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     Date: 19990920

     Dossier: IMM-6106-98


ENTRE:

     JIAN ZHONG MAI

                                         demandeur,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                                         défendeur.


     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE GIBSON

[1]      La Cour prononce les présents motifs au sujet d'une demande de contrôle judiciaire visant la décision d'un agent des visas du Haut-Commissariat canadien en Malaisie de rejeter la demande de résidence permanente du demandeur au Canada. La décision de l'agent est datée du 22 juillet 1998.

[2]      L'agent a notamment décidé ce qui suit :

     [TRADUCTION]
     Votre demande nous est parvenue le 24 mai 1995. Après un examen approfondi des renseignements qui y figuraient, il est apparu qu'il fallait vous convoquer à une entrevue avant qu'une décision définitive soit rendue. Vous ne vous êtes pas présenté à l'entrevue qui avait été fixée pour le 12 juillet 1995. Vous avez plutôt demandé que votre dossier soit transféré à l'ambassade canadienne à Bangkok, ce qui a été fait le 4 décembre 1995. Depuis le mois de septembre 1996, le Haut-Commissariat canadien à Singapour est chargé de traiter les demandes d'immigration émanant de onze pays environnants, notamment des demandes soumises à l'ambassade canadienne à Bangkok. Votre dossier est donc revenu à nos bureaux. Une deuxième entrevue vous a été fixée, pour le 25 juin 1998. Vous ne vous y êtes pas présenté.
     Le courrier vous a été envoyé à l'adresse mentionnée sur votre formule de demande. Nous n'avons rien reçu indiquant que nos lettres ne vous parvenaient pas. Comme vous ne vous êtes présenté à aucun de vos deux rendez-vous, votre demande de résidence permanente au Canada est refusée.

L'adresse postale indiquée dans la formule de demande était celle du consultant en immigration du demandeur, mais l'adresse domiciliaire du demandeur y était également inscrite.

[3]      La meilleure preuve dont dispose la Cour est que le demandeur a été informé par une lettre en date du 11 mai 1998 portant l'adresse postale indiquée dans la formule de demande de la date fixée pour l'entrevue, savoir le 25 juin 1998.

[4]      Il appert du dossier en l'espèce que l'agent des visas aurait su, au moins depuis le 19 juin 1998 - soit quelque six jours avant l'entrevue - que le consultant du demandeur éprouvait des difficultés. Il avait reçu une note du Centre régional de renseignements pour l'Ontario l'informant que des "notes de préparation à l'entrevue" préparées par le consultant à l'intention du demandeur avaient été saisies. Le demandeur a confirmé que son consultant [TRADUCTION] "avait fait faillite et avait été accusé par la GRC de fraude en immigration commise en 1996-1997".

[5]      Vu ces faits, l'avocat du demandeur soutient que l'agent des visas a manqué à son devoir d'agir équitablement envers le demandeur en ne vérifiant pas, avant de rejeter la demande de ce dernier, s'il avait bien reçu l'avis de l'entrevue du 25 juin 1998. Il fait valoir que cela aurait pu être fait en écrivant directement à l'adresse domiciliaire du demandeur.

[6]      Personne n'a contesté que c'est au demandeur qu'il appartenait d'établir que son admission au Canada ne contreviendrait pas à la Loi sur l'immigration ou à ses règlements d'application1. Il n'a pas été contesté non plus que le demandeur a confié à son consultant en immigration la gestion de sa demande d'établissement au Canada.

[7]      Dans l'affaire Bhajam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)2, le juge Simpson a écrit, aux pages 47 et 48 :

     ... le contenu du devoir d'agir équitablement lorsqu'il s'agit d'examiner un visa au cours de la période qui suit la décision de faire subir une entrevue et avant la tenue de cette entrevue est "minime". Même alors, je puis imaginer des cas exceptionnels dans lesquels l'équité exigerait que l'agent des visas du consulat examine la demande d'ajournement fondée sur des motifs valables et présentée en temps opportun.

L'avocat du demandeur fait valoir qu'il s'agissait justement d'un "cas exceptionnel". Il soutient, par analogie, que l'équité exige que l'agent des visas vérifie directement auprès du demandeur s'il a reçu l'avis d'entrevue, même si l'adresse du consultant a été donnée comme adresse postale, lorsqu'il est au courant que le consultant éprouve des problèmes pouvant avoir des incidences sur les services offerts à ses clients.

[8]      Avec regret, je ne puis accepter l'argument de l'avocat du demandeur voulant que l'agent des visas devait, pour agir équitablement en l'espèce, aller jusqu'à s'assurer que le demandeur avait reçu l'avis de l'entrevue prévue pour le 25 juin 1998. Le demandeur a choisi de faire appel aux services d'un consultant en immigration et a librement choisi celui qu'il jugeait digne de confiance. J'estime que la situation est la même que le demandeur ait lui-même retenu les services du consultant ou que ce dernier ait été choisi pour lui par sa famille au Canada. C'est au demandeur qu'il revenait de veiller à ce que le consultant choisi s'acquitte de son mandat de traiter la demande d'immigration. Il ressort clairement des faits de l'espèce que le demandeur ne s'est pas acquitté de cette tâche. Son omission n'a pas imposé à l'agent des visas l'obligation de prendre cette tâche à sa charge, même s'il savait au moins six jours avant l'entrevue que le consultant en immigration en cause éprouvait des difficultés.

[9]      Pour les motifs exposés ci-dessus, je rejette la demande de contrôle judiciaire.

[10]      Les avocats du demandeur et du défendeur ont tous deux indiqué qu'en cas de décision défavorable à leur client respectif, ils recommanderaient que soit certifiée une question revêtant cette forme :

     L'agent des visas qui procède au traitement d'une demande de résidence permanente dans laquelle l'adresse postale du consultant en immigration est indiquée comme adresse postale du demandeur est-il tenu envers le demandeur de s'assurer que celui-ci a reçu l'avis d'entrevue lorsqu'il apprend que le consultant éprouve des difficultés pouvant avoir des répercussions sur les services qu'il offre au demandeur?

La portée de la question proposée est relativement restreinte, mais j'estime qu'il s'agit d'une "question sérieuse", et qu'il arrive assez souvent que les consultants en immigration soient aux prises avec des difficultés pour que la question revête une "importance générale". Pour ces motifs, la question est certifiée dans le libellé proposé ci-dessus.



                                

                                     Juge



Ottawa (Ontario)

Le 20 septembre 1999




Traduction certifiée conforme


Ghislaine Poitras, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


No DU GREFFE :                  IMM-6106-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :          JIAN ZHONG MAI

                             - et -

                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :          Le 14 septembre 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE GIBSON


EN DATE DU                  15 septembre 1999

ONT COMPARU :

                    
Mme Mary Lam                  pour le demandeur
M. Marcel Larouche                  pour le défendeur

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Cecil L. Rotenberg, c.r.
255, Duncan Mill Road
Pièce 808
Don Mills (Ontario)
M3B 3H9
                         pour le demandeur

M. Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada          pour le défendeur

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA


     Date: 19990920

     Dossier: IMM-6106-98


ENTRE:

JIAN ZHONG MAI

                 demandeur,

     - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                 défendeur.





     MOTIFS DE L'ORDONNANCE




__________________

     1 Voir le paragraphe 8(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2.

     2 (1996), 110 F.T.R. 42.

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