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     Date : 19991208

     Dossier : IMM-987-99


ENTRE :

     BAKHTIAR MUJAHID SUBHANI

     demandeur

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     défendeur



     MOTIFS DU JUGEMENT


Le juge McGILLIS


[1]      Il y a en l'espèce recours en contrôle judiciaire exercé par le demandeur contre la décision en date du 15 janvier 1999, par laquelle l'agente des visas a rejeté sa demande de résidence permanente au Canada. Le litige est centré sur l'appréciation faite par l'agente des visas du facteur personnalité.

[2]      Le demandeur, citoyen du Bangladesh, a fait sa demande de résidence permanente le 11 décembre 1996 à titre d'immigrant indépendant, avec pour profession envisagée celle d'" ingénieur spécialiste des installations d'énergie CCDP 2147-110 ".

[3]      Le 2 novembre 1998, il a comparu à une entrevue avec l'agente des visas. Dans ses notes prises à cette occasion, celle-ci indique, entre autres, qu'elle l'a évalué au regard des professions d'ingénieur spécialiste des installations d'énergie (CCDP 2147-110), de mécanicien de machines fixes, en général (CCDP 9533-122), et d'ingénieur mécanicien, en général (CCDP 2147-118). Elle trouvait que l'expérience du demandeur ne correspondait pas spécifiquement à ces professions. Pour ce qui est de la personnalité, voici ce qu'elle a notamment relevé :

     [TRADUCTION]

     CANDIDAT SAIT PEU DE CHOSES SUR LE CANADA, N'A PRATIQUEMENT RIEN FAIT POUR SE PRÉPARER À L'IMMIGRATION, ET SE FAIT DES ILLUSIONS SUR SES PERSPECTIVES D'EMPLOI. LUI AI FAIT PART DE MES RÉSERVES LORS DE L'ENTREVUE.

[4]      Le 23 novembre 1998, l'avocat du demandeur a envoyé à l'agente des visas un message par télécopie, où on peut lire ce qui suit :

     [TRADUCTION]

     Nous vous écrivons au nom de notre client, M. Bakhtiar Subhani, que vous avez interviewé récemment au sujet de sa demande de résidence permanente. Il nous informe que vous avez exprimé des réserves quant à ses qualifications à l'immigration. Il nous dit aussi que quand il a cherché à savoir en quoi consistaient vos réserves dans l'espoir de vous donner des éclaircissements, vous vous êtes contentée de lui dire que l'entrevue était terminée.
     Nous tenons à rappeler respectueusement que l'équité procédurale vous fait obligation de donner à notre client la possibilité de comprendre la nature de vos réserves et d'y répondre avant que vous ne parveniez à une décision. Nous vous prions en conséquence de nous faire parvenir une liste des points que notre client pourrait éclaircir afin que vous puissiez décider en connaissance de cause.

[5]      L'agente des visas n'a pas répondu à cette lettre.

[6]      Le 23 décembre 1998, l'avocat du demandeur lui a encore envoyé un message par télécopie pour lui demander de " communiquer la liste des réserves possibles ".

[7]      Le 15 janvier 1999, l'agente des visas a ajouté la mention suivante à ses notes :

     [TRADUCTION]

     nota :
     versé au dossier la lettre de l'avocat demandant la " liste des points que notre client pourrait éclaircir afin que vous puissiez décider en connaissance de cause " "
     LE DEMANDEUR S'EST VU DONNER LA POSSIBILITÉ DE DÉFENDRE SA DEMANDE LORS DE L'ENTREVUE, LORSQUE JE LUI AI FAIT PART DE MES RÉSERVES.

[8]      Par lettre incorrectement datée du 15 janvier 1998, l'agente des visas a rejeté la demande de résidence permanente par ce motif que le demandeur n'avait pas obtenu suffisamment de points d'appréciation pour se qualifier pour l'immigration au Canada. Cependant, elle lui a accordé " le bénéfice du doute " et des points d'appréciation au titre de l'expérience dans les professions susmentionnées. Dans son appréciation, elle lui a donné le maximum de points pour chaque facteur, sauf la personnalité, pour laquelle elle lui a donné 5 sur 10. Par suite, le demandeur s'est vu accorder 68 points au regard des professions de mécanicien de machines fixes, en général (CCDP 2147-118) et d'ingénieur mécanicien, en général (CCDP 2147-118).

[9]      Dans son affidavit versé au dossier de l'instance, l'agente des visas donne, entre autres, les raisons pour lesquelles elle n'a accordé au demandeur que 5 points d'appréciation pour la personnalité. Elle note aussi qu'elle lui a donné la possibilité de répondre, au cours de l'entrevue, à ses réserves.

[10]      De son côté, le demandeur a déposé un affidavit dans lequel il affirme notamment qu'il a demandé à l'agente des visas de ne pas décider son cas tout de suite après l'entrevue, afin qu'il puisse lui soumettre d'autres détails.

[11]      L'avocat du demandeur reproche à l'agente des visas d'avoir manqué aux impératifs d'équité procédurale faute d'avoir donné à ce dernier la possibilité de répondre à ses réserves. Cette conclusion est fondée. À même supposer que l'agente des visas ait donné au demandeur la possibilité de répondre à ses réserves au cours de l'entrevue, elle aurait quand même dû accéder à la demande faite par son avocat afin d'y répondre avant qu'elle ne rende sa décision. Bien que celui-ci lui ait écrit à deux reprises pour demander la possibilité de donner des éclaircissements, elle ne s'est pas donné la peine de lui répondre et a rendu sa décision sans autres observations de la part du demandeur ou de son avocat. Vu les deux demandes faites par cet avocat avant qu'elle n'ait rendu sa décision, elle était tenue par l'équité procédurale de permettre au demandeur ou à son avocat de répondre à ses réserves. En tirant cette conclusion, j'ai pris acte des témoignages contradictoires dans le dossier au sujet de ce qui s'est passé à la clôture de l'entrevue.

[12]      La Cour fait droit au recours en contrôle judiciaire et renvoie l'affaire pour nouvelle instruction par un autre agent des visas. Une téléconférence sera organisée avec les avocats des deux parties pour leur permettre de présenter leurs conclusions sur le point de savoir si l'affaire pose une question grave de portée générale.

     Signé : D. McGillis

     ________________________________

     Juge


Toronto (Ontario),

le 8 décembre 1999





Traduction certifiée conforme,



Bernard Olivier, LL.B.


     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



DOSSIER No :              IMM-987-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Bakhtiar Mujahid Subhani

                     c.

                     Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration


DATE DE L'AUDIENCE :      Mercredi 8 décembre 1999


LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)


MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR MME LE JUGE McGILLIS


LE :                      Mercredi 8 décembre 1999



ONT COMPARU :


M. Ira Nishisato                  pour le demandeur

M. Stephen H. Gold                  pour le défendeur



AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :


Borden & Elliot                  pour le demandeur

Avocats

Scotia Plaza

40 rue King ouest

Toronto (Ontario)

M5H 3Y4

Morris Rosenberg                  pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada

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