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Date: 19971215


Dossier: IMM-4908-96

ENTRE

     ISAM JABER,

     requérant,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE TEITELBAUM

INTRODUCTION

[1]      Le requérant Isam Jaber (le requérant) demande le contrôle judiciaire d'une décision par laquelle la section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la section d'appel) a refusé d'entendre l'appel pour le motif qu'elle n'avait pas compétence.


LES FAITS

[2]      Le 13 décembre 1990, le père du requérant a présenté une demande de résidence permanente à titre de requérant principal pour lui-même et sa famille. La demande de résidence permanente était faite pour lui-même et ses enfants qui, déclarait-il, n'étaient pas mariés. Le 10 septembre 1992, le présent requérant et les autres membres de sa famille pour lesquels la demande de résidence permanente avait été faite ont obtenu un visa qui leur permettrait de venir au Canada.

[3]      Selon l'intimé, le requérant a, le 13 novembre 1992, pendant qu'il était en Syrie, épousé une certaine Shahinaz Lolou, également citoyenne syrienne. Le requérant nie être marié avec Mme Lolou et déclare qu'elle est seulement sa fiancée. Le 23 novembre 1992, le requérant est venu séjourner au Canada et, au point d'entrée, il a signé une déclaration solennelle indiquant qu'il n'est pas marié et qu'il est célibataire.

[4]      Le 13 avril 1993, le requérant a présenté une demande pour parrainer l'immigration au Canada de Shahinaz Lolou. Aux questions 6 et 14 de sa demande, le requérant a déclaré que Shahinaz Lolou est son épouse.

[5]      À la suite de cette déclaration, une audience a eu lieu devant un arbitre conformément à l'article 27 de la Loi sur l'immigration (la Loi). L'audience s'est tenue les 19 juin, 21 septembre et 6 décembre 1995. Le 10 janvier 1996, l'arbitre a statué que le requérant était marié au moment de son arrivée au Canada et qu'il avait omis de divulguer ce fait en arrivant au Canada. Par conséquent, l'arbitre a conclu que le requérant est une personne décrite à l'alinéa 27(1)e) de la Loi et, par la suite, celui-ci a reçu un avis d'expulsion conformément au paragraphe 32(2) de la Loi.

[6]      Le requérant a interjeté appel, mais celui-ci a été rejeté le 6 décembre 1996 lorsque la section d'appel a jugé qu'elle n'avait pas compétence. Le requérant a demandé le contrôle judiciaire de cette décision.

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

[7]      Le résident permanent est défini ainsi à l'article 2 :

"permanent resident" means a person who

(a) has been granted landing,

(b) has not become a Canadian citizen, and

(c) has not ceased to be a permanent resident pursuant to section 24 or 25.1,

and includes a person who has become a Canadian citizen but who has subsequently ceased to be a Canadian citizen under subsection 10(1) of the Citizenship Act, without reference to subsection 10(2) of that Act;

"résident permanent" Personne qui remplit les conditions suivantes :

a) elle a obtenu le droit d'établissement;

b) elle n'a pas acquis la citoyenneté canadienne;

c) elle n'a pas perdu son statut conformément à l'article 24 ou 25.1.

Est également visée par la définition la personne qui a acquis la citoyenneté canadienne mais l'a perdue conformément au paragraphe 10(1) de la Loi sur la citoyenneté, compte non tenu du paragraphe 10(2) de cette loi.

[8]      La notion de droit d'établissement, d'établissement ou de droit de s'établir est définie à l'article 2:

"landing" means lawful permission to establish permanent residence in Canada;

"droit d'établissement", "établissement" ou "droit de s'établir" Autorisation d'établir sa résidence permanente au Canada.

[9]      Une mesure d'expulsion a été prise contre le requérant en vertu du paragraphe 32(2) de la Loi et concluait qu'il était une personne décrite au paragraphe 27(1). Ces articles disposent:

27. (1) An immigration officer or a peace officer shall forward a written report to the Deputy Minister setting out the details of any information in the possession of the immigration officer or peace officer indicating that a permanent resident is a person who

(a) is a member of an inadmissible class described in paragraph 19(1)(c.2), (d), (e), (f), (g), (k) or (l);

(a.1) outside Canada,

(i) has been convicted of an offence that, if committed in Canada, constitutes an offence that may be punishable under any Act of Parliament by a maximum term of imprisonment of ten years or more, or

(ii) has committed, in the opinion of the immigration officer or peace officer, based on a balance of probabilities, an act or omission that would constitute an offence under the laws of the place where the act or omission occurred and that, if committed in Canada, would constitute an offence that may be punishable under any Act of Parliament by a maximum term of imprisonment of ten years or more,

except a person who has satisfied the Minister that the person has been rehabilitated and that at least five years have elapsed since the expiration of any sentence imposed for the offence or since the commission of the act or omission, as the case may be;

(a.2) before being granted landing, was convicted in Canada of

(i) an indictable offence, or

(ii) an offence for which the offender may be prosecuted by indictment or for which the offender is punishable on summary conviction,

that may be punishable by way of indictment under any Act of Parliament by a maximum term of imprisonment of less than ten years;

(a.3) before being granted landing,

(i) was convicted outside Canada of an offence that, if committed in Canada, would constitute an offence referred to in paragraph (a.2), or

(ii) committed outside Canada, in the opinion of the immigration officer or peace officer, based on a balance of probabilities, an act or omission that constitutes an offence under the laws of the place where the act or omission occurred and that, if committed in Canada, would constitute an offence referred to in paragraph (a.2),

except a person who has satisfied the Minister that the person has been rehabilitated and that at least five years have elapsed since the expiration of any sentence imposed for the offence or since the commission of the act or omission, as the case may be;

(b) if that person was granted landing subject to terms and conditions, has knowingly contravened any of those terms or conditions;

(c) [Repealed, 1992, c. 49, s. 16]

(d) has been convicted of an offence under any Act of Parliament, other than an offence designated as a contravention under the Contraventions Act, for which a term of imprisonment of more than six months has been, or five years or more may be, imposed;

(e) was granted landing by reason of possession of a false or improperly obtained passport, visa or other document pertaining to his admission or by reason of any fraudulent or improper means or misrepresentation of any material fact, whether exercised or made by himself or by any other person;

(f) wilfully fails to support himself or any dependent member of his family in Canada;

(g) is a member of the inadmissible class described in paragraph 19(1)(j) who was granted landing subsequent to the coming into force of that paragraph; or

(h) became a member of the inadmissible class described in paragraph 19(1)(j) subsequent to the coming into force of that paragraph.

32.(2) Where an adjudicator decides that a person who is the subject of an inquiry is a permanent resident described in subsection 27(1), the adjudicator shall, subject to subsections (2.1) and 32.1(2), make a deportation order against that person.

Appeals by permanent residents and persons in possession of returning resident permits

27. (1) L'agent d'immigration ou l'agent de la paix doit faire part au sous-ministre, dans un rapport écrit et circonstancié, de renseignements concernant un résident permanent et indiquant que celui-ci, selon le cas :

a) appartient à l'une des catégories non admissibles visées aux alinéas 19(1)c.2), d), e), f), g), k) ou l);

a.1) est une personne qui a, à l'étranger :

(i) soit été déclarée coupable d'une infraction qui, si elle était commise au Canada, constituerait une infraction qui pourrait être punissable, aux termes d'une loi fédérale, par mise en accusation, d'un emprisonnement maximal égal ou supérieur à dix ans, sauf si la personne peut justifier auprès du ministre de sa réadaptation et du fait qu'au moins cinq ans se sont écoulés depuis l'expiration de toute peine lui ayant été infligée pour l'infraction,

(ii) soit commis, de l'avis, fondé sur la prépondérance des probabilités, de l'agent d'immigration ou de l'agent de la paix, un fait " acte ou omission " qui constitue une infraction dans le pays où il a été commis et qui, s'il était commis au Canada, constituerait une infraction qui pourrait être punissable, aux termes d'une loi fédérale, par mise en accusation, d'un emprisonnement maximal égal ou supérieur à dix ans, sauf si la personne peut justifier auprès du ministre de sa réadaptation et du fait qu'au moins cinq ans se sont écoulés depuis la commission du fait;

a.2) avant que le droit d'établissement ne lui ait été accordé, a été déclaré coupable au Canada d'une infraction punissable par mise en accusation d'un emprisonnement maximal de moins de dix ans et qui est :

(i) soit un acte criminel,

(ii) soit une infraction dont l'auteur peut être poursuivi par mise en accusation ou par procédure sommaire;

a.3) avant que le droit d'établissement ne lui ait été accordé, a, à l'étranger :

(i) soit été déclaré coupable d'une infraction qui, si elle était commise au Canada, constituerait une infraction visée à l'alinéa a.2), sauf s'il peut justifier auprès du ministre de sa réadaptation et du fait qu'au moins cinq ans se sont écoulés depuis l'expiration de la peine lui ayant été infligée pour l'infraction,

(ii) soit commis, de l'avis, fondé sur la prépondérance des probabilités, de l'agent d'immigration ou de l'agent de la paix, un fait " acte ou omission " qui constitue une infraction dans le pays où il a été commis et qui, s'il était commis au Canada, constituerait une infraction visée à l'alinéa a .2), sauf s'il peut justifier auprès du ministre de sa réadaptation et du fait qu'au moins cinq ans se sont écoulés depuis la commission du fait;

b) a sciemment contrevenu aux conditions dont était assorti son droit d'établissement;

c) [Abrogé, 1992, ch. 49, art. 16]

d) a été déclaré coupable d'une infraction prévue par une loi fédérale, autre qu'une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions:

(i) soit pour laquelle une peine d'emprisonnement de plus de six mois a été imposée,

(ii) soit qui peut être punissable d'un emprisonnement maximal égal ou supérieur à cinq ans;

e) a obtenu le droit d'établissement soit sur la foi d'un passeport, visa " ou autre document relatif à son admission " faux ou obtenu irrégulièrement, soit par des moyens frauduleux ou irréguliers ou encore par suite d'une fausse indication sur un fait important, même si ces moyens ou déclarations sont le fait d'un tiers;

f) manque délibérément à son obligation de subvenir à ses besoins ou à ceux d'une personne à charge " membre de sa famille " au Canada;

g) appartient à la catégorie non admissible visée à l'alinéa 19(1)j) et a obtenu le droit d'établissement après l'entrée en vigueur de cet alinéa;

h) est devenu membre de la catégorie non admissible visée à l'alinéa 19(1)j) après l'entrée en vigueur de cet alinéa.

32.(2) S'il conclut que l'intéressé est un résident permanent se trouvant dans l'une des situations visées au paragraphe 27(1), l'arbitre, sous réserve des paragraphes (2.1) et 32.1(2), prend une mesure d'expulsion contre lui.

[10]      Les paragraphes 70(1) et 70(2) désignent ceux qui peuvent interjeter appel d'une mesure d'expulsion:

70. (1) Subject to subsections (4) and (5), where a removal order or conditional removal order is made against a permanent resident or against a person lawfully in possession of a valid returning resident permit issued to that person pursuant to the regulations, that person may appeal to the Appeal Division on either or both of the following grounds, namely,

(a) on any ground of appeal that involves a question of law or fact, or mixed law and fact; and

(b) on the ground that, having regard to all the circumstances of the case, the person should not be removed from Canada.

(2) Subject to subsections (3) to (5), an appeal lies to the Appeal Division from a removal order or conditional removal order made against a person who

(a) has been determined under this Act or the regulations to be a Convention refugee but is not a permanent resident; or

(b) seeks landing or entry and, at the time that a report with respect to the person was made by an immigration officer pursuant to paragraph 20(1)(a), was in possession of a valid immigrant visa, in the case of a person seeking landing, or a valid visitor's visa, in the case of a person seeking entry.

Appel des résidents permanents et des titulaires de permis de retour

70. (1) Sous réserve des paragraphes (4) et (5), les résidents permanents et les titulaires de permis de retour en cours de validité et conformes aux règlements peuvent faire appel devant la section d'appel d'une mesure de renvoi ou de renvoi conditionnel en invoquant les moyens suivants :

a) question de droit, de fait ou mixte;

b) le fait que, eu égard aux circonstances particulières de l'espèce, ils ne devraient pas être renvoyés du Canada.

(2) Sous réserve des paragraphes (3) à (5), peuvent faire appel devant la section d'appel d'une mesure de renvoi ou de renvoi conditionnel :

a) les non-résidents permanents qui se sont vu reconnaître le statut de réfugié au sens de la Convention aux termes de la présente loi ou de ses règlements;

b) les personnes qui, ayant demandé l'admission, étaient titulaires d'un visa de visiteur ou d'immigrant, selon le cas, en cours de validité lorsqu'elles ont fait l'objet du rapport visé à l'alinéa 20(1)a).

[11]      Enfin, l'article 12 du Règlement prévoit les exigences auxquelles un immigrant doit satisfaire lorsqu'il se présente à un point d'entrée au Canada:

12. An immigrant who has been issued a visa and who appears before an immigration officer at a port of entry for examination pursuant to subsection 12(1) of the Act is required

(a) if his marital status has changed since the visa was issued to him, or

(b) if any other facts relevant to the issuance of the visa have changed since the visa was issued to him or were not disclosed at the time of issue thereof,

to establish that at the time of the examination

(c) the immigrant and the immigrant's dependants, whether accompanying dependants or not, where a visa was issued to the immigrant pursuant to subsection 6(1), section 9 or subsection 10(1) or (1.1) or 11(3) or (4), or

(d) the immigrant and the immigrant's accompanying dependants, in any other case,

meet the requirements of the Act, these Regulations, the Indochinese Designated Class Regulations, the Self-Exiled Persons Class Regulations or the Political Prisoners and Oppressed Persons Designated Class Regulations, including the requirements for the issuance of the visa.

12. Un immigrant à qui un visa a été délivré et qui se présente pour examen devant un agent d'immigration à un point d'entrée, conformément au paragraphe 12(1) de la Loi, doit

a) si son état matrimonial a changé depuis la délivrance du visa, ou

b) si des faits influant sur la délivrance du visa ont changé depuis que le visa a été délivré ou n'ont pas été révélés au moment où le visa a été délivré,

établir

c) que lui-même et les personnes à sa charge, qu'elles l'accompagnent ou non, dans le cas où un visa a été délivré à l'immigrant conformément au paragraphe 6(1), à l'article 9 ou aux paragraphes 10(1) ou (1.1) ou 11(3) ou (4),

d) que lui-même et les personnes à sa charge qui l'accompagnent, dans tout autre cas,

satisfont, au moment de l'examen, aux exigences de la Loi, du présent règlement, du Règlement sur la catégorie désignée d'Indochinois, du Règlement sur la catégorie désignée d'exilés volontaires ou du Règlement sur la catégorie désignée de prisonniers politiques et de personnes opprimées, y compris les exigences relatives à la délivrance du visa.

LES ARGUMENTS

1. Les arguments du requérant

[12]      Le requérant déclare que, avant de conclure qu'elle a compétence ou non, la section d'appel doit d'abord examiner les faits à partir desquels l'arbitre a conclu que le requérant a obtenu la résidence permanente par des moyens frauduleux ou une fausse déclaration sur un fait important, afin de vérifier si la conclusion de l'arbitre était bien fondée en fait et en droit. S'il ressort de la preuve que l'arbitre a commis une erreur de droit ou de fait, la section d'appel a alors compétence parce que le requérant serait légalement admis au Canada et a donc un droit d'appel.

[13]      De plus, le requérant dit que la section d'appel a commis une erreur de fait et de droit parce qu'elle n'a pas tenu compte de tous les éléments de preuve portés à sa connaissance. Il soutient que, même si la section d'appel n'était pas tenue de citer l'ensemble de la preuve, elle est tenue de mentionner certains éléments de preuve qui contredisent ses conclusions. Il allègue avoir fourni plusieurs documents pour prouver qu'il était célibataire lors de son arrivée au Canada et donc ne pas avoir fait de fausses déclarations.

2. Les arguments de l'intimé

[14]      L'intimé soutient que, pour obtenir le droit d'établissement, le requérant devait satisfaire aux conditions auxquelles son visa avait été délivré au moment où il s'est présenté à un point d'entrée au Canada. L'intimé fait valoir qu'en l'espèce, le requérant devait être encore célibataire lorsqu'il s'est présenté à un point d'entrée au Canada.

[15]      L'intimé affirme que le requérant n'a pas satisfait aux conditions de son visa à ce moment-là parce qu'il s'était marié depuis que le visa avait été délivré et qu'il n'en a pas informé l'agent d'immigration lors de l'examen au point d'entrée. L'intimé prétend que, étant donné les définitions de " droit d'établissement, établissement et droit de s'établir " et de " résident permanent " à l'article 2 de la Loi, le requérant n'avait pas l'autorisation légale d'entrer au Canada et n'était donc pas un résident permanent. Essentiellement, l'intimé soutient que, même si le requérant a reçu un dossier d'établissement signé par un agent d'immigration, il n'a jamais été un résident permanent parce qu'il n'avait pas l'autorisation légale d'entrer au Canada.

[16]      Comme le paragraphe 70(1) prévoit que seuls les résidents permanents et les titulaires de permis de retour en cours de validité ont un droit d'appel à la section d'appel, l'intimé soutient que la section d'appel n'a pas compétence. L'intimé allègue que le recours approprié pour le requérant consiste à demander le contrôle judiciaire de la décision de l'arbitre.

[17]      Quant à l'argument du requérant selon lequel la section d'appel n'a pas tenu compte des éléments de preuve portés à sa connaissance, l'intimé prétend que la section d'appel a examiné tous les éléments de preuve, y compris ceux présentés à l'audience, les observations faites à l'arbitre, la décision de celui-ci et les observations que les parties ont faites par écrit à la section d'appel. De plus, l'intimé soutient que la section d'appel a mentionné dans ses motifs les faits sur lesquels elle s'est fondée pour conclure que le requérant n'était pas un résident permanent. L'intimé cite également une jurisprudence selon laquelle, même si la section d'appel n'a pas mentionné tous les faits portés à sa connaissance, cela ne signifie pas qu'elle n'a pas tenu compte de la preuve. Enfin, l'intimé avance que le fait que la section d'appel ait ou non tenu compte de la preuve n'est pas pertinent car, en tout premier lieu, elle n'avait pas compétence pour entendre l'appel.

LA QUESTION EN LITIGE

[18]      La seule question à trancher est celle de savoir si la section d'appel a compétence pour entendre l'appel interjeté par le requérant. Suivant cette question, il faut également déterminer si, lorsque l'arbitre a conclu que le requérant a dénaturé le fait qu'il était marié et que ce dernier conteste ce fait, la section d'appel est obligée de déterminer si cette conclusion est exacte avant de décider si elle a compétence pour entendre l'appel.

ANALYSE

[19]      L'arbitre a statué que le requérant n'était ni un résident permanent ni le titulaire d'un permis de retour en cours de validité ou d'un visa d'immigrant en cours de validité. Je suis donc convaincu que le requérant a cessé d'avoir un droit d'appel à la section d'appel en vertu de l'article 70 de la Loi.

[20]      L'intimé soutient à bon droit que le recours approprié pour le requérant consistait à demander le contrôle judiciaire de la décision de l'arbitre et non pas à interjeter appel à la section d'appel et à demander alors le contrôle judiciaire de sa conclusion selon laquelle elle n'avait pas compétence.

[21]      J'ai examiné les décisions Canada (M.E.I.) c. DeCaro, [1993] 2 C.F. 408 (C.A.F.), Canada (M.E.I.) c. Wong (1993), 153 N.R. 237 (C.A.F.), Canada (M.E.I.) c. Hundal, [1995] 3 C.F. 32 (C.F. 1re inst.), conf. par (1996), 36 Imm. L.R. (2d) 153 (C.A.F.), et Bruan c. Canada (M.E.I.), [1995] 3 C.F. 231 (C.F. 1re inst.). Ces décisions sont pertinentes en ce qui concerne l'examen au fond de la décision de l'arbitre, mais elles ne s'appliquent pas à la présente affaire où la section d'appel n'a pas examiné les faits parce qu'elle a conclu qu'elle n'avait pas compétence.

[22]      À cette étape, le requérant s'intéresse surtout aux faits sur lesquels l'arbitre a jugé que le requérant n'était pas résident permanent. Étant donné que le requérant n'a aucun recours en section d'appel, la seule option qui se présente à lui est de demander un contrôle judiciaire. Par conséquent, je confirme la décision de la section d'appel selon laquelle elle n'avait pas compétence pour entendre l'appel.

LES QUESTIONS À CERTIFIER

[23]      Les parties demandent que les questions suivantes soient certifiées conformément au paragraphe 83(1) de la Loi.

     1)      Lorsqu'un arbitre a conclu qu'une personne a obtenu le droit d'établissement par suite d'une fausse indication sur son état matrimonial, la section d'appel, saisie d'un appel interjeté en vertu du paragraphe 70(1) de la Loi sur l'immigration à l'encontre de la mesure de renvoi prononcée par l'arbitre, peut-elle rejeter l'appel pour défaut de compétence, sans entendre l'affaire au fond, à la lumière du dossier d'arbitrage et des plaidoiries des parties relativement à sa compétence?                 
     2)      La section d'appel a-t-elle compétence en vertu du paragraphe 70(1) pour entendre l'appel d'une personne qui a obtenu le droit d'établissement sur la foi d'une déclaration frauduleuse donnée par cette personne?                 
     3)      En particulier, la personne qui a obtenu le droit d'établissement sur la foi d'une déclaration frauduleuse a-t-elle obtenu l'"autorisation de s'établir au Canada", de sorte qu'elle est un "résident permanent" qui peut interjeter appel en vertu du paragraphe 70(1) de la Loi sur l'immigration ?                 
     4)      La section d'appel a-t-elle compétence en vertu du paragraphe 70(1) pour entendre l'appel d'une personne, indépendamment du fait que cette personne a fait ou non l'objet d'un rapport établi en vertu des alinéas 27(1)e) ou 27(2)g) de la Loi?                 
             

[24]      J'accueille la demande de certification de ces questions bien que les trois dernières aient déjà été certifiées par le juge Dubé dans l'affaire Canada (M.C.I.) c. Yu, [1997] F.C.J. no 782 (QL) (C.F. 1re inst.), qui sera entendue bientôt par la Cour d'appel fédérale.

                                 "Max M. Teitelbaum"

                                                              J.C.F.C.

OTTAWA (ONTARIO)

Le 15 décembre 1997


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