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Date : 20000623

Dossier : T-280-99

OTTAWA (ONTARIO), le 23 juin 2000.

EN PRÉSENCE DU juge Dolores M. Hansen.

ENTRE :                                                           

                             SIM & McBURNEY,

                                                                 demanderesse,

                                        - et -

                           MICROTEL LIMITED,

                                                                   défenderesse.

      MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1] Il s'agit d'un appel formé à l'égard d'une décision du protonotaire adjoint par laquelle ce dernier a conclu qu'il fallait autoriser le contre-interrogatoire relatif à un affidavit déposé par l'usager inscrit d'une marque de commerce dans le cadre d'un appel d'une décision du registraire des marques de commerce.


[2] La demanderesse a interjeté appel de la décision du registraire des marques de commerce qui a radié en partie l'enregistrement de marque de commerce numéro 341 159 de la défenderesse. En appel, la défenderesse a déposé un autre affidavit pour compléter la preuve soumise au registraire des marques de commerce. Aucune mesure additionnelle n'a été prise par la demanderesse jusqu'à ce que la Cour donne un avis d'examen de l'état de l'instance. En réponse, la demanderesse a proposé un échéancier qui comprenait le contre-interrogatoire concernant l'affidavit déposé à l'appui de la thèse du propriétaire inscrit de la marque de commerce. La défenderesse a soulevé trois questions en réponse, dont seulement une est pertinente au regard de la présente requête, savoir s'il est possible de procéder à un contre-interrogatoire dans les présentes circonstances.

[3] Le protonotaire adjoint a ordonné que l'affaire se poursuive comme s'il s'agissait d'une instance à gestion spéciale. Il a conclu que [TRADUCTION] « le contre-interrogatoire dans cette instance aurait été admissible » , mais que, comme la demanderesse n'avait plus le temps de procéder à un tel interrogatoire, il lui faudrait présenter une requête en prorogation de délai.

[4] Avant 1998, les règles 700 à 705 des Règles de la Cour fédérale régissaient les appels portés en application de l'article 56 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13. Plus particulièrement, selon la règle 704(6), il fallait obtenir l'autorisation de la Cour pour procéder à un contre-interrogatoire concernant un affidavit.

[5] Avec l'adoption des Règles de la Cour fédérale (1998), les appels interjetés en vertu de l'article 56 de la Loi sur les marques de commerce à l'égard de décisions rendues par le registraire des marques de commerce sont maintenant assujettis aux dispositions de la partie 5 des Règles qui régit les instances introduites par voie de demande. En outre, le droit de contre-interroger l'auteur d'un affidavit déposé dans le cadre d'une demande est prévu par la règle 83 qui est ainsi rédigée :


83. Une partie peut contre-interroger l'auteur d'un affidavit qui a étésignifiépar une partie adverse dans le cadre d'une requête ou d'une demande.

83. A party to a motion or application may cross-examine the deponent of an affidavit served by an adverse party to the motion or application.


                                                     


[6]         Dans l'arrêt Meredith & Finlayson c. Canada (Registraire des marques de commerce)[1], le juge Hugessen a précisé l'objet et la portée de l'article 45 en ces termes : [TRADUCTION] « [...] une méthode simple et rapide de radier du registre les marques tombées en désuétude » . Dans l'arrêt Cinnabon, Inc. c. Yoo-Hoo of Florida Corp.[2], le juge Décary a examiné l'objet et la portée des instances introduites en application de l'article 45 ainsi que la nature sommaire de ces instances et il a confirmé que les appels à la Section de première instance de la Cour fédérale fondés sur l'article 56 de la Loi sur les marques de commerce n'ont pas pour effet d'étendre la portée de l'enquête. Il a également avalisé la pratique actuellement suivie par la Section de première instance qui permet au propriétaire inscrit de déposer des éléments de preuve dans le cadre d'appels formés contre des décisions rendues en application de l'article 45.

[7]         La défenderesse soutient que le fait de permettre le contre-interrogatoire concernant un affidavit déposé en appel étendrait la portée de la preuve pertinente envisagée par l'article 45. Elle prétend en outre que la modification des règles ne peut [TRADUCTION] « changer la pratique établie sous le régime de la Loi sur les marques de commerce et que les règles doivent être interprétées de manière à s'harmoniser avec la législation connexe » .


[8]         La défenderesse renvoie à l'affaire Osler, Hoskin & Harcourt c. United States Tobacco Co.[3] pour étayer sa thèse voulant que la partie requérante n'ait pas le droit de procéder à un contre-interrogatoire concernant un autre affidavit déposé par le propriétaire inscrit. Après avoir examiné cette décision, j'arrive toutefois à la conclusion que la déclaration sur laquelle se fonde la défenderesse est une remarque incidente.

[9]         De surcroît, la Cour, à de nombreuses occasions par le passé, a accordé l'autorisation de procéder à un contre-interrogatoire concernant l'affidavit déposé en appel par le propriétaire inscrit d'une marque de commerce dans le cadre d'une instance fondée sur l'article 45[4]. Comme l'a déclaré le juge Mahoney dans l'arrêt Labatt's Ltd. c. Benson & Hedges (Canada) Ltd.[5] :

[TRADUCTION]La Cour est persuadée que la Division de première instance est habilitée à exiger que l'auteur d'un affidavit, déposéà la Cour, se soumette à un contre-interrogatoire, et que le juge de première instance était en droit de recevoir en preuve la transcription du contre-interrogatoire. La déposition d'un témoin faite au cours d'un contre-interrogatoire vaut autant que ce qui est dit dans la preuve principale. En limitant la preuve recevable au cours d'un appel d'une décision rendue en vertu de l'article 44 de la Loi sur les marques de commerce, S.R.C. 1970, chap. T-10, à celle soumise par le propriétaire de la marque de commerce, cette cour n'a pas, dans l'affaire Plough, limitécelle-ci à la preuve principale seulement.

[10]       À mon avis, la modification des règles ayant pour effet de supprimer l'exigence relative à l'autorisation ne change en rien la nature sommaire de l'instance introduite en vertu de l'article 45 et n'étend pas la portée de la preuve pertinente visée par cette disposition. De fait, les nouvelles règles régissant ce genre d'instances envisagent un processus qui est lui-même de nature sommaire.

[11]       En outre, si l'affidavit comporte des ambiguïtés comme l'affirme la défenderesse en l'espèce, il est certainement préférable d'obtenir des précisions que de laisser la Cour échafauder des hypothèses sur la situation de fait.


[12]       Comme le contre-interrogatoire a été autorisé dans le passé, cette modification des règles n'a pas pour effet, contrairement à ce que prétend la défenderesse, d'entraîner un changement dans la pratique suivie.

[13]       Pour ces motifs, l'appel est rejeté.

                                        ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE le rejet de l'appel.

                                                                        « Dolores M. Hansen »          

                                                                                                     Juge                     

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER : T-280-99

INTITULÉ DE LA CAUSE : SIM & McBURNEY -ET- MICROTEL LIMITED

LIEU DE L'AUDIENCE : Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE : Le 18 janvier 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE PRONONCÉS le 23 juin 2000.

ONT COMPARU :

Me Gillian Smith                                                            POUR LA DEMANDERESSE

Me Brian P. Isaac                                                           POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Sim, Hughes, Ashton & McKay                                   POUR LA DEMANDERESSE

Smart & Biggar                                                             POUR LA DÉFENDERESSE



     [1]             (1991), 40 C.P.R. (3d) 409 (C.A.F.), à la page 412.

     [2]             (1998), 82 C.P.R. (3d) 513.

     [3]                 (1997), 77 C.P.R. (3d) 475 (C.F. 1re inst.).

     [4]       Par exemple, voir les affaires Admiral Sanitation Ltd. c. Big D. Industries Inc. et al., (1989), 28 C.P.R. (3d) 538 (C.F. 1re inst.); Cast Iron Soil Pipe Institute c. Concourse Int'l Trading Inc. (1990), 30 C.P.R. (3d) (C.F. 1re inst.); Cornestone Securities Canada Inc. c. Registraire des marques de commerce et al., (1994), 58 C.P.R. (3d) 417 (C.F. 1re inst.).

     [5]             (1983), 75 C.P.R. (2d) 287, à la page 288.

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