Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

     IMM-2103-95

E n t r e :

     MIRANDA WAI CHU YUEN, MANDY MAN YEE CHAN

     et ROXANNA MAN WAH CHAN et ERIC MING YIN CHAN,

     représentés par leur tuteur à l'instance,

     MIRANDA WAI CHU YUEN,

     requérants,

     et

     MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE ROTHSTEIN

     La Cour est saisie d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision en date du 6 juillet 1995 par laquelle un agent des visas a rejeté la demande de résidence permanente présentée par la requérante Miranda Yuen en son nom personnel et au nom de ses enfants1. La demande a été présentée sous la catégorie des entrepreneurs. L'agent des visas a conclu que Mme Yuen pouvait à certaines conditions être considérée comme un entrepreneur. Il a toutefois rejeté sa demande pour deux motifs. Le premier était que son mari était une personne non admissible au Canada pour des raisons d'ordre criminel. Il a conclu que son mari était à sa charge et que, contrairement à ce qu'elle prétendait, elle et son mari n'étaient pas séparés. En conséquence, suivant l'alinéa 9(1)a) du Règlement sur l'immigration, DORS/78-172 (modifié), aucun visa ne devait être délivré à la requérante2.

     Le second motif invoqué par l'agent des visas pour justifier son rejet de la demande de la requérante était qu'il était d'avis que la requérante était une personne non admissible de son propre chef du fait qu'elle faisait partie du crime organisé, plus précisément d'une triade de Hong Kong et qu'elle était par conséquent visée par l'alinéa 19(1)c.2) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (modifiée)3.

     En ce qui concerne le premier motif invoqué pour rejeter sa demande, la requérante affirme qu'elle s'est séparée de son mari en 1981 et que c'est l'alinéa 9(2)a) du Règlement qui s'applique en pareil cas :

     9.(2) Pour l'application du paragraphe (1), l'agent des visas :         
     a) n'est pas tenu de déterminer si une personne à charge fait partie d'une catégorie de personnes non admissibles si cette personne est :         
         (1) soit le conjoint de la personne qui présente la demande de visa " le demandeur " lorsque, sur la foi d'une preuve écrite, un agent d'immigration est convaincu que le mariage du demandeur et de ce conjoint a dans les faits cessé d'exister à la suite de leur séparation [...]         

Elle affirme que, si l'agent des visas avait correctement interprété l'expression " le mariage du demandeur et de ce conjoint a dans les faits cessé d'exister à la suite de leur séparation ", il aurait conclu, vu l'ensemble de la preuve, que l'alinéa 9(2)a) s'appliquait et qu'il ne se serait pas fondé sur la non-admissibilité du mari de la requérante pour rejeter la demande de visa de la requérante.

     Dans sa décision, l'agent des visas déclare :

     [TRADUCTION]         
     Malgré le fait que vous avez déclaré que vous êtes séparée de votre mari, je ne suis pas convaincu que cette séparation est suffisamment valable pour vous soustraire à l'exigence prescrite par le Règlement et suivant laquelle M. Chan ne doit pas appartenir à une catégorie de personnes non admissibles.         

     [...]

     Je prends acte de l'entente de séparation qui a été dressé à Hong Kong le 1er avril 1982 et qui précise les modalités de votre séparation de votre mari, et je reconnais que vous avez vraisemblablement vécu séparément la plupart du temps au cours des 14 dernières années. Mais j'ai également tenu compte de votre réticence avouée à demander le divorce et de la collaboration constante dont vous et votre mari avez fait preuve dans vos entreprises commerciales et dans vos affaires familiales. Il me semble donc que, bien que votre mariage ait changé à certains égards au cours des 25 dernières années, il demeure très important tant pour vous-même que pour votre mari, et j'estime que les obligations mutuelles contractées au début de vos rapports ne sont pas entièrement dissoutes.         

Dans les notes qu'il a rédigées à la suite de l'entrevue de la requérante, qui a eu lieu le 10 mars 1995, l'agent des visas écrit :

     [TRADUCTION]         
     Son état matrimonial est compliqué. Mme Yuen m'a semblé sincère lorsqu'elle m'a expliqué la nature de ses rapports avec son mari. Elle a précisé que son mari ne désirait pas pour le moment vivre au Canada. Je ne suis cependant pas convaincu que leur séparation justifierait de biffer le nom de M. Chan de la demande. J'ai l'impression que nous sommes toujours en présence d'une cellule familiale. Malgré le relâchement des rapports entre le mari et la femme, je suis porté à croire que les réticences de Mme Yuen à divorcer s'expliquent par le fait qu'elle se perçoit et qu'elle perçoit son mari comme formant toujours une famille qui lui confère certains droits, etc.         
     Finalement, sa crédibilité. Il ne s'agit manifestement pas d'une femme sotte. Il ressort de l'ensemble des renseignements versés au dossier au sujet de la réputation de criminel dont Chan fait l'objet et du fait qu'elle reconnaît que la population semble le percevoir comme un caïd, que sa loyauté envers lui va au-delà de ce à quoi on s'attendrait normalement. Ainsi, si elle sait réellement qui il est, elle se présente à moi sous un faux jour; si elle l'ignore, elle devrait le savoir. Je suis amené à croire qu'elle en sait vraisemblablement assez au sujet des véritables activités de son mari pour devoir couper toute relation avec lui qui dépasse celles qu'elle a eues jusqu'à présent, si elle veut présenter une demande honnête qui n'est pas entachée par Chan.         

     L'avocate de la requérante affirme que l'expression " le mariage du demandeur et de ce conjoint a dans les faits cessé d'exister à la suite de leur séparation " que l'on trouve à l'alinéa 9(2)a) doit être interprétée en conformité avec des principes du droit de la famille. L'avocat de la requérante soutient que, suivant les éléments de preuve qui ont été présentés en l'espèce et qui ont été acceptés par l'agent des visas, la requérante avait cessé dans les faits d'habiter avec son mari et ni l'un ni l'autre n'avait l'intention de reprendre la vie commune et que, par conséquent, l'alinéa 9(2)a) s'applique. Malgré le fait que la requérante et son mari semblent avoir vécu à la même adresse jusqu'à ce qu'elle quitte Hong Kong pour le Canada en 1990, l'agent des visas a conclu que la requérante et son mari avaient " vraisemblablement vécu séparément la plupart du temps au cours des 14 dernières années ". Il a également reconnu au cours du contre-interrogatoire qu'il a subi au sujet de son affidavit qu'il ne croyait pas qu'ils reprendraient la vie commune.

     L'avocate de la requérante invoque l'arrêt Mayberry v. Mayberry, [1971] 2 O.R. 378 (C.A.) à l'appui de son argument que, si des personnes qui vivent sous le même toit font chambre à part, elles sont considérées comme ne vivant pas ensemble. Diverses définitions tirées de dictionnaires ont également été citées, de même que des dispositions de la Loi sur le divorce, L.R.C. (1985), ch. 3 (2e suppl.) et de la Loi sur le droit de la famille de l'Ontario, R.S.O. 1990, ch. F-3, pour démontrer que, par séparation, il faut entendre que les conjoints mariés ne vivent plus ensemble et qu'ils n'ont pas l'intention de reprendre la vie commune. Si, effectivement, le critère de l'alinéa 9(2)a) est effectivement celui de la cessation de la cohabitation et de l'absence d'intention de reprendre la vie commune, je serais d'accord avec l'avocate de la requérante pour dire que les éléments de preuve portés à la connaissance de l'agent des visas et acceptés par lui satisfaisaient à ce critère.

     Je conclus toutefois que le critère sur lequel se fonde l'avocat de la requérante n'est pas celui qui est visé à l'alinéa 9(2)a). En effet, contrairement à ce que prétend l'avocate de la requérante, le raisonnement suivi par la Cour d'appel dans l'arrêt Mayberry v. Mayberry s'accorde, de façon générale, avec le raisonnement contextuel adopté par l'agent des visas en l'espèce. Ainsi, dans l'arrêt Mayberry v. Mayberry, le juge Jessup déclare, aux pages 378 et 379 :

     [TRADUCTION]         
     [...] Il semble clair, au vu de la preuve, que les parties en sont peu à peu arrivées à une situation dans laquelle, malgré le fait qu'elles vivent sous le même toit, elles sont séparées l'une de l'autre au sens du sous-alinéa 4(1)e)(i) de la loi. Il y a eu une répudiation réciproque du lien conjugal qui s'est soldée par la dissolution permanente du mariage. Les parties en sont graduellement venues à rompre toute communication entre elles. Elles ne prennent pas leur repas en commun, elles ne participent à aucune activité sociale ensemble et, finalement, en 1995, la femme a quitté le lit conjugal et, vraisemblablement sans que son mari ne proteste, a commencé à faire chambre à part [...]         

Il est évident que, dans l'arrêt Mayberry v. Mayberry, le tribunal était d'avis que les parties s'étaient séparées en raison du fait qu'il y avait eu une " dissolution permanente du mariage ", comme en faisaient foi l'absence virtuelle de communication entre les parties, le fait qu'elles ne prenaient plus leur repas en commun et qu'elles ne participaient plus à aucune activité sociale ensemble, sans compter le fait qu'elles faisaient désormais chambre à part.

     Qui plus est, bien que le droit de la famille soit d'une utilité incontestable pour interpréter les termes matrimoniaux que renferme la Loi sur l'immigration, il est également nécessaire de tenir compte du contexte dans lequel les termes sont employés dans la Loi sur l'immigration. Dans les cas où ils doivent déterminer si des personnes sont séparées, les agents de visas doivent tenir compte des circonstances particulières de l'espèce, y compris, le cas échéant, des coutumes qui ont cours dans des pays et des cultures autres que le Canada. Je suis d'accord avec l'avocate de la requérante pour dire qu'on doit faire preuve de prudence lorsqu'on tient compte de ces facteurs. En revanche, il est également nécessaire d'éviter d'attribuer aveuglément des coutumes et des situations propres au Canada lorsqu'on examine une séparation survenue dans une culture étrangère.

     L'objet de l'article 9 du Règlement sur l'immigration est de considérer comme un groupe familial la personne qui demande un visa d'immigrant au Canada ainsi que toutes les personnes à sa charge, que celles-ci l'accompagnent ou non. Si une seule de ces personnes à charge n'est pas admissible, le requérant ne l'est pas non plus.

     Aux termes de l'alinéa 9(2)a) du Règlement, l'agent des visas doit décider s'il est nécessaire de déterminer si un conjoint appartient à une catégorie de personnes non admissibles. Si l'agent des visas est convaincu que le mariage du requérant et de son conjoint a dans les faits cessé d'exister à la suite de leur séparation, il n'est pas tenu de déterminer si le conjoint séparé fait partie d'une catégorie de personnes non admissibles. De toute évidence, le législateur visait ainsi à s'assurer que, dans la mesure du possible, les membres d'une même famille ne sont pas séparés par suite de la délivrance d'un visa d'immigrant au requérant. Lorsque des conjoints ne sont plus unis par les liens du mariage, l'octroi d'un visa d'immigrant au requérant n'aura pas pour effet de désunir les membres de la famille. Cependant, si l'agent des visas n'est pas convaincu que le mariage du requérant et de son conjoint a dans les faits cessé d'exister à la suite de leur séparation, il doit se conformer à l'alinéa 9(1)a).

     Suivant les éléments de preuve qui ont été portés à la connaissance de l'agent des visas, les circonstances de l'espèce sont pour le moins inusitées. Suivant la preuve, le mari de la requérante était la " tête de dragon " de la triade Wo Hop To de Hong Kong. Une triade est une fraternité criminelle secrète dont les quartiers généraux sont principalement situés à Hong Kong ou à Taïwan. Les triades se livrent à des activités criminelles tant à l'échelle nationale ainsi qu'à l'échelle internationale. La triade Wo Hop To fait partie du groupe Wo, la deuxième plus grande triade de Hong Kong. Suivant la preuve, la triade Wo Hop To est liée à des activités criminelles aux États-Unis, en Australie et au Canada.

     Suivant un rapport publié en décembre 1992 par le sous-comité permanent des enquêtes du comité des affaires gouvernementales du Sénat américain intitulé The New International Criminal and Asian Organized Crime Report, le mari de la requérante exploiterait des salons de mah-jong, des restaurants et des salons de massage et se livrait à des activités illégales de jeu à Hong Kong. Suivant ce même rapport, d'autres têtes dirigeantes de la triade Wo Hop de Hong Kong encourageaient activement le trafic de l'héroïne, le jeu illégal, le prêt usuraire, l'extorsion et faisaient entrer et sortir clandestinement des étrangers. Suivant ce rapport, divers dirigeants du Wo Hop To situés un peu partout à travers le monde relèveraient du mari de la requérante.

     L'agent des visas a formé l'opinion que la relation conjugale entre la requérante et son mari était complexe. Suivant la preuve, en 1981, le mari a pris une maîtresse, ce qui a conduit, en 1982, à l'entente de séparation intervenue entre la requérante et son mari. La requérante et son mari ont néanmoins continué à vivre à la même adresse. Le mari de la requérante a nommé celle-ci comme administratrice ou associée dans plusieurs entreprises après leur séparation. Dans certains cas, la requérante faisait partie des actionnaires. Dans d'autres, elle était coadministratrice avec son mari, la maîtresse de celui-ci et d'autres personnes qui, suivant la preuve, faisaient partie de la triade de son mari. Il ressort à l'évidence du nom de certaines de ces entreprises, en l'occurrence Novel Club, Tennochy Novel Seafood Restaurant, Sunny Paradise Sauna et New Paradise Health Club, que ces entreprises sont de la même nature que celles que, selon le rapport du Sénat des États-Unis, le mari de la requérante exploiterait. En tout, il y avait au moins six entreprises dont la requérante était administratrice, associée ou actionnaire. Dans le cas d'au moins une de ces entreprises prospères, Sunny Paradise, le mari de la requérante a donné des actions à celle-ci.

     Vu tous ces éléments de preuve, l'agent des visas a formé l'opinion que les rapports qui existaient entre la requérante et son mari correspondaient encore à ceux d'une " cellule familiale " qui conféraient à la requérante certains droits, comme en faisaient foi ses réticences à divorcer. L'agent des visas a estimé que le fait qu'elle niait que son mari était un " caïd ", malgré l'accumulation d'éléments de preuve au sujet de sa réputation de criminel notoire, témoignait d'une loyauté envers son mari qui allait au-delà de celle à laquelle on pouvait normalement s'attendre, alors que l'agent des visas se serait plutôt attendu à ce que la requérante coupe davantage les ponts, compte tenu des activités criminelles de son mari. L'agent des visas s'est dit d'avis que la requérante essaierait de parrainer son mari si elle obtenait un visa d'immigrant à cause de la loyauté dont elle faisait preuve envers lui et parce qu'il croyait que son mari influençait et contrôlait plusieurs personnes, dont la requérante. Ces considérations ont amené l'agent des visas à conclure que la requérante et son mari n'étaient pas séparés. À mon avis, toutes ces considérations sont pertinentes lorsqu'il s'agit de déterminer si la requérante et son mari étaient séparés au sens de l'alinéa 9(2)a) du Règlement sur l'immigration.

     L'avocate de la requérante reconnaît que, si le mari de celle-ci est une personne non admissible pour des raisons d'ordre criminel, toute demande que la requérante pourrait présenter à l'avenir pour le parrainer serait vouée à l'échec et que la question du parrainage futur de son mari brouille les pistes. La question de savoir si le mari de la requérante sera plus tard jugé non admissible pour des raisons d'ordre criminel n'a pas été soumise à l'agent des visas. La question à laquelle l'agent des visas doit répondre aux termes de l'alinéa 9(2)a) du Règlement est celle de savoir si la requérante est véritablement séparée de son mari, de sorte que ce dernier n'est pas à la charge de la requérante. L'agent des visas n'a commis aucune erreur de droit et n'a pas tenu compte d'éléments non pertinents pour décider que la séparation de la requérante d'avec son mari n'était pas suffisamment valable pour dispenser son mari de respecter les exigences de l'alinéa 9(1)a) du Règlement.

     L'avocate de la requérante affirme que la conclusion de l'agent des visas suivant laquelle la requérante a été influencée par son mari constitue un stéréotype sexuel qui va à l'encontre de l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés. Elle n'a toutefois pas insisté sur ce point. L'agent des visas s'est d'avis, suivant la preuve, que le mari de la requérante influençait et contrôlait plusieurs personnes, pas seulement sa femme ou les femmes en général. Le moyen tiré de la Charte n'est pas fondé sur les faits.

     Compte tenu de la conclusion à laquelle j'en viens en ce qui concerne la conclusion tirée par l'agent des visas au sujet de l'application de l'alinéa 9(1)a) du Règlement, il n'est pas nécessaire de décider si l'agent des visas a commis une erreur en concluant que la requérante faisait elle-même partie du crime organisé, en violation de l'alinéa 19(1)c.2) de la Loi sur l'immigration, ou si cet alinéa contrevient à une disposition quelconque de la Charte.

     La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Le prononcé de l'ordonnance sera suspendu pendant une semaine pour donner aux parties la possibilité de soumettre des questions à certifier en vue d'un appel.

     " Marshall E. Rothstein "

                                         JUGE

TORONTO (ONTARIO)

LE 13 NOVEMBRE 1997.

Traduction certifiée conforme     

                                 François Blais, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU DOSSIER :              IMM-2103-95
INTITULÉ DE LA CAUSE :      MIRANDA WAI CHU YUEN et autres
                     et
                     MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
DATE DE L'AUDIENCE :          14 OCTOBRE 1997
LIEU DE L'AUDIENCE :          TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE prononcés par le juge Rothstein le 13 novembre 1997

ONT COMPARU :

     Me Barbara Jackman              pour les requérants
     Me Lori Hendriks                  pour l'intimé
     Me Kevin Lunney

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

     Jackman & Associates              pour les requérants
     196, rue Adelaide Ouest, 2e étage
     Toronto (Ontario) M5H 1W7
     Me George Thomson              pour l'intimé
     Sous-procureur général du Canada
                             COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     IMM-2103-95

                         E n t r e :
                         MIRANDA WAI CHU YUEN et autres,

     requérants,

     et

                         MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

             MOTIFS DE L'ORDONNANCE
__________________

1      Cette décision est la seconde décision rendue un agent des visas au sujet de la requérante. La demande de résidence permanente de la requérante avant auparavant été rejetée. La requérante a introduit une instance en contrôle judiciaire et il semble que l'intimé ait consenti à ce qu'une nouvelle décision soit rendue au sujet de la demande. La requérante s'est désistée de cette instance en contrôle judiciaire et la nouvelle décision visée par le présent contrôle judiciaire est celle qui a été rendu le 6 juillet 1995 par l'agent des visas.

2      Le mari de la requérante, Tin Hung Chan, avait été déclaré coupable d'infractions graves à Hong-Kong au cours des années soixante, ce qui le rendait non admissible aux termes du sous-alinéa 19(1)c.1)(ii) de la Loi sur l'immigration, qui dispose :
         19.(1) Les personnes suivantes appartiennent à une catégorie non admissible :
     [...]          c.1)      celles dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elles ont, à l'étranger :
     [...]
             (ii) soit commis un fait " acte ou omission " qui constitue une infraction dans le pays où il a été commis et qui, s'il était commis au Canada, constituerait une infraction qui pourrait être punissable, aux termes d'une loi fédérale, d'un emprisonnement maximal égal ou supérieur à dix ans, [...]
     En raison de l'alinéa 9(1)a) du Règlement sur l'immigration, l'agent des visas ne pouvait délivrer un visa d'immigrant à la requérante que si les personnes à sa charge, que celles-ci l'accompagnent ou non, ne faisaient pas partie d'une catégorie de personnes non admissibles :
             9.(1) Sous réserve du paragraphe (1.01) et de l'article 11, lorsqu'un immigrant, autre qu'une personne appartenant à la catégorie de la famille, qu'un parent aidé ou qu'un réfugié au sens de la Convention cherchant à se réétablir, présente une demande de visa d'immigrant, l'agent des visas peut lui en délivrer un ainsi qu'à toute personne à sa charge qui l'accompagne si :
             a) l'immigrant et les personnes à sa charge, qu'elles l'accompagnent ou non, ne font pas partie d'une catégorie de personnes non admissibles et satisfont aux exigences de la Loi et du présent règlement; [...]
     Aux termes de l'article 2 du Règlement, le conjoint d'un requérant est défini comme étant une personne à charge. L'agent des visas a jugé que le mari de Mme Yuen était à la charge de celle-ci et qu'il était une personne non admissible et qu'en conséquence, l'alinéa 9(1)a) du Règlement s'appliquait et que la demande de résidence permanente qu'elle avait présentée en son nom personnel et au nom de ses enfants devait être rejetée.

3      19.(1) Les personnes suivantes appartiennent à une catégorie non admissible :
     [...]
     c.2) celles dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elles sont ou ont été membres d'une organisation dont il a y des motifs raisonnables de croire qu'elle se livre ou s'est livrée à des activités faisant partie d'un plan d'activités criminelles organisées par plusieurs personnes agissant de concert en vue de la perpétration d'une infraction au Code criminel, à la Loi sur les stupéfiants ou aux parties III ou IV de la Loi sur les aliments et drogues qui peut être punissable par mise en accusation ou a commis à l'étranger un fait " acte ou omission " qui, s'il avait été commis au Canada, constituerait une telle infraction, sauf si elles convainquent le ministre que leur admission ne serait nullement préjudiciable à l'intérêt national; [...]

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.