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Date : 20040715

Dossier : IMM-3640-03

Référence : 2004 CF 997

ENTRE :

                                                              TAMERAT ALEMU

                                                                                                                                           demandeur

                                                                          - et -

                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                             défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

[1]                Depuis 1997, M. Alemu, un Éthiopien du groupe ethnique des Oromo, réside en Afrique du Sud où il a obtenu l'asile temporaire. Un groupe de cinq citoyens canadiens parraine sa demande de résidence permanente à titre de personne déplacée qui a qualité de réfugié au sens de la Convention ou de membre de la catégorie désignée pour considérations humanitaires.


[2]                M. Alemu a demandé un visa en 1999, mais sa demande a été refusée. Le 12 décembre 2000, le juge Blanchard a accueilli une demande de contrôle judiciaire de cette décision, avec le consentement des parties, et M. Alemu a été interviewé une deuxième fois en avril 2001. Sa demande a été refusée de nouveau et il demande le contrôle judiciaire de la décision négative du 25 février 2003 de l'agent des visas dans laquelle l'agent a conclu que : a) M. Alemu n'était pas un réfugié au sens de la Convention et qu'il n'était pas membre de la catégorie désignée pour considérations humanitaires; b) il y avait des motifs raisonnables de croire qu'il était membre de la catégorie des personnes interdites de territoire décrites au paragraphe 34(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR).

[3]                Avant l'audition de la demande de contrôle judiciaire, le ministre a demandé, en vertu de l'article 87, que soit interdite la divulgation de certains renseignements pris en compte par l'agent dans sa décision. La demande relative à l'article 87 a été entendue le 21 juin 2004 et la demande de contrôle judiciaire a été entendue le 24 juin 2004. Les présents motifs visent tant la demande du ministre en vertu de l'article 87 de la LIPR que la demande de contrôle judiciaire de M. Alemu concernant les décisions de l'agent aussi bien en matière d'inclusion qu'en matière d'exclusion.

CONTEXTE


[4]                Dans sa demande initiale, M. Alemu a prétendu qu'il était membre du Front de libération des Oromo (FLO) quand le mouvement était autorisé par la loi et qu'il l'avait appuyé par la suite, alors qu'il était interdit. Il a dit qu'il participait aux réunions, qu'il distribuait des documents et percevait des frais pour le FLO dans sa région, mais qu'il ne faisait pas partie de l'aile militaire et n'avait participé à aucun acte de violence. Il aurait été arrêté et torturé pendant quatre mois et, à sa libération, il se serait caché à Addis Ababa, de 1992 à 1994. Il a ensuite suivi un cours technique et obtenu un emploi, mais il a été obligé de quitter son emploi lorsqu'un collègue de travail oromo a été arrêté. Un mandat d'arrestation a été lancé contre lui et il s'est enfui au Kenya. Il prétend qu'il ne pouvait pas retourner en Éthiopie et que les Oromo d'Afrique du Sud font l'objet de harcèlement de la part de l'ambassade d'Éthiopie.

[5]                Dans son affidavit à l'appui de la demande d'autorisation de présenter une demande de contrôle judiciaire du premier refus, M. Alemu a repris presque toutes les allégations contenues dans sa demande. Toutefois, tout en reconnaissant qu'il appuyait le mouvement, il a nié avoir soutenu activement le FLO à compter de 1992. En outre, il a dit qu'il n'avait aucune appartenance politique en Afrique du Sud. Il a affirmé que l'interprétation avait posé problème lors de son premier entrevue et que l'interprète avait embelli et déformé ses propos en voulant malencontreusement donner plus de poids à sa demande.


[6]                Au cours du deuxième entrevue, en avril 2001, M. Alemu a prétendu qu'il n'avait jamais été membre du FLO. Il a affirmé plutôt qu'il avait participé à des réunions et obtenu des dons afin de venir en aide aux soldats du FLO uniquement pendant que le FLO faisait partie du gouvernement. Il a dit que les sommes qu'il avait recueillies pour le groupe n'étaient pas des frais, mais des dons afin d'aider les soldats du FLO qui étaient malades et que les brochures qu'il avait distribuées n'étaient pas des brochures d'opposition mais se rapportaient à la collecte de fonds et au gouvernement de coalition. Il a prétendu qu'il n'appuyait pas les objectifs politiques du FLO. Il a nié qu'il se cachait à Addis, qu'il avait participé à des réunions du FLO dans cette ville et que la police d'Éthiopie avait lancé un mandat d'arrestation contre lui. Il a prétendu avoir quitté l'Éthiopie à cause du harcèlement et parce qu'il craignait d'être arrêté arbitrairement et d'être assassiné. Il a également nié qu'il craignait les fonctionnaires éthiopiens en Afrique du Sud. En outre, il a prétendu que son père était d'origine amharique (plutôt qu'oromo) et que trois de ses frères étaient décédés. La demande initiale ne mentionnait pas ces détails.

[7]                Bien entendu, l'agent des visas a décelé plusieurs incohérences dans les déclarations de M. Alemu au cours du premier et du deuxième entrevues, dans son affidavit au soutien de la demande de contrôle judiciaire et dans sa demande de 1999. L'agent a conclu qu'il ne pouvait pas se fier aux déclarations de M. Alemu et il n'était pas convaincu que M. Alemu lui disait la vérité en décrivant les raisons pour lesquelles il avait été contraint de quitter l'Éthiopie. Par conséquent, l'agent des visas n'a pas été convaincu que M. Alemu était un réfugié au sens de la Convention ni membre de la catégorie désignée pour considérations humanitaires. Il a également conclu qu'il y avait des motifs raisonnables de croire que M. Alemu était interdit de territoire au Canada comme membre du FLO.

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES APPLICABLES

[8]                Les dispositions pertinentes, pour ce qui concerne une demande en vertu de l'article 87, sont jointes à l'annexe A des présents motifs. Les dispositions législatives qui s'appliquent dans le présent contrôle judiciaire forment l'annexe B. Certaines dispositions précises seront reproduites dans les présents motifs à des fins de clarté et de consultation.


DEMANDE EN VERTU DE L'ARTICLE 87

[9]                Aux termes de l'article 11 de la LIPR, un étranger doit demander un visa préalablement à son entrée au Canada. L'agent des visas délivre le visa, à la suite d'un contrôle, s'il est convaincu que l'étranger n'est pas interdit de territoire et qu'il satisfait aux exigences de la LIPR. Le paragraphe 87(1) de la LIPR prévoit notamment que le ministre peut, dans le cadre d'un contrôle judiciaire, demander au juge d'interdire la divulgation de tout renseignement pris en compte par l'agent des visas dans l'appréciation de la demande en vertu de l'article 11. La procédure visée à l'article 78 de la LIPR s'applique à l'examen de la demande, en vertu du paragraphe 87(2), sous réserve des exceptions prévues et « avec les adaptations nécessaires » . L'article 87 prévoit :


Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27

Immigration and Refugee Protection Act,

S.C. 2001, c. 27

87. (1) Le ministre peut, dans le cadre d'un contrôle judiciaire, demander au juge d'interdire la divulgation de tout renseignement protégé au titre du paragraphe 86(1) ou pris en compte dans le cadre des articles 11, 112 ou 115.

87. (1) The Minister may, in the course of a judicial review, make an application to the judge for the non-disclosure of any information with respect to information protected under subsection 86(1) or information considered under section 11, 112 or 115.

(2) L'article 78 s'applique à l'examen de la demande, avec les adaptations nécessaires, sauf quant à l'obligation de fournir un résumé et au délai.

(2) Section 78, except for the provisions relating to the obligation to provide a summary and the time limit referred to in paragraph 78(d), applies to the determination of the application, with any modifications that the circumstances require.


[10]            La juge Dawson a décrit, dans Gariev c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et del'Immigration) 2004 CF 531 (Gariev) l'interaction entre les articles 11, 78 et 87 de la LIPR. Je souscris à ces commentaires, particulièrement les paragraphes 6, 7 et 8 :

La Loi prévoit que lorsqu'une demande en vertu de l'article 87 est déposée, le juge chargé d'entendre l'affaire est tenu de garantir la confidentialité des renseignements en cause « dont la divulgation porterait atteinte, selon lui, à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui » . Pour être plus succincte, je vais utiliser l'expression « porter atteinte à la sécurité nationale ou d'autrui » en mentionnant cette disposition.


Le juge doit trancher la demande sans formalisme et selon la procédure expéditive dans la mesure où les circonstances et les considérations de justice naturelle le permettent. Le juge est tenu, sur demande du ministre, d'entendre tous les renseignements qui, selon le ministre, ne peuvent être divulgués, en l'absence de l'étranger visé et de son conseil. Si le juge décide que la divulgation du renseignement porterait atteinte à la sécurité nationale ou d'autrui, il rendra une ordonnance favorable au ministre. Le renseignement fait alors partie du dossier dont la Cour est saisie dans la demande de contrôle judiciaire et il n'est pas divulgué au demandeur ni à son avocat.

Si toutefois, le juge décide que l'ensemble ou une partie des renseignements pourraient être divulgués parce que telle divulgation ne porterait pas atteinte à la sécurité nationale ou d'autrui, les renseignements sont remis au ministre. Le cas échéant, ces renseignements ne sont pas versés au dossier dont la Cour est saisie dans la demande de contrôle judiciaire. Subsidiairement, le ministre peut décider qu'il n'est pas nécessaire de lui remettre les renseignements, auquel cas les renseignements sont divulgués et font partie des documents publics dont la Cour serait saisie.

[11]            Dans cette affaire, les pages 29 à 32, 43 et 44 avaient été retirées du dossier du tribunal. En outre, la page 68 contenait des renseignements qui avaient été rédigés à partir des notes du Système de traitement informatisé des dossiers d'immigration (STIDI). Le ministre a déposé, au dossier public, la requête en interdiction de divulguer ces renseignements, ainsi qu'un affidavit à l'appui confirmant que l'agent des visas avait pris en compte les renseignements en prenant sa décision et affirmant qu'il était nécessaire d'interdire la divulgation de ces renseignements au demandeur, à son avocat et au public. L'affidavit mentionnait l'existence d'un « affidavit secret » qui devait contenir d'autres motifs qui justifiaient une interdiction de divulgation. Le dossier de requête du ministre, à l'exclusion de l'affidavit secret, a été signifié et déposé en conformité avec les dispositions de l'article 362 des Règles de la Cour fédérale (1998).


[12]            La procédure qui a été suivie, en rapport avec la demande du ministre, était conforme à la procédure adoptée par mes collègues dans des demandes semblables : Gariev, précité; Sogi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2003), 34 Imm. L.R. (3d) 106 (C.F.) (Sogi) confirmé 2004 CAF 212 (C.A.F.); Andeel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2003), 240 F.T.R. 1; 33 Imm. L.R. (3d) 36 (C.F.) (Andeel). Le 21 juin, l'avocat du ministre et celui du demandeur ont comparu en audience publique et ils ont présenté leurs observations concernant la demande en vertu de l'article 87. Ces observations font partie du dossier public. Dès la fin de la présentation des observations, le juge a fixé une nouvelle date d'audition de la demande de contrôle judiciaire, soit le 24 juin, il a suspendu l'audience et est tout de suite passé à l'audience à huis clos en la présence uniquement de l'avocat du ministre et du solliciteur général, de l'auteur de l'affidavit secret et du greffier.

[13]            Conformément à la pratique de la juge Dawson décrite dans Gariev, précité, le fonctionnaire du greffe a ouvert l'audience en la manière habituelle. Les avocats ont présenté les conclusions formelles qui étaient fondées uniquement sur la preuve dont le tribunal était saisie.

[14]            En prenant une décision sur la question de savoir si la divulgation des renseignements confidentiels porterait atteinte à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui, j'ai appliqué les principes énoncés dans Henrie c. Canada (Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité), [1989] 2 C.F. 229; (1988), 53 D.L.R. (4th) 568 (C.F. 1re inst.) confirmé (1992) 140 N.R. 315; 88 D.L.R. (4th) 575 (C.A.F.) décision dans laquelle le juge Addy a dit, aux pages 578 et 579 :


[...] en matière de sécurité, existe la nécessité non seulement de protéger l'identité des sources humaines de renseignement mais encore de reconnaître que les types suivants de renseignements pourraient avoir à être protégés, compte tenu évidemment de l'administration de la justice et plus particulièrement de la transparence de ses procédures: les renseignements relatifs à l'identité des personnes faisant l'objet d'une surveillance, qu'il s'agisse de particuliers ou de groupes, les moyens techniques et les sources de la surveillance, le mode opérationnel du service concerné, l'identité de certains membres du service lui-même, les systèmes de télécommunications et de cryptographie et, parfois, le fait même qu'il y a ou non surveillance. Cela signifie par exemple que des éléments de preuve qui, en eux-mêmes, peuvent ne pas être particulièrement utiles à reconnaître une menace, pourraient néanmoins devoir être protégés si la simple révélation que le SCRS en a possession rendrait l'organisme visé conscient du fait qu'il est placé sous surveillance ou écoute électronique, ou encore qu'un de ses membres a fait des révélations.

Il importe de se rendre compte qu'un [traduction] « observateur bien informé » , c'est-à-dire une [page 243] personne qui s'y connaît en manière de sécurité et qui est membre d'un groupe constituant une menace, présente ou éventuelle, envers la sécurité du Canada, ou une personne associée à un tel groupe, connaître les rouages de celui-ci dans leurs moindres détails ainsi que les ramifications de ses opérations dont notre service de sécurité pourrait être relativement peu informé. En conséquence de quoi l'observateur bien informé pourra parfois, en interprétant un renseignement apparemment anodin en fonction des données qu'il possède déjà, être en mesure d'en arriver à des déductions préjudiciables à l'enquête visant une menace particulière ou plusieurs autres menaces envers la sécurité nationale. Il pourrait, par exemple, être en mesure de déterminer, en tout ou en partie, les éléments suivants: (1) la durée, l'envergure et le succès ou le peu de succès d'une enquête; (2) les techniques investigatrices du service; (3) les systèmes typographiques et de téléimpression utilisées par le SCRS; (4) les méthodes internes de sécurité; (5) la nature et le contenu d'autres documents classifiés; (6) l'identité des membres du service ou d'autres personnes participant à une enquête.

[15]            Après avoir entendu les avocats et examiné les documents, je suis convaincue que, sauf une partie des renseignements consignés aux notes du STIDI, à la page 68, les renseignements des pages 29 à 32, 43 et 44 du dossier du tribunal porteraient atteinte à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui s'ils étaient divulgués. Pour ce qui touche les renseignements consignés à la page 68 dont l'interdiction de divulgation est demandée, j'ai décidé que, puisqu'une partie des renseignements a déjà été rendue publique, la partie des renseignements qui a déjà été divulguée ne devrait pas faire l'objet d'une ordonnance de non-divulgation.

[16]            Par voie de conséquence, j'ai décidé que les renseignements confidentiels ne seront pas divulgués au demandeur, à son avocat ni à aucun autre membre du public, sauf les renseignements qui se trouvent à la page 15 du dossier du demandeur, daté du 7 août 2003, qui ont déjà été divulgués. L'avocat a reconnu qu'il ne demanderait pas la non-divulgation de renseignements qui se trouvent déjà dans le dossier public et qui en font partie. J'ai également décidé que le ministre et le tribunal pouvaient prendre en compte les renseignements non divulgués dans le cadre de la décision concernant la demande de contrôle judiciaire.

[17]            Lorsque l'audition de la demande de contrôle judiciaire a repris le 24 juin, l'avocat du demandeur a été avisé de mes conclusions et une ordonnance a été rendue en conséquence. Les documents ont été déposés au dossier du tribunal, dans une enveloppe scellée, que seul un juge désigné par le juge en chef, en conformité avec l'article 76 de la LIPR, peut consulter. J'ai également avisé l'avocat du demandeur qu'aucun des renseignements non divulgués ne concernait la participation de M. Alemu en tant que membre du FLO. Ainsi, la demande de contrôle judiciaire s'est déroulée par la suite, étant entendu que les renseignements non divulgués formaient partie du dossier relatif à la demande, même s'ils n'avaient pas été divulgués au demandeur.

DEMANDE DE CONTRÔLE JUDICIAIRE

[18]            M. Alemu soulève deux questions :

(1)         L'agent des visas a-t-il appliqué irrégulièrement la définition de réfugié au sens de la Convention?


(2)         L'agent des visas a-t-il commis une erreur dans l'application de l'alinéa 34(1)f) de la LIPR?

[19]            Pour les motifs énoncés plus loin, j'ai conclu que la demande de contrôle judiciaire doit être accueillie au motif que l'analyse, tant à l'égard de ses conclusions en matière d'inclusion que celles en matière d'exclusion, est incomplète. Même si l'avocat du défendeur a présenté d'une manière cohérente les diverses options ou explications possibles à l'appui des conclusions de l'agent des visas, à mon avis, ces explications doivent se trouver, d'une manière ou d'une autre, expressément ou implicitement, dans le raisonnement de l'agent. Ni un demandeur ni le tribunal ne devrait être tenu dans l'ignorance ou être obligé de supputer les raisons pour lesquelles une demande a été refusée. Cela étant, je suis d'accord avec le défendeur - malgré l'argument contraire du demandeur - que pour que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie, les deux motifs invoqués par M. Alemu doivent être bien fondés.


[20]            L'agent des visas a jugé que M. Alemu n'était pas crédible. En règle générale, le tribunal hésite à intervenir quand il s'agit de conclusions en matière de crédibilité. En l'espèce, rien ne permet de même amorcer une attaque contre la conclusion de l'agent. Les éléments dont il disposait et sur lesquels il a fondé sa conclusion en matière de crédibilité étaient plus que suffisants et, à cet égard, son raisonnement est inattaquable. L'agent a noté au moins dix exemples de contradictions ou d'incohérences (dans certains cas, d'autres incohérences apparaissaient dans les exemples donnés) dans les déclarations de M. Alemu qui ont entraîné la décision. Il n'est pas nécessaire, pour les fins de la présente analyse, d'énumérer les divers exemples sur lesquels l'agent s'est fondé sauf pour dire que l'agent a fait preuve de diligence en les notant et par conséquent, il a conclu ce qui suit :

[traduction] [...] Vos explications concernant les nombreuses incohérences et contradictions ne me satisfont pas et je ne crois pas que l'on puisse se fonder, avec certitude, sur les renseignements que vous avez fournis. Puisque je ne peux me fier à aucun des renseignements que vous m'avez fournis concernant ces importantes questions, je ne suis pas convaincu que vous m'ayez dit toute la vérité concernant les motifs qui vous ont amené à fuir l'Éthiopie. Je ne suis donc pas convaincu que vous ayez qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de membre de la catégorie désignée pour des considérations humanitaires [...]

[21]            Cette conclusion soulève un problème : celui du manque d'analyse supplémentaire. Certes, la conclusion relative au manque de crédibilité de M. Alemu est inattaquable mais pour comprendre la conclusion de fait de l'agent, il faut examiner sa conclusion en matière d'exclusion. En décidant que M. Alemu était interdit de territoire, l'agent a dit ceci :

[traduction]Votre demande est également refusée puisqu'il y a des motifs raisonnables de croire que vous faites partie de la catégorie de personnes interdites de territoire visées au paragraphe 34(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés qui prévoit qu'emportent interdiction de territoire pour raison de sécurité les faits suivants :

a) être l'auteur d'actes d'espionnage ou se livrer à la subversion contre toute institution démocratique, au sens où cette expression s'entend au Canada;

b) être l'instigateur ou l'auteur d'actes visant au renversement d'un gouvernement par la force;

c) se livrer au terrorisme;

d) constituer un danger pour la sécurité du Canada;

e) être l'auteur de tout acte de violence susceptible de mettre en danger la vie ou la sécurité d'autrui au Canada;

f) être membre d'une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elle est, a été ou sera l'auteur d'un acte visé aux alinéas a), b) ou c).


Pour ce qui vous concerne, il y a des motifs raisonnables de croire que le Front de libération des Oromo (FLO) est un groupe visé à l'alinéa f) ci-dessus et que votre participation à ce groupe fait en sorte que vous êtes interdit de territoire au Canada. Vous avez déjà admis être membre du Front de libération des Oromo (FLO). Les renseignements que vous avez fournis révèlent que vous avez participé volontairement et activement à ce mouvement. Lors de votre deuxième entrevue, vous auriez pu expliquer les liens que vous aviez avec le FLO et donner des renseignements concernant les activités du FLO. Vous avez dit, pendant cette entrevue, que vous n'étiez ni membre du FLO ni partisan de cette organisation. Je ne crois pas que vous soyez crédible à cet égard compte tenu des autres déclarations que vous avez faites et compte tenu des incohérences et contradictions susmentionnées. Ce manque de crédibilité m'amène à croire que vous tentez de minimiser les liens que vous avez avec le Front de libération des Oromo et que vous avez été ou êtes peut-être toujours membre du Front de libération des Oromo (FLO).

[22]            Il n'y a aucune preuve, autre que celle fournie par M. Alemu, concernant la participation de ce dernier en tant que membre du FLO. Cette preuve n'a pas été crue et il a été décidé qu'il n'était pas un réfugié au sens de la Convention. Toutefois, certaines de ses affirmations ont été crues et acceptées afin de l'exclure.

La décision en matière d'exclusion


[23]            À des fins de cohérence, je vais d'abord examiner la conclusion en matière d'exclusion. La norme de contrôle applicable est énoncée dans l'arrêt Harb c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2003), 302 N.R. 178 (C.A.F.). Dans la mesure où il s'agit de conclusions de fait, elles ne sont susceptibles de contrôle que si elles sont erronées et si elles ont été tirées d'une manière abusive ou arbitraire sans tenir compte des éléments de preuve dont le tribunal était saisi, c'est-à-dire, si elles sont manifestement déraisonnables. Dans la mesure où les conclusions ont été tirées par suite de l'application du droit aux faits en cause, elles ne peuvent faire l'objet d'un contrôle que si elles sont déraisonnables et, dans la mesure où elles interprètent le sens d'une clause d'exclusion, les conclusions ne sont susceptibles de contrôle que si elles sont erronées.

[24]            L'agent des visas a conclu que [traduction] « il y a des motifs raisonnables de croire que le Front de libération des Oromo (FLO) est un groupe décrit à l'alinéa [34(1)] f) ci-dessus et que votre appartenance à ce groupe fait en sorte que vous êtes interdit de territoire au Canada » .

[25]            L'article 33 de la LIPR, sous-titrée « Interprétation » , précise que les faits - actes ou omissions - sont appréciés sur la base de motifs raisonnables de croire qu'ils sont survenus, surviennent ou peuvent survenir.

[26]            La norme de preuve qu'il faut observer pour établir des « motifs raisonnables » est davantage qu'un léger soupçon, mais elle n'atteint pas le critère civil de la prépondérance des probabilités et, naturellement, il s'agit encore moins de la norme « hors de tout doute raisonnable » employée en droit criminel. Il s'agit d'une croyance légitime à une possibilité sérieuse en raison de preuves dignes de foi : Andeel, précité, citant Sabour c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2000), 9 Imm. L.R. (3d) 61 (1re inst.); Chiau c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 2 C.F. 642 (C.F. 1re inst.) confirmé [2001] 2 C.F. 297 (C.A.). Voir également Gariev, précité.

[27]            Les motifs invoqués par l'agent des visas constituent un fondement relativement à sa décision concernant l'appartenance de M. Alemu au FLO. Toutefois, ils ne constituent pas la base de sa conclusion selon laquelle il y avait des motifs raisonnables de croire que le FLO était un groupe visé à l'alinéa 34(1)f). À mon avis, l'agent avait l'obligation de présenter une explication quelconque de la conclusion selon laquelle le FLO était un groupe visé.

[28]            Deux questions se posent à cet égard. La première question exige un examen de l'alinéa 34(1)f). Cette disposition prévoit l'existence de motifs raisonnables de croire que l'organisation se livre, s'est livrée ou se livrera à des actes visés aux alinéas a), b), ou c) du paragraphe 34(1). Il faut donc tenir compte de ces alinéas qui sont ainsi libellés :


34. (1) Emportent interdiction de territoire pour raison de sécurité les faits suivants :

a) être l'auteur d'actes d'espionnage ou se livrer à la subversion contre toute institution démocratique, au sens où cette expression s'entend au Canada;

b) être l'instigateur ou l'auteur d'actes visant au renversement d'un gouvernement par la force;

c) se livrer au terrorisme;

34. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on security grounds for

(a) engaging in an act of espionage or an act of subversion against a democratic government, institution or process as they are understood in Canada;

(b) engaging in or instigating the subversion by force of any government;

(c) engaging in terrorism;



[29]            Dans l'arrêt Qu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] 3 C.F. 3 (C.A.) (Qu), la Cour d'appel a établi le critère applicable à la disposition comparable de l'ancienne Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2, aujourd'hui abrogée. Il n'y a aucune différence fondamentale entre les termes des anciennes et des nouvelles dispositions. Par conséquent, les décisions de la Cour d'appel dans l'affaire Qu pour ce qui touche le sous-alinéa 19(1)f)(i) de l'ancienne Loi s'appliquent également à l'alinéa 34(1)a) de la LIPR. Au paragraphe 34 de l'arrêt, le juge en chef Richard a dit, au nom de la Cour :

Lorsqu'il applique le sous-alinéa 19(1)f)(i) de la Loi sur l'immigration, l'agent des visas doit examiner d'abord le statut de l'organisation, c'est-à-dire se demander s'il s'agit d'une institution démocratique--a democratic institution--au sens du sous-alinéa, et ensuite la conduite du non-citoyen, c'est-à-dire se demander si le non-citoyen s'est livré à des actes d'espionnage ou de subversion contre cette institution démocratique. La conduite du non-citoyen aux fins du sous-alinéa n'a d'utilité que si l'on est arrivé à la conclusion que l'organisation a le statut requis.

[30]            Il découle d'un examen des motifs énoncés dans l'arrêt Qu, que l'alinéa 34(1)a) établit un critère comparatif - entre une institution démocratique visée par un acte d'espionnage ou de subversion - et une institution démocratique au sens où on l'entend au Canada. L'acte d'espionnage ou de subversion doit être précisé pour que les motifs soient intelligibles. Il me semble que si un critère doit être appliqué, il doit l'être à toutes les fois qu'il faut prendre une décision.

[31]            L'alinéa 34(1)b) est moins exigeant puisque la disposition n'exige pas une appréciation de la qualité du gouvernement renversé pour établir qu'une personne est l'auteur ou l'instigateur d'actes visant le renversement d'un gouvernement par la force. Toutefois, on peut prétendre que puisque la disposition précise deux possibilités - être l'instigateur ou l'auteur d'actes visant au renversement d'un gouvernement par la force - il faut une certaine spécificité.


[32]            Pour que l'alinéa 34(1)c) s'applique, le décideur doit avoir tenu compte de la définition du terrorisme présentée au paragraphe 98 de l'arrêt Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] 1 R.C.S. 3, en rapport avec les actions du groupe. Le juge Lemieux, dans Fuentes c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2003] 4 C.F. 249 (1re inst.) a dit que si un arbitre n'applique pas la définition du terrorisme de l'arrêt Suresh, il commet une erreur susceptible de contrôle. Le juge Mosley est arrivé à une conclusion semblable dans Zarrin c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) 2004 CF 332. Aujourd'hui, la définition de l'expression « se livrer à l'activité terroriste » peut s'inférer de la définition d' « activité terroriste » de la Loi antiterrorisme, L.C. 2001, ch. 41.

[33]            L'alinéa 34(1)f) mentionne expressément les alinéas a), b) et c) de l'article. En raison du terme « ou » , l'un ou l'autre des alinéas a), b) et c) suffit. Toutefois, le décideur doit préciser les actes auxquels l'organisation s'est livrée, savoir s'il s'agit d'un ou de plusieurs des actes mentionnés aux alinéas a), b) ou c). Une simple affirmation péremptoire fondée sur l'alinéa 34(1)f), sans plus, ne suffit pas. Il ne convient pas d'affirmer que dans Gariev, précité, la cour a conclu que le demandeur était interdit de territoire en vertu de l'alinéa 34(1)f). Dans cette affaire, il était allégué qu'il fallait démontrer que le demandeur appartenait directement à l'organisation en cause. En outre, les parties avaient reconnu que l'organisation se livrait ou s'était livrée à des actes d'espionnage contre une institution démocratique (paragraphe 37).


[34]            Dans l'affaire Andeel, précitée, le juge Noël a été saisi d'une situation semblable dans le cadre de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité. Le juge Noël a décidé, que puisque l'agent des visas avait négligé de tenir compte des articles applicables de la Loi sur les crimes de guerre, cette absence d'explication constituait une erreur de droit. Il a dit :

Sinon pour des motifs de fond, alors pour le simple intérêt de la clarté, une explication et une référence précise à l'article applicable sont essentielles. Une référence générale à des articles qui sont mutuellement exclusifs ne donne pas à l'intéressé cette clarté ni ne permet une bonne compréhension de la décision.

Voir également : Bitaraf c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) 2004 CF 898, au paragraphe 22.

[35]            Enfin, en rapport avec la première question en cause, il faut souligner que l'agent des visas avait consulté d'autres employés concernant son projet de lettre de refus. Un message de réponse à la page 163 du dossier du tribunal contient l'observation suivante :

[traduction] Il s'agit essentiellement de présenter les motifs qui permettent de conclure que ce groupe est un groupe qui se livre ou qui s'est livré à des actes de terrorisme. Rien dans la lettre ne démontre que vous ayez posé des questions au demandeur concernant les activités du groupe et rien n'indique non plus que vous ayez des motifs raisonnables de croire qu'il en est ainsi. Si vous avez l'intention de rejeter la demande en vertu de cette disposition, il faut que les deux éléments soient en place. Certes, l'affaire comporte des renseignements qui sont confidentiels mais il est préférable que la décision soit justifiée.

[36]            Je ne conteste pas ces observations. Si l'agent des visas avait suivi ce conseil, il aurait pu éviter son erreur. Je conclus que la simple mention de l'alinéa 34(1)f) de la LIPR, sans préciser les actes de l'organisation et en quoi ces actes relèvent des alinéas a), b) ou c) du paragraphe 34(1) est manifestement déraisonnable et constitue un motif de contrôle.


[37]            La deuxième question est celle de savoir si l'affidavit de l'agent des visas affirmé solennellement en réponse à la demande de contrôle judiciaire et auquel sont annexés [traduction] « plusieurs documents sur le FLO et ses activités » pris en compte par l'agent des visas dans le cadre de sa décision peut pallier la lacune que présentent ses motifs. La pièce C de l'affidavit de l'agent des visas comprend : les Country Reports on Human Rights Practices de 1999; un renvoi non daté à un document de l'Office of International Criminal Justice intitulé Extremist Groups et des documents de 1993 de la Direction de la recherche de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié intitulé : Ethiopia: Current Situation. Ces documents n'ont pas été mentionnés dans les notes du STIDI ni dans les motifs de l'agent des visas. Aucun document ne figure au dossier du tribunal. Le bien-fondé d'une telle approche est sujet à caution mais je n'ai pas besoin de prendre une décision à cet égard en l'espèce. Au mieux, l'affidavit, ainsi que la pièce C qui lui est annexée constituent un effort d'expliquer et de clarifier la décision de l'agent des visas. L'effort ne donne pas les résultats escomptés.

[38]            L'affidavit ne fait que révéler que l'agent des visas a examiné les documents annexés avant de rendre sa décision. La conclusion exprimée dans son affidavit est la même que la conclusion que l'agent a présentée dans ses motifs, savoir que le FLO est un groupe visé à l'alinéa 34(1)f) de la LIPR. L'agent ne présente aucun autre motif à l'appui de sa conclusion.


[39]            En supposant que l'objet visé, c'est que j'examine les documents et que j'y décèle des renseignements permettant de préciser la nature du FLO, j'ai examiné les documents et selon moi, ils ne sont pas réellement utiles. On y trouve quelques rares et fugaces mentions de détention et de traitement de diverses personnes dont il est allégué qu'elles participaient aux activités « terroristes » du FLO ou de personnes soupçonnées de se livrer à ces activités. Seul le document de la Direction de la recherche de la Commission décrit le FLO en tant qu'organisation sur le plan historique. On y trouve aucune mention de la participation du FLO aux actes mentionnés aux alinéas 34(1) a), b) ou c) de la LIPR. Ce document mentionne brièvement les violations des droits de la personne par le FLO, mais les alinéas 34(1)a), b) ou c) ne visent pas ces violations.

[40]            Quelle que soit la norme de preuve - une croyance de bonne foi en une réelle possibilité fondée sur une preuve crédible - exigée afin d'établir des « motifs raisonnables » il n'y a pas, selon moi, des motifs raisonnables permettant de conclure, compte tenu de la preuve dont disposait l'agent des visas (y compris la preuve qui n'a pas été divulguée au demandeur, à son avocat ou au public), que le FLO est une organisation visée aux alinéas a), b) ou c) du paragraphe 34(1) de la LIPR. La preuve dont l'agent des visas a tenu compte n'étaye tout simplement pas cette conclusion. Par voie de conséquence, il n'y a aucun motif permettant de conclure que le demandeur est membre d'un groupe visé à l'alinéa 34(1)f).


[41]            Une conclusion d'exclusion est très importante pour un demandeur. Il faut faire preuve de circonspection afin d'être tout à fait certain que ces conclusions sont tirées comme il se doit. Le tribunal ne substituera pas son opinion à celle du décideur si l'analyse et le fondement de la décision sont raisonnables. Il n'en est pas ainsi en l'espèce. Une conclusion d'exclusion doit être fondée sur des motifs qui permettent de connaître la nature du groupe et de conclure à la participation du demandeur au groupe. S'il n'y a ni motif, ni fondement, le résultat est bien loin d'être raisonnable.

La décision relative à l'inclusion

[42]            Si la conclusion à laquelle je suis arrivée en ce qui concerne la décision en matière d'exclusion avait été différente, il ne serait pas nécessaire d'examiner la conclusion en matière d'inclusion. Si l'exclusion s'applique, le demandeur n'a tout simplement pas qualité de réfugié au sens de la Convention : Gonzalez c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1994] 3 C.F. 646 (C.A.). Toutefois, parce que la décision en matière d'exclusion n'est pas fondée, il faut examiner en particulier la décision selon laquelle M. Alemu n'est pas un réfugié au sens de la Convention.

[43]            Je vais maintenant examiner la conclusion en matière d'inclusion. Tel que susmentionné, après avoir énuméré diverses contradictions et incohérences dans les déclarations de M. Alemu, l'agent des visas a décidé qu'il ne pouvait pas se fonder sur les renseignements qui lui avaient été fournis et qu'il n'était donc pas convaincu que M. Alemu était un réfugié au sens de la Convention ni membre de la catégorie désignée pour considérations humanitaires.


[44]            Une décision relative au statut de réfugié est un exercice de nature prospective : Mileva c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1991] 3 C.F. 398 (C.A.); Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) c. Mark (1993), 151 N.R. 213 (C.A.F.). Il faut aborder l'examen des circonstances du point de vue du persécuteur, puisque c'est ce point de vue qui est déterminant en matière de persécution    : Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689; Alfred c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1994), 76 F.T.R. 231 (1re inst.).

[45]            Que le demandeur soit ou non un témoin crédible, cela ne l'empêche pas d'avoir qualité de réfugié si ses opinions et activités politiques sont susceptibles de conduire à son arrestation et à sa punition : Attakora c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1989), 99 N.R. 168 (C.A.F.). Il doit y avoir une possibilité raisonnable que le demandeur soit persécuté s'il retourne dans son pays d'origine : Salibian c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1990] 3 C.F. 250 (C.A.).

[46]            Malgré le manque de crédibilité du demandeur, si une preuve objective établit qu'un groupe en particulier est à risque, le tribunal doit déterminer si le demandeur correspond à ce profil. Si le tribunal n'effectue pas cette analyse, il s'agira d'une erreur susceptible de contrôle : Ramirez c. Canada (Solliciteur général) (1994), 88 F.T.R. 208 (1re inst.); Burgos-Rojas c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 162 F.T.R. 157 (1re inst.); Kamalanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2001), 15 Imm. L.R. (3d) 55 (C.F. 1re inst.).      


[47]            Dans les circonstances en cause, les documents annexés à l'affidavit de l'agent des visas et qui forment la pièce C mentionnent à plusieurs reprises le traitement de personnes dont on soupçonne qu'elles sont membres du FLO en Éthiopie. Les mentions sont telles qu'à mon avis, l'agent des visas aurait dû être averti et incité à se demander si M. Alemu était à risque s'il était renvoyé en Éthiopie. L'agent n'a pas effectué une telle analyse et la jurisprudence révèle que cette omission constitue une erreur fatale. Cela ne veut pas dire qu'une telle analyse entraînerait nécessairement une décision favorable. D'ailleurs, le document le plus récent de la pièce C date depuis maintenant déjà cinq ans. En conformité avec le principe de la décision prospective, il faudrait se fonder sur une preuve documentaire plus récente. En outre, je constate l'absence totale de renseignements concernant la situation en Afrique du Sud. Ce facteur n'a pas été soulevé et n'a pas été mentionné dans les documents; je ne ferai donc aucune observation à cet égard.

[48]            En fin de compte, pour les motifs énoncés, M. Alemu a démontré le bien-fondé des deux motifs et la demande de contrôle judiciaire sera accueillie. La question sera renvoyée pour nouvelle décision à un agent des visas différent. Une ordonnance sera rendue à cette fin.

[49]            Les avocats n'ont proposé aucune question de certification. Aucune question n'est certifiée.

                                                        _ Carolyn A. Layden-Stevenson _            

                                                                                                     Juge                                   

Ottawa (Ontario)

le 15 juillet 2004

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad.a., LL.L.


                                            ANNEXE A

                                                   des

               Motifs de l'ordonnance datée du 15 juillet 2004

                                                  dans

                                    TAMERAT ALEMU

                                                  - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                          IMM-3640-03

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES


Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27

11. (1) L'étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l'agent les visa et autres documents requis par règlement, lesquels sont délivrés sur preuve, à la suite d'un contrôle, qu'il n'est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

Immigration and Refugee Protection Act,

S.C. 2001, c. 27

11. (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document shall be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

(2) Ils ne peuvent être délivrés à l'étranger dont le répondant ne se conforme pas aux exigences applicables au parrainage.

(2) The officer may not issue a visa or other document to a foreign national whose sponsor does not meet the sponsorship requirements of this Act.


78. Les règles suivantes s'appliquent à l'affaire :

a) le juge entend l'affaire;

b) le juge est tenu de garantir la confidentialité des renseignements justifiant le certificat et des autres éléments de preuve qui pourraient lui être communiqués et dont la divulgation porterait atteinte, selon lui, à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui;

c) il procède, dans la mesure où les circonstances et les considérations d'équité et de justice naturelle le permettent, sans formalisme et selon la procédure expéditive;

d) il examine, dans les sept jours suivant le dépôt du certificat et à huis clos, les renseignements et autres éléments de preuve;

e) à chaque demande d'un ministre, il examine, en l'absence du résident permanent ou de l'étranger et de son conseil, tout ou partie des renseignements ou autres éléments de preuve dont la divulgation porterait atteinte, selon lui, à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui;

f) ces renseignements ou éléments de preuve doivent être remis aux ministres et ne peuvent servir de fondement à l'affaire soit si le juge décide qu'ils ne sont pas pertinents ou, l'étant, devraient faire partie du résumé, soit en cas de retrait de la demande;

g) si le juge décide qu'ils sont pertinents, mais que leur divulgation porterait atteinte à la sécurité nationale ou à celle d'autrui, ils ne peuvent faire partie du résumé, mais peuvent servir de fondement à l'affaire;

h) le juge fournit au résident permanent ou à l'étranger, afin de lui permettre d'être suffisamment informé des circonstances ayant donné lieu au certificat, un résumé de la preuve ne comportant aucun élément dont la divulgation porterait atteinte, selon lui, à la sécurité nationale ou à la sécurité d'autrui;

i) il donne au résident permanent ou à l'étranger la possibilité d'être entendu sur l'interdiction de territoire le visant;

j) il peut recevoir et admettre en preuve tout élément qu'il estime utile - même inadmissible en justice - et peut fonder sa décision sur celui-ci.

78. The following provisions govern the determination:

(a) the judge shall hear the matter;

(b) the judge shall ensure the confidentiality of the information on which the certificate is based and of any other evidence that may be provided to the judge if, in the opinion of the judge, its disclosure would be injurious to national security or to the safety of any person;

(c) the judge shall deal with all matters as informally and expeditiously as the circumstances and considerations of fairness and natural justice permit;

(d) the judge shall examine the information and any other evidence in private within seven days after the referral of the certificate for determination;

(e) on each request of the Minister or the Solicitor General of Canada made at any time during the proceedings, the judge shall hear all or part of the information or evidence in the absence of the permanent resident or the foreign national named in the certificate and their counsel if, in the opinion of the judge, its disclosure would be injurious to national security or to the safety of any person;

(f) the information or evidence described in paragraph (e) shall be returned to the Minister and the Solicitor General of Canada and shall not be considered by the judge in deciding whether the certificate is reasonable if either the matter is withdrawn or if the judge determines that the information or evidence is not relevant or, if it is relevant, that it should be part of the summary;

(g) the information or evidence described in paragraph (e) shall not be included in the summary but may be considered by the judge in deciding whether the certificate is reasonable if the judge determines that the information or evidence is relevant but that its disclosure would be injurious to national security or to the safety of any person;

(h) the judge shall provide the permanent resident or the foreign national with a summary of the information or evidence that enables them to be reasonably informed of the circumstances giving rise to the certificate, but that does not include anything that in the opinion of the judge would be injurious to national security or to the safety of any person if disclosed;

(i) the judge shall provide the permanent resident or the foreign national with an opportunity to be heard regarding their inadmissibility; and

(j) the judge may receive into evidence anything that, in the opinion of the judge, is appropriate, even if it is inadmissible in a court of law, and may base the decision on that evidence.

87. (1) Le ministre peut, dans le cadre d'un contrôle judiciaire, demander au juge d'interdire la divulgation de tout renseignement protégé au titre du paragraphe 86(1) ou pris en compte dans le cadre des articles 11, 112 ou 115.

87. (1) The Minister may, in the course of a judicial review, make an application to the judge for the non-disclosure of any information with respect to information protected under subsection 86(1) or information considered under section 11, 112 or 115.

(2) L'article 78 s'applique à l'examen de la demande, avec les adaptations nécessaires, sauf quant à l'obligation de fournir un résumé et au délai.

(2) Section 78, except for the provisions relating to the obligation to provide a summary and the time limit referred to in paragraph 78(d), applies to the determination of the application, with any modifications that the circumstances require.



                                            ANNEXE B

                                                   des

               Motifs de l'ordonnance datée du 15 juillet 2004

                                                  dans

                                    TAMERAT ALEMU

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DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES


Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27

11. (1) L'étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l'agent les visa et autres documents requis par règlement, lesquels sont délivrés sur preuve, à la suite d'un contrôle, qu'il n'est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

Immigration and Refugee Protection Act,

S.C. 2001, c. 27

11. (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document shall be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

12.(3) La sélection de l'étranger, qu'il soit au Canada ou non, s'effectue, conformément à la tradition humanitaire du Canada à l'égard des personnes déplacées ou persécutées, selon qu'il a la qualité, au titre de la présente loi, de réfugié ou de personne en situation semblable.

12.(3) A foreign national, inside or outside Canada, may be selected as a person who under this Act is a Convention refugee or as a person in similar circumstances, taking into account Canada's humanitarian tradition with respect to the displaced and the persecuted.


33. Les faits - actes ou omissions - mentionnés aux articles 34 à 37 sont, sauf disposition contraire, appréciés sur la base de motifs raisonnables de croire qu'ils sont survenus, surviennent ou peuvent survenir.

33. The facts that constitute inadmissibility under sections 34 to 37 include facts arising from omissions and, unless otherwise provided, include facts for which there are reasonable grounds to believe that they have occurred, are occurring or may occur.34. (1) Emportent interdiction de territoire pour raison de sécurité les faits suivants :

a) être l'auteur d'actes d'espionnage ou se livrer à la subversion contre toute institution démocratique, au sens où cette expression s'entend au Canada;

b) être l'instigateur ou l'auteur d'actes visant au renversement d'un gouvernement par la force;

c) se livrer au terrorisme;

d) constituer un danger pour la sécurité du Canada;

e) être l'auteur de tout acte de violence susceptible de mettre en danger la vie ou la sécurité d'autrui au Canada;

f) être membre d'une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elle est, a été ou sera l'auteur d'un acte visé aux alinéas a), b) ou c).

34. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on security grounds for

(a) engaging in an act of espionage or an act of subversion against a democratic government, institution or process as they are understood in Canada;

(b) engaging in or instigating the subversion by force of any government;

(c) engaging in terrorism;

(d) being a danger to the security of Canada;

(e) engaging in acts of violence that would or might endanger the lives or safety of persons in Canada; or

(f) being a member of an organization that there are reasonable grounds to believe engages, has engaged or will engage in acts referred to in paragraph (a), (b) or ©).

(2) Ces faits n'emportent pas interdiction de territoire pour le résident permanent ou l'étranger qui convainc le ministre que sa présence au Canada ne serait nullement préjudiciable à l'intérêt national.

(2) The matters referred to in subsection (1) do not constitute inadmissibility in respect of a permanent resident or a foreign national who satisfies the Minister that their presence in Canada would not be detrimental to the national interest.

95. (1) L'asile est la protection conférée à toute personne dès lors que, selon le cas :

a) sur constat qu'elle est, à la suite d'une demande de visa, un réfugié ou une personne en situation semblable, elle devient soit un résident permanent au titre du visa, soit un résident temporaire au titre d'un permis de séjour délivré en vue de sa protection;

95. (1) Refugee protection is conferred on a person when

(a) the person has been determined to be a Convention refugee or a person in similar circumstances under a visa application and becomes a permanent resident under the visa or a temporary resident under a temporary resident permit for protection reasons;


(2) Est appelée personne protégée la personne à qui l'asile est conféré et dont la demande n'est pas ensuite réputée rejetée au titre des paragraphes 108(3), 109(3) ou 114(4).

(2) A protected person is a person on whom refugee protection is conferred under subsection (1), and whose claim or application has not subsequently been deemed to be rejected under subsection 108(3), 109(3) or 114(4).97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n'a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally ...

99. (1) La demande d'asile peut être faite à l'étranger ou au Canada.

99. (1) A claim for refugee protection may be made in or outside Canada.

(2) Celle de la personne se trouvant hors du Canada se fait par une demande de visa comme réfugié ou de personne en situation semblable et est régie par la partie 1.      

(2) A claim for refugee protection made by a person outside Canada must be made by making an application for a visa as a Convention refugee or a person in similar circumstances, and is governed by Part 1.


Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés

139. (1) Un visa de résident permanent est délivré à l'étranger qui a besoin de protection et aux membres de sa famille qui l'accompagnent si, à l'issue d'un contrôle, les éléments suivants sont établis :

a) l'étranger se trouve hors du Canada;

b) il a présenté une demande conformément à l'article 150;

c) il cherche à entrer au Canada pour s'y établir en permanence;

d) aucune possibilité raisonnable de solution durable n'est, à son égard, réalisable dans un délai raisonnable dans un pays autre que le Canada, à savoir :

(i) soit le rapatriement volontaire ou la réinstallation dans le pays dont il a la nationalité ou dans lequel il avait sa résidence habituelle,

(ii) soit la réinstallation ou une offre de réinstallation dans un autre pays;

e) il fait partie d'une catégorie établie dans la présente section;

[...]

Immigration and Refugee Protection Regulations

139. (1) A permanent resident visa shall be issued to a foreign national in need of refugee protection, and their accompanying family members, if following an examination it is established that

(a) the foreign national is outside Canada;

(b) the foreign national has submitted an application in accordance with section 150;

(c) the foreign national is seeking to come to Canada to establish permanent residence;

(d) the foreign national is a person in respect of whom there is no reasonable prospect, within a reasonable period, of a durable solution in a country other than Canada, namely

(i) voluntary repatriation or resettlement in their country of nationality or habitual residence, or

(ii) resettlement or an offer of resettlement in another country;

(e) the foreign national is a member of one of the classes prescribed by this Division;

[...](i) sous réserve du paragraphe (3), ni lui ni les membres de sa famille visés par la demande de protection ne sont interdits de territoire.

(i) subject to subsection (3), the foreign national and their family members included in the application for protection are not inadmissible.

145. Est un réfugié au sens de la Convention outre-frontières et appartient à la catégorie des réfugiés au sens de cette convention l'étranger à qui un agent a reconnu la qualité de réfugié alors qu'il se trouvait hors du Canada.

145. A foreign national is a Convention refugee abroad and a member of the Convention refugees abroad class if the foreign national has been determined, outside Canada, by an officer to be a Convention refugee.

146. (1) Pour l'application du paragraphe 12(3) de la Loi, la personne dans une situation semblable à celle d'un réfugié au sens de la Convention appartient à l'une des catégories de personnes protégées à titre humanitaire outre-frontières suivantes :

a) la catégorie de personnes de pays d'accueil;

b) la catégorie de personnes de pays source.

146. (1) For the purposes of subsection 12(3) of the Act, a person in similar circumstances to those of a Convention refugee is a member of one of the following humanitarian-protected persons abroad classes:

(a) the country of asylum class; or

(b) the source country class.

(2) Les catégories de personnes de pays d'accueil et de personnes de pays source sont des catégories réglementaires de personnes qui peuvent obtenir un visa de résident permanent sur le fondement des exigences prévues à la présente section.

(2) The country of asylum class and the source country class are prescribed as classes of persons who may be issued permanent resident visas on the basis of the requirements of this Division.

147. Appartient à la catégorie de personnes de pays d'accueil l'étranger considéré par un agent comme ayant besoin de se réinstaller en raison des circonstances suivantes :

a) il se trouve hors de tout pays dont il a la nationalité ou dans lequel il avait sa résidence habituelle;

b) une guerre civile, un conflit armé ou une violation massive des droits de la personne dans chacun des pays en cause ont eu et continuent d'avoir des conséquences graves et personnelles pour lui.

147. A foreign national is a member of the country of asylum class if they have been determined by an officer to be in need of resettlement because

(a) they are outside all of their countries of nationality and habitual residence; and

(b) they have been, and continue to be, seriously and personally affected by civil war, armed conflict or massive violation of human rights in each of those countries.



                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-3640-03

INTITULÉ :                                        TAMERAT ALEMU

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                  OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                LE 24 JUIN 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

DATE DE L'ORDONNANCE :        LE 15 JUILLET 2004

COMPARUTIONS :

Mike Bell                                              POUR LE DEMANDEUR

Derek Rasmussen                                  POUR LE DÉFENDEUR

Toby Hoffmann                                     POUR LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL

(DEMANDE EN VERTU DE L'ARTICLE 87)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

BELL, UNGER, RILEY, MORRIS                   POUR LE DEMANDEUR

Ottawa (Ontario)

Morris Rosenberg                                             POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


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