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Date : 20190318


Dossier : IMM-4072-16

Référence : 2019 CF 326

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 18 mars 2019

En présence de madame la juge St-Louis

ENTRE :

AYOOB HAJI MOHAMMED ET AIERKEN MAILIKAIMU

demandeurs

et

LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Introduction

[1]  Les demandeurs demandent le contrôle judiciaire de la décision rendue le 11 juillet 2016 par une agente des visas (l’agente) en poste à l’ambassade du Canada à Rome, en Italie. L’agente a rejeté la demande de résidence permanente de M. Ayoob Haji Mohammed parce qu’il existait des motifs raisonnables de croire que celui-ci appartenait au Mouvement islamique du Turkestan oriental (le Mouvement). Par conséquent, M. Mohammed a été déclaré interdit de territoire au titre des alinéas 34(1)c) et f) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi).

[2]  Pour les motifs exposés ci-après, la demande sera accueillie.

II.  Contexte

[3]  En 2009, M. Mohammed, un citoyen chinois d’origine ethnique ouïgour, a rencontré Mme Mailikaimu, une citoyenne canadienne, et, en 2010, il l’a épousée. Le couple vit en Albanie, où M. Mohammed a le statut de résident permanent, avec ses deux enfants canadiens.

[4]  Le 28 avril 2014, avec l’aide d’un avocat canadien, M. Mohammed a présenté une demande de résidence permanente dans la catégorie du regroupement familial, parrainé par son épouse canadienne. Dans sa demande, M. Mohammed a relaté ses antécédents au Pakistan, en Afghanistan, et à Guantanamo Bay, et a souligné que les Américains l’avaient innocenté. La lettre de son avocat qui accompagnait la demande disait expressément que le cas de M. Mohammed était particulier, ce qui expliquait pourquoi il produisait des observations plus exhaustives et que, dans l’éventualité où d’autres questions ou préoccupations se posaient quant à son admissibilité, ils souhaitaient avoir la possibilité d’y répondre.

[5]  Le 2 juillet 2014, la demande de parrainage a été approuvée, et la demande de résidence permanente a été transmise au bureau des visas en vue d’un examen plus approfondi.

[6]  Le 8 décembre 2014, M. Mohammed a été convoqué en entrevue afin que se poursuive le traitement de sa demande. Le courriel de convocation ne mentionnait pas de préoccupations quant à l’interdiction de territoire et ne faisait mention que d’une entrevue de sélection et que des paragraphes 16(1) et 16(1.1) de la Loi. M. Mohammed s’est présenté à son entrevue le 15 janvier 2015 et croyait que le tout s’était bien passé. Il se souvient d’avoir parlé d’un éventail de sujets, dont ses antécédents personnels et sa relation avec son épouse, ses voyages au Pakistan, les événements ayant conduit à son emprisonnement à Guantanamo Bay, le temps qu’il avait passé à cet endroit, son transfert en Albanie, ses opinions politiques, sa connaissance des politiques de la Chine au sujet des Ouïgours et du Mouvement, et le mouvement politique auquel appartiennent d’autres Ouïgours. La Cour n’a reçu aucune note relative à cette entrevue.

[7]  Le 11 mai 2015, en réponse à la demande de conseils de sécurité que lui avait adressée l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC), le Service canadien du renseignement de sécurité (le SCRS) a rédigé un rapport sur M. Mohammed. Le 16 septembre 2015, l’ASFC a produit un rapport d’interdiction de territoire, estimant qu’il y avait des motifs raisonnables de croire que M. Mohammed était interdit de territoire au titre des alinéas 34(1)d) et f) de la Loi.

[8]  L’agente a échangé des courriels avec un analyste des litiges à Ottawa, faisant état de ses préoccupations au sujet de l’interdiction de territoire de M. Mohammed et de la façon idéale d’aborder celles-ci tout en assurant l’équité procédurale (Pièce A dans le contre-interrogatoire de Jennifer Woo tenu le 10 janvier 2019).

[9]  Le 8 février 2016, M. Mohammed a été convoqué à une nouvelle entrevue de sélection visant à poursuivre le traitement de sa demande. Là encore, le courriel renvoyait uniquement aux paragraphes 16(1) et 16(1.1) de la Loi. M. Mohammed s’est présenté à sa seconde entrevue le 8 février 2016. Selon les notes inscrites dans le Système mondial de gestion des cas (le SMGC), divers sujets ont été abordés. Les mémoires du SCRS et de l’ASFC n’ont pas été divulgués à M. Mohammed, et vers la fin de l’entrevue, l’agente a fait savoir à celui-ci qu’elle avait des préoccupations au sujet de son appartenance au Mouvement et qu’elle avait des motifs de croire qu’il était interdit de territoire au titre des alinéas 34(1)d) et f) de la Loi.

[10]  Le 11 juillet 2016, l’agente a rejeté la demande de résidence permanente de M. Mohammed au motif d’une interdiction de territoire pour raisons de sécurité conformément aux alinéas 34(1)c) et f) de la Loi, au lieu des alinéas 34(1)d) et f), mentionnés à la fin de l’entrevue. L’agente a affirmé qu’elle avait des motifs raisonnables de croire que M. Mohammed appartenait au Mouvement, une organisation se livrant au terrorisme.

[11]  Le 4 octobre 2016, au titre de l’article 9 des Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22 (Règles en matière d’immigration), M. Mohammed a reçu les notes relatives à la seconde entrevue versées dans le SMGC, lesquelles révèlent que pendant l’entrevue, l’agente avait montré à M. Mohammed deux articles extraits de sources ouvertes. Le 4 décembre 2017, le juge LeBlanc a ordonné, au titre de l’article 87 de la Loi, la non-divulgation des notes de la première entrevue.

[12]  Le 30 mars 2017, le dossier certifié du tribunal a été reçu et comprenait des versions caviardées des rapports du SCRS et de l’ASFC. Le 12 octobre 2018, le juge LeBlanc confirmait la non-divulgation des renseignements caviardés conformément à l’article 87 de la Loi.

III.  Observations des parties

A.  Les observations de M. Mohammed

[13]  À l’appui de sa demande, M. Mohammed a produit son affidavit, souscrit le 1er février 2018, un affidavit de son ancien avocat, souscrit le 31 janvier 2018, et un affidavit de M. Benjamin Rozon, souscrit le 2 février 2018, et les documents accompagnant sa demande de parrainage, ainsi que des ordonnances rendues précédemment au sujet de la divulgation des documents. M. Mohammed a aussi produit des lettres et des documents provenant de sources ouvertes divulgués au titre du paragraphe 14(2) des Règles en matière d’immigration.

[14]  Dans leur mémoire supplémentaire produit le 14 février 2019, les demandeurs demandent que soit rendue une ordonnance 1) cassant la décision de l’agente, 2) renvoyant l’affaire à un autre agent pour qu’il rende une nouvelle décision, 3) excluant les rapports du SCRS et de l’ASFC du dossier ou, à titre subsidiaire, communiquant les rapports à l’avocat (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Yansane, 2017 CAF 48 au paragraphe 16), 4) déclarant que la première entrevue contrevenait au droit de M. Mohammed conféré par l’alinéa 10b) de la Charte.

[15]  Les demandeurs soutiennent que 1) l’agente a contrevenu à l’obligation d’équité envers M. Mohammed; 2) la conclusion d’interdiction de territoire tirée par l’agente au titre des alinéas 34(1)c) et f) de la Loi n’est pas raisonnable; 3) la première entrevue contrevenait aux droits conférés à M. Mohammed par l’alinéa 10b) de la Charte canadienne des droits et libertés.

[16]  Les demandeurs affirment que, en ce qui concerne les questions se rapportant à l’équité procédurale et au respect de la Charte, la norme de contrôle qui devrait s’appliquer est celle de la décision correcte, et que la décision d’interdiction de territoire rendue par l’agente devrait être examinée selon la norme de la décision raisonnable (Caruth c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 891 au paragraphe 45).

B.  Les observations du ministre

[17]  Le ministre a commencé ses observations en soulignant que les non-citoyens n’ont pas un droit absolu d'entrer ou de demeurer au Canada (Medovarski c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CSC 51 au paragraphe 46). Il soutient que la norme de contrôle qui s’applique est celle de la décision raisonnable, sauf en ce qui concerne les questions d’équité procédurale, auxquelles aucune norme de contrôle n’est appliquée (Suresh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1 au paragraphe 85; Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 aux paragraphes 33 à 56).

[18]  Le ministre soutient que l’agente 1) a rendu une décision raisonnable, 2) n’a pas contrevenu à l’équité procédurale, 3) n’a pas contrevenu à l’alinéa 10b) de la Charte.

[19]  Eu égard à l’équité procédurale, le ministre affirme, premièrement, que les affidavits de M. Mohammed ne sont pas dignes de foi étant donné que, plus tôt dans la procédure, ce dernier a tenté de miner la décision de l’agente en alléguant qu’il y avait eu des problèmes d’interprétation, alors que cela n’était pas le cas.

[20]  Deuxièmement, le ministre prétend que M. Mohammed était au courant des préoccupations quant à l’interdiction de territoire et avait eu la possibilité d’y répondre. Il explique que la lettre d’observations et les pièces jointes produites par l’ancien avocat de M. Mohammed avant la première entrevue, ainsi que le courriel que M. Mohammed a adressé à son avocat après l’entrevue, démontrent que le demandeur et son avocat connaissaient les préoccupations quant à l’interdiction de territoire. De plus, le ministre affirme qu’il serait difficile de faire état de toutes les préoccupations liées à l’interdiction de territoire dans une lettre d’équité procédurale et que M. Mohammed aurait pu produire des observations supplémentaires pendant et après la seconde entrevue. Il soutient que l’omission de M. Mohammed, après la seconde entrevue, de soulever des préoccupations au sujet de l’entrevue ou de faire des observations supplémentaires porte un coup fatal à son argument concernant l’absence d’avertissement. Enfin, le ministre prétend que l’agente n’a commis aucune erreur en faisant état de préoccupations quant à des motifs d’interdiction de territoire, puis en rendant une décision sur la foi de l’un de ces motifs.

[21]  Troisièmement, le ministre affirme que l’agente n’était pas tenue de divulguer les mémoires du SCRS et de l’ASFC pas plus que les deux articles trouvés grâce à Google. Les articles étaient accessibles au public et étaient déjà contenus dans la lettre d’observations et les pièces jointes de l’ancien avocat de M. Mohammed (Azizian c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 379 aux paragraphes 29 et 30). Le ministre ajoute que M. Mohammed a eu la possibilité de prendre une part importante au processus décisionnel (Gebremedhin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 380 aux paragraphes 9 à 16).

[22]  Quatrièmement, le ministre soutient que, même si la Cour accepte que l’équité procédurale n’a pas été respectée, elle devrait quand même refuser de casser la décision au motif qu’une décision défavorable est inévitable (Yassine c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1994), 172 NR 308 (CAF)).

[23]  Cinquièmement, le ministre soutient que l’argument selon lequel il existe une crainte raisonnable de partialité n’est pas fondé. En fait, la préoccupation initiale de l’agente quant à l’interdiction de territoire de M. Mohammed relève du bon sens, et le fait que l’agente ait sollicité des conseils ne prouve pas la partialité (Butterfield c Canada (Procureur général), 2016 CF 777 au paragraphe 19).

IV.  Analyse

A.  Norme de contrôle

[24]  En ce qui concerne l’équité procédurale, la Cour d’appel fédérale a souligné que la cour de révision n’applique pas à proprement parler une norme de contrôle. La cour de révision doit plutôt examiner la question de savoir si la procédure était équitable eu égard à l’ensemble des circonstances et si, en mettant nettement l’accent sur la nature des droits substantiels concernés et les conséquences pour la personne, un processus juste et équitable a été suivi. (Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c. Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 au paragraphe 54).

B.  L’agente a contrevenu à l’équité procédurale

[25]  La Cour est convaincue que l’agente a contrevenu à l’équité procédurale. Les agents des visas sont tenus de s’assurer que les demandeurs peuvent participer réellement au processus de demande (Toki c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 606 au paragraphe 25; A.B. c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 134 au paragraphe 55 (A.B.)).

[26]  La Cour d’appel fédérale a reconnu l’affirmation générale selon laquelle le devoir de l’agent d’immigration d’agir équitablement comprend le fait de « communiquer à l’immigrant son impression initiale afin que celui-ci puisse la modifier » (Muliadi c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1986] 2 CF 205 (C.A.) au paragraphe 16). L’affirmation a été interprétée comme une obligation pour les agents d’immigration d’informer les demandeurs de leurs préoccupations (Nguesso c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 879 au paragraphe 98; Sidhu c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 515 au paragraphe 75 (Sidhu); Rukmangathan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 284 au paragraphe 22).

[27]  La jurisprudence reconnait aussi qu’il peut être satisfait à cette obligation en posant les questions appropriées ou en demandant des précisions raisonnables donnant au demandeur la possibilité de répondre aux préoccupations de l’agent des visas (Sidhu au paragraphe 76; Liao c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] ACF n1926 (CF 1re inst.) aux paragraphes 16 et 17). Cela pourrait donner à penser que, en l’espèce, l’agente a agi équitablement, puisqu’elle a fait part à M. Mohammed de ses préoccupations quant à l’interdiction de territoire lors de la seconde entrevue et que celui-ci avait eu la possibilité d’y répondre.

[28]  Toutefois, la Cour a conclu plus récemment, dans le contexte de l’interdiction de territoire au titre de l’article 34 de la Loi, qu’un agent contrevient à l’équité procédurale lorsqu’il demande une entrevue sans inscrire précisément l’alinéa de l’article 34 en cause : A.B. aux paragraphes 63 à 66. En l’espèce, les lettres demandant l’entrevue ne mentionnaient pas à M. Mohammed les préoccupations de l’agente quant à l’interdiction de territoire et ne faisaient pas mention de l’article 34. Pour cette raison, le manquement à l’équité procédurale devient plus flagrant.

[29]  La Cour est convaincue qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale parce que l’agente a omis de 1) donner un préavis de ses préoccupations particulières (Brhane c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 220 au paragraphe 19), 2) divulguer les documents sur lesquels elle s’était fondée pour rendre sa décision, 3) fournir à M. Mohammed la possibilité de produire des observations après l’entrevue.

[30]  Eu égard à l’absence de préavis, les avis de convocation à l’entrevue étaient génériques, puisque M. Mohammed n’a appris l’objet véritable des entrevues — aborder des préoccupations liées à la sécurité — qu’à la fin de la seconde entrevue. La Cour est convaincue qu’une telle façon de faire contrevient à l’équité procédurale (Johnson c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 550 aux paragraphes 14 à 17; Bushra c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2016 CF 1412 aux paragraphes 20 et 21). De plus, l’agente a omis, avant l’entrevue, de préciser les alinéas particuliers de l’article 34 de la Loi qui étaient en cause et, pendant l’entrevue, elle a fait connaître à M. Mohammed ses préoccupations relatives aux alinéas 34(1)d) et f) de la Loi, mais en dernière analyse, a conclu à l’interdiction de territoire en fonction des motifs prévus aux alinéas 34(1)c) et f) (A.B. au paragraphe 53).

[31]  La Cour est convaincue que l’omission de divulguer les rapports posait problème, étant donné que ceux-ci ont guidé le processus décisionnel (Krishnamoorthy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1342 aux paragraphes 38 et 39; Pusat c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 428 au paragraphe 30 (Pusat); Mekonen c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 1133 aux paragraphes 19, 26).

[32]  Au sujet de l’omission d’autoriser la production d’observations après l’entrevue, l’équité procédurale exigeait d’offrir la possibilité de produire des observations après l’entrevue si les demandeurs n’avaient pas été informés à l’avance de préoccupations particulières (Bin Chen c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1227 aux paragraphes 34 et 35). Il ne s’agit pas ici d’un cas où le demandeur a renoncé à son droit de formuler des observations à la première occasion (Lally c Société Telus Communications, 2014 CAF 214 aux paragraphes 25 et 26). Il ne s’agit pas non plus d’un cas où le demandeur a omis de produire des pièces à jour (Rodriguez Zambrano c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 481 aux paragraphes 39 et 40).

[33]  Le ministre soutient que, à la lumière de la lettre d’observations de l’ancien avocat et des faits qu’il a lui-même communiqués, M. Mohammed était au courant des préoccupations quant à l’interdiction de territoire et aurait pu tenter de les dissiper (Chiau c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] 2 CF 297 aux paragraphes 47 à 50). Toutefois, la lettre accompagnant sa demande de résidence permanente soulignait que les autorités américaines l’avaient innocenté et disait expressément que, si des questions ou des préoccupations supplémentaires quant à l’interdiction de territoire se posaient, M. Mohammed souhaitait avoir la possibilité d’y répondre.

[34]  Le ministre affirme que la Cour devrait quand même refuser de casser la décision au motif qu’une décision défavorable est inévitable (Yassine c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) [1994] ACF n949 (CAF)). La Cour n’est pas de cet avis. En règle générale, « la faiblesse d'une cause ne devrait pas normalement amener les tribunaux à ignorer les manquements à l'équité ou à la justice naturelle » sauf lorsque « le fondement de la demande est à ce point faible que la cause est de toute façon sans espoir » (Mobil Oil Canada Ltd c Office Canada-Terre-Neuve des hydrocarbures extracôtiers, [1994] 1 RCS 202 au paragraphe 54). Dans l’affaire en l’espèce, M. Mohammed a demandé la possibilité de présenter des observations supplémentaires au besoin et ignorait tout des mémoires du SCRS et l’ASFC. La Cour ne peut pas supposer l’incidence que n’aurait pas pu avoir les réponses et les explications de M. Mohammed sur la décision de l’agente (Pusat, aux paragraphes 33 et 34).

V.  Conclusion

[35]  La Cour accueillera la demande et renverra le dossier pour que soit rendue une nouvelle décision.


JUGEMENT dans le dossier IMM-4072-16

LA COUR STATUE que :

  1. La demande est accueillie, et l’affaire est renvoyée pour que soit rendue une nouvelle décision;

  2. Aucune question n’est certifiée.

« Martine St-Louis »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 9e jour de mai 2019

Line Niquet, trad. a.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

DoSSIER :

IMM-4072-16

 

INTITULÉ :

AYOOB HAJI MOHAMMED ET AIERKEN MAILIKAIMU c LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 25 FÉVRIER 2019

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE ST-LOUIS

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 18 MARS 2019

COMPARUTIONS :

Prasanna Balasundaram

POUR LES DEMANDEURS

Gregory George et

Bradley Bechard

pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Downtown Legal Services

Toronto (Ontario)

pour les demandeurs

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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