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Date : 20000914


Dossier : T-1158-99


ENTRE :


ANCHOR BREWING COMPANY,


demanderesse,


- et -


THE SLEEMAN BREWING & MALTING CO. LTD.,


défenderesse.





MOTIFS DE L'ORDONNANCE


Le juge MacKAY


[1]          La défenderesse interjette appel d'une partie de la décision de Madame le protonotaire Roza Aronovitch, datée du 19 juillet 2000, de refuser d'ordonner de répondre à certaines questions posées à l'interrogatoire préalable de son représentant, auxquelles la demanderesse avait refusé de répondre.

[2]          Cet appel est intervenu dans une action en contrefaçon de marque de commerce et en commercialisation trompeuse, intentée par la voie d'une déclaration de la demanderesse déposée le 23 juin 1999. Dans l'action, la demanderesse cherche à obtenir un jugement déclaratoire, un redressement par voie d'injonction et une réparation pécuniaire pour la production, la publicité, l'offre à la vente et la vente de bière au Canada en liaison avec la marque de commerce STEAM. Selon ce qui est allégué, cette activité de la défenderesse contrefait la marque de commerce de la demanderesse et crée de la confusion avec cette marque. La demanderesse est propriétaire de la marque de commerce déposée portant le numéro LMC362 494.

[3]          En réponse à la déclaration de la demanderesse, la défenderesse a choisi de procéder à un interrogatoire préalable oral avant de signifier et déposer sa défense, comme le permet le paragraphe 236(2) des Règles de la Cour fédérale (1998). Au cours de l'interrogatoire préalable du représentant de la demanderesse, la plupart des questions de la défenderesse ont reçu des réponses, soit pendant l'interrogatoire même, soit après un examen ultérieur. Un certain nombre d'autres questions ont fait l'objet d'un refus de répondre et la requête de la défenderesse pour exiger des réponses a conduit à la décision attaquée. Dans son ordonnance, le protonotaire enjoignait de répondre à certaines questions, mais refusait d'ordonner de répondre aux autres, qui font l'objet de l'appel.

[4]          Lors de l'instruction de l'affaire, dans le cours des débats, les avocats sont parvenus à régler entre eux divers points sur certaines questions. Finalement, l'avocat de la défenderesse a retiré sans réserve les questions cotées P353 - L1; P550 - L13; P553 - L18 et P555 - L24. En outre, l'avocat de la demanderesse ayant pris l'engagement que la défenderesse répondrait aux questions P508 - L2; P508 - L22 et P509 - L18, l'avocat de la défenderesse a retiré ces questions de l'examen. Au total, il reste 21 questions qui sont en cause, toutes considérées comme reliées de façon générale aux activités de la demanderesse aux États-Unis, principalement à la demande d'enregistrement, à l'enregistrement de la marque de commerce de la demanderesse, aux litiges et aux poursuites touchant cette marque aux États-Unis.

La question en litige

[5]          Les parties conviennent que la question en litige devant la Cour est de savoir si le protonotaire a commis une erreur de droit flagrante.

[6]          Les avocats conviennent que le critère applicable est celui de l'arrêt Canada c. Aqua-Gem Investments Limited (1993), 149 N.R.273 (C.A.F.). Dans la révision d'une décision discrétionnaire du protonotaire, la Cour n'intervient que dans les cas où elle conclut que le protonotaire a commis une erreur de droit flagrante, en ce sens que la décision se fonde sur un mauvais principe ou sur une mauvaise appréciation des faits, ou elle est entachée d'erreur et porte sur une question déterminante sur l'issue finale du principal.

[7]          Je souscris à l'opinion de Madame le juge Reed dans l'arrêt James River Corp. of Virginia c. Hallmark Cards, Inc. et al (1997), 72 C.P.R. (3d) 157 (C.F. 1re inst.), selon laquelle une ordonnance qui enjoint de donner des réponses dans le cadre d'un interrogatoire préalable, question d'ordre interlocutoire dans le processus de préparation de l'instruction, est généralement considérée comme une décision discrétionnaire.

[8]          La défenderesse insiste sur le fait que le protonotaire a commis une erreur flagrante en déclarant, au sujet de la situation de la défenderesse qui commençait l'interrogatoire préalable avant le dépôt de sa défense :

[TRADUCTION] Bien que les Règles n'apportent aucune restriction sur l'étendue de tels interrogatoires, la jurisprudence de la Cour écarte l'interrogatoire préalable avant l'instruction quand il est pratiqué à l'aveuglette en vue d'établir une défense et spécifiquement dans le contexte de la présomption de validité de la marque en droit. (Syntex Pharmaceuticals International Ltd. v. Apotex Inc. (1984), 2 C.P.R. (3d) 533; F.P. Bourgault Industries... c. Flexi-Coil, (1994), 55 C.P.R. (3d) 352)1

[9]          Au nom de la défenderesse, il est allégué que cette déclaration ne fait pas de distinction entre les caractéristiques du droit des marques de commerce, qui sont évidentes en l'espèce, et le principe en jeu dans les affaires citées, qui concerne les actions en contrefaçon de brevet. En l'espèce, le seul acte de procédure, la déclaration, s'appuie sur des droits revendiqués non seulement au titre de la marque de commerce déposée, mais également au titre de droits de marque reconnus en common law, eux aussi visés par l'allégation de contrefaçon résultant de la confusion causée par les actes de la défenderesse. La défenderesse renvoie aux alinéas et sous-alinéas 1(d), (e) iv), aux paragraphes 4 et 5 et peut-être 12 de la déclaration, où la demanderesse revendique ses droits sur la marque de commerce STEAM, sans les limiter à la marque de commerce déposée.

[10]          Je conviens que dans la mesure où la déclaration du protonotaire s'applique au droit des marques de commerce, elle devrait être limitée aux circonstances reliées à des marques déposées, mais cette déclaration n'est pas le fondement de sa décision au sujet des questions soulevées dans l'appel. Après avoir signalé la pertinence des questions reliées au volume des affaires et à la notoriété de la défenderesse auprès des Canadiens aux États-Unis en rapport avec les faits plaidés qui s'appuient sur ces affaires et cette réputation auprès des Canadiens voyageant aux États-Unis, elle a par contre déclaré au sujet des questions soulevées en l'espèce :

. . . [TRADUCTION] Je ne considère pas les questions reliées aux demandes d'enregistrement, aux enregistrements, aux litiges et aux poursuites aux États-Unis comme pertinentes dans le contexte d'une action en contrefaçon intentée au Canada. Il n'est donc pas nécessaire de répondre à ces questions1.

[11]          La demanderesse fait valoir que les questions en cause soulevées par la défenderesse semblent découler de documents produits par la demanderesse, sans tenir compte de la nécessité d'établir un lien entre ces questions et les faits invoqués. Elle insiste sur l'absence de pertinence des questions par rapport aux moyens invoqués dans la déclaration.

[12]          Il est reconnu que les questions en cause ont trait à la demande d'enregistrement, à l'enregistrement, aux litiges et aux poursuites aux États-Unis. Les deux parties s'appuient sur des décisions de la Cour qui, dans diverses autres causes, ont jugé que ces questions visaient des éléments de preuve pertinents, ou non pertinents par rapport aux points en litige. En l'espèce, je conviens que la défenderesse a le droit de poser des questions au sujet de la confusion alléguée par rapport aux intérêts de la demanderesse sur les droits de marque non déposée. Cela dit, je ne suis pas persuadé par l'argumentation de l'avocat de la défenderesse lorsqu'il soutient que les questions ici visées, s'agissant d'enregistrement de marques de commerce aux États-Unis et d'activités connexes, sont pertinentes par rapport aux prétendus intérêts de la demanderesse sur des droits de marque de commerce non déposée au Canada. En résumé, je ne suis pas convaincu que les questions en cause sont pertinentes par rapport aux faits et aux arguments invoqués dans la déclaration.

[13]          Dans les circonstances, je ne suis pas convaincu que le protonotaire Aronovitch a commis une erreur flagrante dans son ordonnance du 19 juillet 2000. L'appel de la défenderesse portant sur les questions non tranchées à l'audience est rejeté. Une ordonnance est établie en conséquence, dépens à suivre.




     W. Andrew MacKay                     


     JUGE                        



OTTAWA (Ontario)

Le 14 septembre 2000




Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.





Date : 20000914


Dossier : T-1158-99


OTTAWA (Ontario), le 14 septembre 2000

EN PRÉSENCE DE M. LE JUGE MacKAY


ENTRE :


ANCHOR BREWING COMPANY,


demanderesse,


- et -


THE SLEEMAN BREWING & MALTING CO. LTD.,


défenderesse.





     SUR requête de la défenderesse, datée du 28 juillet, visant :

     1.      Une ordonnance annulant l'ordonnance du protonotaire adjoint Roza Aronovitch, datée du 19 juillet 2000, en ce qu'elle rejetait la demande de la défenderesse qu'il soit enjoint au représentant de la demanderesse, Anchor Brewing Company, Frederick Maytag, de comparaître de nouveau et de répondre aux questions suivantes soulevées à son interrogatoire préalable : P216 - L13; P230 - L22;
         P231 - L16; P234-5 - L23 à L6; P240 - L6;    P241 - L12; P242 - L2; P242 - L17;
         P243 - L6; P295 - L14; P296 - L18; P298 - L3; P300 - L10; P301 - L8;
         P301 - L24; P353 - L1; P432 - L3; P439 - L6; P439 - L9; P441 - L11;
         P464 - L14; P495 - L24; P508 - L2; P508 - L22; P509 - L18; P550 - L13;
         P553 - L18 et P555 - L24;
     2.      Une ordonnance adjugeant les dépens à la défenderesse, à tous les niveaux;
     3.      Tout autre redressement proposé par l'avocat et autorisé par la Cour;

     Les avocats des parties ayant été entendus à Toronto, le 14 août 2000 et l'avocat de la défenderesse ayant alors retiré de l'appel :

     a)      sans réserve, les questions P353 - L1; P550 - L13; P553 - L18;
         P555 - L24;     
     b)      eu égard à l'engagement de l'avocat de la demanderesse d'y répondre, les questions P508 - L2; P508 - L22, P509 - L18;

     ET CONSIDÉRANT que la Cour a réservé sa décision, et eu égard aux observations faites à l'audience :



     O R D O N N A N C E


     IL EST STATUÉ :

     1.      La demande de la défenderesse portant sur les questions non tranchées à l'audience est rejetée.
     2.      Les dépens sont à suivre.










     W. Andrew MacKay


     JUGE



Traduction certifiée conforme


Martine Guay, LL.L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


                    


N º DU GREFFE :              T-1158-99
INTITULÉ DE LA CAUSE :      ANCHOR BREWING COMPANY c. THE SLEEMAN BREWING & MALTING CO. LTD.

LIEU DE L'AUDIENCE :          TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE :          LE 14 AOÛT 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE M. LE JUGE MACKAY

EN DATE DU :              14 SEPTEMBRE 2000



ONT COMPARU :


ELLIOTT SIMCOE                           POUR LA DEMANDERESSE

ET GLEN TREMBLAY

KENNETH McKAY                          POUR LA DÉFENDERESSE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :


SMART & BIGGAR                          POUR LA DEMANDERESSE

OTTAWA (ONTARIO)

SIM, HUGHES, ASHTON & McKAY              POUR LA DÉFENDERESSE
__________________

     1      Ordonnance - Directives, dossier No T-1158-99, daté du 19 juillet 2000 (C.F. 1re inst.), p. 3.

     2      Id., à la p. 4.

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