Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20190305


Dossier : IMM‑2361‑18

Référence : 2019 CF 266

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 5 mars 2019

En présence de madame la juge McVeigh

ENTRE :

YUSUF OMAR MOHAMED

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Introduction

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par la Section de la protection des réfugiés (la SPR), qui a rejeté la demande d’asile de Yusuf Omar Mohamed (le demandeur).

[2]  La SPR n’était pas convaincue que le demandeur craignait avec raison d’être persécuté. Comme le commissaire de la SPR n’a pas jugé crédibles ses allégations d’appartenance à un clan minoritaire persécuté (le clan Madhiban), il a conclu que le demandeur n’était pas une personne à protéger.

II.  Le contexte

[3]  Le demandeur est né à Mogadiscio, en Somalie, le 1er février 1970. Il allègue que, en 1991 ou vers cette année‑là, dans le contexte de la guerre civile, il a été atteint d’une balle à la jambe droite tirée par des miliciens appartenant au clan Hawiye, puissant clan majoritaire en Somalie. Il a pu s’enfuir et gagner un camp de réfugiés au Kenya où il a vécu avec d’autres membres de sa famille pendant plus d’une décennie.

[4]  Il prétend être membre de la tribu Madhiban. Cette tribu (aussi connue comme tribu Midgaan, Gabooye ou Gaboye) appartient à une « caste inférieure » opprimée en Somalie. Elle a longtemps été victime de discrimination et privée d’une pléthore de possibilités économiques et sociales.

[5]  En 1993 ou vers cette année‑là, le demandeur a épousé Saynab Hussein Arale au Kenya. Il l’avait connue en Somalie et se trouvait dans le même camp de réfugiés qu’elle. Celle‑ci est allée aux États‑Unis avant lui et y a rencontré une autre personne, si bien que, à l’arrivée du demandeur en sol américain, ils se sont séparés. Son ex‑épouse a contredit ses propos en indiquant qu’ils s’étaient mariés à Mogadiscio en 1993. Le demandeur a expliqué cette contradiction en disant qu’elle avait inventé ce récit pour éviter de lui verser de l’argent pendant leur divorce.

[6]  À l’audience, il a été précisé que le demandeur a cinq enfants qui sont citoyens américains au Minnesota, et trois autres dans la vingtaine, issus d’un premier mariage, dont le nom ne figure pas dans le formulaire Fondement de la demande d’asile. Ces trois derniers enfants ont vécu en Somalie de 2005 à 2017, mais ils demeurent aujourd’hui au Soudan.

[7]  En 2004 ou vers cette année‑là, le demandeur s’est vu accorder un statut d’asile dérivé aux États‑Unis, c’est‑à‑dire en tant que conjoint à charge de son épouse, Saynab Hussein Arale. Il a divorcé de celle‑ci le 13 mai 2005. Du fait de ce divorce, il était inadmissible à une modification du statut de réfugié, ce qui lui a été confirmé par une lettre des services américains de la citoyenneté et de l’immigration le 11 août 2010. Après son divorce, il a continué à séjourner aux États‑Unis sans statut juridique clair.

[8]  Il a assuré sa subsistance aux États‑Unis comme conducteur de limousine. Il a dit avoir surtout demeuré à Minneapolis, mais l’entreprise pour laquelle il travaillait exerçait son activité tant dans l’État de Washington qu’à Minneapolis. Le permis de conduire du demandeur avait été délivré par l’État de Washington.

[9]  Le demandeur a dit être en communication avec sa mère ainsi que ses frères et sœurs au Kenya, de même qu’avec un frère qui est à Washington. Sa mère vit à présent au Kenya, mais avait demeuré à Mogadiscio, puis en Suisse pendant dix ans avant de retourner en Somalie, pour finalement gagner le Kenya.

[10]  En 2017 ou vers cette année‑là, le demandeur a entendu dire que l’administration de Donald Trump révoquait le statut d’autres Somaliens, ce qui l’a amené à décider de faire une demande de statut de réfugié au Canada.

[11]  Le ou vers le 12 mars 2017, il s’est rendu à la frontière et est arrivé au Canada au point d’entrée d’Emerson, pour demander l’asile. Il a produit sa demande le ou vers le 13 mars 2017. Il a confirmé avoir un neveu au Canada, Yasin Ahmed Osman, qui est citoyen canadien. Ainsi, il répondait à un des critères d’exception de l’Entente sur les tiers pays sûrs.

[12]  Le 17 août 2018, un tribunal de la SPR a été convoqué en vue d’entendre la demande d’asile du demandeur. Le demandeur était représenté à l’audience. Il avait un interprète et a ainsi répondu tant en anglais qu’en somali.

[13]  À la fin de l’audience, le commissaire de la SPR a dit vouloir faire une pause et voir s’il pouvait rendre une décision de vive voix. Environ une demi‑heure après la conclusion du témoignage, le commissaire de la SPR a rendu de vive voix la décision défavorable contestée.

[14]  Il reste que, comme le demandeur a un statut particulier (en tant qu’étranger qui a présenté une demande au Canada, en provenance d’un pays signataire de l’Entente sur les tiers pays sûrs), il ne peut interjeter appel de la décision défavorable de la SPR auprès de la Section d’appel des réfugiés (la SAR), aux termes de l’alinéa 110(2)d) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR). Cet alinéa interdit expressément au demandeur tout contrôle de la décision de la SPR par la SAR.

[15]  Je rejetterai la présente demande pour les motifs qui suivent.

III.  La question en litige

[16]  La question en litige est la suivante :

  1. Le commissaire de la SPR est‑il parvenu à une conclusion déraisonnable ou inéquitable sur le plan de la procédure?

IV.  La norme de contrôle

[17]  Les questions mixtes de droit et de fait doivent faire l’objet d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, et la question d’interprétation législative doit également être soupesée selon cette norme. Quant à la question relative à l’équité procédurale, elle fera l’objet d’un contrôle selon la norme de la décision correcte, conformément à l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9.

V.  Analyse

[18]  Le demandeur a fait valoir que la décision contestée comportait trois erreurs susceptibles de contrôle :

  • son premier argument est que le commissaire de la SPR a commis une erreur en concluant qu’une [traduction] « corroboration » était nécessaire, de sorte que la décision est viciée du fait qu’elle était fondée sur l’absence de corroboration, et non le manque de cohérence;
  • un deuxième argument est que les documents sur les conditions dans le pays sur lesquels s’appuie le commissaire de la SPR ne correspondent pas au profil présenté par le demandeur, puisque la preuve documentaire porte sur le Somaliland, et non sur la Somalie;
  • la troisième erreur avancée à l’audience est le fait que le commissaire de la SPR a immédiatement rendu une décision de vive voix (au lieu de prendre l’affaire en délibéré). C’était l’indice, selon le demandeur, que le commissaire s’en est remis à la preuve documentaire relative au Somaliland et qu’il s’est mépris en déclarant que le demandeur avait un droit d’appel et qu’il pourrait compléter sa demande dans le cadre d’un appel, alors qu’en fait, il n’y avait pas de droit d’appel. D’après le demandeur, ces erreurs ne se seraient probablement pas produites si le décideur avait pris l’affaire en délibéré.

[19]  J’estime qu’un grand nombre des questions soulevées par le demandeur comportent des sous‑questions et se chevauchent; je vais donc les aborder sous des rubriques pouvant être considérées comme des sujets de préoccupation.

[20]  De plus, les avocats ont indiqué qu’ils s’en tenaient à leurs arguments avancés par écrit, bien que ceux‑ci n’aient pas été plaidés à l’audience. En examinant le reste des arguments, je n’en vois aucun qui serait à retenir.

A.  Le commissaire de la SPR est‑il parvenu à une conclusion déraisonnable ou inéquitable sur le plan de la procédure?

[21]  Le commissaire de la SPR n’a pas acquis la conviction qu’une preuve crédible permettait de conclure à une [traduction] « possibilité sérieuse » que le demandeur soit persécuté pour un motif prévu par la Convention. Il n’était pas convaincu non plus, selon la prépondérance des probabilités, qu’il existait des motifs sérieux de croire qu’il serait victime de torture ou qu’il risquerait de perdre la vie ou encore d’être soumis à des traitements ou peines cruels et inusités s’il était expulsé vers la Somalie.

(1)  L’emploi du terme [traduction] « corroboration »

[22]  Selon le demandeur, le commissaire de la SPR n’a pas bien compris la présomption de crédibilité. Il a fait valoir que l’absence de preuve corroborante dans l’information sur les conditions dans le pays ne peut servir à réfuter la présomption de crédibilité. Il concède que le commissaire a fait observer qu’il se devait de présumer que le demandeur était crédible, mais il fait valoir que la présomption de crédibilité signifie qu’une preuve objective et une corroboration ne sont pas nécessaires. Cette présomption ne peut, de l’avis du demandeur, être réfutée par l’absence de preuve objective ou de corroboration (Dayebga c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 842 [Dayebga]; Ortega Ayala c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 611 [Ayala]).

[23]  Dans son mémoire en réponse, le demandeur renvoie au paragraphe 12 de la décision où le commissaire de la SPR a déclaré ce qui suit : [traduction] « Et donc, je ne peux voir de corroboration dans la preuve documentaire relative à […] » Il fait valoir que la phrase démontre clairement que le commissaire exigeait à tort une preuve corroborante et, de plus, du fait que le commissaire a commencé par [traduction] « [e]t donc », la phrase est l’indice que la conclusion est fondée sur l’absence d’une telle preuve.

[24]  Le demandeur y voit une contradiction directe avec l’approche de la juge Mactavish dans la décision Cao c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 694 (Cao), et celle du juge Muldoon dans Valtchev c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 776 (Valtchev). Selon l’appréciation du demandeur, les décisions Cao et Valtchev appuient la proposition selon laquelle il ne peut y avoir contradiction entre le témoignage du demandeur et l’information sur les conditions dans le pays que si cette dernière exclut la possibilité que les événements se soient produits de la manière décrite par le demandeur.

[25]  Comme je l’ai déjà mentionné, je ne souscris pas aux observations du demandeur, en général, quant à la question de la « preuve corroborante » par opposition à la « preuve contradictoire ». Le décideur a pleinement apprécié la présomption de crédibilité du témoignage sous serment en se fondant sur la preuve dont il disposait. Lorsque le demandeur a été prié de dire si, à son avis, le commissaire de la SPR s’était simplement mal exprimé, il a fait valoir que, si tel était le cas, il aurait corrigé ses propos en recevant la transcription de sa décision de vive voix. Toutefois, comme il ne l’a pas fait, cela démontre, selon le demandeur, que l’emploi du terme était délibéré.

[26]  Je conviens avec le défendeur que, lorsqu’elle est lue dans son ensemble, la décision met dûment l’accent sur la preuve contradictoire du demandeur en relation avec l’information sur les conditions dans le pays.

[27]  Le commissaire de la SPR a conclu que le demandeur manquait de crédibilité pour les motifs suivants :

  • i) Il a conclu de façon très critique au manque de crédibilité de l’allégation faite par le demandeur d’appartenir au clan minoritaire opprimé Madhiban. Le décideur a jugé que les membres de groupes minoritaires Madhiban n’auraient probablement pas pu fréquenter l’école et que la famille du demandeur jouissait de privilèges (y compris la possession de terres et de bétail) normalement inaccessibles aux membres du clan Madhiban. Le décideur a fondé cette conclusion sur la documentation dont il disposait concernant les conditions dans le pays;

  • ii) Le commissaire de la SPR a conclu que la lettre produite par la Fondation Loyan (et présentée pour confirmer l’identité du demandeur et son appartenance au groupe minoritaire Madhiban) n’était pas compatible avec ce qu’avait déclaré le demandeur. Le commissaire a constaté que la lettre portait la signature d’une personne autre que celle qui avait reçu le demandeur en entrevue selon celui‑ci. Cela démontre qu’un processus approprié n’a pas été suivi et que des conclusions ont ainsi été tirées par la Fondation Loyan sans fondement adéquat;

  • iii) Le commissaire de la SPR a tiré une inférence défavorable de l’omission par le demandeur d’un certain nombre de faits importants. D’abord, il a conclu que le demandeur avait menti concernant l’intérêt supérieur de l’enfant, en taisant l’existence d’autres de ses enfants. Il a rejeté l’explication du demandeur selon laquelle il n’avait pas parlé de ses autres enfants, parce que son ex‑épouse lui avait dit qu’il n’aurait rien à voir avec ceux‑ci. Le commissaire a aussi tiré une inférence défavorable quant à la crédibilité, du fait que le demandeur n’ait pas documenté sa résidence dans l’État de Washington dans son formulaire de l’annexe A (malgré le fait qu’il avait fourni des documents d’identité de cet État);

  • iv) Le commissaire de la SPR a conclu que, malgré un rapport médical soulignant une cicatrisation qui était compatible avec une blessure antérieure par balle, ce document n’établissait pas qui avait tiré sur le demandeur, quelles avaient été les circonstances de ce tir et s’il existait un risque pour l’avenir.

[28]  Je reconnais que le commissaire de la SPR emploie bel et bien le terme [traduction] « corroboration » à la page 6 en se référant à la preuve documentaire dont il dispose, mais je conclus que l’emploi de ce terme n’a aucune incidence sur sa décision, puisqu’il fait clairement observer ce qui suit [traduction] : « Et, réellement, la conclusion que je tire aujourd’hui ne découle pas tant de questions d’incohérence ou de contradiction interne dans le propre témoignage du demandeur d’asile. Elle réside réellement dans les différences que j’ai relevées entre son témoignage et la documentation objective sur le pays à propos du clan Madhiban. »

[29]  La conclusion de manque de crédibilité était fondée sur des incohérences, et non sur une absence de corroboration, comme il a déjà été démontré. Par conséquent, je conclus que le fait que le commissaire s’est mal exprimé dans la décision rendue de vive voix était exactement cela, une mauvaise expression, et que le fond de la décision confirme qu’il n’y avait pas d’erreur susceptible de contrôle. Je conclus, en examinant la décision, que le commissaire de la SPR, bien qu’il ait employé le terme [traduction] « corroboration », a relevé dans la demande d’asile des incohérences qui l’ont amené à conclure aux conclusions quant à la crédibilité.

(2)  La non‑appartenance au clan Madhiban

[30]  Le commissaire de la SPR s’est étendu sur les motifs pour lesquels il jugeait que le demandeur n’était pas membre du clan Madhiban. Il a fait observer ce qui suit :

  • le père du demandeur était un militaire;
  • son père (le grand‑père du demandeur) gardait des chameaux (plus ou moins chaque année, les propriétaires lui faisaient don d’un chameau);
  • sa famille était propriétaire d’une maison;
  • le demandeur fréquentait l’école.

[31]  Le témoignage du demandeur ne concordait pas avec ce que décrit la documentation sur les conditions dans le pays comme étant les caractéristiques socioéconomiques du clan Madhiban. Je conviens avec le demandeur que quelqu’un pouvait être membre de ce clan sans présenter tous les éléments du profil qu’énumère la documentation sur les conditions dans le pays. Il lui revenait d’expliquer au commissaire en quoi les facteurs « généraux » énumérés étaient inapplicables dans son cas.

[32]  Le commissaire de la SPR a jugé que le demandeur n’avait fourni ni explication ni preuve crédible quant à la raison pour laquelle il avait pu fréquenter l’école et, en l’espèce, deux écoles publiques distinctes, alors que la preuve documentaire indiquait que le clan ne pouvait aller à l’école. Une autre incohérence était que son père était propriétaire d’une maison, alors que la documentation sur les conditions dans le pays mentionne que les membres du clan Madhiban ne peuvent accéder à la propriété.

[33]  Il incombe au demandeur de fournir des éléments de preuve. Le commissaire de la SPR ne pouvait accepter ce que le demandeur présentait parce que le cartable national de documentation [traduction] « indiqu[ait] que ces choses n’étaient tout simplement pas accessibles au clan Madhiban et qu’il n’en disposait pas en Somalie ». Le commissaire a ajouté ne pas voir [traduction] « […] les éléments de preuve du genre de scénario avant et après que le demandeur d’asile a proposé […] », puis il a décrit la preuve plus en détail. Le demandeur a également fait valoir que le commissaire avait commis une erreur en supposant que tout le monde devait suivre le modèle courant. La preuve est énoncée aux paragraphes 41 à 43, puisqu’elle a trait à une autre question soulevée par le demandeur et qu’elle la chevauche.

[34]  Je remarque que le commissaire de la SPR n’a pas rendu sa décision en se fondant sur un seul facteur qui n’était pas satisfait; il a plutôt indiqué que plusieurs facteurs ne l’avaient pas été. Je ne vois aucune erreur dans l’appréciation qu’il fait selon laquelle le demandeur n’appartient probablement pas au clan Madhiban.

(3)  La Somalie ou le Somaliland

[35]  Le commissaire de la SPR a jugé que le demandeur ne s’exposait vraisemblablement pas à des risques s’il retournait en Somalie, et ce, pour les raisons suivantes :

  • sa mère et d’autres membres de sa famille ont séjourné ces dernières années en Somalie pendant de longues périodes, et rien ne prouve qu’ils aient été ciblés, bien qu’ils aient passé beaucoup de temps dans des [traduction] « pays occidentaux »;
  • la documentation sur les conditions dans le pays démontre l’existence d’un risque généralisé, mais non spécifique, pour le demandeur à cause d’Al‑Shabaab ou de la situation de rapatrié.

[36]  Le demandeur soutient que le commissaire de la SPR a fait une lecture incorrecte de l’information sur la situation dans le pays pour en arriver à la conclusion susmentionnée. Le demandeur fait valoir qu’une erreur susceptible de contrôle judiciaire a été commise lorsque le commissaire de la SPR s’est appuyé sur des documents provenant de la Commission nationale des droits de la personne du Somaliland et les a invoqués, plutôt que de s’appuyer sur la preuve documentaire concernant la Somalie.

[37]  Le demandeur fait valoir que le commissaire de la SPR s’appuie sur des rapports spécifiques au Somaliland, qui n’est pas la Somalie. Le demandeur affirme que le Somaliland fonctionne comme un pays en tant que tel et qu’il était donc déraisonnable de s’appuyer sur une preuve documentaire faisant référence au Somaliland. Selon la position du demandeur, le commissaire de la SPR n’a pas accordé au demandeur l’équité procédurale appropriée en rendant sa décision de vive voix. Le demandeur prétend que, si le commissaire de la SPR avait pris son temps, qu’il avait relu tout le dossier après l’audience et qu’il n’avait pas rendu de décision de vive voix, il lui serait apparu évident qu’il ne pouvait pas s’appuyer sur la preuve documentaire concernant le Somaliland, alors que le demandeur était de la Somalie.

[38]  Selon mon appréciation, tout d’abord, le Somaliland n’est pas un pays reconnu. À l’audience, le demandeur a admis que, bien que le Somaliland puisse fonctionner comme un pays, le droit international ne le reconnaissait pas en tant que pays. De toute évidence, la preuve documentaire est liée à l’ensemble de la Somalie, bien que certains éléments de preuve traitent des différents territoires, dont le Somaliland.

[39]  Le document dont il est question dans la décision est la réponse à la demande d’information (RDI) 13:13 (la RDI). La RDI confirme que la tribu Gabooye dont le demandeur prétend faire partie se trouve au Somaliland, de même que dans d’autres territoires de la Somalie. La RDI fait état de la tribu Gabooye à l’échelle de la Somalie; il semble que le fait de traiter la tribu comme étant présente dans toute la Somalie, dont le Somaliland, revienne relativement à dire, à quelques nuances près, qu’elle est présente dans tous les territoires.

[40]  Le fait que le commissaire de la SPR s’en soit remis à la RDI, qui s’est à son tour appuyée sur un rapport précis tiré du rapport de la Commission nationale des droits de la personne du Somaliland, ne constitue pas une erreur. Il ne s’agit pas d’une erreur, puisque le clan est répandu dans toute la région et que le rapport fait état de différences mineures et de similitudes de traitement partout en Somalie. Rien de ce que le demandeur a présenté comme profil de risque ne souligne la moindre différence entre le fait d’être du clan Madhiban au Somaliland ou en Somalie. Voici ce que mentionne la RDI :

[traduction]

Selon le secrétaire de l’Organisation Gabooye, les membres de la tribu Gabooye se trouvent principalement dans le Nord de la Somalie [au Somaliland], bien que certains habitent à Mogadiscio (6 novembre 2012). Le rapport d’ACCORD indique que les membres de la tribu Gabooye et de ses sous‑groupes se trouvent dans le Nord du pays et sont également [traduction] « disséminés dans le Sud de la Somalie » (15 déc. 2009). Le Groupement pour les droits des minorités mentionne que les groupes professionnels se trouvent partout en Somalie et qu’ils constituent la principale minorité du Somaliland (12 octobre 2010). Toutefois, il fait remarquer qu’en raison des conflits et de la perte des moyens de subsistance traditionnels, de nombreuses minorités professionnelles ont également emménagé dans des zones urbaines ou des camps pour personnes déplacées internes (PDI) […] Selon le secrétaire de l’Organisation Gabooye, la plupart des membres de la tribu Gabooye ne sont pas autorisés à fréquenter les mêmes écoles que les autres enfants somaliens (6 novembre 2012). Cette déclaration est corroborée par la Commission nationale des droits de la personne du Somaliland [...]

[41]  En outre, selon la transcription, la conseil n’a pas soulevé au cours de l’audience ce qu’il estime maintenant être une erreur, en ce sens que le commissaire de la SPR s’est appuyé sur la documentation sur les conditions dans le pays relative au Somaliland concernant le clan Madhiban.

(4)  Les conditions dans le pays et l’appartenance au clan Madhiban

[42]  Selon le témoignage du demandeur en guise de réponse à la preuve documentaire, le clan Madhiban possédait historiquement des biens, mais le clan Madhiban ne pouvait faire valoir aucun document juridique à l’appui de la revendication sur ces biens. Le demandeur a indiqué qu’il possède toujours une maison dans le quartier de Hodan, en Somalie, et que des personnes y habitent actuellement, sans, toutefois, que le demandeur reçoive d’argent en contrepartie. Il craignait que, s’il retournait en Somalie, ces personnes puissent présumer qu’il vendrait la maison ou en reprendrait possession, et ils pourraient le tuer pour cette raison.

[43]  Dans la décision, le commissaire de la SPR a soupesé la preuve présentée par le demandeur par rapport à la preuve documentaire :

[traduction]

Lorsque j’examine la documentation qui se trouve dans le cartable national de documentation au sujet du clan Madhiban, je ne vois rien qui indique clairement que la situation qui prévalait auparavant était meilleure que celle qui prévaut actuellement. Selon mon interprétation de l’information dont je dispose au sujet du clan Madhiban, la discrimination et l’exclusion frappant le clan Madhiban font partie de traditions culturelles de longue date en Somalie […]

[…] Je vais vous expliquer cela un peu plus en détail. En ce qui concerne le droit de propriété, comme je l’ai mentionné au demandeur vers la fin, avant la pause, selon la section 13:13, une citation d’un rapport en particulier indique que les castes professionnelles, dont les membres du clan Madhiban font partie ‒ les castes professionnelles se sont traditionnellement vues interdire la propriété de terres et de bétail ainsi que la participation aux affaires locales, à l’économie de marché ou à la politique.

On y décrit la tribu Gabooye, que je prononce probablement mal, dont le clan Madhiban est un sous‑groupe, comme une caste professionnelle définie en fonction de ses professions traditionnelles, soit des cautions des groupes de clans de pasteurs majoritaires. Ainsi, les groupes de clans majoritaires sont ceux qui possèdent le bétail et qui pratiquent traditionnellement l’élevage. Les castes professionnelles, comme le clan Madhiban, n’y sont pas autorisées et sont plutôt limitées aux professions traditionnelles.

On y indique que [traduction] « les membres des clans minoritaires ne peuvent occuper que les emplois les plus indésirables ». Cela provient de la Commission nationale des droits de la personne du Somaliland :

[traduction]

Ils ne peuvent obtenir que des emplois de balayeur de rue, de concierge, de cordonnier, de cireur de chaussures, de forgeron, de potier et de praticien de la circoncision. Ce sont des emplois mal rémunérés, et le revenu qu’ils en tirent ne leur permet pas de mener une existence convenable.

[…]

Voici un autre extrait du même document, section 13.13 :

[traduction]

La plupart des membres de la tribu Gabooye ne sont pas autorisés à fréquenter les mêmes écoles que les autres enfants somaliens. Cette information est corroborée par la Commission nationale des droits de la personne du Somaliland, qui déclare que les enfants en situation minoritaire ne vont pas à l’école, parce qu’ils ne peuvent en assumer les frais et qu’ils craignent d’être maltraités par les autres enfants.

Un autre organisme mentionne également ce qui suit :

[traduction]

La pauvreté ainsi que la discrimination et la ségrégation très répandues empêchent les enfants des minorités d’aller à l’école. Les membres des groupes minoritaires vivent dans des logements ne répondant pas aux normes dans des quartiers pauvres et n’ont pas accès aux installations et aux services sanitaires comme la collecte des ordures ainsi que les toilettes.

[…]

Tout cela est très différent de la description par le demandeur de sa situation familiale qui prévalait jusqu’à ce que lui et les membres de sa famille durent quitter la Somalie en 1991. Encore une fois, il vaut la peine de souligner la citation avec laquelle j’ai débuté mon exposé, à savoir que les castes professionnelles ne sont traditionnellement pas autorisées à posséder de terres. C’est une référence à la tradition. Cela ne veut pas dire que c’est encore le cas à l’heure actuelle, mais, avant, cela pouvait être le cas.

[44]  Le commissaire de la SPR disposait d’éléments de preuve à l’appui de ses conclusions, comme en témoignent les citations de la transcription ci‑dessus. Je n’ai trouvé aucune erreur dans le fait que le commissaire de la SPR se soit appuyé sur la preuve documentaire relative aux Gabooye. De plus, il existait d’autres éléments de preuve documentaire à l’appui de la conclusion selon laquelle le demandeur n’était pas membre du clan Madhiban.

(5)  Le fait que la décision a été rendue de vive voix

[45]  Le demandeur a fait valoir que c’était une erreur de rendre une décision de vive voix dans une telle situation. Je ne suis pas d’accord pour dire, à la lumière de ces faits et d’autres audiences de la SPR, qu’un commissaire de la SPR doit différer sa décision et ne peut rendre une décision de vive voix.

[46]  En fait, il est tout à fait approprié que la SPR rende des décisions de vive voix, et le fait de fournir au demandeur une décision en temps opportun semble répondre à toutes les exigences de la loi et de l’équité procédurale. Dans la décision Soliman c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 162, le juge Noël a fait remarquer au paragraphe 17 que les décisions de vive voix de la RPD n’étaient pas problématiques en soi.

[47]  Au début de l’audience, le commissaire de la SPR a expliqué exactement comment l’instance se déroulerait, notamment que la décision serait rendue à la fin de l’audience si celle‑ci n’était pas longue :

[traduction]

Ainsi, l’audience se déroulera de la façon suivante aujourd’hui : je vous poserai d’abord quelques questions, puis, selon la façon dont les choses se dérouleront, votre conseil voudra peut‑être aussi vous poser des questions, et j’entendrai peut‑être ce qu’elle a à dire à propos de votre cause, tout argument qu’elle souhaite me présenter.

J’espère que nous serons en mesure d’en arriver à une conclusion et que je serai en mesure de vous faire part aujourd’hui même de ma décision et des motifs de ma décision. Toutefois, si l’audience s’étire, je n’aurai peut‑être pas le temps de vous donner ma décision et les motifs de ma décision aujourd’hui, auquel cas je devrai vous les faire parvenir plus tard, par la poste. D’accord?

Voyons alors comment les choses vont se dérouler. Nous ferons une pause au milieu de l’après‑midi, cela est certain; toutefois, si l’un d’entre vous a à quelque moment besoin d’une pause pour quelque raison que ce soit, n’hésitez pas à me le faire savoir, et j’essaierai d’y donner suite.

[48]  À la fin de l’audience, le commissaire de la SPR a déclaré ce qui suit :

[traduction]

J’aimerais maintenant que nous ajournions pendant une demi‑heure. Je voudrais examiner tout ce que j’ai entendu ainsi que ce qui se trouve dans le dossier et voir si je peux en arriver à une décision aujourd’hui, car je sais que vous l’attendez; je ne veux ainsi pas vous faire patienter si je suis en mesure de vous donner une décision aujourd’hui même. Je vais donc consacrer la pause à l’examen de tout le dossier et voir si je peux vous faire part d’une décision et de motifs. Je crois avoir besoin d’environ 25 minutes. Si nous pouvions reprendre un quart d’heure avant l’heure, je devrais, je l’espère, être en mesure de vous faire part de ma décision à ce moment‑là. Merci.

[49]  J’estime que le commissaire de la SPR a fait preuve d’une grande considération et a indiqué qu’il prendrait le temps d’examiner les documents. Je ne vois là aucune iniquité procédurale, et je juge raisonnable le fait que la décision a été rendue de vive voix.

[50]  En outre, lors de l’audience, lorsqu’il en a été question, la conseil du demandeur n’a pas enregistré d’objection ni à ce moment‑là ni après. Je ne souscris pas à l’avis du demandeur voulant que, si le commissaire de la SPR avait pris davantage de temps et n’avait pas rendu de décision de vive voix, il en serait, après mûre réflexion, arrivé à une issue différente.

(6)  L’absence d’appel

[51]  Le demandeur fait valoir que la SPR a commis une erreur déraisonnable en affirmant qu’il disposait d’une option prévue par la loi d’en appeler de la décision.

[52]  Le demandeur a élargi cet argument au fait que la jurisprudence de la Cour suprême et de notre Cour a établi qu’un demandeur qui n’a pas la possibilité d’interjeter appel devrait bénéficier de protections procédurales plus généreuses. Plus particulièrement, le demandeur soutient que le commissaire de la SPR aurait dû différer sa décision.

[53]  Pour étayer son argument, le demandeur se fonde sur certains éléments de jurisprudence. Dans l’arrêt Arsenault c Canada (Procureur général), 2016 CAF 179, le juge Scott, s’exprimant au nom de la Cour, examinait une demande de contrôle judiciaire visant à faire annuler une décision d’un arbitre de la Commission des relations de travail dans la fonction publique. En souscrivant à la thèse des demandeurs dans son jugement, la Cour d’appel a fait remarquer que les demandeurs faisaient référence au principe selon lequel « l’absence d’un droit d’appel entraîne des garanties procédurales plus généreuses » (paragraphe 17).

[54]  Le demandeur admet que la portée de la présentation de nouveaux éléments de preuve dans le cadre d’un contrôle judiciaire est fortement limitée par le paragraphe 110(4) de la LIPR, qui permet de présenter de nouveaux éléments de preuve dans des circonstances très limitées uniquement.

[55]  Étrangement, le demandeur déclare qu’il n’a aucune intention d’ajouter de nouveaux éléments de preuve documentaire. Le demandeur fait plutôt valoir que ce qui précède démontre que le commissaire de la SPR (pour utiliser une expression familière) dormait essentiellement au gaz lorsqu’il a rendu sa décision le jour même de l’audience. Pour reprendre les termes du demandeur, [traduction« [i]l a laissé entendre que, peu importe les erreurs qui étaient commises, le cas échéant, elles pourraient être corrigées en appel ».

[56]  Je ne souscris pas à cette proposition. Comme l’a correctement fait remarquer le défendeur, bien qu’il soit vrai que l’équité procédurale devrait être interprétée de façon généreuse en l’absence de droit d’appel d’une décision et lorsque l’audience peut entraîner des conséquences graves pour le demandeur, le demandeur n’a pas été en mesure d’invoquer quelque précédent que ce soit pour conclure que les demandeurs entendus par la SPR ont le droit de voir la décision mise en délibéré par souci d’équité procédurale. Comme le demandeur ne peut pas établir ce principe et comme il a fait valoir que d’autres éléments de preuve n’auraient pas été présentés à la SAR de toute façon, il n’y a pas eu de manquement identifiable à l’équité procédurale.

[57]  Bien que je sois d’accord avec le demandeur pour dire que le commissaire de la SPR a commis une erreur, l’erreur doit être telle que, si elle n’avait pas été commise, la SPR aurait pu en arriver à une issue différente. Cela reflète la décision dans l’affaire Tran c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 210 (Tran), où le juge Grammond, en citant le paragraphe 24 de la décision Castillo Mendoza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 648, a conclu qu’« [u]ne décision est tout de même raisonnable si elle contient des erreurs qui ne modifieraient pas l’issue » (paragraphe 13 de la décision Tran).

[58]  Il faut examiner les mots exacts de la décision du commissaire de la SPR pour obtenir plus de certitude quant à la question de savoir si son erreur touche au cœur même de l’affaire.

[59]  À la page 1 des motifs donnés de vive voix, le commissaire de la SPR souligne ce qui suit :

[traduction]

Je rejette votre demande et j’en suis désolé. Je vous expliquerai pourquoi. Mais avant d’aborder l’explication, je tiens également à vous rappeler que vous avez le droit d’interjeter appel de ma décision. Par conséquent, la décision que je rends aujourd’hui ne constitue pas l’étape définitive au sujet de votre situation au Canada. Vous pouvez en faire appel : il se peut très bien que j’aie commis une erreur en l’espèce, et peut‑être que la Section d’appel aura une optique différente de celle que j’ai aujourd’hui. Je vous souhaite bonne chance pour la suite. Toutefois, je dois rendre ma décision en me fondant sur l’information dont je dispose et j’expliquerai maintenant comment j’en suis arrivé à cette décision.

[Non souligné dans l’original.]

[60]  À la page 8 de la décision, le commissaire de la SPR souligne ce qui suit :

[traduction]

Par conséquent, ces documents ne font tout simplement pas état d’un changement important dans les circonstances par rapport à la période précédant la guerre civile en Somalie. Et, vous savez, peut‑être que cela peut être modifié au moyen d’une preuve documentaire supplémentaire au niveau de l’appel. Mais je ne dispose pas de cette information aujourd’hui. Je dispose de renseignements qui donnent à penser que, traditionnellement, historiquement et culturellement, les membres du clan Madhiban ont été frappés d’exclusion et de restrictions importantes quant aux types de travail qu’ils pouvaient effectuer et à leur accès à l’éducation, et exclus de la possibilité de posséder des biens. Et cela ne cadre tout simplement pas avec la description que le demandeur a faite de sa situation familiale en Somalie.

[Non souligné dans l’original.]

[61]  Comme le fait remarquer le défendeur, l’ensemble du raisonnement du commissaire de la SPR repose sur la documentation objective de la situation dans le pays et son incohérence par rapport à l’exposé de faits du demandeur quant à sa vie vécue en Somalie par le passé. Le demandeur doit présenter les meilleurs éléments de preuve possible lors de l’audience de la SPR, car, même en cas d’appel, la présentation de nouveaux éléments de preuve est assujettie à des circonstances restreintes (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Singh, [2016] 4 RCF 230, 2016 CAF 96).

[62]  La décision était fondée sur un manque de crédibilité. Une erreur commise par le commissaire de la SPR lorsqu’il explique les mesures pouvant être prises après la décision défavorable de la SPR ne rend pas la décision déraisonnable. En l’espèce, la croyance erronée qu’il y avait possibilité d’en appeler ne rend pas la décision déraisonnable.

[63]  Je rejetterai la présente demande.

[64]  Aucune question n’a été présentée en vue de la certification, et l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑2361‑18

LA COUR STATUE :

  1. que la demande est rejetée;

  2. qu’aucune question n’est certifiée.

« Glennys L. McVeigh »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑2361‑18

 

INTITULÉ :

YUSUF OMAR MOHAMED c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Winnipeg (Manitoba)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 17 dÉcembRE 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE MCVEIGH

 

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :

LE 5 marS 2019

 

COMPARUTIONS :

David Matas

POUR LE DEMANDEUR

David Grohmueller

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

David Matas

Avocat

Winnipeg (Manitoba)

POUR LE DEMANDEUR

Le procureur général du Canada

Winnipeg (Manitoba)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.