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Date : 20190301


Dossiers : IMM‑2525‑18

IMM‑2526‑18

IMM‑2527‑18

IMM‑2528‑18

Référence : 2019 CF 246

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 1er mars 2019

En présence de madame la juge Strickland

Dossier : IMM‑2525‑18

ENTRE :

SOOMIN MUN

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

Dossier : IMM‑2526‑18

 

 

ET ENTRE :

CHUNAI JANG

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

Dossier : IMM‑2527‑18

ET ENTRE :

JUNGWON MOON

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

ET ENTRE :

Dossier : IMM‑2528‑18

JUNGSEO MOON

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire concernant la décision, datée du 22 mai 2018, par laquelle un délégué du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le délégué du ministre, ou le délégué) a conclu que les demandeurs étaient interdits de territoire pour fausses déclarations, suivant l’alinéa 40(1)c) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR), et a prononcé une mesure d’expulsion à l’encontre de chacun d’eux.

Le contexte

[2]  Les demandeurs, qui forment une famille de quatre personnes, se disaient citoyens de la Corée du Nord. Par une décision datée du 16 novembre 2010, la Section de la protection des réfugiés (la SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada a fait droit à leurs demandes d’asile. En 2011, le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration a présenté une demande afin que la SPR annule sa décision pour cause de présentations erronées, au sens de l’article 109 de la LIPR. Il était allégué que les demandeurs avaient fait des présentations erronées sur des faits importants, relativement à leurs identités, à leurs noms véritables, aux véritables pays dont ils avaient la citoyenneté, à des documents sud-coréens, ainsi qu’au temps qu’ils avaient passé en Corée du Sud. La SPR a conclu que les demandeurs avaient également la citoyenneté de la Corée du Sud, un fait qu’ils n’avaient pas révélé lors de l’audience initiale qu’elle avait tenue. Ainsi, par une décision datée du 11 décembre 2017, la SPR a annulé la décision antérieure du 16 novembre 2010 par laquelle elle avait fait droit à leur demande d’asile.

[3]  En conséquence, les demandeurs ont fait l’objet de rapports d’interdiction de territoire pour fausses déclarations. Le 22 mai 2018, le délégué du ministre a décidé que les demandeurs étaient interdits de territoire au Canada en vertu de l’alinéa 40(1)c) de la LIPR et, conformément à l’article 228 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 (le RIRP), il a pris contre eux des mesures d’expulsion.

La décision faisant l’objet du présent contrôle

[4]  La décision dont il est question en l’espèce est celle datée du 22 mai 2018, par laquelle le délégué du ministre a décidé que les demandeurs étaient interdits de territoire pour fausses déclarations, suivant l’alinéa 40(1)c) de la LIPR, et a pris contre eux des mesures d’expulsion, comme il est précisé dans les examens qu’il a réalisés. Ces derniers indiquent que le délégué a pris en compte les rapports prévus au paragraphe 44(1) ainsi que les preuves justificatives, et que les demandeurs ont admis l’allégation de fausses déclarations. Le délégué s’est dit convaincu, au vu de la preuve, que cette allégation était fondée, et il a conclu de ce fait que les demandeurs étaient des personnes visées à l’alinéa 40(1)c) de la LIPR. Il a également consigné, sous la rubrique [traduction] « Notes supplémentaires », que les avocats des demandeurs avaient fait remarquer qu’il fallait autoriser leurs clients à déposer une demande d’asile à l’encontre de la Corée du Sud car, à ce moment‑là (avant l’examen du délégué), ils ne faisaient pas l’objet d’une mesure de renvoi. Le délégué a conclu que l’alinéa 104(1)d) s’appliquait à leur cas, et des mesures d’expulsion ont été prises.

Les questions en litige

[5]  Les demandeurs soumettent deux questions à trancher dans le cadre du contrôle judiciaire :

  1. Le délégué du ministre a‑t‑il commis une erreur dans le cadre de l’exercice de son pouvoir discrétionnaire en faisant abstraction d’éléments de preuve, en interprétant mal des éléments de preuve et en restreignant indûment son pouvoir discrétionnaire?

  2. Les demandeurs ont-ils été privés de l’application des principes de justice fondamentale et de justice naturelle, et le délégué du ministre a‑t‑il porté atteinte à leurs droits à l’équité procédurale?

[6]  Après avoir passé en revue les documents et les observations, je suis d’avis qu’il serait plus exact de formuler la question comme suit :

Le délégué du ministre a‑t‑il commis une erreur en indiquant que l’alinéa 104(1)d) de la LIPR s’applique et, dans l’affirmative, cela a‑t‑il pour effet d’annuler la décision voulant que les demandeurs soient interdits de territoire pour fausses déclarations en vertu de l’alinéa 40(1)c) de la LIPR, de même que la prise des mesures d’expulsion?

La norme de contrôle applicable

[7]  Les demandeurs font valoir que la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte, car c’est elle qu’il convient d’appliquer pour contrôler les décisions portant sur une question de pure compétence et celles qui sont dépourvues d’équité procédurale ou de justice naturelle (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9). De plus, c’est ce qui ressort de l’application des facteurs énoncés dans l’arrêt Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, compte tenu de l’absence d’une clause privative; de l’expertise restreinte du délégué du ministre lorsqu’il est question de trancher des questions de droit mettant en cause la compétence et des présomptions de conformité avec des traités internationaux, l’objet de l’alinéa 104(1)d) étant lié à la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés, 28 juillet 1951, [1969] R.T. Can no 6; et parce que la nature de la question se rapporte uniquement à la détermination d’une question de droit.

[8]  Le défendeur soutient que la norme de contrôle qui s’applique à toutes les questions dont est saisi un délégué du ministre dans le cadre d’une décision fondée sur le paragraphe 44(2) est la norme de la décision raisonnable (Valdez c Canada (Sécurité publique et protection civile), 2016 CF 377, au paragraphe 18; Finta c Canada (Sécurité publique et protection civile), 2012 CF 1127, au paragraphe 31; Iamkhong c Canada (Sécurité publique et protection civile), 2008 CF 1349, aux paragraphes 36 et 37). Le défendeur convient par ailleurs que, dans le cas des questions d’équité procédurale, c’est la norme de la décision correcte qui s’applique (Bisla c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1059, au paragraphe 11).

[9]  En l’espèce, la décision faisant l’objet du contrôle est celle par laquelle le délégué du ministre a conclu que les demandeurs étaient interdits de territoire pour fausses déclarations en vertu de l’alinéa 40(1)c) de la LIPR. Il convient de contrôler cette décision selon la norme de la décision raisonnable (Agapi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 923, au paragraphe 13; Melendez c Canada (Sécurité publique et protection civile), 2016 CF 1363, au paragraphe 11; Li c Canada (Sécurité publique et protection civile), 2017 CF 1151, au paragraphe 15; Discua Melendez c Canada (Sécurité publique et protection civile), 2018 CF 1131, au paragraphe 18).

[10]  Dans la mesure où il se pose une question d’interprétation législative — et, pour les raisons indiquées ci-après, je ne suis pas convaincue que ce soit le cas — la Cour suprême du Canada a décrété que, lorsqu’un tribunal administratif interprète ou applique sa loi constitutive, il existe une présomption réfutable selon laquelle la norme de contrôle qui s’applique à sa décision est celle de la décision raisonnable (Alberta (Information and Privacy Commissioner) c Alberta Teachers’ Association; 2011 CSC 61 [Alberta Teachers], Commission scolaire de Laval c Syndicat de l’enseignement de la région de Laval, 2016 RCS 8, au paragraphe 32; B010 c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 58, au paragraphe 25; Wilson c Colombie-Britannique (Superintendent of Motor Vehicles), 2015 CSC 47, au paragraphe 17; ATCO Gas and Pipelines Ltd. c Alberta (Utilities Commission), 2015 CSC 45, au paragraphe 28; Tervita Corp. c Canada (Commissaire de la concurrence), 2015 CSC 3, au paragraphe 35).

[11]  Enfin, l’insuffisance des motifs ne permet pas à elle seule de casser une décision lors d’un contrôle judiciaire. La Cour suprême du Canada a statué que les motifs devaient être examinés en corrélation avec le résultat, dans le cadre d’un exercice global. Le caractère suffisant des motifs est donc englobé dans l’analyse du caractère raisonnable de la décision dans son ensemble (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, aux paragraphes 14 et 22 [NL Nurses]). Ce n’est que dans les cas où des motifs sont requis, mais n’ont pas été fournis, qu’il peut y avoir un manquement à l’équité procédurale (NL Nurses, au paragraphe 22). La norme de la décision correcte s’applique au contrôle judiciaire des questions d’équité procédurale (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12).

La législation applicable

La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27

Section 4 - Interdictions de territoire

Division 4 – Inadmissibility

 

Fausses déclarations

Misrepresentation

 

40 (1) Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants :

40 (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible for misrepresentation

[…]

c) l’annulation en dernier ressort de la décision ayant accueilli la demande d’asile ou de protection;

(c) on a final determination to vacate a decision to allow their claim for refugee protection or application for protection; or

[…]

Application

Application

(2) Les dispositions suivantes s’appliquent au paragraphe (1) :

(2) The following provisions govern subsection (1):

a) l’interdiction de territoire court pour les cinq ans suivant la décision la constatant en dernier ressort, si le résident permanent ou l’étranger n’est pas au pays, ou suivant l’exécution de la mesure de renvoi;

(a) the permanent resident or the foreign national continues to be inadmissible for misrepresentation for a period of five years following, in the case of a determination outside Canada, a final determination of inadmissibility under subsection (1) or, in the case of a determination in Canada, the date the removal order is enforced; and

b) l’alinéa (1)b) ne s’applique que si le ministre est convaincu que les faits en cause justifient l’interdiction.

(b) paragraph (1)(b) does not apply unless the Minister is satisfied that the facts of the case justify the inadmissibility.

Section 5 - Perte de statut et renvoi

Division 5 – Loss of Status and Removal

Rapport d’interdiction de territoire

Preparation of report

44 (1) S’il estime que le résident permanent ou l’étranger qui se trouve au Canada est interdit de territoire, l’agent peut établir un rapport circonstancié, qu’il transmet au ministre.

44 (1) An officer who is of the opinion that a permanent resident or a foreign national who is in Canada is inadmissible may prepare a report setting out the relevant facts, which report shall be transmitted to the Minister.

Suivi

Referral or removal order

(2) S’il estime le rapport bien fondé, le ministre peut déférer l’affaire à la Section de l’immigration pour enquête, sauf s’il s’agit d’un résident permanent interdit de territoire pour le seul motif qu’il n’a pas respecté l’obligation de résidence ou, dans les circonstances visées par les règlements, d’un étranger; il peut alors prendre une mesure de renvoi.

(2) If the Minister is of the opinion that the report is well-founded, the Minister may refer the report to the Immigration Division for an admissibility hearing, except in the case of a permanent resident who is inadmissible solely on the grounds that they have failed to comply with the residency obligation under section 28 and except, in the circumstances prescribed by the regulations, in the case of a foreign national. In those cases, the Minister may make a removal order.

Partie 2

Part 2

Protection des réfugiés

Refugee Protection

Section 2 - Réfugiés et personnes à protéger

Division 2 – Convention Refugees and Persons in Need of Protection

Demande

Claim

99 (1) La demande d’asile peut être faite à l’étranger ou au Canada.

99 (1) A claim for refugee protection may be made in or outside Canada.

[…]

[…]

Demande faite au Canada

Claim inside Canada

(3) Celle de la personne se trouvant au Canada se fait à l’agent et est régie par la présente partie; toutefois la personne visée par une mesure de renvoi n’est pas admise à la faire.

(3) A claim for refugee protection made by a person inside Canada must be made to an officer, may not be made by a person who is subject to a removal order, and is governed by this Part.

Demande faite au Canada ailleurs qu’à un point d’entrée

Claim made inside Canada — not at port of entry

(3.1) La personne se trouvant au Canada et qui demande l’asile ailleurs qu’à un point d’entrée est tenue de fournir à l’agent, dans les délais prévus par règlement et conformément aux règles de la Commission, les renseignements et documents — y compris ceux qui sont relatifs au fondement de la demande — exigés par ces règles.

(3.1) A person who makes a claim for refugee protection inside Canada other than at a port of entry must provide the officer, within the time limits provided for in the regulations, with the documents and information — including in respect of the basis for the claim — required by the rules of the Board, in accordance with those rules.

Résident permanent

Permanent resident

(4) La demande de résidence permanente faite au Canada par une personne protégée est régie par la partie 1.

(4) An application to become a permanent resident made by a protected person is governed by Part 1.

Irrecevabilité

Ineligibility

101 (1) La demande est irrecevable dans les cas suivants :

101 (1) A claim is ineligible to be referred to the Refugee Protection Division if

a) l’asile a été conféré au demandeur au titre de la présente loi;

(a) refugee protection has been conferred on the claimant under this Act;

b) rejet antérieur de la demande d’asile par la Commission;

(b) a claim for refugee protection by the claimant has been rejected by the Board;

c) décision prononçant l’irrecevabilité, le désistement ou le retrait d’une demande antérieure;

(c) a prior claim by the claimant was determined to be ineligible to be referred to the Refugee Protection Division, or to have been withdrawn or abandoned;

d) reconnaissance de la qualité de réfugié par un pays vers lequel il peut être renvoyé;

(d) the claimant has been recognized as a Convention refugee by a country other than Canada and can be sent or returned to that country;

e) arrivée, directement ou indirectement, d’un pays désigné par règlement autre que celui dont il a la nationalité ou dans lequel il avait sa résidence habituelle;

(e) the claimant came directly or indirectly to Canada from a country designated by the regulations, other than a country of their nationality or their former habitual residence; or

f) prononcé d’interdiction de territoire pour raison de sécurité ou pour atteinte aux droits humains ou internationaux — exception faite des personnes interdites de territoire au seul titre de l’alinéa 35(1)c) —, grande criminalité ou criminalité organisée.

(f) the claimant has been determined to be inadmissible on grounds of security, violating human or international rights, serious criminality or organized criminality, except for persons who are inadmissible solely on the grounds of paragraph 35(1)(c).

Avis sur la recevabilité de la demande d’asile

Notice of ineligible claim

104 (1) L’agent donne un avis portant, en ce qui touche une demande d’asile dont la Section de protection des réfugiés est saisie ou dans le cas visé à l’alinéa d) dont la Section de protection des réfugiés ou la Section d’appel des réfugiés sont ou ont été saisies, que :

104 (1) An officer may, with respect to a claim that is before the Refugee Protection Division or, in the case of paragraph (d), that is before or has been determined by the Refugee Protection Division or the Refugee Appeal Division, give notice that an officer has determined that

a) il y a eu constat d’irrecevabilité au titre des alinéas 101(1)a) à e);

(a) the claim is ineligible under paragraphs 101(1)(a) to (e);

b) il y a eu constat d’irrecevabilité au seul titre de l’alinéa 101(1)f);

(b) the claim is ineligible under paragraph 101(1)(f);

c) la demande n’étant pas recevable par ailleurs, la recevabilité résulte, directement ou indirectement, de présentations erronées sur un fait important quant à un objet pertinent, ou de réticence sur ce fait;

(c) the claim was referred as a result of directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter and that the claim was not otherwise eligible to be referred to that Division; or

d) la demande n’est pas la première reçue par un agent.

(d) the claim is not the first claim that was received by an officer in respect of the claimant.

Classement et nullité

Termination and nullification

(2) L’avis a pour effet, s’il est donné au titre :

(2) A notice given under the following provisions has the following effects:

a) des alinéas (1)a) à c), de mettre fin à l’affaire en cours devant la Section de protection des réfugiés;

(a) if given under any of paragraphs (1)(a) to (c), it terminates pending proceedings in the Refugee Protection Division respecting the claim; and

b) de l’alinéa (1)d), de mettre fin à l’affaire en cours et d’annuler toute décision ne portant pas sur la demande initiale.

(b) if given under paragraph (1)(d), it terminates proceedings in and nullifies any decision of the Refugee Protection Division or the Refugee Appeal Division respecting a claim other than the first claim.

Demande d’annulation

Vacation of refugee protection

109 (1) La Section de la protection des réfugiés peut, sur demande du ministre, annuler la décision ayant accueilli la demande d’asile résultant, directement ou indirectement, de présentations erronées sur un fait important quant à un objet pertinent, ou de réticence sur ce fait.

109 (1) The Refugee Protection Division may, on application by the Minister, vacate a decision to allow a claim for refugee protection, if it finds that the decision was obtained as a result of directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter.

Rejet de la demande

Rejection of application

(2) Elle peut rejeter la demande si elle estime qu’il reste suffisamment d’éléments de preuve, parmi ceux pris en compte lors de la décision initiale, pour justifier l’asile.

(2) The Refugee Protection Division may reject the application if it is satisfied that other sufficient evidence was considered at the time of the first determination to justify refugee protection.

Effet de la décision

Allowance of application

(3) La décision portant annulation est assimilée au rejet de la demande d’asile, la décision initiale étant dès lors nulle.

(3) If the application is allowed, the claim of the person is deemed to be rejected and the decision that led to the conferral of refugee protection is nullified.

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227

Application du paragraphe 44(2) de la Loi : étrangers

Subsection 44(2) of the Act — foreign nationals

228 (1) Pour l’application du paragraphe 44(2) de la Loi, mais sous réserve des paragraphes (3) et (4), dans le cas où elle ne comporte pas de motif d’interdiction de territoire autre que ceux prévus dans l’une des circonstances ci-après, l’affaire n’est pas déférée à la Section de l’immigration et la mesure de renvoi à prendre est celle indiquée en regard du motif en cause :

228 (1) For the purposes of subsection 44(2) of the Act, and subject to subsections (3) and (4), if a report in respect of a foreign national does not include any grounds of inadmissibility other than those set out in the following circumstances, the report shall not be referred to the Immigration Division and any removal order made shall be

[…]

b) en cas d’interdiction de territoire de l’étranger pour fausses déclarations au titre de l’alinéa 40(1)c) de la Loi, l’expulsion;

(b) if the foreign national is inadmissible under paragraph 40(1)(c) of the Act on grounds of misrepresentation, a deportation order;

Demande d’asile recevable

Eligible claim for refugee protection

(3) Dans le cas d’une demande d’asile jugée recevable ou à l’égard de laquelle il n’a pas été statué sur la recevabilité, la mesure de renvoi à prendre dans les circonstances prévues aux sous-alinéas (1)c)(i), (iii), (iv) ou (v) est l’interdiction de séjour.

(3) If a claim for refugee protection is made and the claim has been determined to be eligible to be referred to the Refugee Protection Division or no determination has been made, a departure order is the applicable removal order in the circumstances set out in any of subparagraphs (1)(c)(i) and (iii) to (v).

Question préliminaire

[12]  Le défendeur a déposé une requête, en vertu des articles 8 et 399 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 (les Règles), en vue de faire modifier l’ordonnance du juge Grammond, datée du 20 novembre 2018, qui l’obligeait à déposer tout autre affidavit supplémentaire avant le 14 janvier 2018. Il souhaite faire changer cette date afin qu’elle corresponde à celle à laquelle un affidavit, souscrit le 8 février 2019 par Hélène Chabot, analyste des litiges au ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration, a été déposé au greffe (l’affidavit de Mme Chabot).

[13]  À l’appui de cette requête, le défendeur a déposé l’affidavit de Baljinder Rehal, parajuriste au ministère de la Justice. Monsieur Rehal y déclare qu’il assiste Me Neeta Logsetty, laquelle est chargée de la présente affaire pour le compte du défendeur, et que cette dernière l’a informé n’avoir pris connaissance des renseignements contenus dans l’affidavit de Mme Chabot que le 1er février 2019. Maître Logsetty a alors entrepris sur-le-champ de soumettre ces renseignements à la Cour au moyen de la requête susmentionnée. Dans son affidavit, joint en tant que pièce à l’affidavit de M. Rehal, Mme Chabot déclare avoir passé en revue les dossiers relatifs aux demandeurs, lesquels dossiers figurent dans le Système mondial de gestion des cas, ainsi que dans le principal système de gestion de l’exécution de la loi de l’Agence des services frontaliers du Canada et dans le Système national de gestion des cas. S’appuyant sur cet examen, elle déclare notamment que, le 16 mars 2018, les demandeurs ont présenté des demandes de résidence permanente au Canada fondées sur des motifs d’ordre humanitaire (demandes CH); que, le 22 mai 2018, des mesures d’expulsion ont été prises contre eux; que, entre le 21 juillet et le 4 septembre 2018, le demandeur, Soomin Mun, a présenté cinq demandes en vue de son retour au Canada depuis la Corée du Sud, lesquelles ont toutes été rejetées; et que les demanderesses, Jungwon Moon et Chunai Jang, ont déposé des demandes d’examen des risques avant renvoi (ERAR) en août 2018, disant craindre d’être persécutées et que, si elles étaient renvoyés en Corée du Sud, elles s’exposeraient à une menace à leur vie ainsi qu’à un risque de traitements ou de peines cruels ou inhumains.

[14]  Le défendeur soutient en outre qu’en l’espèce, les facteurs dont il faut tenir compte pour décider s’il convient d’accorder l’autorisation de déposer un affidavit supplémentaire sont réunis (Pfizer Canada Inc. c Rhoxalpharma Inc., 2004 CF 1685, au paragraphe 16; Fibremann Inc. c Rocky Mountain Spring (Icewater 02) Inc., 2005 CF 977, au paragraphe 12). Plus précisément, les renseignements concernés sont pertinents et déterminants pour la demande de contrôle judiciaire sous‑jacente. Les demandeurs soutiennent, en effet, qu’ils ont droit à ce qu’on examine au Canada les risques de persécution et de préjudice que la Corée du Sud fait peser sur eux. Or, l’affidavit de Mme Chabot révèle que le demandeur Soomin Mun est retourné en Corée du Sud et s’est réclamé de nouveau de la protection de ce pays, et que deux des autres demanderesses ont déposé des demandes d’ERAR. Les renseignements, qui plus est, ne sont pas préjudiciables, car les demandeurs les connaissent déjà; par ailleurs, ils seront utiles à la Cour, et il est dans l’intérêt de la justice de les admettre.

[15]  Les demandeurs s’opposent à la requête. Ils soutiennent que les renseignements relatifs à leur statut d’immigrant et aux mesures prises pour le régulariser au moyen de demandes d’ERAR ou d’une autre manière sont postérieurs à la date à laquelle le délégué a rendu sa décision et qu’ils ne sont pas pertinents pour la présente demande de contrôle judiciaire.

[16]  Étant donné que les parties ont abordé la présente demande de contrôle judiciaire sous des angles très différents pour ce qui est des questions déterminantes et des facteurs pertinents à prendre en compte en l’espèce — dont le fait de savoir si les demandeurs ont été privés d’une évaluation des risques auxquels ils s’exposeraient à leur retour en Corée du Sud —, et compte tenu du fait que le dépôt de la nouvelle preuve par affidavit ne leur causera aucun préjudice, je suis persuadée qu’il convient d’admettre l’affidavit en question, conformément à l’article 312 des Règles (voir Forest Ethics Advocacy Association c Office national de l’énergie, 2014 CAF 88, aux paragraphes 4 à 6).

Le délégué du ministre a-t-il commis une erreur en indiquant que l’alinéa 104(1)d) de la LIPR s’applique et, dans l’affirmative, cela a-t-il pour effet d’annuler la décision voulant que les demandeurs soient interdits de territoire pour fausses déclarations en vertu de l’alinéa 40(1)c) de la LIPR, de même que la prise des mesures d’expulsion?

La position des demandeurs

[17]  Les demandeurs soutiennent qu’aux termes du paragraphe 99(3) de la LIPR, le délégué du ministre était tenu de renvoyer leur demande d’asile à l’encontre de la Corée du Sud à un agent d’immigration pour décision. C’était en effet la première fois qu’ils demandaient l’asile à l’encontre de la Corée du Sud; leur demande antérieure, présentée en 2010, visait plutôt la Corée du Nord. Ils font donc valoir que le délégué du ministre a commis une erreur lorsqu’il a refusé d’exercer son pouvoir discrétionnaire en se fondant uniquement sur l’alinéa 104(1)d) de la LIPR ainsi que sur leur demande d’asile antérieure à l’encontre de la Corée du Nord. Ils invoquent l’ouvrage de Lorne Waldman, intitulé Canadian Immigration and Refugee Law Practice, 2e éd., Markham, LexisNexis, 2017, ch. 9, § 9.55, ainsi que la décision Sivalingam c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 199, aux paragraphes 7, 9 et 10, pour faire valoir qu’on ne peut interdire à un délégué du ministre de renvoyer une affaire en vue d’un examen de l’admissibilité simplement en raison du dépôt d’une demande antérieure, laquelle demande met en cause un pays différent et des circonstances différentes. De plus, il est nécessaire de se reporter à la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés, 28 juillet 1951, [1969] R.T. Can no 6 (la Convention sur les réfugiés) pour interpréter l’alinéa 104(1)d) de la LIPR, qui constitue une disposition d’exclusion (Pushpanathan; Febles c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CSC 68).

[18]  Les demandeurs sont d’avis que l’interprétation la plus logique et la moins restrictive de l’alinéa 104(1)d), et celle qui concorde le plus avec la Convention sur les réfugiés et la Convention de Vienne sur le droit des traités, 23 mai 1969, 1155 RTNU 331, est qu’il est interdit à une personne de déposer une demande d’asile uniquement dans le cas où celle-ci entraînera le dédoublement d’une instance mettant en cause des allégations de persécution comparable à l’encontre du même pays que celui qui était visé par des allégations antérieures. Cette interprétation, soutiennent-ils, s’applique à la situation actuelle, mais ce n’est pas cette approche que le délégué du ministre a suivie. De plus, les décideurs sont tenus d’interpréter l’application d’une loi interne, comme la LIPR, d’une manière conforme aux obligations fondamentales du traité sur lequel cette loi est fondée. Cette présomption s’applique dans les cas où la loi est ambiguë, de sorte qu’il convient de l’interpréter d’une manière qui soit compatible avec les obligations internationales du Canada (National Corn Growers Assn. c Canada (Tribunal des importations), [1990] 2 RCS 1324, au paragraphe 43 [National Corn Growers]). Ils estiment que les paragraphes 1(A)(2) et 1(C)(3) de la Convention sur les réfugiés prévoient qu’un demandeur d’asile peut avoir plus d’une nationalité, et qu’il est donc possible que l’on dépose des demandes doubles et que l’on doive procéder à plus d’une évaluation des risques courus dans un pays. Cependant, ils n’ont jamais eu la possibilité de faire évaluer leurs allégations de persécution relatives à la Corée du Sud, car l’évaluation antérieure de la SPR portait exclusivement sur le risque de persécution en Corée du Nord.

[19]  Les demandeurs font valoir que le simple fait d’avoir déclaré que l’alinéa 104(1)d) s’appliquait, sans expliquer pourquoi, était un manquement à l’obligation d’équité procédurale, car il était nécessaire, dans ces circonstances, de fournir des motifs à l’appui (NL Nurses, au paragraphe 22).

La position du défendeur

[20]  Le défendeur avance que le délégué du ministre, après avoir examiné les rapports prévus à l’article 44 et leur fondement, a conclu de manière raisonnable que les demandeurs étaient interdits de territoire en application de l’alinéa 40(1)c). Cette conclusion ne comporte aucune erreur. De plus, le délégué a également pris en compte le souhait des demandeurs de déposer des demandes d’asile à l’encontre de la Corée du Sud; toutefois, l’alinéa 104(1)d) interdit clairement la présentation de demandes qui ne sont pas la première qu’un demandeur dépose. Le délégué soutient que, en l’espèce, les demandeurs prient simplement la Cour de soupeser de nouveau la preuve (Apolinario c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2016 CF 1287, au paragraphe 46).

[21]  Le défendeur soutient en outre que, conformément aux articles 96 et 97 de la LIPR, la demande d’asile d’un demandeur ne peut viser que le pays dont il a la nationalité et qu’il a déclaré. De surcroît, la SPR ne peut évaluer ou examiner le risque que les demandeurs disent courir en Corée du Sud, parce que ce risque a déjà été examiné par rapport à la Corée du Nord. Le moyen qu’il convient d’utiliser pour examiner les risques allégués en Corée du Sud est l’ERAR, un processus qui vise à respecter l’engagement qu’a pris le Canada à l’égard du principe de non-refoulement prévu par la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, [1987], R.T. Can n36.

[22]  Le défendeur fait valoir que le délégué n’a pas commis d’erreur lorsqu’il a conclu que, aux termes de l’alinéa 104(1)d), les demandes d’asile des demandeurs à l’encontre de la Corée du Sud ne pouvaient être renvoyées à la SPR, et que, au vu de la preuve dont il disposait, sa décision était raisonnable. De plus, le dossier dans son ensemble — qui comporte la décision initiale par laquelle la SPR a fait droit aux demandes d’asile des demandeurs; la décision ultérieure par laquelle la SPR a annulé le statut de réfugié des demandeurs; les rapports prévus à l’article 44; les examens du délégué du ministre; et les mesures d’expulsion — indique les motifs pour lesquels le délégué a rendu sa décision. Le défendeur est d’avis que les demandeurs sont tenus de démontrer que les éventuelles lacunes que présentent les motifs ont porté préjudice à l’exercice du droit d’appel que leur confère la loi, et qu’il ne suffit pas d’affirmer que l’on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’il soit obligatoire de fournir des motifs, mais que ceux-ci n’ont pas été fournis.

Analyse

[23]  Il est tout d’abord nécessaire, selon moi, de situer la décision du délégué dans son contexte.

[24]  Nul ne conteste que, lorsque la SPR a rendu la décision par laquelle elle acceptait les demandeurs à titre de réfugiés au sens de la Convention, les demandes de ces derniers reposaient simplement sur l’allégation selon laquelle ils étaient citoyens de la Corée du Nord et courraient un risque de persécution s’ils étaient renvoyés dans ce pays. Ils n’ont pas révélé qu’ils détenaient aussi la citoyenneté de la Corée du Sud, ni d’autres renseignements importants concernant leurs identités et leur demande.

[25]  Par la suite, le ministre, en application de l’article 109 de la LIPR, a déposé une demande visant à faire annuler, pour fausses déclarations, le statut de réfugié au sens de la Convention des demandeurs. À l’étape de la demande d’annulation, la SPR a fait remarquer qu’à cause des fausses déclarations, elle avait été empêchée, lors de l’audition de la demande d’asile, de prendre en considération tout problème de discrimination auquel les demandeurs risquaient de s’exposer en Corée du Sud. C’est‑à‑dire que, comme les demandeurs n’avaient pas révélé qu’ils étaient citoyens de la Corée du Sud, et qu’ils n’avaient pas sollicité une protection par rapport à ce pays lors de l’audition de la demande d’asile, la SPR n’avait eu aucune raison d’examiner s’ils avaient besoin d’une protection contre la Corée du Sud, et elle ne l’avait pas fait. La SPR a conclu, en appliquant l’article 109, que de fausses déclarations avaient été faites et que, à l’audition de la demande d’asile, on ne lui avait pas présenté assez d’éléments de preuve pour qu’il soit justifié de conférer le statut de réfugié à l’encontre de la Corée du Sud.

[26]  En conséquence, chacun des demandeurs a fait l’objet d’un rapport d’interdiction de territoire prévu au paragraphe 44(1) pour fausses déclarations. Dans ces rapports, l’agent a déclaré que, à son avis, les demandeurs étaient interdits de territoire en vertu de l’alinéa 40(1)c) car, selon la prépondérance des probabilités, il y avait des raisons de croire qu’ils étaient interdits de territoire pour fausses déclarations après annulation en dernier ressort de la demande d’asile. Dans les examens qu’il a effectués, le délégué du ministre indique pour sa part que, conformément au paragraphe 44(1), il a passé en revue les rapports prévus au paragraphe 44(1) et les preuves justificatives dans le but de décider si l’on autoriserait les demandeurs à rester au Canada, ou s’il était nécessaire de prendre contre eux des mesures de renvoi. Il ressort des examens du délégué que les demandeurs ont admis les allégations de fausses déclarations — ce qui s’est soldé par l’annulation de leur statut de réfugié —, et qu’il s’est dit convaincu que ces derniers tombaient sous le coup de l’alinéa 40(1)c). Le même jour, soit le 22 mai 2018, conformément à l’article 228 du RIRP, le délégué a pris les mesures d’expulsion, indiquant dans chacune que c’était parce qu’il était convaincu que les demandeurs étaient interdits de territoire en vertu de l’alinéa 40(1)c) de la LIPR.

[27]  En bref, conformément au paragraphe 44(2), le délégué a conclu que les rapports prévus au paragraphe 44(1) étaient bien fondés, et que les demandeurs étaient, en vertu du paragraphe 40(1), interdits de territoire pour fausses déclarations. En conséquence, en application de l’alinéa 228(1)b) du RIRP, et sans qu’il soit nécessaire de renvoyer les rapports à la Section de l’immigration en vue de la tenue d’une audience d’admissibilité, le délégué a pris les mesures d’expulsion. Je signale que dans l’arrêt Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile) c Cha, 2006 CAF 126 [Cha], la Cour d’appel fédérale a décrété, dans le contexte de l’alinéa 228(1)a) et d’une conclusion d’interdiction de territoire pour cause de criminalité, que le délégué est censé prendre une mesure d’expulsion s’ils est d’avis que le rapport prévu à l’article 44 est bien fondé. C’est‑à‑dire, dans les cas où l’agent d’immigration a conclu à juste titre que toutes les exigences en matière d’interdiction de territoire sont remplies. La Cour d’appel fédérale a ajouté que la mission des agents d’immigration et des délégués ne consiste qu’à rechercher les faits, rien de plus, rien de moins. Toutefois, même si la question de l’interdiction de territoire a été tranchée, un étranger peut néanmoins demander qu’il soit sursis à la mesure de renvoi pour des motifs d’ordre humanitaire ou dans le cadre d’un ERAR (arrêt Cha, aux paragraphes 34, 35 et 48).

[28]  Dans la présente affaire, il est évident et incontesté que les demandeurs ont fait des fausses déclarations qui justifiaient l’annulation de leur statut de réfugié et la prise de mesures d’expulsion. Aucune erreur n’est alléguée ou n’est relevée à cet égard. Et, selon moi, il s’agissait là de la conclusion déterminante du délégué.

[29]  Les demandeurs affirment toutefois avoir fait valoir devant le délégué qu’on devrait leur permettre de présenter une demande d’asile à l’encontre de la Corée du Sud car, à ce moment-là, ils n’étaient pas encore sous le coup d’une mesure de renvoi. Se fondant sur ce qui est consigné dans l’examen du délégué, sous la rubrique [traduction] « Notes supplémentaires », où il est indiqué que l’alinéa 104(1)d) s’applique, ils soutiennent que le délégué a commis une erreur de droit en refusant de les autoriser à présenter une nouvelle demande d’asile.

[30]  En fait, les demandeurs cherchent à dissocier leur demande de dépôt d’une nouvelle demande d’asile à l’encontre de la Corée du Sud de la conclusion tirée au sujet des fausses déclarations et, partant, de la conclusion d’interdiction de territoire et de la prise des mesures d’expulsion. Ils se fondent sur la prémisse que le fait de les renvoyer en Corée du Sud, sans tenir compte des risques qu’ils allèguent maintenant, va à l’encontre des obligations du Canada en matière de protection des réfugiés.

[31]  À mon avis, l’article 96 de la LIPR envisage une situation dans laquelle un demandeur d’asile peut avoir la nationalité de plus d’un pays. Lorsqu’elle examine si un demandeur d’asile est un réfugié au sens de l’article 96, la SPR doit déterminer s’il s’agit d’une personne qui craint avec raison d’être persécutée, pour l’un des motifs énoncés dans la Convention, et qui « se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays ». Rien n’empêchait donc les demandeurs de révéler leur double citoyenneté quand ils ont déposé leurs demandes d’asile et de solliciter une protection à la fois contre la Corée du Nord et contre la Corée du Sud. Les demandeurs d’asile ayant plusieurs nationalités sont tenus de prouver qu’aucun des pays dont ils ont la nationalité ne les protégera (Tretsetsang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CAF 175). Les fausses déclarations que les demandeurs ont faites au moment de présenter leur demande d’asile, en omettant de révéler leur citoyenneté sud-coréenne devant la SPR, signifient qu’ils ne se sont pas acquittés de ce fardeau, comme l’indiquent clairement les motifs d’annulation de la SPR.

[32]  Reste l’alinéa 104(1)d). Si l’article 101 de la LIPR traite des demandes qui sont irrecevables, et donc non renvoyées à la SPR, l’article 104 est essentiellement une disposition exigeant de donner un avis. Aux termes de l’alinéa 104(1)a), un agent peut donner avis qu’une demande est irrecevable pour les raisons suivantes : l’asile a été conféré au demandeur au titre de la LIPR ou rejeté par la SPR; une décision prononçant l’irrecevabilité, le désistement ou le retrait d’une demande antérieure a été prononcée; le demandeur a été reconnu comme ayant la qualité de réfugié par un pays vers lequel il peut être renvoyé; ou le demandeur est arrivé d’un pays désigné par règlement (alinéas 101(1)a) à e)). Aux termes de l’alinéa 104b), un agent peut donner avis que la demande est irrecevable parce que le demandeur a été considéré comme interdit de territoire pour raison de sécurité, pour atteinte aux droits humains, pour grande criminalité ou pour d’autres motifs énoncés (alinéa 101(1)f)). Selon l’alinéa 104c), un agent peut donner avis qu’il a conclu que la recevabilité de la demande résulte, directement ou indirectement, de présentations erronées sur un fait important quant à un objet pertinent, ou de réticence sur ce fait (alinéa 101(1)a). Dans l’une ou l’autre de ces circonstances, l’avis donné sert à mettre fin à n’importe quelle instance en cours de la SPR qui porte sur la demande d’asile.

[33]  Quant à l’alinéa 104(1)d), l’agent peut, en ce qui a trait à une demande d’asile dont la SPR a été saisie, donner avis qu’il ne s’agit pas de la première demande qu’un agent a reçue au sujet du demandeur. Cet avis a pour effet de mettre fin à toute instance devant la SPR et d’annuler toute décision que cette dernière (ou la Section d’appel des réfugiés) a rendue à l’égard d’une demande d’asile, à l’exception d’une décision concernant la demande initiale. C’est donc dire que l’alinéa 104(1)d) confère à un agent le pouvoir discrétionnaire de donner avis qu’il a déterminé qu’il ne s’agit pas de la première demande déposée par les demandeurs. Si l’agent exerce ce pouvoir discrétionnaire, le fait de donner l’avis a pour conséquence de mettre fin à toute deuxième instance ou autre instance nouvelle que les mêmes demandeurs ont soumise à la SPR, ou de la rendre nulle, à l’exception de leur première demande d’asile.

[34]  Dans le dossier qui m’est soumis, rien ne prouve que les demandeurs ont présenté une seconde demande à la SPR en vue de solliciter l’asile à l’encontre de la Corée du Sud après avoir reçu avis de la décision d’annulation du 11 décembre 2017. C’est donc dire qu’en l’absence de toute demande en cours, et étant donné que la première demande des demandeurs avait été annulée pour fausses déclarations, la référence faite par le délégué à la disposition d’avis discrétionnaire de ce l’alinéa 104(1)d) peut paraître inappropriée. Cela dit, ce dernier était au courant que la nouvelle demande projetée par les demandeurs n’était pas leur première. De ce fait, suivant l’alinéa 104(1)d), la nouvelle demande envisagée était futile, si l’avis relatif à la première demande avait été donné.

[35]  Quand ils ont comparu devant moi, les avocats des demandeurs ont fait valoir, si j’ai bien compris, qu’une fois que leurs clients avaient demandé qu’on les autorise à présenter une nouvelle demande à la SPR, le délégué aurait dû ajourner l’instance et conclure, conformément à l’alinéa 101(1)b), que leurs demandes étaient irrecevables et ne pouvaient être déférées à la SPR. Une fois cette conclusion tirée — ce qui, admettent-ils, était inévitable dans les circonstances —, il aurait alors dû reprendre l’audience, les déclarer interdits de territoire pour fausses déclarations en vertu de l’alinéa 40(1)c) et prendre les mesures d’expulsion. Les avocats des demandeurs ont également fait valoir qu’il n’était pas logique que ceux-ci présentent une nouvelle demande après le prononcé de la décision d’annulation, mais avant la conclusion, par le délégué, d’interdiction de territoire pour fausses déclarations, car, à cause de leur demande d’asile antérieure, la SPR ne l’aurait pas admise.

[36]  Étant donné que les demandeurs ont admis les fausses déclarations, qu’ils ne contestent pas le caractère raisonnable de la décision du délégué, à savoir qu’ils sont interdits de territoire pour fausses déclarations, et qu’ils reconnaissent qu’une nouvelle demande, déposée à l’encontre de la Corée du Sud, serait irrecevable devant la SPR, j’ai de la difficulté à souscrire à leur point de vue selon lequel la référence à l’application de l’alinéa 104(1)d) faite dans les notes supplémentaires de l’examen du délégué est un motif suffisant pour conclure que celui-ci a commis une erreur susceptible de contrôle. Et, compte tenu de leurs observations, même si tel était le cas, je ne vois pas en quoi l’issue serait différente à supposer que j’annule la décision pour ce motif et que je la renvoie à un décideur différent. Ordonner la tenue d’une nouvelle audience ne serait qu’un exercice inutile (Cha, au paragraphe 67). À cet égard, dans l’arrêt Maple Lodge Farms Ltd. c Canada (Agence d’inspection des aliments), 2017 CAF 45 [Maple Lodge Farms], la Cour d’appel fédérale a traité du pouvoir discrétionnaire de réparation dont jouissent les tribunaux dans le cadre d’un contrôle judiciaire :

[51]  L’arrêt Mines Alerte Canada encourage les cours de révision à se demander entre autres, à l’étape des mesures de réparation, si l’annulation de la décision du décideur administratif et le renvoi de l’affaire au décideur pour nouvelle décision serviraient une fin pratique ou juridique. Lorsque la cour de révision conclut que le décideur administratif devant rendre une nouvelle décision ne saurait raisonnablement parvenir à un résultat différent, compte tenu des faits et du droit, la décision ne doit pas être annulée : Stemijon Investments Ltd. c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 299, 341 D.L.R. (4th) 710; Robbins c. Canada (Procureur général), 2017 CAF 24. Ce principe bien établi s’accorde avec la nécessité actuelle d’éviter des instances inutiles et d’allouer les ressources décisionnelles à des fins opportunes : Hryniak c. Mauldin, 2014 CSC 7, [2014] 1 R.C.S. 87.

[37]  Dans l’arrêt Maple Lodge Farms, la Cour d’appel fédérale a statué que les conclusions de fait antérieures du tribunal administratif étaient distinctes de l’erreur juridique qu’elle avait commise, et non touchées par cette dernière, et que par conséquent, en appliquant la loi aux faits, ce tribunal ne pouvait tirer raisonnablement qu’une seule conclusion lors du réexamen. La Cour d’appel fédérale a donc exercé son pouvoir discrétionnaire de réparation en se prononçant contre l’annulation de la décision et contre le renvoi de l’affaire en vue d’un nouvel examen.

[38]  Dans le même ordre d’idées, en l’espèce, la conclusion selon laquelle les demandeurs sont interdits de territoire pour fausses déclarations est distincte de toute erreur juridique découlant de la référence faite par le délégué à l’alinéa 104(1)d), et non touchée par cette dernière. À mon avis, lors d’un réexamen de l’affaire, un délégué ne saurait arriver raisonnablement à un résultat différent, au vu des faits et du droit, au moment d’exercer le pouvoir discrétionnaire restreint que lui confère le paragraphe 44(2). Dans ces circonstances, annuler la décision et la renvoyer pour réexamen à un autre délégué ne servirait à rien. J’exerce donc mon pouvoir discrétionnaire, et je refuse de le faire.

[39]  Les demandeurs demandent essentiellement à la Cour de se lancer dans un exercice d’interprétation législative dans des circonstances où cela serait inutile. À cet égard, ils soutiennent qu’en raison de la manière dont le délégué a interprété l’alinéa 104(1)d), à savoir, selon eux, que seules les demandes émanant d’un même pays peuvent être des premières demandes au sens de cette disposition, il est important que la Cour intervienne, non pas pour leur compte, mais pour celui d’autres demandeurs qui se présenteront à la Cour les mains nettes et sans que l’on ait conclu à de fausses déclarations de leur part. Cet argument, selon moi, n’est pas convaincant et, comme je l’ai précisé plus tôt, dans les circonstances de l’espèce, il importe peu qu’on ait fait référence à une éventuelle application de l’alinéa 104(1)d), car il est évident que l’alinéa 101(1)b) fait en sorte qu’une seconde demande des demandeurs soit irrecevable, comme ceux-ci l’admettent d’ailleurs.

[40]  Quant à l’allégation des demandeurs selon laquelle on les aurait privés de la possibilité de faire évaluer les risques auxquels ils seraient exposés s’ils étaient renvoyés en Corée du Sud, et que cela contreviendrait aux obligations du Canada en droit international, la Cour d’appel fédérale a examiné le rôle que remplit l’ERAR dans un tel contexte, dans l’arrêt Raza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CAF 385 :

[9]  Le paragraphe 112(1) de la LIPR contient notamment ce qui suit :

112. (1) La personne se trouvant au Canada […] peut, conformément aux règlements, demander la protection au ministre si elle est visée par une mesure de renvoi ayant pris effet […]

112. (1) A person in Canada […] may, in accordance with the regulations, apply to the Minister for protection if they are subject to a removal order that is in force […]

[10]  L’objet de l’article 112 de la LIPR n’est pas contesté. Il est expliqué de la manière suivante dans le Résumé d’étude d’impact de la réglementation, Gazette du Canada, partie II, volume 136, numéro spécial (14 juin 2002), à la page 274 :

La justification, au niveau des politiques, de l’examen des risques avant renvoi se trouve dans les engagements nationaux et internationaux du Canada en faveur du principe de non‑refoulement. En vertu de ce principe, les demandeurs ne peuvent être renvoyés du Canada dans un pays où ils risqueraient d’être persécutés, torturés, tués ou soumis à des traitements ou peines cruels ou inusités. Ces engagements exigent que les risques soient examinés avant le renvoi.

The policy basis for assessing risk prior to removal is found in Canada’s domestic and international commitments to the principle of non‑refoulement. This principle holds that persons should not be removed from Canada to a country where they would be at risk of persecution, torture, risk to life or risk of cruel and unusual treatment or punishment. Such commitments require that risk be reviewed prior to removal.

[41]  Une telle demande de protection peut être faite même si les demandeurs d’asile sont sous le coup d’une mesure de renvoi, et l’issue d’une demande d’ERAR fructueuse est l’octroi du droit d’asile, à moins que ne se posent des questions d’interdiction de territoire pour grande criminalité ou pour d’autres motifs énoncés au paragraphe 115(3). L’interdiction de territoire pour fausses déclarations n’est pas l’une de ces exceptions prévues. Il n’y a donc aucun fondement à ce que les demandeurs affirment devant moi, à savoir qu’un ERAR offre une forme de protection inférieure. De plus, aucune preuve n’a été déposée à l’appui du point de vue déclaré selon lequel il est plus difficile d’obtenir gain de cause dans le cadre d’un ERAR que dans le cadre d’une demande fondée sur les articles 96 ou 97. Et, là encore, il était loisible aux demandeurs de faire état de leur double citoyenneté quand ils ont comparu devant la SPR et de solliciter une protection à l’encontre à la fois de la Corée du Nord et de la Corée du Sud. Au lieu de cela, ils ont fait de fausses déclarations au sujet de leur statut de citoyen.

[42]  Le fait que l’on ait pris des mesures d’expulsion contre les demandeurs n’empêche donc pas ces derniers de demander un ERAR, dans le cadre duquel les présumés risques auxquels ils seraient exposés à leur retour en Corée du Sud pourront être évalués. L’affidavit que le défendeur a déposé confirme que le demandeur principal est retourné en Corée du Sud pour poursuivre une occasion d’affaires. En agissant de la sorte, il s’est réclamé de la protection de ce pays, quoiqu’il ait tenté aussi, mais sans succès toutefois, de revenir au Canada. De plus, deux des autres demanderesses ont déposé une demande d’ERAR. L’affidavit ne traite pas du statut de la troisième demanderesse, mais les demandeurs n’ont pas non plus déposé d’éléments de preuve qui donneraient à penser qu’on ne lui a pas offert un ERAR. Cela étant, je ne puis non plus conclure que la référence faite par le délégué à l’applicabilité de l’alinéa 104(1)d) a pu priver les demandeurs de la possibilité de faire évaluer les présumés risques à l’égard de la Corée du Sud.

[43]  En conclusion, bien que le délégué du ministre se soit trompé en indiquant que l’alinéa 104(1)d) de la LIPR s’appliquait, cette erreur, dans les circonstances de l’espèce, n’a aucune incidence, car n’importe quelle deuxième demande de protection déposée par les demandeurs à l’encontre de la Corée du Sud était, aux termes de l’alinéa 101(1)b), irrecevable et ne pouvait donc être renvoyée à la SPR. Ces derniers ont également été pleinement informés de la raison pour laquelle le délégué du ministre avait conclu qu’ils étaient interdits de territoire pour fausses déclarations, ce qu’ils ont d’ailleurs admis. Il n’y a pas eu de défaut de fournir des motifs suffisants à l’appui de cette décision. De plus, il est possible d’évaluer les risques qu’allèguent les demandeurs à l’égard de la Corée du Sud au moyen de demandes d’ERAR.

Une question certifiée

[44]  Les demandeurs soumettent la question suivante pour certification :

Faut-il considérer que l’alinéa 104(1)d) de la LIPR empêche une personne de déposer une deuxième demande d’asile si celle-ci vise un pays de persécution différent qui n’a pas été mentionné auparavant, tout en tenant compte des obligations qu’imposent au Canada le droit international et la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés?

[45]  Le défendeur s’oppose à la question proposée, car celle-ci, selon lui, n’est pas déterminante quant à l’issue de l’affaire ni pertinente à l’égard des circonstances factuelles de cette dernière.

[46]  Dans l’arrêt Lunyamila c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2018 CAF 22, la Cour d’appel a passé en revue les critères relatifs à la certification d’une question proposée :

[46]  La Cour a récemment réitéré, dans l’arrêt Lewis c. Canada (Sécurité publique et Protection civile) 2017 CAF 130, au paragraphe 36, les critères de certification. La question doit être déterminante quant à l’issue de l’appel, transcender les intérêts des parties au litige et porter sur des questions ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale. Cela signifie que la question doit avoir été examinée par la Cour fédérale et elle doit découler de l’affaire elle‑même, et non simplement de la façon dont la Cour fédérale a statué sur la demande. Un point qui n’a pas à être tranché ne peut soulever une question dûment certifiée (arrêt Lai c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2015 CAF 21, 29 Imm. L.R. (4th) 211, au paragraphe 10). Il en est de même pour une question qui est de la nature d’un renvoi ou dont la réponse dépend des faits qui sont uniques à l’affaire (arrêt Mudrak c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CAF 178, 485 N.R. 186, aux paragraphes 15 et 35).

[47]  En l’espèce, l’interprétation de l’alinéa 104(1)d) de la LIPR est un point qu’il n’est pas nécessaire de trancher et, de ce fait, elle ne saurait justifier la certification d’une question.


JUGEMENT dans les dossiers IMM‑2525‑18, IMM‑ 2526‑18, IMM‑ 2527‑18 et IMM‑ 2528‑18

LA COUR ORDONNE que :

  1. La requête du défendeur en vue de faire admettre l’affidavit d’Hélène Chabot, souscrit le 8 février 2019, est accueillie;

  2. La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée;

  3. La question que proposent les demandeurs n’est pas certifiée;

  4. Une copie des présents motifs sera versée dans les dossiers IMM‑2526‑18, IMM‑2527‑18 et IMM‑2528‑18.

« Cecily Y. Strickland »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 4e jour de juin 2019.

Julie‑Marie Bissonnette, traductrice agréée


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AUX DOSSIERS


DOSSIERS :

IMM‑2525‑18

IMM‑2526‑18

IMM‑2527‑18

IMM‑2528‑18

INTITULÉS :

SOOMIN MUN c MCI,

CHUNAI JANG c MCI,

JUNGWON MOON c MCI et

JUNGSEO MOON c MCI

LIEU DE L’AUDIENCE :

toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 18 FÉVRIER 2019

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE STRICKLAND

DATE DES MOTIFS :

LE 1er MARS 2019

COMPARUTIONS :

Donald Greenbaum

Bryant Greenbaum

 

POUR LES DEMANDEURS

Neeta Logsetty

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AUX DOSSIERS :

Donald Greenbaum

Bryant Greenbaum

North York (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

Ministère de la Justice

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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