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Date : 20020207

Dossier : T-1216-99

Référence neutre : 2002 CFPI 144

ENTRE :

                                                                        JUDY CHUA

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                              - et -

                                             LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

                                                                                                                                                      défendeur

                                                  TAXATION DE DÉPENS - MOTIFS

Charles E. Stinson

Officier taxateur


[1]                 Dans cette procédure de contrôle judiciaire, qui concernait la constitutionnalité de la procédure de recouvrement appliquée par le défendeur contre la demanderesse, à propos d'une créance fiscale (273 986,44 $ É.-U.) du Internal Revenue Service des États-Unis d'Amérique (ci-après l'IRS), la Cour avait statué en faveur de la demanderesse et lui avait adjugé « les trois quarts de ses dépens selon la colonne III du tarif B » . Les parties m'ont fait observer que les seuls points en litige dans le mémoire de frais de la demanderesse (51 287,46 $ au total) concernent deux réclamations de six unités chacune selon le point no 3, pour des affidavits supplémentaires; la réclamation de 1 800 $ selon le point no 14b) pour le deuxième avocat; le doublement d'honoraires après le 8 décembre 1999 selon la règle 420, et les réclamations de 2 344 $ et de 14 012,43 $ respectivement pour les photocopies et pour Michael Moran, un avocat américain. Les parties se sont entendues pour ramener le point no 6 (requête du 13 septembre 1999) à 300 $ et pour supprimer le point no 12 (exposé des faits). Les parties se sont entendues sur les taux applicables d'intérêt après jugement sur les dépens.

Position du défendeur

[2]                 Le défendeur a soutenu que deux des réclamations selon le point no 5 (dossier d'audience du 6 octobre 1999 et dossier de demande du 10 novembre 1999), acceptées devant moi, concernent déjà les services réclamés sous le point no 3. Le défendeur a reconnu la présence d'avocats additionnels, mais a fait valoir que le texte clair et précis du point no 14b), qui requiert une directive de la Cour, fait obstacle à tout montant ici puisque la Cour n'a rien ordonné.


[3]                 Le défendeur a fait valoir que la demanderesse n'a pas droit à un doublement des dépens selon ce que prévoit la règle 420. Le défendeur a affirmé qu'il pouvait plaider la constitutionnalité de la Convention entre le Canada et les États-Unis d'Amérique en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, 1980, et ses modifications (ci-après la Convention), mais que son unique rôle concernant la créance fiscale consistait à aider l'IRS dans le recouvrement d'impôts dus aux États-Unis. Le défendeur a fait valoir qu'il ne pouvait pas examiner le compromis proposé puisque la validité de la créance fiscale elle-même n'était pas l'objet du contrôle judiciaire. La demanderesse a été invitée à communiquer directement avec l'IRS. La Cour a confirmé cette position dans ses décisions interlocutoires et dans sa décision concernant les dépens. Les pourparlers de compromis, auxquels le défendeur n'a pas participé, entre l'IRS, qui n'était pas partie au contrôle judiciaire, et la demanderesse, n'intéressaient pas les points soulevés dans le contrôle judiciaire. Le défendeur devrait être considéré comme la partie ayant eu gain de cause aux fins de la règle 420, parce que la Cour n'a pas tiré de conclusions négatives sur la non-divulgation des détails de la créance fiscale sous-jacente et, bien qu'elle ait statué en faveur de la demanderesse sur l'argument lié à la Charte des droits et libertés, elle a statué en faveur du défendeur sur la question de la compétence législative.

[4]                 Le défendeur a soutenu que la preuve au soutien de la réclamation liée aux photocopies ne répond pas au critère de l'affaire Diversified Products Corp. c. Tye-Sil Corp. 34 C.P.R. (3d) 267, aux pp. 275 et 276. Puisque ces frais étaient de nature interne, ils ne sont pas taxables. Le défendeur a fait valoir qu'il serait arbitraire d'autoriser même le tarif de 0,20 $ la page appliqué par la Cour canadienne de l'impôt, vu l'insuffisance de la preuve concernant le coût réel, vu que les frais dont il s'agit ici sont fondés sur une estimation, et vu enfin l'absence d'une preuve de pertinence. Le défendeur a fait valoir que les frais de 2 013,47 $ demandés par Ikon Office Solutions pour les photocopies et la reliure, convenus sous réserve de production de la facture (la demanderesse l'a maintenant produite), ainsi que les sommes additionnelles de 47 $ et de 35,41 $ versées à des bibliothèques universitaires, sont une indemnité suffisante pour les photocopies, et en particulier celles qui concernent le dossier de demande.


[5]                 Le défendeur a fait valoir que les frais afférents à Michael Moran, un avocat américain, devraient être supprimés parce qu'il n'a été produit aucune preuve d'expert recevable concernant le droit fiscal des États-Unis. Le défendeur s'est opposé à la tentative de la demanderesse de produire, comme pièce de l'affidavit d'un avocat canadien, la lettre d'opinion de M. Moran. La demanderesse a retiré ledit affidavit lors de l'audience, et la décision de la Cour ne s'est nullement fondée sur l'opinion de M. Moran. Le défendeur a admis qu'une facture confirme que M. Moran a bien rendu un service, mais il a soutenu que sa lettre d'opinion ne faisait pas avancer le litige parce qu'elle concernait l'exactitude des calculs portant sur une créance fiscale des États-Unis qui n'était pas en cause dans le contrôle judiciaire. Le défendeur a soutenu que les observations de la Cour sur l'application régulière de la loi étaient sans rapport avec la manière dont elle avait disposé des questions liées à la Charte et des questions constitutionnelles, et que la décision de la Cour n'éteignait pas la créance fiscale des États-Unis. Le défendeur a fait observer que ces mêmes arguments s'appliquent à l'offre de règlement dont parle la règle 420, puisque ladite créance fiscale était située uniquement aux États-Unis et que le seul point que devait décider la Cour était de savoir si une procédure de recouvrement pouvait se dérouler au Canada. Le défendeur a fait valoir que, si la demanderesse avait transigé avec l'IRS concernant la créance fiscale des États-Unis, le jugement sur les questions relatives à la Charte et sur les questions constitutionnelles aurait quand même pu être rendu, mais en réalité l'objectif de la demanderesse était d'échapper au recouvrement et non de transiger. Finalement, dans l'affaire Camp Robin Hood Ltd. c. La Reine [1982] 1 C.F. 19, à la p. 38, dans l'affaire Apotex Inc. c. Wellcome Foundation Ltd. (1998) 159 F.T.R. 233, à la p. 250, et dans l'affaire Bayliner Marine Corp. c. Doral Boats Ltd. (1987) 11 F.T.R. 192, à la p. 196, la Cour était arrivée à la conclusion qu'une dépense n'est pas admissible simplement parce qu'elle a été engagée.

La position de la demanderesse

[6]                 La demanderesse a fait valoir que des circonstances inusitées mettent en jeu ici la règle 409 et divers facteurs relevant de la règle 400(3). La règle 400(3)a) trouve application dans le cas d'une femme âgée de 75 ans et aux prises avec des problèmes de santé, dont le mari est lui aussi aux prises avec des problèmes de santé, qui est poursuivie par le défendeur, en tant que mandataire de l'IRS, pour son unique actif. La règle 400(3)c) est applicable car il s'agissait là de la première affaire publiée se rapportant à la Convention, d'un arrangement rétroactif sur une période de dix ans et de la première occasion donnée aux États-Unis de recouvrer des impôts au Canada. Les alinéas g) et h) de la règle 400(3) sont applicables eux aussi vu le travail considérable qui fut nécessaire pour régler cette importante question d'intérêt public. L'alinéa i) de la règle 400(3) est applicable parce que la conduite de l'IRS, qui a retardé et refusé la communication de documents, a entraîné des frais interlocutoires additionnels, notamment le recours à M. Moran pour qu'il examine en détail la créance fiscale des États-Unis.


[7]                 S'agissant du point no 3, la demanderesse a noté que le défendeur, après avoir produit l'affidavit d'un représentant (M. Ehrlich) de l'IRS, avait d'abord accepté de faire comparaître le représentant pour un contre-interrogatoire, mais M. Ehrlich avait plus tard refusé de comparaître. L'ordonnance datée du 30 juillet 1999, qui résultait en partie de la nécessité pour la demanderesse d'obtenir certains détails de la créance fiscale des États-Unis, était rédigé en un langage très ferme, elle imposait une série de mesures, notamment la signification à tous les procureurs généraux au Canada d'un avis de la contestation constitutionnelle, et elle prévoyait un rejet pour le cas où la demanderesse négligerait de se plier auxdites mesures. Cela avait nécessité un niveau de préparation qui dépassait le niveau requis d'habitude par un procès ou une audience, ce qui justifiait donc les deux réclamations apparaissant dans le texte du point no 3.

[8]                 S'agissant du point no 14b), relatif au deuxième avocat, la demanderesse a fait valoir que la nature constitutionnelle inusité de cette affaire, les deux points principaux étant la question de savoir si la Charte empêchait l'IRS de saisir la maison de la demanderesse, et la question de savoir si le défendeur pouvait tenir lieu d'agent de recouvrement pour l'IRS, avait nécessité la mise à contribution d'un deuxième cabinet d'avocats. D'ailleurs, cette affaire impliquait deux audiences en une seule, un avocat d'expérience s'occupant de la question constitutionnelle, et un deuxième avocat d'expérience s'occupant de la question relative à la Charte.


[9]                 S'agissant des doubles dépens dont parle la règle 420(1), la demanderesse a affirmé que c'est M. Ehrlich qui avait amorcé et proposé les termes d'un compromis. L'expertise de M. Moran était utile pour ces pourparlers de compromis. La demanderesse a soutenu que, selon la preuve, le défendeur, en tant qu'agent de recouvrement de l'IRS, n'avait pas le pouvoir de transiger. Le défendeur a activement encouragé la demanderesse à traiter directement avec l'IRS et cela, combiné aux déclarations et propositions de l'IRS, avait conduit la demanderesse à croire que les pourparlers de compromis devaient être menés directement avec l'IRS. La demanderesse a soutenu que la règle 420(1) ne requiert pas que des offres de compromis soient faites à une partie. Par conséquent, les pourparlers approfondis de compromis engagés ici avec l'entité véritablement concernée par la créance fiscale, c'est-à-dire l'IRS, font intervenir ladite règle parce que la décision de la Cour a éteint l'intégralité de la créance fiscale. Si la créance n'existe pas en vertu de la Convention, il est impossible à l'IRS de demander l'aide du défendeur. La demanderesse a fait valoir que l'affaire Yared Realty Ltd. c. Topalovic [1981] O.J. No. 2219, aux paragraphes 6-11, énonce le principe selon lequel les règles régissant les dépens sont applicables dans le cas d'une partie nominale tenant lieu de simple prête-nom d'une personne qui n'est pas partie. Par conséquent, la règle 420(1) est applicable étant donné que la décision de la Cour était beaucoup plus favorable à la demanderesse que la contre-offre de compromis faite par l'IRS.

[10]            La demanderesse a fait valoir que la preuve confirme les frais de photocopie, même si le montant semble élevé. Le dossier révèle plusieurs demandes interlocutoires, comportant des documents et précédents volumineux, essentiels pour structurer, en vue du contrôle judiciaire, des questions complexes de nature fiscale et constitutionnelle, ainsi que des questions liées à la Charte. Avis de la question constitutionnelle devait également être signifié à tous les gouvernements au Canada.


[11]            La demanderesse, invoquant l'affaire J. Allen Carr c. Le Ministre du Revenu national [1995] A.C.I. no 265, aux paragraphes 57 à 59, a fait valoir que, même si M. Moran n'a pas été appelé comme témoin expert, ses frais sont taxables parce que son expertise a permis de confirmer le déni de l'application régulière de la loi aux États-Unis au regard de l'argument lié à la Charte et de structurer une offre de compromis. La demanderesse a admis que la Cour n'avait pas compétence pour statuer sur la créance fiscale des États-Unis, mais a fait observer que la décision de la Cour reconnaissait le traitement irrégulier appliqué par l'IRS.

Taxation

[12]            Il n'importe pas de savoir si les affidavits supplémentaires réclamés sous le point no 3 portent sur des procédures interlocutoires ou sur les aspects de fond du contrôle judiciaire. Les provinces ou États qui inscrivent un dédommagement partiel dans un tarif, en l'occurrence le tarif B, énumèrent en général des événements distincts pour le recouvrement de dépens, dans une liste qui n'est pas nécessairement limitative. La demanderesse a reçu une indemnisation au titre des points nos 5 et 13 et, eu égard aux circonstances qui nous intéressent ici, cela fait obstacle à un recouvrement au regard du point no 3. En ce qui concerne le point no 14b), la règle 409 permet à un officier taxateur de considérer les facteurs de la règle 400(3), mais cela ne veut pas dire, en ce qui concerne les règles 405 et 407, la définition de « officier taxateur » dans la règle 2 et la composition de la Cour selon ce que prévoit l'article 5 de la Loi sur la Cour fédérale, qu'un officier taxateur peut exercer le pouvoir conféré à la Cour par la règle 400(1). Je refuse la réclamation afférente au point no 14b).


[13]            La règle 419 fait intervenir la règle 420 dans un contrôle judiciaire. Les décisions que j'ai rendues dans l'affaire Ronald Williams et autres c. Le Ministre du Revenu national 2001 CFPI 106 (T-1646-97, le 20010222), aux paragraphes [21] à [23], et dans l'affaire Early Recovered Resources Inc. c. Gulf Log Salvage Co-Operative Association 2001 CFPI 1212 (T-588-00, le 20011106), aux paragraphes [7], [12] et [17], donnent à entendre que l'application de la règle 420 ne va pas nécessairement de soi. Je conviens que la décision de la Cour n'a pas éteint la créance fiscale des États-Unis. Les avocats des deux parties, en tant que fonctionnaires judiciaires selon le paragraphe 11(3) de la Loi sur la Cour fédérale, auraient été tenus d'informer la Cour d'un facteur susceptible d'empêcher une utilisation à bon escient du temps de la Cour. Je doute que la Cour eût permis que cette procédure de contrôle judiciaire suive son cours sur une question théorique si la créance fiscale des États-Unis avait été l'objet d'une transaction.


[14]            La pièce introductive d'instance concerne la décision du défendeur de recouvrer la créance fiscale des États-Unis. Il expose plusieurs griefs de contrôle judiciaire, affirmant notamment que la demanderesse n'est pas tenue de payer la « présumée dette » . Cette affirmation pourrait concerner la validité de la créance fiscale, mais elle se rapporte plus vraisemblablement à une intention de contester, pour des motifs constitutionnels et des motifs liés à la Charte, la décision de procéder à un recouvrement au Canada au nom de l'IRS. L'avis de question constitutionnelle, tel qu'il a été signifié, renferme dans son paragraphe 23 l'affirmation selon laquelle [TRADUCTION] « il ne s'agit pas d'une question de fiscalité en tant que telle - et certainement pas d'une question de fiscalité canadienne - mais il s'agit d'une question de recouvrement d'une créance fiscale faisant intervenir un créancier étranger... une question qui doit être résolue d'après les notions générales guidant le traitement équitable des débiteurs au sens large » . La position ultérieure de la demanderesse par laquelle elle allègue une difficulté dans le calcul de la créance fiscale pourrait s'accorder avec les mots « au sens large » . Le paragraphe [23] des motifs de la Cour dans la décision datée du 12 septembre 2000 confirme que le défendeur était au fait des préoccupations de la demanderesse au regard de la Charte, et cela près de trois ans avant l'introduction de l'instance. Il n'importe pas de savoir si je crois que le défendeur aurait pu ou aurait dû tirer les conclusions apparaissant aux paragraphes [67] à [71], qui concernent la possibilité d'un préjudice pour des personnes telles que la demanderesse, parce que l'observation, au paragraphe [50], qui concerne le pouvoir discrétionnaire du défendeur de refuser une demande de recouvrement faite par les États-Unis me porte à croire, pour les questions relatives aux dépens, que le défendeur ne pouvait pas totalement se dissocier du processus de compromis.


[15]            Cette procédure de contrôle judiciaire a été introduite le 30 juin 1999. Selon le dossier, le défendeur a proposé à la demanderesse en septembre 1999 de s'adresser directement à l'IRS, bien qu'avec des questions qui émanaient de l'affidavit de M. Ehrlich. Des pourparlers de compromis ont alors suivi ce rapprochement avec l'IRS. Vu la possibilité d'un recouvrement international, la rétroactivité de la Convention et le passage du temps depuis l'examen initial (1996) de la demande d'aide en vue d'un recouvrement, je crois qu'il est improbable que le défendeur ait pu véritablement amener l'IRS à transiger ou à éteindre la créance fiscale des États-Unis, ce qui aurait rendu inutile le présent contrôle judiciaire. Le défendeur a également fait valoir, pour la question constitutionnelle, qu'un débiteur fiscal qui est confronté à des mesures de recouvrement selon la Loi de l'impôt sur le revenu peut contester les mesures de recouvrement, mais non la créance sous-jacente (paragraphe 35 de l'exposé des faits et du droit déposé le 25 novembre 1999). Toutefois, vu la décision Yared Realty Ltd., précitée, et vu l'absence, dans la règle 420(1), de mots limitant l'application de cette règle aux parties au litige, et puisque les rapports de la demanderesse avec l'IRS auraient pu directement influer sur la procédure de recouvrement sans égard à l'expiration des délais en vigueur aux États-Unis pour contester formellement la créance fiscale, je suis d'avis que le résultat était plus favorable à la demanderesse qu'au défendeur, et par conséquent qu'à l'IRS. Je note également que l'IRS, dans sa contre-offre datée du 23 mai 2000, mentionnait l'abandon de la procédure de contrôle judiciaire parmi les conditions du compromis. La raison de cette condition s'expliquait sans doute par sa volonté d'empêcher toute dilution possible de la Convention. Par conséquent, la demanderesse aura ses doubles dépens à compter du 8 décembre 1999.


[16]            Mes conclusions relatives à la règle 420 ne rendent pas plus simple la tâche de résoudre la question du rôle de M. Moran. Une ordonnance datée du 30 juillet 1999 exigeait en son paragraphe 3 que le défendeur [TRADUCTION] « fournisse les détails du régime fiscal imposé par l'Internal Revenue Service des États-Unis concernant la somme, la pénalité et les intérêts réclamés et indique... les détails du texte législatif en vertu duquel une nouvelle cotisation a été autorisée... » Une deuxième ordonnance rendue ce même jour différait une demande de retrait de l'affidavit de M. Ehrlich jusqu'à liquidation de la contestation constitutionnelle. L'engagement à faire comparaître M. Ehrlich pour un contre-interrogatoire, et l'abandon de cet engagement, se sont prouits avant l'audience du 30 juillet 1999. Le dossier (paragraphe 6 des observations écrites datées du 6 octobre 1999) mentionne que M. Moran a été retenu le 20 août 1999, parce que les pièces communiquées par le défendeur conformément au paragraphe 3 de l'ordonnance du 30 juillet 1999 étaient censément insuffisantes. Les quatre paragraphes finaux du rapport de M. Moran font état de plusieurs erreurs dans les calculs de l'IRS et mentionnent que [TRADUCTION] « il paraît clair qu'aucun des calculs fournis par l'IRS n'est exact » . On pourrait débattre, selon le point de vue que l'on adopte, la question de savoir si telles erreurs étaient ou non inextricablement liées aux questions de recouvrement, mais il est clair que la demanderesse faisait valoir sa position lorsque ces frais ont été engagés au titre de M. Moran par suite de la nécessité pour elle d'obtenir des informations et éclaircissements de M. Erhlich (paragraphes 14 à 29 des observations écrites datées du 6 octobre 1999).


[17]            Puis la demanderesse a comparu le 13 septembre 1999, en sollicitant une ordonnance qui enjoindrait le défendeur de se conformer au paragraphe 3 de l'ordonnance du 30 juillet 1999, et qui prescrirait la comparution comme témoin de M. Ehrlich en vue d'un contre-interrogatoire, et la production de la lettre, ainsi que des renseignements s'y rapportant, adressée par l'IRS au défendeur, dans laquelle l'IRS demandait une aide en vue d'un recouvrement. La Cour a ajourné toute l'affaire et ordonné que les parties obtiennent une clarification de l'ordonnance du 30 juillet 1999 concernant le statut de l'affidavit de M. Ehrlich et s'informent si le défendeur s'était conformé au paragraphe 3. Le défendeur a adopté la position (observations écrites datées du 12 octobre 1999) selon laquelle l'affidavit de M. Ehrlich était produit en opposition à une demande interlocutoire qui avait été déposée au nom de la demanderesse et qui n'était plus en cause, et qu'il serait contre-indiqué de permettre à la demanderesse de l'utiliser dans la procédure elle-même de contrôle judiciaire. Dans ses motifs du 28 octobre 1999, la Cour avait rejeté la requête sollicitant la conformité audit paragraphe 3, la comparution de M. Ehrlich à titre de témoin et la production de la demande d'aide au recouvrement, et elle avait indiqué que le paragraphe 3 de l'ordonnance du 30 juillet 1999 avait été inclus par erreur, étant donné que le stade initial de ce différend concernerait les questions de la demanderesse au regard de la Charte.


[18]            Je doute que la demanderesse eût approché le défendeur ou l'IRS avec des propositions de compromis, n'eût été la décision du défendeur de donner suite à la demande de l'IRS pour une aide au recouvrement. J'ai déjà accepté dans certains cas des débours afférents à des avocats étrangers (motifs datés du 29 juillet 1999, numéro du greffe T-1941-93: James L. Ferguson c. Arctic Transportation Ltd. et autres). Je ne suis pas nécessairement convaincu que la demanderesse aurait engagé M. Moran, quel que fût le texte de l'ordonnance du 30 juillet 1999, mais je crois que la demanderesse n'aurait pas tenté à cette étape de sa vie un règlement de sa dette fiscale envers les États-Unis, n'eût été la décision du défendeur de procéder au recouvrement, et par conséquent les coûts afférents à M. Moran n'auraient pas été engagés sans ladite décision. L'opinion de M. Moran, qui à l'origine devait porter sur le témoignage de M. Ehrlich dans le contexte de procédures interlocutoires pour lesquelles il n'a pas été adjugé de dépens, a finalement été utilisée à des fins additionnelles, telles que les pourparlers de compromis, qui intéressaient le contexte du contrôle judiciaire, et mes conclusions ci-dessus concernant la règle 420, pour lesquelles des dépens ont été accordés. Il semble clair que la proposition de compromis du 8 décembre 1999 était pour l'essentiel fondée sur son rapport. Son rapport semble dépasser l'expertise d'avocats canadiens aussi avertis et aussi expérimentés que celui de la demanderesse. Les avocats des deux parties devaient, du 30 juillet au 18 août 1999, examiner les mesures, notamment en mettant en doute l'à-propos du paragraphe 3 de l'ordonnance du 30 juillet 1999, qui aurait pu empêcher ou réduire les dépens afférents à M. Moran. Le défendeur a communiqué le 18 août 1999 une réponse conformément audit paragraphe 3. Je crois que le défendeur doit par conséquent accepter les conséquences de certains coûts s'y rapportant. Cependant, la demanderesse devrait supporter une part de responsabilité dans la difficulté posée par ledit paragraphe 3. Eu égard aux circonstances du présent litige, j'autorise une somme réduite, soit 9 000 $ Can.

[19]            Une critique que l'on pourrait formuler à propos des frais de photocopie au fil des ans est que ces frais visent parfois des textes doctrinaux ou jurisprudentiels qui n'ont que peu de rapport, voire aucun rapport, avec les points en litige. En accord avec les motifs que j'ai exposés dans l'affaire Carlile c. La Reine, 97 D.T.C. 5284, et dans l'affaire Section locale 4004, Division du transport aérien du Syndicat canadien de la fonction publique c. Air Canada, le 25 mars 1999, numéro du greffe T-323-98, et en accord avec l'avis de lord Russell (à propos des honoraires d'avocat) dans l'affaire Re Eastwood (deceased) :

[TRADUCTION]

... À notre avis, le système d'application directe de l'approche en matière de taxation des honoraires d'un avocat indépendant à une affaire telle que celle-ci présente une simplicité relative qu'il convient de recommander grandement, et il semble avoir fonctionné sans qu'on lui impute depuis de nombreuses années une injustice notable dans le domaine de la taxation des dépens, où la justice est de toute façon une justice rugueuse, en ce sens qu'elle n'est pas exempte d'une approximation assez marquée... (non souligné dans le texte),          (1974) 3 All E.R. 603, à la page 608

j'accorde une somme réduite, soit 1 200 $.

[20]            Le mémoire de frais de la demanderesse, présenté selon la somme de 51 287,46 $, est taxé et accepté selon la somme de 42 088,45 $.


          « Charles E. Stinson »          

   Officier taxateur

Vancouver (C.-B.)

Le 7 février 2002

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, Trad. a., LL.L.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                        T-1216-99

INTITULÉ :                       Judy Chua c. Le Ministre du Revenu national

LIEU DE L'AUDIENCE :                                Vancouver (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :                              le 25 septembre 2001

TAXATION DE DÉPENS - MOTIFS : Charles E. Stinson

DATE DES MOTIFS :     le 7 février 2002

ONT COMPARU :

L.M. Little, c.r.                                                     pour la demanderesse

Timothy Walker                                                                

Linda L. Bell                                                         pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Thorsteinssons

Vancouver (C.-B.)                                               pour la demanderesse

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                                  pour le défendeur


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