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     Date : 19981023

     Dossier : T-2166-97

     OTTAWA (ONTARIO), LE VENDREDI 23 OCTOBRE 1998

     EN PRÉSENCE DE M. LE JUGE TEITELBAUM

         AFFAIRE INTÉRESSANT une demande de contrôle et d'annulation, fondée sur l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, et ses modifications, d'une décision de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, qui a été rendue par le commissaire Yvon Tarte, le 5 septembre 1997, au sujet d'un renvoi à l'arbitrage en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35 (nE du dossier de la CRTFP 166-20-27663)                 

Entre :

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     demandeur,

     - et -

     DAVID A. KAHN,

     défendeur.

     ORDONNANCE

     Pour les raisons énoncées dans les motifs de l'ordonnance, la demande portant sur les dépens est accueillie.

     Le défendeur a droit au remboursement de la somme de 5 607,51 $ qu'il a engagée pour défendre ses intérêts dans la demande de contrôle judiciaire intentée par le demandeur dont celui-ci s'est désisté, en plus d'une somme globale de 2 500 $ pour le temps qu'il a " perdu " à défendre ses intérêts dans une demande de contrôle judiciaire qui s'est révélée inutile.

                                 " Max M. Teitelbaum "

                        

                                     Juge

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     Date : 19981023

     Dossier : T-2166-97

         AFFAIRE INTÉRESSANT une demande de contrôle et d'annulation, fondée sur l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, et ses modifications, d'une décision de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, qui a été rendue par le commissaire Yvon Tarte, le 5 septembre 1997, au sujet d'un renvoi à l'arbitrage en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35 (nE du dossier de la CRTFP 166-20-27663)                 

Entre :

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     demandeur,

     - et -

     DAVID A. KAHN,

     défendeur.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE TEITELBAUM

[1]      Il s'agit d'une demande présentée par le défendeur (le demandeur dans la présente demande) en vue d'obtenir une ordonnance pour que lui soient remboursés les frais qu'il a engagés [TRADUCTION] " pour mener à bien toutes les procédures associées à la requête de contrôle judiciaire qui a été déposée le 3 octobre 1997 ", et qui a été introduite par le procureur général du Canada.

[2]      Au nombre des motifs appuyant la présente requête pour obtenir les dépens, le défendeur déclare ce qui suit :

         [TRADUCTION]                 
         1.      Le demandeur (procureur général du Canada) a déposé un avis de désistement le 21 mai 1998. Il a signifié cet avis de désistement au défendeur le 1er juin 1998.                 
         2.      Règles 400 et 402 des Règles de la Cour fédérale.                 

[3]      Le défendeur, pour appuyer sa requête, a déposé un affidavit dans lequel il déclare ce qui suit :

         [TRADUCTION]                 
         2. Dans le but de limiter les frais, je me suis représenté moi-même tant à l'audition devant la CRTFP que devant la présente Cour.                 
         3. Les procédures étaient vexatoires et inutiles. La manière dont le demandeur a traité le dossier a compliqué indûment les procédures et a donné lieu à de nombreuses mesures supplémentaires qui m'ont obligé à demander constamment des avis juridiques.                 
         4. Depuis le moment où les allégations non fondées ont été portées contre moi jusqu'à ce que le demandeur abandonne sa demande, le total des frais que j'ai engagés pour obtenir des avis juridiques se chiffre à 7 874,81 $, dont 5 215,05 $ ont trait à la procédure de contrôle judiciaire devant la présente Cour.                 
         5. Outre les frais juridiques, j'ai consacré environ 250 heures de mon propre temps à préparer et à signifier divers documents et à me présenter en cour.                 
         6. En résumé, malgré que j'aie eu totalement gain de cause dans la défense que j'ai présentée devant la CRTFP et devant la Cour fédérale, j'ai subi des désagréments par suite des mesures prises par le demandeur. Je demande donc que me soient accordés des dépens qui compenseront cette situation.                 

[4]      Le défendeur n'a pas été contre-interrogé sur son affidavit. Je suis donc convaincu qu'il a dépensé la somme de 7 874, 81 $ (plus 482,46 $ comme l'indique une facture en date du 31 août 1998 et qui a été produite à l'audience) pour obtenir des " avis juridiques " dont 5 215,05 $ ont trait à la procédure de contrôle judiciaire et 482,46 $ ont trait à la présente demande d'adjudication des dépens.

CONTEXTE

[5]      Le demandeur était chargé de projet au S.C.R.S. Par suite d'une allégation de manquement à la sécurité ou d'insubordination, le défendeur déclare qu'il a été suspendu pour trois jours sans rémunération.

[6]      Dans son exposé oral, le défendeur déclare qu'il a déposé un grief qui, après avoir été entendu aux trois paliers, a été refusé.

[7]      Le défendeur, se représentant toujours lui-même afin de réduire autant que possible les coûts mais bénéficiant des avis juridiques d'un cabinet prestigieux, a déposé un grief devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP). Le grief a été déposé contre le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS).

[8]      Le 5 septembre 1997, après que le défendeur se fût représenté lui-même devant la CRTFP et suivant les " conseils des avocats ", la CRTFP a " exonéré " le défendeur. La CRTFP a accepté l'argument du défendeur et a accueilli le grief qu'il avait déposé.

[9]      Par suite de cette décision rendue par Yvon Tarte, commissaire de la CRTFP, le demandeur, soit le procureur général du Canada, a déposé au greffe de la Cour fédérale du Canada un avis de requête introductive d'instance afin d'obtenir une ordonnance infirmant la décision d'Yvon Tarte au motif que [TRADUCTION] " la Commission avait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée qui avait été tirée de manière abusive et sans tenir compte des éléments dont elle disposait ".

[10]      Le 18 novembre 1997, le procureur général du Canada (PG) a déposé à la Cour un avis de requête demandant :

         [TRADUCTION]                 
         [...] une ordonnance de mise sous scellés afin d'empêcher les parties intéressées et/ou les membres du public, jusqu'à ce que la Cour en ordonne autrement, de consulter toutes les pièces, y compris la pièce " A " déjà déposée par le demandeur, de même que les pièces " A " à " E " déposées par le défendeur, qui ont été déposées ou seront déposées à la Cour dans le cadre de la demande de contrôle et d'annulation, fondée sur l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale , L.R.C. (1985), ch. F-7, et ses modifications, d'une décision de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, rendue par le commissaire Yvon Tarte le 5 septembre 1997, au sujet d'un renvoi à l'arbitrage en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35 (nE du dossier de la CRTFP 166-20-27663).                 

[11]      Il semble que la demande ait été partiellement accueillie dans une ordonnance datée du 18 novembre 1997.

[12]      Le demandeur, soit le procureur général du Canada, a essayé de déposer le dossier de la requête dans la procédure de contrôle judiciaire mais il a été informé, le ou avant le 8 décembre 1997, que son dossier de requête renfermait un affidavit qui n'aurait pas dû être déposé à moins qu'il n'ait obtenu au préalable l'autorisation de la Cour. Le 12 décembre 1997, le PG a déposé un tel avis de requête fondé sur la Règle 324 en vigueur à l'époque (qui est maintenant la Règle 369).

[13]      Le dossier de la Cour renferme le mémoire suivant :

         [TRADUCTION]                 
             II/le 16 décembre 1997                 
             M me Ainslie Benedict du cabinet Nelligan Power, nous a téléphoné au nom du défendeur pour nous informer que M. Kahn aura besoin de plus de temps pour répondre à la requête du demandeur.                 
             Le deuxième affidavit de Louise Di Stefano n'a pas été signifié à M. Kahn, de sorte que celui-ci ne peut faire d'observations sur la pertinence de cet affidavit puisqu'il n'en connaît pas le contenu. En outre, il devra peut-être demander des directives à la Cour afin de déterminer s'il est visé par l'ordonnance de protection de M. le juge Joyal, ce qui l'empêcherait d'examiner la copie scellée qui a été déposée au greffe.                 

[14]      Cela confirme le fait que M. Kahn a demandé des conseils à un avocat.

[15]      Le 23 décembre 1997 et de nouveau le 15 janvier 1998, le défendeur a répondu à l'avis de requête. Le 19 janvier 1998, M. le juge Rouleau déclare ceci dans un mémoire :

         [TRADUCTION]                 
         OBJET/RE :      P.G. du Canada c. David A. Kahn T-2166-97                 
         Il n'y a rien dans ce dossier qui soit clair. Je suggère de transmettre l'affaire à un juge des requêtes qui entendra cette affaire en présence des parties n'importe quel jour d'audition des requêtes à Ottawa à un moment convenant au défendeur.                 

[16]      Le 9 février 1998, le juge Joyal a émis la directive suivante :

         [TRADUCTION]                 
         Comme suite à mes directives en date du 18 novembre 1997, les dispositions relatives à la confidentialité n'excluent pas les parties à l'instance, savoir le procureur général du Canada et le défendeur Kahn ; c'est-à-dire que les parties peuvent avoir accès à tous les documents produits par la partie adverse, sous réserve de l'ordonnance de confidentialité et de toute autre ordonnance de la présente Cour.                 

[17]      Après que plusieurs lettres eurent été adressées à la Cour pour obtenir des directives concernant les affidavits supplémentaires du demandeur et les renvois faits à ces affidavits dans le mémoire du demandeur (le PG) dans le cadre de la demande de contrôle judiciaire, le juge Hugessen a émis l'ordonnance suivante en avril 1998 :

         [TRADUCTION]                 
         Aucune explication satisfaisante n'ayant été donnée quant à savoir pourquoi les documents que l'on cherche maintenant à produire n'ont pas été produits à temps, la requête est rejetée.                 

[18]      Le 22 avril 1998, le défendeur a déposé une requête à la Cour en vue de faire radier les parties du mémoire du PG qui font référence à la preuve contenue dans un affidavit supplémentaire [TRADUCTION] " qui, par suite d'une ordonnance de la Cour, ne fait pas partie du dossier de la Cour ".

[19]      M. Kahn et l'avocat du PG se sont présentés devant le juge Muldoon le 5 mai 1998, date à laquelle la demande de M. Kahn a été accueillie par consentement.

[20]      Le 20 mai 1998, l'avocat du PG a envoyé par télécopieur la communication suivante :

         [TRADUCTION]                 
         La présente a pour objet de vous informer que le procureur général du Canada se désiste de son avis de requête en vue d'un contrôle judiciaire en l'espèce. Un avis de désistement conforme à la formule 370 des Règles de la Cour fédérale (1998), sera préparé, signifié et déposé demain à la Cour.                 

[21]      Le 3 juin 1998, le PG a déposé dans le dossier de la Cour un avis de désistement.

[22]      Par conséquent, le défendeur a déposé un avis de requête dans lequel il demande que les dépens lui soient adjugés.

[23]      J'ai examiné le dossier de la Cour déposé en l'espèce étant donné que je suis convaincu que le temps et les efforts consacrés à la cause, de même que la complexité de l'instance, sont des facteurs pertinents pour déterminer si des dépens doivent être adjugés et, le cas échéant, le montant de ceux-ci.

ANALYSE

[24]      Les dispositions applicables sont les Règles 400(1), 3a), c), e), g), i), o), (4), (6)c), 401(1) et 402 :

     400.(1) The Court shall have full discretionary power over the amount and allocation of costs and the determination of by whom they are to be paid.         

     ...

     (3) In exercising its discretion under subsection (1), the Court may consider         
         a) the result of the proceeding;         

     ...

         c) the importance and complexity of the issues;         

     ...

         e) any written offer to settle;         

     ...

         g) the amount of work;         

     ...

         i) any conduct of a party that tended to shorten or unnecessarily lengthen the duration of the proceeding;         

     ...

         o) any other matter that it considers relevant.         
     (4) The Court may fix all or part of any costs by reference to Tariff B and may award a lump sum in lieu of, or in addition to, any assessed costs.         

     ...

     (6) Notwithstanding any other provision of these Rules, the Court may         

     ...

         c) award all or part of costs on a solicitor-and-client basis; or         
     401(1) The Court may award costs of a motion in an amount fixed by the Court.         
     402. Unless otherwise ordered by the Court or agreed by the parties, a party against whom an action, application or appeal has been discontinued or against whom a motion has been abandoned is entitled to costs forthwith, which may be assessed and the payment of which may be enforced as if judgment for the amount of the costs had been given in favour of that party.         
     400.(1) La Cour a entière discrétion pour déterminer le montant des dépens, les répartir et désigner les personnes qui doivent les payer.         

     ...

     (3) Dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire en application du paragraphe(1), la Cour peut tenir compte de l'un ou l'autre des facteurs suivants :         
         a) le résultat de l'instance ;         

     ...

         c) l'importance et la complexité des questions en litige ;         

     ...

         e) toute offre écrite de règlement ;         

     ...

         g) la charge de travail ;         

     ...

         i) la conduite d'une partie qui a eu pour effet d'abréger ou de prolonger inutilement la durée de l'instance ;         

     ...

         o) toute autre question qu'elle juge pertinente.         
     (4) La Cour peut fixer tout ou partie des dépens en se reportant au tarif B et adjuger une somme globale au lieu ou en sus des dépens taxés.         

     ...

     (6) Malgré toute autre disposition des présentes règles, la Cour peut :         

     ...

         c) adjuger tout ou partie des dépens sur une base avocat-client ;         
     401.(1) La Cour peut adjuger les dépens afférents à une requête selon le montant qu'elle fixe.         
     402. Sauf ordonnance contraire de la Cour ou entente entre les parties, lorsqu'une action, une demande ou un appel fait l'objet d'un désistement ou qu'une requête est abandonnée, la partie contre laquelle l'action, la demande ou l'appel a été engagé ou la requête présentée a droit aux dépens sans délai. Les dépens peuvent être taxés et le paiement peut en être poursuivi par exécution forcée comme s'ils avaient été adjugés par jugement rendu en faveur de la partie.         

[25]      Il ne fait aucun doute qu'en vertu de la Règle 402 la partie contre laquelle une demande a été abandonnée a droit aux dépens " sans délai ".

[26]      La question spéciale qui se pose en l'espèce est l'évaluation des dépens, s'il y a lieu, qui doivent être payés à une partie " qui a eu gain de cause " et qui, pendant toute la procédure s'est représentée elle-même mais, et je souligne, en bénéficiant des avis d'un avocat, avis qui ont coûté au défendeur 5 215,05 $ pour la demande de contrôle judiciaire.

[27]      Le défendeur prétend qu'il a payé cette somme. Aucun élément de preuve ne contredit cette affirmation.

[28]      Le défendeur réclame également une certaine somme pour les 250 heures " de son propre temps ", selon son affidavit du 30 juin 1998, qu'il a consacré à la préparation et à la signification des documents et à sa comparution en cour. Dans son exposé oral, le défendeur a également réclamé les débours pour la signification des documents et les photocopies.

[29]      Le paragraphe 400(1) de la Règle donne à la Cour entière discrétion pour déterminer le montant des dépens.

[30]      L'avocat du demandeur, soit le PG, prétend, si je comprends bien, que parce que le défendeur s'est représenté lui-même, la Cour n'a pas le pouvoir discrétionnaire de lui adjuger les dépens. Son argument se fonde sur une décision de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Lavigne c. Canada (Développement des ressources humaines) [1998] A.C.F. nE 855 dans laquelle le juge Marceau a déclaré ceci en prononçant son jugement à l'audience :

         Le juge des requêtes n'avait d'autre choix que de confirmer que les plaideurs qui ne sont pas avocats inscrits au Barreau n'ont pas droit aux honoraires d'avocat prévus aux Règles de la Cour fédérale, après avoir occupé avec succès pour eux-mêmes en justice. Dans le cadre du tarif B de ces Règles, un plaideur ne peut assurer un service à lui-même. Il n'est pas loisible à l'autorité judiciaire, qu'il s'agisse de la Section de première instance ou de la Cour d'appel, de déroger à un texte réglementaire.                 
         La Cour reconnaît que l'appelant n'a pas tort de dire qu'il serait inique de dénier aux plaideurs qui ne sont pas avocats et qui n'ont pas les moyens de retenir les services d'un avocat, certains frais et dépens qui pourraient les dédommager du temps qu'ils ont dû consacrer à l'affaire et de la " connaissance du droit " qu'ils ont dû déployer pour se conformer aux Règles afin de saisir le tribunal de leurs prétentions. Nous ne sommes pas sûrs que la règle 400(4) actuelle (la règle 344(4)ancienne) ne puisse s'appliquer dans une certaine mesure pour faire, dans des cas exceptionnels, ce que l'équité pourrait dicter à cet égard. Il est cependant indéniable qu'une modification de la Loi ou des Règles serait nécessaire pour reconnaître expressément aux plaideurs qui ne sont pas avocats, le droit à tout ou partie des honoraires qui ont été jusqu'ici formellement réservés aux avocats.                 

[31]      Je ne vois pas le lien entre l'affaire Lavigne (précitée) et les faits dont je suis saisi. Tout d'abord, dans le cas de Lavigne (précité), il est clair que c'est Lavigne qui avait intenté la procédure dans laquelle il a apparemment eu gain de cause. En l'espèce, c'est le demandeur, soit le procureur général du Canada, qui a introduit la procédure de contrôle judiciaire qui a obligé le défendeur à consacrer du temps et de l'argent à la contestation de cette demande de contrôle judiciaire et à demander les avis juridiques dont il avait besoin pour défendre ses intérêts.

[32]      En outre, le défendeur, si j'ai bien compris son exposé oral, ne réclame rien en vertu du tarif B, mais demande que lui soient remboursés les frais qu'il a payés à son avocat pour obtenir ses " avis " et ses frais pour le temps " perdu " parce qu'il a été " obligé " de se consacrer à la défense de ses intérêts dans la demande de contrôle judiciaire qui manifestement n'était pas fondée, puisque le procureur général s'est désisté.

[33]      Je suis convaincu que l'affaire Lavigne (précitée) ne limite en aucune manière mon pouvoir discrétionnaire de fixer la somme appropriée qui devrait être accordée au défendeur pour ses débours et pour le temps qu'il a consacré à " défendre " ses intérêts.

[34]      Cela dit, qu'est-ce qui représente une somme appropriée en l'espèce ?

[35]      Je suis tenu de suivre ce que le juge Marceau a dit quand il déclare dans l'affaire Lavigne (précitée) " que les plaideurs qui ne sont pas avocats inscrits au Barreau n'ont pas droit aux honoraires d'avocat prévus aux Règles de la Cour fédérale, après avoir occupé avec succès pour eux-mêmes en justice. "

[36]      Cela ne signifie pas, comme je l'ai déjà dit, que les plaideurs qui ne sont pas avocats et qui retiennent les services d'un avocat afin d'obtenir des avis juridiques en vue de défendre leurs intérêts, ne peuvent être remboursés de ces dépenses et de toute autre dépense qu'ils ont dû engager par suite des procédures juridiques introduites, en l'espèce, par le demandeur.

[37]      Le demandeur doit rembourser à l'intimé la somme de 5 697,51 $, qui représente les frais payés par le défendeur à son avocat pour obtenir des avis juridiques au sujet de la demande de contrôle judiciaire et de l'avis de requête concernant l'adjudication des dépens.

[38]      En vertu de la Règle 3 qui dispose comme suit :

     3. These Rules shall be interpreted and applied so as to secure the just, most expeditious and least expensive determination of every proceeding on its merits.         
     3. Les présentes règles sont interprétées et appliquées de façon à permettre d'apporter une solution au litige qui soit juste et la plus expéditive et économique possible.         

et du paragraphe 400(4) des Règles, je suis convaincu que le défendeur a droit à une somme globale de 2 500 $ pour couvrir ses dépenses en vue de comparaître devant la Cour et pour le temps qu'il a passé à consulter son avocat et à photocopier des documents qu'il a ensuite signifiés.

[39]      L'avocat du demandeur a soumis à mon attention la décision de la Cour suprême du Canada dans Young c. Young, [1993] 4 R.C.S. 3, où le juge McLachlin déclare ceci à la page 134 :

         La Cour d'appel s'est fondée sur les principes suivants, auxquels je souscris. Les dépens comme entre procureur et client ne sont généralement accordés que s'il y a eu conduite répréhensible, scandaleuse ou outrageante d'une des parties. Le peu de fondement d'une demande ne constitue donc pas une raison d'accorder les dépens sur cette base ; pas plus que le fait qu'une partie des frais soit payée par des tiers.                 

[40]      L'avocat déclare qu'en ordonnant au demandeur de rembourser au défendeur ses dépenses pour obtenir des avis juridiques je lui ordonne en fait de payer les dépens sur la base des frais entre procureur et client.

[41]      En toute déférence, je ne suis pas d'accord. Il n'y a pas de dépens payés pour couvrir les frais juridiques de comparution en cour. Les seules dépenses qui sont remboursées sont celles qui ont été engagées pour obtenir des avis juridiques.

CONCLUSION

[42]      Le défendeur a droit au remboursement de la somme de 5 607,51 $ qu'il a engagée pour défendre ses intérêts dans la demande de contrôle judiciaire intentée par le demandeur et dont celui-ci s'est désisté, en plus d'une somme globale de 2 500 $ pour le temps qu'il a " perdu " à défendre ses intérêts dans une demande de contrôle judiciaire qui s'est révélée inutile.

                                 " Max M. Teitelbaum "

                        

                                     Juge

OTTAWA (Ontario)

le 23 octobre 1998

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NE DU GREFFE :              T-2166-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Le procureur général du Canada - et - David A. Kahn

LIEU DE L'AUDIENCE :          Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :          le 13 octobre 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE TEITELBAUM

DATE :                  le 23 octobre 1998

ONT COMPARU :

Gérard Normand                      pour le demandeur

David A. Kahn                      en son propre nom

PROCUREUR INSCRIT AU DOSSIER :

Morris Rosenberg                      pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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