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                                                                                                                                           Date : 20010419

                                                                                                                               Dossier : IMM-331-00

                                                                                                           Référence neutre : 2001 CFPI 349

Ottawa (Ontario), le 19 avril 2001

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE PELLETIER

ENTRE :

                                                  VICTOR HERNANDEZ-ANDASOL

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE PELLETIER

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'un avis du ministre selon lequel le demandeur constitue un danger pour le public en raison des ses antécédents judiciaires.


[2]                 Le demandeur est un résident permanent du Canada, ayant été accepté en tant que réfugié du Salvador en 1989. En 1995, le demandeur a été condamné à l'emprisonnement pour une durée de trois ans relativement à une agression sexuelle survenue en 1994. En raison de la déclaration de culpabilité, les fonctionnaires du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration ont entrepris le processus qui a amené le délégué du ministre à établir l'avis selon lequel le demandeur constituait un danger pour le public. Au cours de ce processus, les fonctionnaires du ministère ont préparé un document intitulé [traduction] « Demande de l'avis du ministre » ainsi qu'un document intitulé [traduction] « Rapport sur l'avis du ministre » . Ces documents ont été préparés en vue de leur soumission au délégué du ministre afin que celui-ci les examine pour déterminer si le demandeur constituait un danger pour le public. On n'au fourni au demandeur aucune copie de ces documents avant que le délégué du ministre établisse l'avis. Le demandeur a présenté une demande de contrôle judiciaire au motif qu'il avait été privé de l'équité procédurale.

[3]                 À l'audition de l'affaire, on savait que la Cour d'appel fédérale avait entendu et pris en délibéré l'appel interjeté dans Bhagwandass c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] 1 C.F. 619, [2001] A.C.F. no 341, qui soulevait exactement la même question. À la fin de l'audience, l'autorisation de déposer des observations supplémentaires après le prononcé de la décision de la Cour d'appel fédérale a été accordée. La décision a été rendue le 7 mars 2001, et d'autres observations ont été faites quant à l'effet de cette décision.


[4]                 Dans Bhagwandass, précité, la Cour d'appel fédérale a confirmé la décision du juge Gibson selon laquelle le défaut de communiquer au demandeur la demande de l'avis du ministre et le rapport sur l'avis du ministre avant la prise de la décision constituait une négation de l'équité procédurale. Ce défaut a privé le demandeur de la possibilité de faire des observations sur le contenu de ces documents avant qu'une décision touchant ses droits soit prise.

[5]                 Je suis d'avis que l'arrêt Bhagwandass porte précisément sur la question en litige dans la présente demande et qu'il règle l'issue de cette dernière. Le défendeur tente de faire une distinction avec l'arrêt Bhagwandass en disant que ce dernier reposait sur la conclusion de la Cour d'appel selon laquelle les rapports en question constituaient des outils d'assistance judiciaire, tandis qu'en l'espèce, ces rapports contenaient simplement [traduction] « un langage neutre et une évaluation équilibrée » . On ne sait pas si la distinction signifie qu'un outil d'assistance judiciaire ne comporte pas une évaluation équilibrée. On ne sait pas non plus si le défendeur prétend qu'une évaluation non équilibrée entraînerait un droit à la communication, même si cette évaluation n'était pas un outil d'assistance judiciaire.


[6]                 Il n'est pas possible que le droit du demandeur à la communication des documents devant être soumis à un décideur repose sur une distinction entre « les outils d'assistance judiciaire » , d'une part, et « une évaluation équilibrée » , d'autre part. Le demandeur a le droit de s'attendre à ce que le personnel du ministère présente une évaluation équilibrée dans tous les cas. Même un document qui contient une évaluation équilibrée et recommande des mesures peut être considéré comme un outil d'assistance judiciaire par la personne subissant un préjudice en raison de l'acceptation de la recommandation. L'équité procédurale vise à donner aux personnes touchées par les décisions prises par des tiers la possibilité de participer au processus décisionnel. Un tel droit ne peut pas dépendre de la qualification du contenu d'un document, par opposition au fait que ce dernier est soumis au décideur. C'est ce fait qui donne un sens à la communication du document.

[7]                 Par conséquent, je conclus que le défaut de communiquer la demande de l'avis du ministre et le rapport sur l'avis du ministre constituait une négation de la justice naturelle exigeant l'annulation de l'avis de danger.

ORDONNANCE

Pour les motifs qui précèdent, l'annulation de l'avis émis en date du 5 septembre 1997 par W.A. Sheppit, délégué du ministre, est ordonnée.

  

                                                                                                                                   « J.D. Denis Pelletier »          

                                                                                                                                                          J.C.F.C.                      

  

Traduction certifiée conforme

Pierre St-Laurent, LL.M., trad. a.

    

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

  

NO DU GREFFE :                                   IMM-331-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :    VICTOR HERNANDEZ-ANDASOL c. M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :                      OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                    LE 6 MARS 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR LE JUGE PELLETIER

EN DATE DU :                                       19 AVRIL 2001

  

ONT COMPARU

M. LESLIE H. MORLEY                                                             POUR LE DEMANDEUR

MME MARIE CROWLEY                                                            POUR LE DÉFENDEUR

  

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

M. LESLIE H. MORLEY                                                             POUR LE DEMANDEUR

KINGSTON (ONTARIO)

M. Morris Rosenberg                                                                    POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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