs. Hamdard a donc interprété l’accord de règlement partiel comme ayant un effet au Canada. De plus, Navsun s’est conformée à l’accord de règlement partiel en modifiant le logo du Ajit Weekly au Canada, ce qui a été approuvé et encouragé par Hamdard en pleine connaissance de cause.

[72]  S’il était nécessaire pour moi de le faire, je conclurais que Hamdard, par ses actions, a appliqué l’accord de règlement partiel à la conduite des parties au Canada. Hamdard a permis à Navsun d’utiliser son nouveau logo au Canada conformément à l’accord de règlement partiel, et ne peut donc s’opposer à l’utilisation du nouveau logo par Navsun conformément à cet accord.

B.  Navsun a-t-elle contrefait la marque de commerce de Hamdard?

[73]  Hamdard a enregistré son logo comme dessin de marque au Canada en 2015. Pour établir une violation en vertu des articles 19 et 20 de la Loi sur les marques de commerce, la Cour doit tenir compte des facteurs non exhaustifs énumérés au paragraphe 6(5). L’analyse est semblable à celle appliquée à l’allégation de commercialisation trompeuse. En effet, les parties s’appuient en grande partie sur les mêmes arguments avancés à l’appui de leurs positions respectives concernant l’allégation de commercialisation trompeuse, malgré la différence dans les dates pertinentes. La date pertinente pour la contrefaçon de la marque de commerce est le 10 juillet 2018, soit la date de l’audience (Alticor Inc. c Nutravite Pharmaceuticals Inc., 2005 CAF 269, au paragraphe 12; Cartier Inc c Cartier Optical Ltd (1988), 20 CPR (3d) 68 (CFPI), au paragraphe 48).

[74]  Pour les raisons expliquées ci-dessus, je ne suis pas convaincu que Hamdard s’est acquittée du fardeau qui lui incombait de démontrer que le nouveau logo de Navsun est semblable à celui de sa marque déposée au point de créer de la confusion. Les noms de domaine Internet des deux publications ne sont pas non plus semblables au point de créer de la confusion. La demande de Hamdard fondée sur la violation de la marque de commerce doit donc être rejetée.

C.  Y a-t-il eu dépréciation de l’achalandage de Hamdard conformément à l’article 22 de la Loi sur les marques de commerce?

[75]  La dépréciation de l’achalandage conformément à l’article 22 de la Loi sur les marques de commerce se limite aux marques déposées. Hamdard n’a pas enregistré son logo comme dessin de marque au Canada avant 2015. Étant donné que je conclus que ni le nouveau logo de Navsun ni son nom de domaine Internet ne ressemblent à la marque déposée de Hamdard au point de créer de la confusion, il ne peut y avoir de dépréciation de l’achalandage conformément à l’article 22.

D.  Navsun a-t-elle violé le droit d’auteur de Hamdard?

[76]  Hamdard allègue que la violation du droit d’auteur ne concerne que le logo original de Navsun. Conformément au paragraphe 1 de l’article B(1) de l’accord de règlement partiel, Navsun a accepté de ne pas contester le droit d’auteur de Hamdard sur le logo qui apparaît dans la cartouche de titre du Daily Ajit.

[77]  Le paragraphe 43.1(1) de la Loi sur le droit d’auteur prévoit un délai de prescription de trois ans à l’égard des demandes visant la violation du droit d’auteur. Hamdard peut donc présenter sa demande visant la violation du droit d’auteur seulement à compter de juillet 2007, soit trois ans avant d’entreprendre la présente action (Hamdard CAF, au paragraphe 10).

[78]  Hamdard soutient que le logo original de Navsun portait atteinte à ses droits d’auteur. La copie peut être présumée en raison de la similitude de la conception (citant Construction Denis Desjardins inc. c Jeanson, 2010 QCCA 1287, au paragraphe 29). Hamdard demande des dommages-intérêts équivalant à ce qu’il en coûte à Navsun pour remplacer les copies légitimes de l’œuvre artistique par le logo contrefait, ce qui, selon ses estimations, représente plus de 2 millions de dollars. Toutefois, cette estimation suppose une violation continue du droit d’auteur de 2007 à aujourd’hui. Hamdard demande également des dommages-intérêts punitifs.

[79]  Les dommages-intérêts pour violation du droit d’auteur sont de nature compensatoire (Loi sur le droit d’auteur, au paragraphe 35(1); Dictionnaires Robert Canada S.C.C. c Librairie du Nomade inc, (1987), 11 FTR 44 (C.F 1re instance ), précité (1990), 37 FTR 240 (note) (CAF)). Bien que j’accepte l’affirmation de Hamdard selon laquelle le logo original de Navsun portait atteinte à son droit d’auteur, rien ne prouve que Hamdard a subi des dommages-intérêts indemnisables en conséquence. L’analyse est semblable à celle effectuée à l’égard de la demande de Hamdard fondée sur la commercialisation trompeuse, dont il a été question plus haut.

[80]  Les dommages ne peuvent être réclamés que pour la période de juillet 2007, soit trois ans avant le début de la présente action, à septembre 2009, date à laquelle l’accord de règlement partiel a été signé. Conformément aux dommages-intérêts symboliques accordés pour la commercialisation trompeuse, je fixerais les dommages-intérêts pour la violation du droit d’auteur à 5 000 $. Encore une fois, je ne suis pas convaincu que la conduite de Navsun dans cette affaire ait été suffisamment répréhensible pour justifier l’octroi de dommages-intérêts punitifs.

E.  Une injonction interlocutoire devrait-elle être accordée?

[81]  Les allégations de commercialisation trompeuse et de violation du droit d’auteur de Hamdard n’ont été établies qu’en ce qui concerne le logo original de Navsun. Les allégations avancées à l’égard du nouveau logo de Navsun n’ont pas été prouvées. Rien ne démontre que Navsun a l’intention de revenir à son logo d’origine. Il n’est donc pas nécessaire d’accorder une injonction interlocutoire en l’espèce. Il n’est pas non plus nécessaire d’examiner les objections de Navsun à une injonction interlocutoire sur la base des règles d’equity de l’acquiescement et du manque de diligence.

F.  Navsun peut-elle poursuivre sa demande reconventionnelle?

[82]  La demande reconventionnelle de Navsun a été rejetée par la Cour dans la décision Hamdard CF. La Cour d’appel fédérale a confirmé le rejet de la demande reconventionnelle dans l’arrêt Hamdard CAF. Bien que la protonotaire Aalto ait accordé à Navsun la permission de déposer une défense modifiée, cela ne pouvait pas avoir pour effet de relancer la demande reconventionnelle de Navsun, compte tenu de son rejet antérieur. La demande reconventionnelle ne fait plus l’objet de la présente instance.

VI.  Conclusion

[83]  Hamdard a établi ses allégations de commercialisation trompeuse et de violation du droit d’auteur, mais seulement en ce qui concerne le logo original de Navsun. En raison des délais de prescription et des moyens de défense, Hamdard ne peut réclamer des dommages-intérêts que pour la période allant de juillet 2007 à septembre 2009. Les dommages-intérêts accordés à Hamdard pour la commercialisation trompeuse et la violation du droit d’auteur sont fixés à 10 000 $.

[84]  Les allégations de Hamdard pour ce qui est de la commercialisation trompeuse, de la contrefaçon de la marque de commerce, de la dépréciation de l’achalandage et de la violation du droit d’auteur relativement au nouveau logo de Navsun sont rejetées.

[85]  La demande reconventionnelle de Navsun a déjà été rejetée par la Cour dans la décision Hamdard CF et ne fait plus l’objet de la présente instance.

[86]  Compte tenu du fait que chacune des parties obtient également gain de cause dans les requêtes en jugement sommaire ou en procès sommaire, aucuns dépens ne seront adjugés à l’une ou l’autre des parties.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. Les défenderesses Navsun Holdings Ltd et 6178235 Canada Inc [collectivement Navsun] sont responsables de la commercialisation trompeuse et de la violation du droit d’auteur pour la période allant de juillet 2007 à septembre 2009 à l’égard du logo qui figure dans la cartouche de titre du journal Daily Ajit publié par la demanderesse, Sadhu Singh Hamdard Trust [Hamdard].

  2. Navsun doit payer à Hamdard des dommages-intérêts de 10 000 $ pour la commercialisation trompeuse et la violation du droit d’auteur.

  3. Les allégations de Hamdard pour ce qui est de la commercialisation trompeuse, de la contrefaçon de la marque de commerce, de la dépréciation de l’achalandage et de la violation du droit d’auteur pour la période de septembre 2009 à ce jour sont rejetées.

  4. Aucuns dépens ne sont accordés à l’une ou l’autre des parties.

« Simon Fothergill »

Juge
COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1127-10

 

INTITULÉ :

SANDHU SINGH HAMDARD TRUST c NAVSUN HOLDINGS LTD., MASTERS WEB INC. ET 6178235 CANADA INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 10 JUILLET 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE FOTHERGILL

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 19 OCTOBRE 2018

 

COMPARUTIONS :

David G. Allsebrook

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Tamara Ramsey

 

POUR LES DÉFENDERESSES

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

LudlowLaw

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Chitiz Pathak LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

POUR LES DÉFENDERESSES

 

 

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