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Date : 20020503

Dossier : T-2282-01

Référence neutre : 2002 CFPI 498

Ottawa (Ontario), le 3 mai 2002

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O'KEEFE

ENTRE :

PFIZER CANADA INC.

et PFIZER INC.

demanderesses

- et -

APOTEX INC.

et LE MINISTRE DE LA SANTÉ

défendeurs

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE O'KEEFE

[1]                 Il s'agit d'une requête visant à obtenir une ordonnance en vertu du paragraphe 6(7) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133, modifié (le Règlement AC), obligeant Apotex Inc. (Apotex) à produire des échantillons de l'azithromycine en vrac utilisé dans ses comprimés d'azithromycine, ainsi que des échantillons de ces comprimés. Les demanderesses demandent également la production de la présentation abrégée de drogue nouvelle (PADN) et la fiche maîtresse du médicament d'Apotex.


Historique

[2]                 Par lettre du 12 novembre 2001, Apotex a fourni un avis d'allégation en vertu du Règlement AC à l'égard des comprimés d'azithromycine en vue de l'administration par voie orale en doses de 250 mg. Dans l'avis d'allégation, Apotex a notamment allégué que la fabrication, la construction, l'utilisation ou la vente par Apotex de ses comprimés d'azithromycine ne contreferaient aucune revendication du médicament lui-même et aucune revendication de l'emploi du médicament dans le brevet canadien 1,314,876 (le brevet 876).

[3]                 Les demanderesses sont titulaires du brevet 876, qui revendique des droits exclusifs sur le produit dihydrate d'azithromycine sous forme de cristaux, certaines méthodes de préparation de ce produit et une composition pharmaceutique contenant ce produit.

[4]                 Dans l'avis d'allégation, Apotex allègue que ses comprimés contiendront de l'azithromycine, mais non le dihydrate.

[5]                 Apotex a informé les demanderesses que ses comprimés contiendront de l'isopropanolate d'azithromycine monohydrate, également appelé clathrate de l'isopropanol et de l'azithromycine (le monohydrate).

[6]                 Apotex a déposé la demande de brevet 2,245,398 (la demande 398), qui divulgue une méthode de préparation du monohydrate.

[7]                 Les demanderesses ont tenté de suivre les enseignements de la demande 398 en préparant un échantillon du monohydrate. Elles ont fourni une preuve que leur échantillon de monohydrate comportait 13 % du dihydrate. Elles ont également présenté une preuve qu'après une période de 12 mois, une partie de l'échantillon de monohydrate s'était transformée en dihydrate, de sorte que l'échantillon se composait alors de 43 % de monohydrate et de 57 % de dihydrate.

[8]                 Les demanderesses veulent obtenir la production d'échantillons de l'azithromycine d'Apotex pour déterminer si les comprimés d'azithromycine contiennent effectivement le dihydrate qui est revendiqué dans le brevet 876.

[9]                 Les demanderesses veulent également obtenir la production des extraits de la PADN qui précisent :

1.          Le procédé de fabrication de l'azithromycine en vrac;

2.          Le procédé de fabrication de comprimés employé pour les comprimés de 250 mg d'azithromycine;

3.          Les ingrédients spécifiques et les proportions dans lesquelles ils sont utilisés pour fabriquer les comprimés d'azithromycine d'Apotex;

4.          Des renseignements sur le développement pharmaceutique, notamment :


a) une description des différences entre le produit en vrac d'Apotex et le produit de référence canadien;

b) une description des différences entre le produit d'Apotex et le produit de référence canadien.

Les observations des demanderesses

[10]            Les demanderesses font valoir que le type de renseignements demandé est accessible à Apotex, mais ne leur est pas accessible d'une autre manière.

[11]            Les demanderesses soutiennent que le Règlement sur les aliments et drogues, C.R.C., ch. 870, oblige le fabricant à avoir des échantillons disponibles pour les fournir au ministre sur demande et à conserver ces échantillons en vue de l'inspection.

[12]            Les demanderesses plaident que la première personne doit établir, suivant la prépondérance de la preuve, que la divulgation devrait être ordonnée. Elles font valoir qu'il y a lieu d'appliquer le principe énoncé par le juge Rothstein dans l'arrêt Novartis AG et al. c. Abbott Laboratories Ltd. et al. 7 C.P.R. (4th) 264 (C.A.F.), prononcé le 19 juin 2000 :

¶ _17 Dans la décision SmithKline Beecham Pharma Inc. c. Apotex Inc. (1999), 3 C.P.R. (4th) 22, le juge McGillis a eu l'occasion d'ordonner la divulgation conformément au paragraphe 6(7). Au paragraphe 8, elle a dit :

  

[traduction] À mon avis, SmithKline a établi selon la probabilité la plus forte que la divulgation du processus entier de fabrication du chlorhydrate de paroxétine d'Apotex est nécessaire pour fournir une preuve pour traiter l'allégation de non-contrefaçon eu égard, du moins, au produit par procédé énoncé dans la revendication 5 du brevet 023. J'ajouterais aussi que le témoignage de M. Fallis selon lequel il serait « important » , pour trancher la question de la contrefaçon, d'évaluer le traitement effectué par Apotex après l'étape de la recristallisation révélée dans les documents divulgués n'a pas été ébranlé au cours du contre-interrogatoire.     [Non souligné dans l'original.]    

  

Dans la décision SmithKline, le juge McGillis a conclu que SmithKline avait établi selon la probabilité la plus forte que la divulgation était nécessaire. Elle a aussi tenu compte du critère de l'importance. Je pense que la question de savoir si la divulgation est nécessaire et est importante constitue une considération dont il faut tenir compte dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire conféré par le paragraphe 6(7).

   

[13]            Dans l'arrêt du 2 avril 2001 Glaxo Group Ltd. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) 11 C.P.R. (4th) 417, le juge en chef Richard mentionne l'arrêt Novartis,précité, et la production des extraits pertinents de la PADN à la page 424 dans les termes suivants :

¶ 37 Glaxo avait cependant d'autres moyens d'obtenir la divulgation des renseignements nécessaires. Le paragraphe 6(7) du Règlement prévoit un mécanisme qui permet à une première personne comme Glaxo d'obtenir la production des extraits pertinents d'une présentation modifiée de drogue nouvelle. Ce paragraphe prévoit ce qui suit : . . .

  

¶ 38 La Cour a récemment statué que la charge qui incombe à l'auteur d'une demande présentée en vertu du paragraphe 6(7) afin d'obtenir la production n'est pas lourde : Novartis Inc. c. Abbott Laboratories Inc., [2000] A.C.F. n ° 941 (C.A.F.) [publié à 7 C.P.R. (4th) 264].

  

¶ 39 Glaxo aurait pu en tout temps utiliser ce mécanisme et obtenir l'accès aux renseignements demandés. Elle ne l'a tout simplement pas fait et elle cherche maintenant à se soustraire aux conséquences de son omission. Il est clair que Glaxo a eu l'occasion d'obtenir les renseignements et a omis de le faire sans raison apparente, et c'est pourquoi on ne peut pas affirmer qu'il incombait à Apotex de produire des éléments de preuve relativement à une question soulevée par Glaxo.

   

[14]            Les demanderesses font valoir que la Cour peut considérer s'il y a eu une divulgation suffisante des faits pour permettre à la première personne de plaider efficacement sa cause. Elles soutiennent qu'en l'espèce, Apotex n'a pas fourni suffisamment de renseignements au sujet de sa formulation pour leur permettre de contester l'avis d'allégation.

[15]            Les demanderesses plaident que, si les échantillons d'Apotex indiquent la présence d'une proportion de dihydrate, l'allégation de non-contrefaçon formulée par Apotex n'est manifestement pas justifiée.

[16]            Les demanderesses soutiennent que la formation du dihydrate lors de la préparation du monohydrate selon les enseignements du brevet 398, ou par transformation, entraîne qu'il n'est pas clair que le produit en vrac et les comprimés d'Apotex ne contiennent pas de dihydrate, à l'encontre de l'avis d'allégation.

[17]            Les demanderesses citent l'arrêt du 4 janvier 2001 SmithKline Beecham Pharma Inc. et al. c. Apotex Inc. et al. 10 C.P.R. (4th) 338, dans lequel le juge Noël écrit à la page 347 :

¶ 30 Même si les avis d'allégation ne comportaient pas de lacune, SmithKline fait valoir que l'allégation demeure injustifiée, étant donné que la présomption de common law doit s'appliquer en sa faveur. Selon SmithKline, la juge des requêtes n'a pas donné effet à cette présomption.

  

¶ 31 Au soutien de cet argument, SmithKline invoque le fait que les seuls renseignements qu'elle a obtenus d'Apotex concernaient la méthode et le procédé relatifs à la fabrication de la forme anhydre; aucun renseignement n'a été fourni au sujet de la façon dont la forme anhydre serait préparée sous forme de comprimés et au sujet des mesures qui seraient prises pour éviter la transformation. Étant donné que seule Apotex était au courant de ces renseignements, SmithKline allègue que la juge des requêtes devait forcément présumer que le processus de fabrication de comprimés d'Apotex donnerait lieu à la conversion de la forme anhydre en semi-hydrate.

  

¶ 32 SmithKline n'a prouvé que l'une des deux conditions nécessaires pour que la présomption de common law s'applique :


... avant de donner effet à la présomption, la Cour devra être convaincue que les renseignements nécessaires ne se trouvent pas en la possession des intimées et qu'ils relèvent tout particulièrement de la connaissance de l'appelante. Il faudra aussi que les intimées établissent que les renseignements nécessaires n'ont pas été produits en preuve par l'appelante et qu'elles ne pouvaient les obtenir d'aucune autre façon. (Nu-Pharm, précité, p. 19.) (Non souligné dans l'original.)

  

¶ 33 Le dossier produit en appel n'indique pas que SmithKline a tenté d'une façon ou d'une autre d'obtenir ces renseignements ou d'en forcer la production. Pourtant, d'après la jurisprudence qui existait à l'époque pertinente, SmithKline aurait peut-être pu obtenir les renseignements en question en présentant la requête qui convenait (SmithKline Beecham Pharma Inc. c. Apotex Inc., (1999) 3 C.P.R. (4th) 22, p. 27). De plus, si la demande lui avait été faite, Apotex les aurait peut-être fournis volontairement. Il s'ensuit que SmithKline ne peut invoquer la présomption reconnue en common law en l'espèce.

   

Les demanderesses font valoir que, dans l'affaire SmithKline, précitée, la procédure avait été introduite avant que ne soit édicté le paragraphe 6(7), de sorte que, même selon le critère plus strict qui s'appliquait avant que ne soit édicté le paragraphe 6(7), la Cour d'appel envisageait la possibilité que la Cour puisse forcer la production d'échantillons.

[18]            Les demanderesses plaident que, si Apotex avait fourni les renseignements et les échantillons au moment où ils ont été demandés, elles auraient eu un délai d'environ 75 jours pour préparer et déposer leur preuve. Elles indiquent qu'il faudrait leur accorder un délai d'au moins 60 jours pour leur permettre de procéder aux expériences une fois qu'on leur aura fourni les échantillons et les renseignements demandés.


Les observations de la défenderesse Apotex

[19]            Apotex soutient que les allégations de fait au sujet de la contrefaçon qui sont contenues dans l'avis d'allégation sont présumées vraies.

[20]            Apotex plaide que, pour que la Cour puisse exercer son pouvoir discrétionnaire, il faut d'abord établir que les renseignements demandés sont pertinents par rapport aux questions en litige. Une fois cette condition remplie, selon Apotex, la Cour doit exercer son pouvoir discrétionnaire si la divulgation demandée est « nécessaire et importante » (Novartis, précité).

[21]            Apotex soutient que la seule revendication pertinente du brevet 876, soit la revendication 1, est une revendication du produit dihydrate et qu'il n'y a pas de revendication correspondante du procédé de fabrication de ce produit. Apotex en conclut que tout renseignement sur la façon dont elle fabrique ses comprimés d'azithromycine est non pertinent.

[22]            Apotex fait valoir que le brevet définit le dihydrate en indiquant qu'il doit avoir une teneur en eau de 4,6 %. Or, son azithromycine doit avoir une teneur en eau comprise entre 2 % et 3 %, de sorte qu'elle ne peut être couverte par le brevet 876.

[23]            Apotex cite la décision prononcée en novembre 1998 par le juge Rothstein dans l'affaire Hoffman-La Roche Ltd. et al. c. Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social et al. [1998] 85 C.P.R. (3d) 50, où il a écrit au paragraphe 10 :

Le paragraphe 6(7) s'applique aux instances en interdiction lorsque le tribunal juge nécessaire de prendre connaissance de certains extraits de la demande d'avis de conformité pour pouvoir rendre une décision sous le régime du Règlement. Il n'en sera pas ainsi dans chaque procédure et cette mesure n'est certainement pas nécessaire dans le cas qui nous occupe. J'estime que les observations formulées par le juge Stone sont concluantes en ce qui concerne la question en litige en l'espèce. Certes, si le chlorhydrate de ticlopidine de Pro Doc atteint le marché, il sera alors possible pour les demanderesses de l'analyser. Si l'on démontrait que ce produit renferme un des acides énumérés dans la revendication n ° 1, contrairement à ce qu'affirme Pro Doc dans son avis d'allégation, les conséquences pourraient effectivement être très graves pour Pro Doc. Eu égard aux circonstances de l'espèce, qui sont identiques à celles des affaires antérieures portant sur le brevet 170, j'accepte que Pro Doc désire que son avis d'allégation soit exact.

   

[24]            Apotex signale également la décision prononcée en mars 1999 par Madame le juge Sharlow (tel était alors son titre) dans l'affaire Hoffmann-La Roche Ltd. et al. c. Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social et al. [1999] 87 C.P.R. (3d) 251, où elle a écrit à la page 260 :

Hoffmann soutient qu'il serait injuste de la débouter de sa demande d'interdiction à cette étape-ci étant donné qu'elle serait alors privée de son droit de réclamer la divulgation de la présentation de drogue nouvelle, comme le paragraphe 6(7) du Règlement le lui permet et qu'elle serait ainsi privée de son droit de vérifier la véracité des faits énoncés dans l'avis d'allégation. Hoffmann n'a pas présenté de demande en vertu de cette disposition depuis qu'elle a reçu l'avis d'allégation en novembre 1998, plus de trois mois avant l'audition de la présente demande.

  

Apotex fait valoir que les demanderesses n'ont pas suivi correctement les enseignements de la demande 398 pour la préparation de leur échantillon de monohydrate. Elle soutient que les résultats de cet échec sont non pertinents par rapport à son allégation de non-contrefaçon.


[25]            Les questions en litige

1.          Faut-il prononcer une ordonnance obligeant Apotex à fournir aux demanderesses les échantillons et les renseignements demandés?

2.          Les demanderesses devraient-elle recevoir une prorogation de délai pour déposer un supplément de preuve?

Les dispositions législatives et réglementaires pertinentes

[26]            Les paragraphes 6(7) et (8) du Règlement AC disposent :

6.(7) Sur requête de la première personne, le tribunal peut, au cours de l'instance:

a) ordonner à la seconde personne de produire les extraits pertinents de la demande d'avis de conformité qu'elle a déposée et lui enjoindre de produire sans délai tout changement apporté à ces extraits au cours de l'instance;

    

b) enjoindre au ministre de vérifier que les extraits produits correspondent fidèlement aux renseignements figurant dans la demande d'avis de conformité.

(8) Tout document produit aux termes du paragraphe (7) est considéré comme confidentiel.

6.(7) On the motion of a first person, the court may, at any time during a proceeding,

(a) order a second person to produce any portion of the submission for a notice of compliance filed by the second person relevant to the disposition of the issues in the proceeding and may order that any change made to the portion during the proceeding be produced by the second person as it is made; and

(b) order the Minister to verify that any portion produced corresponds fully to the information in the submission.

  

(8) A document produced under subsection (7) shall be treated confidentially.


Analyse et décision

[27]            Question 1

Faut-il prononcer une ordonnance obligeant Apotex à fournir aux demanderesses les échantillons et les renseignements demandés?

La production d'échantillons

Les défendeurs invoquent la décision de 1996 Hoffman-La Roche Ltd. c. Canada (1996), 67 C.P.R. (3d) 484 (C.F. 1re inst.) pour établir que la production d'échantillons ne convient pas dans le cadre du Règlement AC. Cependant, la disposition en vertu de laquelle les demanderesses veulent obtenir la production des échantillons, soit le paragraphe 6(7) du Règlement AC, n'est entrée en vigueur qu'en 1998. Par conséquent, la décision de 1996 que l'on cite ne traite pas du paragraphe 6(7) du Règlement AC.


[28]            On ne peut forcer la production des échantillons en vertu du paragraphe 6(7), à mon avis, que si les échantillons ont été fournis au ministre dans le cadre de la demande d'avis de conformité. Apotex soutient que les demanderesses n'ont pas établi qu'Apotex ait fourni des échantillons au ministre et que, par conséquent, cette mesure ne devrait pas être ouverte. La question de savoir si Apotex a ou non fourni des échantillons au ministre est connue exclusivement par Apotex et le ministre, et n'est pas un élément aisément vérifiable par les demanderesses. Selon mon interprétation du paragraphe 6(7), on ne peut forcer la production d'échantillons que s'ils ont été fournis au ministre. L'alinéa 6(7)b) prévoit le pouvoir d'enjoindre au ministre de vérifier que les extraits produits correspondent fidèlement aux renseignements figurant dans la demande d'avis de conformité.

[29]            Je suis disposé à rendre une ordonnance supposant que des échantillons ont été fournis au ministre et que le paragraphe 6(7) autorise à en forcer la production. Dans le cas où il n'y aurait pas eu d'échantillons fournis au ministre, et le ministre est en mesure de vérifier la chose, Apotex ne sera pas tenue de produire des échantillons pour les demanderesses. L'ordonnance en disposera ainsi.

[30]            Il y a lieu d'ordonner la production

La pertinence des renseignements et des échantillons demandés est une condition préalable à l'exercice du pouvoir discrétionnaire en vertu du paragraphe 6(7). Suivant l'analyse du juge Rothstein dans l'arrêt Novartis, précité, il convient, en vue d'exercer le pouvoir discrétionnaire prévu au paragraphe 6(7), de considérer si la divulgation est nécessaire et importante.

[31]            La preuve présentée par les demanderesses a clairement établi la possibilité que les comprimés d'Apotex, censés ne contenir que le monohydrate, contiennent une partie de dihydrate. Les paragraphes 15 et 16 de l'affidavit de George Quallich sont ainsi conçus :


[traduction] Je crois comprendre que, par la suite, en réponse à une demande des demanderesses, Apotex a fourni certains renseignements dans une lettre du 4 décembre 2001 et joint à la lettre deux feuilles intitulées « Spécifications et certificat d'analyse - Matière première » . Il y est indiqué que le produit d'Apotex est l'isopropanolate d'azithromycine monohydrate. C'est là une autre désignation du clathrate de l'isopropanol et de l'azithromycine monohydrate, divulgué dans la demande 398.

  

Sur le fondement des renseignements contenus dans ces deux feuilles, il m'est impossible de déterminer si le produit contient du dihydrate. En outre, compte tenu du produit que Pfizer a fabriqué en suivant les instructions de la demande 398 et du fait que le clathrate se transforme avec le temps en dihydrate, j'estime que le produit commercial qu'envisage Apotex contiendra probablement une certaine proportion de dihydrate.

   

Si ce fait est établi, les demanderesses ont raison de prétendre que le produit d'Apotex contreferait le brevet 876.

[32]            La production des échantillons et des renseignements demandés est manifestement pertinente par rapport aux questions en litige, car elle permettra d'examiner si les comprimés comportent du dihydrate et contrefont le brevet 876. La production des échantillons est nécessaire pour permettre aux demanderesses d'analyser les comprimés de façon que la Cour ait accès aux renseignements pertinents pour déterminer si l'avis d'allégation est justifié.

[33]            Apotex a fait valoir que ses comprimés ont une teneur en eau différente de celle du dihydrate selon les revendications du brevet 876. Il s'agit là d'une allégation que les demanderesses n'ont pas encore contrôlée par des essais. Même si les comprimés ont une teneur en eau différente de celle de comprimés composés de dihydrate pur, la production des échantillons permettra aux demanderesses de déterminer si les comprimés d'Apotex contiennent du dihydrate. À mon avis, c'est là un élément d'information important pour l'issue de la présente procédure.


[34]            Dans l'exercice de mon pouvoir discrétionnaire, d'après la preuve présentée, je suis convaincu, suivant la prépondérance de la preuve, que la production des renseignements et des échantillons demandés est nécessaire pour fournir à la Cour le fondement probatoire lui permettant d'apprécier les allégations de non-contrefaçon.

[35]            Question 2

Les demanderesses devraient-elle recevoir une prorogation de délai pour déposer un supplément de preuve?

Les demanderesses devraient avoir la possibilité d'examiner les échantillons et les renseignements produits par Apotex et de déposer un supplément de preuve. Je suis donc disposé à accorder aux demanderesses une prorogation de délai de 60 jours à compter de la production des échantillons et des renseignements par Apotex en vue de produire des éléments de preuve.

[36]            La requête des demanderesses est accueillie.

[37]            Les dépens suivront l'issue de la cause.


ORDONNANCE

[38]            LA COUR ORDONNE :

1.          Apotex fournira aux demanderesses des extraits de la PADN qui précisent :

a)          Le procédé de fabrication de l'azithromycine en vrac;

b)          Le procédé de fabrication de comprimés employé pour les comprimés de                       250 mg d'azithromycine;

c)          Les ingrédients spécifiques et les proportions dans lesquelles ils sont utilisés pour fabriquer les comprimés d'azithromycine d'Apotex;

d)          Les renseignements sur le développement pharmaceutique, notamment :

i)           une description des différences entre le produit en vrac d'Apotex et le produit de référence canadien;

ii)          une description des différences entre le produit d'Apotex et le produit de référence canadien.

2.          La production des échantillons est ordonnée de la façon suivante :

a)          Si elle a fourni au ministre des échantillons de ses comprimés d'azithromycine dans le cadre de sa demande d'avis de conformité, Apotex doit fournir aux demanderesses :

i)           100 comprimés d'azithromycine, choisis au hasard dans chaque lot fabriqué jusqu'à maintenant selon le procédé de formulation d'Apotex;


ii)          100 grammes d'azithromycine en vrac utilisé pour la fabrication de chaque lot de comprimés d'azithromycine d'Apotex fabriqué jusqu'à maintenant.

b)          Dans le cas où elle n'a pas fourni d'échantillons de ses comprimés d'azithromycine dans le cadre de sa demande d'avis de conformité, Apotex doit communiquer ce renseignement et ne sera pas tenue de produire d'échantillons pour les demanderesses.

3.          Le paragraphe 6(8) du Règlement AC portant sur la confidentialité s'appliquera aux éléments produits en application de la présente ordonnance.

4.          Tous les renseignements et échantillons à fournir seront fournis sous réserve d'une ordonnance de confidentialité. Les parties conviendront des conditions de l'ordonnance de confidentialité et du moment de la divulgation dans un délai de 10 jours à compter de la date de la présente ordonnance. Tout différend à cet égard sera tranché sur la base d'un autre avis de requête.

5.          À l'égard des extraits de la PADN produits par Apotex en application des paragraphes 1 et 2, le ministre de la Santé vérifiera que les extraits produits correspondent fidèlement aux renseignements fournis dans la PADN en cours d'instruction par le ministre.

6.          Le délai pour le dépôt de la preuve des demanderesses est prorogé de 60 jours à compter de la production des éléments prévus dans la présente ordonnance.


7.          Les dépens suivront l'issue de la cause.

                                                                                 « John A. O'Keefe »      

                                                                                                             Juge                      

Ottawa (Ontario)

Le 3 mai 2002

  

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

  

DOSSIER :                                            T-2282-01

INTITULÉ :                                           PFIZER CANADA INC. ET AL. c. APOTEX INC. ET AL.

LIEU DE L'AUDIENCE :                   TORONTO

DATE DE L'AUDIENCE :                 28 JANVIER 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE DU JUGE O'KEEFE    

DATE DES MOTIFS ET DE L'ORDONNANCE : 3 MAI 2002

COMPARUTIONS :

M. ANTHONY G. CREBER                                           POUR LES DEMANDERESSES

M. ANDREW R. BRODKIN                                        POUR LA DÉFENDERESSE,

APOTEX INC.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

GOWLING LAFLEUR HENDERSON LLP                 POUR LES DEMANDERESSES

Ottawa (Ontario)

GOODMANS LLP                                                          POUR LA DÉFENDERESSE,

Toronto (Ontario)                                                              APOTEX INC.

MORRIS ROSENBERG                                                 POUR LE DÉFENDEUR,

Sous-procureur général                                                     LE MINISTRE DE LA SANTÉ

  
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