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                                                                                                                   T-2382-90

 

ENTRE :

 

            HUSSMAN STORE EQUIPMENT LIMITED,

                        société dûment constituée aux termes

                        de la loi ayant son siège à l’adresse

                        boîte postale 550, Brantford (Ontario),

 

 

                                                                                                             demanderesse,

                                                                 et

 

 

                               MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

 

                                                                                                                   défendeur.

 

 

 

                                           MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

LE JUGE ROTHSTEIN

 

 

            Il s’agit de l’appel d’une décision par laquelle le Tribunal canadien du commerce extérieur a conclu, le 7 juin 1990, que la demanderesse n’était pas admissible à une réduction de la taxe de vente fédérale applicable à la vente d’étagères de supermarchés de type « Ultraline ».

 

            Les dispositions législatives applicables sont le paragraphe 27(1), les alinéas 27(1.1)b) et d), et la partie I de l’annexe V de la Loi sur la taxe d’accise[1].  Pour trancher la question en litige, il a fallu renvoyer en détail à cette annexe et c’est la raison pour laquelle elle est reproduite en entier.

   27. (1) Est imposée, prélevée et perçue une taxe de consommation ou de  vente au taux spécifié au paragraphe (1.1) sur le prix de vente ou sur la quantité vendue de toutes marchandises

                                                                     [...]

 

    27. (1.1) La taxe prévue au paragraphe (1) est imposée aux taux suivants :

 

a) [...]

 

b) huit pour cent, dans le cas des marchandises énumérées à l’annexeV;

 

          c) [...]

 

          d) douze pour cent, dans tout autre cas.

 

 

                                                             ANNEXE V

                                                                       

                                                                  Partie I

                                      MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION[2]

 

1.  Briques; tuiles et carreaux de construction; blocs de construction courbés ou profilés; pierre à bâtir; dalles pour trottoirs et patios; bordures.

 

2.  Cheminées, capuchons de cheminée et foyers fixés à demeure.

 

3.  Portes, fenêtres et persiennes pour bâtiments, et autres structures et ferrures pour celles-ci, à l’exclusion des cadenas; moustiquaires et auvents pour portes et fenêtres.

 

4.  Fil et câbles électriques et de télécommunications; transformateurs, coupe-circuit et matériel electrique connexe conçus pour être installés en permanence dans un système d’alimentation en électricité.

 

5.  Matériel à combattre et à détecter l’incendie devant être installé dans des bâtiments.

 

6.  Carreaux de carrelage et revêtements composés, non découpés, à surface dure, devant être fixés à demeure aux planchers, et supports de ces articles; matériaux devant être incorporés dans les planchers de terrazzo.

 

7.  Vitres pour bâtiments et autres structures.

 

8.  Matériaux de construction à surface dure en matière plastique stratifiée.

 

9.  Réservoirs à eau chaude et chauffe-eau devant être installés à demeure dans des systèmes d’alimentation en eau pour bàtiments.

 

10.  Armoires de cuisine et de salle de bains et paillasses pour ces armoires, devant être installés à demeure dans des bâtiments.

 

11.  Bois d’oeuvre; contre-plaqué; châssis de fenêtres; bardeaux; lattes; revêtements; escaliers; passages; échelles de sauvetage; traverses de chemin de fer; poteaux d’éclairage, tours et éléments de construction semblables; corniches, frises, pilastres et autres éléments de construction semblables, à l’exclusion des meubles, qu’ils soient montés ou non.

 

12.  Matières pour rendre les bâtiments imperméables à l’eau et à l’humidité.

 

13.  Clous, longues pointes, vis, boulons, écrous et rondelles, rivets et attaches semblables.

 

14.  Peintures, vernis, teintures et enduits et finis semblables; huile de créosote et autres préservatifs du bois; additifs pour ce qui précède.

 

15.  Pilotis pour structures.

 

16.  Tuyaux, conduites et tubes conçus pour servir dans des bâtiments, des égouts, des réseaux d’irrigation ou de drainage, de pipelines et dans d’autres constructions; leurs robinets, soupapes et raccords.

 

17.  Plâtre; chaux; ciment et additifs pour béton; mélanges préparés de béton et de mortier secs.

 

18.  Panneaux de plâtre, carton de fibre, panneaux muraux, papier à construction, papier peint et matériaux pour plafonds, pour murs, comme isolants ou à des fins acoustiques, à l’exclusion de la moquette.

 

19.  Fosses septiques et siphons de dépôt de graisse pour ces fosses; pompes de puisard.

 

20.  Bains-douches, baignoires, lavabos, robinets, cabinets, cabinets de toilette, urinoires, éviers et rebords d’évier et baquets de blanchissage; pièces de ce qui précède.

 

21.  Métal de construction et métal fabriqué pour bâtiments et autres structures.

 

22.  Goudron; asphalte; matériaux et éléments de toiture, y compris les gouttières et les descentes.

 

23.  Ventilateurs et abat-vent.

 

24.  Pompes à chaleur lorsqu’elles sont conçues pour servir dans des systèmes de chauffage installés en permanence pour bâtiments.

 

25.  Appareils et dispositifs récupérateurs de chaleur pour tirer de la chaleur de l’air expulsé ou des eaux usées pour en récupérer l’énergie.

 

26.  Panneaux et tubes solaires conçus pour capter l’énergie solaire et la transformer en énergie calorifique utilisée dans les systèmes de chauffage solaires.

 

27.  Isolants thermiques conçus pour les conduits et tuyaux utilisés dans les immeubles et les dispositifs mécaniques; matières d’emballage conçues exclusivement pour être utilisées avec ces isolants.

 

28.  Poêles à bois et chaufferettes à bois.

 

29.  Dispositifs d’étanchéité et abris de zones de chargement, conçus pour économiser l’air chauffé ou réfrigéré pendant le chargement et le déchargement.

 

30.  Les maisons mobiles et les bâtiments modulaires.

 

31.  Les bâtiments et autres structures fabriqués ou produits par une personne, ailleurs qu’à pied d’oeuvre, en concurrence avec des personnes qui construisent ou érigent des bâtiments ou structures analogues non ainsi fabriqués ou produits.

 

32.  Les éléments porteurs destinés à être incorporés à des bâtiments ou autres structures, fabariqués ou produits par une personne, ailleurs qu’à pied d’oeuvre, en concurrence avec des personnes qui construisent ou érigent des bâtiments ou d’autres structures qui incorporent des éléments analogues non ainsi fabriqués ou produits.

 

33.  Béton malaxé prêt à l’usage.

 

34.  Mélanges d’asphalte pour pavage.

 

35.  Articles et matériaux supplémentaires qui, en vertu d’un règlement du gouverneur en conseil, sont des matériaux de construction.

 

 

 

            La demanderesse soutient qu’elle est admissible à un taux réduit de la taxe de vente, soit huit pour cent au lieu de douze, étant donné que le produit en question est visé par l’article 21 de la partie I de l’annexe V, car il s’agit de « métal fabriqué pour [...] autres structures ».  En fait, il s’agit d’étagères de métal destinées aux supermarchés.  La demanderesse transforme l’acier brut en pièces d’acier fabriqué qui, une fois assemblées, forment des étagères dont on se sert couramment dans les supermarchés.  Toutes les pièces fabriquées sont destinées à être vendues sur commande.  Elles sont expédiées dans des boîtes en vue d’être assemblées sur place.  Certaines des étagères ont la forme d’îlots alors que d’autres sont fixées aux murs ou à d’autres pièces d’équipement telles que les réfrigérateurs.  Les boulons d’ancrage et écrous servant à fixer les étagères aux murs et pièces d’équipement ou, dans certains cas, au plancher ou aux poutres de soutènement, ne sont pas fournis par la demanderesse.  Les membres des équipes qui assemblent et installent les étagères ne sont pas des employés de la demanderesse.

 

            L’article 21 suscite deux questions litigieuses.  

 

            1)Les marchandises vendues sont-elles du métal fabriqué pour d’autres structures par opposition à des étagères non assemblées?

            2)Les étagères constituent-elles d’« autres structures »?

 

Pour être admissible à un taux réduit de la taxe de vente, soit huit pour cent au lieu de douze, la demanderesse doit s’adonner à la vente de métal fabriqué pour autres structures.

 

            L’arrêt Chateau Manufacturing Limited c. S.M.R.N., [1984] C.T.C. 43, tranche la première question.  À la page 45, le juge Heald dit :

 

          De plus, même si les marchandises en question devaient être considérées comme « un bâtiment non assemblé » ainsi qu’en a conclu la majorité de la Commission, ce seul fait n’exclurait pas les matériaux qui sont manifestement du métal de construction ou du métal fabriqué destiné à l’érection de bâtiments de la catégorie décrite à l’article 21 de l’annexe V [maintenant l’annexe VI] si cette exclusion n’était pas exprimée clairement.  C’est à cause des termes utilisés par le Parlement à l’article 11 de l’annexe V que je dis cela.  L’article 11 énumère une multitude d’articles comme bois d’oeuvre, contre-plaqué, châssis de fenêtre, etc., « et autres éléments de construction semblables, non compris les meubles, qu’ils soient montés ou non » (C‘est moi qui souligne.).  Il faudrait un langage aussi catégorique pour me persuader que le Parlement entendait exclure le métal de construction et le métal fabriqué en cause de l’application de l’article 21.

 

 

D’après moi, le juge Heald considère que le seul fait qu’un article puisse être considéré comme un bâtiment non assemblé ne signifie pas qu’il ne peut aussi être considéré comme étant du métal de construction ou du métal fabriqué destiné à l’érection de bâtiments ou autres structures.  En l’espèce, il ressort de la preuve que les pièces de métal fabriqué doivent être assemblées sur place, au supermarché, par des équipes n’ayant pas de lien avec la demanderesse.  Vu le raisonnement appliqué dans l’arrêt Chateau par lequel je suis lié, même si l’on supposait que les marchandises envoyées par la demanderesse au supermarché étaient des étagères non assemblées, celles-ci ne seraient pas exclues du champ de l’article 21 pour cette seule raison.

 

            La deuxième question litigieuse est plus difficile à trancher.  À première vue, on pourrait penser que les « autres structures » doivent être considérées comme étant de même nature que les « bâtiments » mentionnés à l’article 21.  S’il en était ainsi, il serait clair, à mon avis, que les étagères de supermarchés ne sont pas visées par cet article.  Cependant, dans l’arrêt Superior Pre-Kast Septic Tanks Ltd. c. Sa Majesté la Reine, [1978] 2 R.C.S. 613, le juge Martland conclut que les mots utilisés à l’article 26 de la Loi ne sont pas de même nature :

 

          Le juge de première instance conclut ensuite que l’application de la règle noscitur a sociis à l’expression « tous semblables bâtiments, structures, éléments », à la fin du par. 26(4), et l’application de la règle ejusdem generis à l’expression « bâtiment ou une autre structure » à l’al. a) de ce paragraphe exigent que l’on restreigne le sens de « ou une autre structure » à quelque chose qui soit de la nature d’un bâtiment.

 

          Si l’on restreint de cette façon le sens du terme « structure », il perd toute utilité dans cet alinéa.  De plus, il est précédé du mot « autre » qui indique certainement qu’il vise quelque chose d’autre qu’un bâtiment.  Cette Cour a précisé ce point dans l’arrêt British Columbia Forest Products Limited c. Le ministre du Revenu national, à propos de la fixation d’une allocation du coût en capital.  L’une des questions en litige était de savoir si certains biens du contribuable tombaient dans la catégorie 3 des Règlements de la Loi de l’impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, ch. 148.  L’alinéa a) de la catégorie 3 mentionnait « un édifice ou autre structure ».  À la p. 111, l’argument que « structure » doit s’interpréter ejusdem generis avec le terme « édifice » a été rejeté, car « il est précédé du terme « autre », envisageant ainsi des structures autres que des édifices ».

 

 

 

Même si le juge Martland ne traitait pas de l’annexe V, sa conclusion m’incite à ne pas appliquer la règle ejusdem generis à l’expression « autres structures » " utilisée à l’annexe V.  Il est vrai, comme je le fais remarquer plus loin, qu’il a conclu à l’absence d’un lien entre l’annexe et l’article 26 de la Loi.  Cependant, suite à l’arrêt Superior, l’annexe V a été modifiée par l’ajout des articles 31 et 32.  Or, le libellé de l’article 31 est très proche de celui de l’alinéa 26(4)a), créant ainsi un lien plus étroit entre l’annexe V et l’article 26 que celui qui existait avant que l’arrêt Superior ne soit rendu.  Je reproduis de nouveau l’article 31 et le fais suivre de l’alinéa 26(4)a), afin de faire ressortir la grande similitude qui existe entre leurs libellés respectifs : 31.  Les bâtiments et autres structures fabriqués ou produits par une personne, ailleurs qu’à pied d’oeuvre, en concurrence avec des personnes qui construisent ou érigent des bâtiments ou structures analogues non ainsi fabriqués ou produits.                               [Non souligné dans l’original.]

      26. (4)  Lorsqu’une personne

 

a) fabrique ou produit un bâtiment ou une autre structure, ailleurs qu’à pied d’oeuvre, en concurrence avec des personnes qui construisent ou montent des bâtiments ou structures analogues non ainsi fabriqués ou produits,                                                 [Non souligné dans l’original.]

 

                                                                     [...]

 

elle est réputée, aux fins de la présente Partie, à l’exclusion du paragraphe 29(1), relativement à tous semblables bâtiments, structures, éléments, parpaings ou agglomérés ou acier de construction qu’elle a ainsi fabriqués ou produits, ne pas en être le fabricant ou le producteur.

 

 

J’applique donc le raisonnement du juge Martland et n’invoque pas la règle ejusdem generis pour interpréter l’expression « autres structures » utilisée à l’article 21 de l’annexe V.  Les « autres structures » ne sont pas nécessairement de la nature d’un bâtiment.

 

            Le Tribunal canadien du commerce extérieur a trouvé utiles les critères que le juge MacGuigan a élaborés à la page 6402 de l’arrêt M.R.N. c. Plastibeton Inc., 86 DTC 6400 (C.A.F.) pour déterminer s’il existait une structure au sens de l’alinéa 26(4)a) :

 

          Il me semble que, dans cette analyse, le juge Martland adopte trois critères pour déterminer l’existence d’une structure:  (1) elle doit être construite; (2) elle doit reposer sur ou dans le sol; (3) elle ne doit pas faire partie d’une autre structure.

 

 

            La demanderesse prétend qu’il devrait être tenu compte des définitions de [TRADUCTION] « structure » que contiennent les dictionnaires suivants :

[TRADUCTION]

 

1)The Shorter Oxford Dictionary on Historical Principles :  Ce qui a été construit; un bâtiment ou édifice quelconque, 4. surtout de taille considérable et d’apparence imposante, 5. de façon plus générale, un ensemble ou une charpente de pièces matérielles assemblées.

 

2)Black's Law Dictionary :  Toute construction, ou toute production ou pièce d’un ouvrage construit artificiellement opt. composée de parties jointes les unes aux autres d’une manière définie.  Ce qui a été construit; un édifice ou bâtiment quelconque.

 

3)The Living Webster Encyclopaedic Dictionary of the English Language : Quelque chose ayant été construit; un bâtiment; un édifice; un pont, un barrage ou une charpente; toute construction; toute chose composée de parties assemblées d’une manière quelconque.

 

 

L’avocat de la demanderesse soutient que ces définitions de [TRADUCTION] « structure » sont assez larges pour englober les étagères de supermarchés.  En particulier, il prétend qu’il ne ressort nullement de ces définitions qu’une structure ne peut se trouver à l’intérieur d’un bâtiment, sur le plancher. 

 

            Il semble que la prétention de la demanderesse va à l’encontre des critères élaborés par le juge MacGuigan pour déterminer s’il existe une structure, en particulier au deuxième, en supposant que ces critères s’appliquent à l’expression « autres structures » utilisée à l’annexe.  Dans Plastibeton, le juge MacGuigan dit expressément que l’article en question, soit la bande médiane d’une route, ne « peut [...] pas être définie comme une « autre structure » [par rapport à la route] pour l’application de l’alinéa 26(4)a) » [Non souligné dans l’original.].  Dans Superior Pre-Kast, l’arrêt ayant servi de fondement à l’élaboration des critères dans Plastibeton, le juge Martland mentionne que l’alinéa 26(4)a) est « sans rapport » avec l’énumération contenue à l’annexe V.  Dans Superior Pre-Kast, les marchandises (des fosses septiques) qui, prétendait-on, constituaient d’« autres structures » au sens de l’article 26, étaient énumérées à l’annexe.  À la page 617, le juge Martland dit :

 

          La pétition de l’appelante Lloydminster a été rejetée sur le fond.  Un des motifs de la décision de première instance est qu’inclure les fosses septiques dans la catégorie des « autres structures » est incompatible avec le par. 29(3) de la Loi.  Ce paragraphe réduit d’un neuvième la taxe imposée par l’art. 27 sur les articles énumérés à l’annexe V.  La Partie I de l’annexe V, intitulée « Matériaux de construction », inclut au par. 17 :

 

                   17.  Fosses septiques et siphons de dépôt de graisses pour ces fosses.

 

          Je ne suis pas d’accord avec cette conclusion.  Le fait que les fosses septiques sont mentionnées d’une façon générale à l’annexe V ne signifie pas qu’elles ne peuvent pas constituer une « structure » au sens d’un article sans rapport avec cette annexe qui détermine les circonstances spéciales dans lesquelles une personne qui a fabriqué ou produit de telles structures est censée ne pas en être le fabricant ou producteur.    [Non souligné dans l’original.]

 

 

            Cependant, comme je l’ai déjà dit, depuis que les arrêts Superior et Plastibeton ont été rendus, l’annexe V a été modifiée par l’ajout, entre autres, des articles 31 et 32.  Le libellé de l’article 31 en particulier est très proche de celui de l’alinéa 26(4)a) et il se peut bien, à mon avis, que la conclusion du juge Martland selon laquelle il n’existe pas de lien entre l’alinéa 26(4)a) et l’annexe V ne soit plus valable, du moins en ce qui concerne l’article 31.  L’application des critères élaborés dans l’arrêt Plastibeton, à partir des motifs exposés par le juge Martland dans Superior, pour interpréter l’expression « autres structures » contenue à l’article 31 de l’annexe, semblerait dès lors justifiable.  Et puis, comme il s’ensuivrait logiquement que l’expression « autres structures » devrait avoir la même signification dans tous les articles de l’annexe, on pourrait également appliquer les critères de Plastibeton à l’article 21.  Cela rejetterait la prétention de la demanderesse, vu que les étagères en question ne reposent pas sur le sol et n’y sont pas fixées.

 

            Quoi qu’il en soit, je ne crois pas qu’il soit nécessaire de se fonder exclusivement sur les critères de Plastibeton pour déterminer ce que désigne les « autres structures » mentionnées à l’article 21.  En effet, une analyse contextuelle de l’annexe permet d’arriver au même résultat que celui qu’on obtient en appliquant directement les critères de Plastibeton .  Les définitions tirées de dictionnaires que propose la demanderesse sont extrêmement larges.  Cependant, les dispositions législatives doivent toujours s’interpréter comme ayant trait au contexte.  Comme le juge Heald l’a dit dans Chateau, à la page 44 :

          Les termes employés à l’article 21 sont du vocabulaire courant et sont pris dans une acception courante.  Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait leur donner l’interprétation la plus large qui soit compatible avec le contexte dans lequel il est utilisé. [...]

                                                                                           [Non souligné dans l’original.]

 

 

            Il est clair qu’un tribunal peut se référer à toutes les dispositions regroupées sous un même titre pour interpréter le contenu de l’une de celles-ci.  Dans son ouvrage Driedger on the Construction of Statutes, 3rd ed. l’auteur dit, à la page 272 :

[TRADUCTION]

 

De l’avis du tribunal, cela signifiait que les titres « ne doivent pas formellement servir d’outils d’interprétation ».  Cependant, le regroupement de dispositions sous un même titre pourrait servir à cela.  Comme le juge Lambert, J.C.A. l’a expliqué [dans Re Peters and District of Chilliwack (1987), 43 D.L.R. (4th) 523, à la page 527] :

 

[...] en analysant la Loi comme je l’ai fait, j’ai étudié les articles regroupés à l’intérieur de parties, et bien que je me sois référé aux titres [c.-à-d. aux titres et sous-titres], ceux-ci ne constituent pas un élément essentiel du raisonnement en vertu duquel j’ai conclu que, selon l’esprit de la Loi, seuls les règlements de zonage adoptés aux termes de l’art. 716 devaient satisfaire aux exigences en matière d’audiences publiques prévues à l’art. 720 [...]

 

 

Le libellé des titres n’était pas essentiel.  C’est plutôt la façon dont les dispositions étaient regroupées, en unités et sous-unités, qui importait.

 

 

 

            En ce qui concerne les articles 3 et 7 de l’annexe, lesquels énumèrent les portes, fenêtres, persiennes et autres structures et ferrures pour celles-ci, de même que les moustiquaires et auvents et vitres, l’expression « autres structures » doit nécessairement renvoyer à un type de construction autre qu’un bâtiment, duquel les éléments énumérés, ou l’un de ceux-ci, pourraient constituer une partie.  Ainsi, il se pourrait qu’un barrage comprenant des pièces habitables ou même un pont à bascule doté d’une petite pièce pour le préposé soit visé par ces articles.  Les portes, persiennes, fenêtres et vitres pour autres structures semblent se rapporter à un type de construction permanente dont l’extérieur est exposé aux intempéries, mais pas forcément de la nature d’un bâtiment comme tel.  L’articleI 15, lequel mentionne les « pilotis pour structures » laisse supposer que les structures visées reposent sur le sol.  Or, les étagères de supermarchés reposent sur le plancher d’un bâtiment ou sont fixées aux murs ou à d’autres parties du bâtiment fixées à demeure.  Elles ne sont pas exposées aux intempéries et ne reposent pas sur le sol.

 

            Les étagères de supermarchés pourraient être considérées semblables aux parties intérieures d’un bâtiment fixées à demeure.  Il semblerait que les éléments visés à l’article 10, soit les armoires de cuisine et de salle de bains, constitueraient des parties intérieures d’un bâtiment fixées à demeure ou du moins s’en rapprocheraient.  Cependant, il est révélateur que l’article 10 porte uniquement sur les armoires de cuisine et de salle de bains.  De toute évidence, les armoires des autres pièces d’un bâtiment ne sont pas visées par cet article.  Il en ressort donc que les parties intérieures d’un bâtiment fixées à demeure ne sont pas, de façon générale, visées par l’annexe, sauf celles qui sont expressément énumérées.  Une interprétation trop large de l’expression « autres structures » utilisée à l’article 21 pour y inclure toutes les parties intérieures d’un bâtiment fixées à demeure, semblerait aller à l’encontre de l’intention du législateur de restreindre le nombre de parties intérieures soumises à un taux de taxe inférieur.

 

            L’article 20 porte sur les bains-douches, baignoires, lavabos et éviers, lesquels sont tous des parties intérieures fixées à demeure.  Cependant, encore une fois, il s’agit d’une énumération précise d’articles qui laisse supposer que l’intention du législateur était de ne pas inclure dans la rubrique « autres structures » les articles qui ne sont pas mentionnés.  Autrement dit, une baignoire ou un lavabo en acier fabriqué pourrait être considéré comme une « autre structure » au sens le plus large du terme, mais il est évident que lorsqu’il a décidé de soumettre de tels articles d’intérieur au taux de taxe inférieur, le législateur en a dressé une liste précise, ce qui semble indiquer que l’expression générale « autres structures » ne devait pas être utilisée à cette fin.

 

            En outre, les meubles ont été expressément exclus.  En effet, l’article 11, qui porte sur certains types d’éléments de construction, dit clairement « à l’exclusion des meubles, qu’ils soient montés ou non ».  Bien que les étagères de supermarchés ne soient pas des meubles au sens conventionnel du terme, il semble bien que les articles se trouvant à l’intérieur d’un bâtiment ne sont pas visés à moins d’être expressément énumérés à l’annexe.

 

            Si l’expression « autres structures » utilisée à l’article 21 était interprétée de manière à inclure les étagères de supermarchés, il s’ensuivrait que toutes les étagères de métal fabriqué installées dans les maisons et autres bâtiments seraient également visées par cet article.  Cependant, cela serait incompatible avec le libellé restrictif de l’annexe en ce qui concerne les articles se trouvant à l’intérieur d’un bâtiment. 

 

            Vu la présente analyse de la partie I de l’annexe V, je suis convaincu que les étagères de supermarchés fournies par la demanderesse ne constituent pas d’« autres structures » au sens de l’article 21 de la partie I de l’annexe V de la Loi sur la taxe d’accise.


            L’appel est rejeté avec dépens.

 

 

 

                                                                        (Signé) « Marshall E. Rothstein »

 

                                                                                                Juge

 

 

 

 

VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

 

LE 26 JUIN 1997.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme                                    ____________________

                                                                                    Bernard Olivier, LL.B.

 


 

               AVOCATS ET PROCUCEURS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :HUSSMAN STORE EQUIPMENT LIMITED, société dûment constituée aux termes de la loi ayant son siège social à l’adresse boîte postale 550, Brantford (Ontario)

 

                                                            et

 

 

                                                MINISTRE DU REVENU NATIONAL

 

 

NO DU GREFFE :                            T-2382-90

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             le 28 mai 1997

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DU JUGE ROTHSTEIN en date du

26 juin 1997

 

 

 

ONT COMPARU :

 

            Clark V. Craig                                              pour la demanderesse

 

 

            Daniel Bourgeois                                           pour le défendeur

 

 

 

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

 

            Simpson, Wigle                                              pour la demanderesse

            Burlington (Ontario)

 

 

            George Thomson                                           pour le défendeur

            Sous-procureur général du Canada

 

 

 

 

 



1     Les dispositions législatives applicables sont maintenant le paragraphe 50(1), les alinéas 50(1.1)b) et d) et l’annexe V de la Loi sur la taxe d’accise.  Les parties ignoraient le moment précis auquel l’affaire soulevée dans la présente affaire a pris naissance, mais elles ont estimé que cela a dû se produire en 1986 et/ou en 1987.  Les dispositions citées sont tirées de la version de la Loi qui se trouve au ch. 54 de 1986, sanctionnée le 19 décembre 1986.  Le paragraphe 5(3) de la Loi prévoit :

 

   5.  (3) Les paragraphes (1) et (2) [les dispositions pertinentes du paragraphe 27(1.1)] sont réputés entrés en vigueur le 1er avril 1986.

2               Cette annexe était en vigueur en 1986/1987, après avoir été modifiée par L.C. 1986, ch. 9, paragraphe 52(1), réputé entré en vigueur en vertu du paragraphe 52(2) le 1er juillet 1985.

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