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     Date : 19980508

     Dossier : T-2327-97

ENTRE :

     ALEC CHINGEE, SHARON SOLONAS,

     TANIA SOLONAS, ELIZABETH SOLONAS,

     et PATRICK PRINCE en leur qualité de chef et

     de conseillers de la Bande indienne du Lac McLoed,

     Demandeurs,

     - et -

     HARRY CHINGEE, VICTOR CHINGEE, GILBERT CHINGEE,

     LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADIEN

     et LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     Défendeurs.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE

JOHN A. HARGRAVE

[1]      Les motifs portent sur la requête présentée par les demandeurs en vue d'obtenir des précisions supplémentaires et des réponses à différentes questions de l'interrogatoire préalable dans une action entre deux groupes qui se disputent les charges de chef et de conseillers de la Bande indienne du Lac McLeod.

PRÉCISIONS SUPPLÉMENTAIRES

[2]      Les demandeurs se reportent, dans la présente requête, à deux demandes de précisions supplémentaires datées du 29 janvier et du 2 février 1998. Les mêmes précisions supplémentaires demandées en l'instance faisaient partie des précisions demandées et refusées dans le cadre d'une requête entendue le 9 février 1998 à la suite de laquelle j'ai prononcé des motifs le 10 mars 1998, à la demande de l'avocat des demandeurs. Lors d'un appel tranché par une ordonnance et de courts motifs datés du 24 mars 1998, le juge Noël a confirmé ce refus.

[3]      Mes motifs du 10 mars 1998 étaient assez concis. Ils n'écartaient pas la possibilité que les demandeurs, s'ils continuaient à éprouver de la difficulté à comprendre les questions en litige, puissent demander des précisions supplémentaires après la fin des interrogatoires préalables comme le laissait entendre la décision Smith, Kline & French Laboratories Ltd. c. Lek Tovarna Farmacevtskih (1985), 4 C.P.R. (3d) 257. Dans cette décision, monsieur le juge Rouleau a noté que la demanderesse était en mesure de poursuivre sa plaidoirie sans précisions supplémentaires, qu'elle ne serait pas prise au dépourvu et qu'elle savait quelle preuve elle devait préparer pour le procès :

         [I]l ne fait aucun doute que la demanderesse est en mesure de poursuivre sa plaidoirie même si elle n'a pas reçu de réponse à sa demande de détails. Elle est parfaitement au courant de la nature des arguments à présenter; elle ne peut prétendre qu'elle sera prise par surprise; elle sait quels éléments de preuve il lui faut préparer pour l'instruction, et les points en litige sont suffisamment définis. Les détails doivent servir à préparer les plaidoiries, non les interrogatoires préalables.         

Monsieur le juge Rouleau a conclu en rejetant la requête, mais il n'a pas écarté la présentation d'une nouvelle demande de précisions :

         Si, après l'interrogatoire préalable, la demanderesse éprouve encore des difficultés à se préparer convenablement pour l'instruction, rien ne l'empêche de présenter une nouvelle demande de détails si elle l'estime nécessaire.         

[4]      La principale question en litige, comme dans le cadre de la requête et de l'appel antérieurs, est celle des coutumes électorales de la Bande. Selon la thèse de l'avocat des demandeurs, qui n'est pas étayée par une autre preuve substantielle par affidavit, mais qui s'appuie sur des documents, dont la transcription de l'interrogatoire préalable, des précisions doivent être fournies et les points en litige doivent être définis avec plus de précision, au moyen d'un document appelé énoncé des points en litige, traitant en grande partie des coutumes de la Bande. Je reconnais qu'un tel énoncé des points en litige pourrait permettre d'épargner du temps. Toutefois, les éléments demandés par les défendeurs, dans l'énoncé des points en litige, sont les mêmes que ceux demandés et refusés dans le cadre de la dernière requête en vue d'obtenir des précisions, bien que présentés sous une forme différente et à un moment différent.

[5]      Le fait qu'une partie puisse demander des précisions, en vue de l'instruction, à une étape avancée de la procédure ne signifie pas que sa demande sera automatiquement accueillie. Dans la décision Smith, Kline, précitée, la demande de précisions en vue de la poursuite de la plaidoirie a été rejetée uniquement parce que la demanderesse était en mesure de poursuivre la plaidoirie à partir de sa connaissance de l'affaire à cette étape : la demanderesse avait assez de précisions pour poursuivre sa plaidoirie et n'avait pas droit à des précisions équivalant à un interrogatoire préalable, mais elle pouvait avoir le droit de demander plus tard des précisions supplémentaires en vue l'instruction. En l'espèce, indépendamment du fait que certaines précisions pertinentes ont été fournies, il existait des motifs substantiels justifiant le refus d'accorder aux demandeurs des précisions sur les coutumes électorales de la Bande. Les défendeurs invoquent les coutumes dans leur défense pour nier une allégation des demandeurs selon laquelle ces derniers ont été élus conformément aux coutumes, allégation qu'il doivent prouver pour avoir gain de cause. Dans mes motifs relatifs à la demande de précisions initiale, je me suis reporté, comme principal motif du rejet de la demande, à la décision Weinberger v. Inglis, [1918] 1 Ch. 133, à la page 138, pour expliquer qu'une dénégation de la part d'un défendeur, même sous la forme d'une affirmation large, ne créait pas le droit d'obtenir des précisions, car c'est le demandeur qui a le fardeau de prouver le bien-fondé de sa cause et le défendeur n'a pas à expliquer sa dénégation.

[6]      Les défendeurs affirment que les demandeurs ne peuvent avoir gain de cause parce que la question des précisions, examinée et tranchée le 9 mai 1998, a force de chose jugée. Il est clair que la doctrine de la chose jugée s'applique aux questions interlocutoires. À l'appui de cette proposition, l'avocat des défendeurs a porté à mon attention la décision Stamper c. Finnigan, [1984] 1 C.P.C. (2d) 175, portant sur la question de savoir si la règle de la préclusion fondée sur la chose jugée s'applique aux décisions tranchant une demande interlocutoire. Une objection fondamentale à son application porte qu'une décision tranchant une demande interlocutoire n'est pas définitive, en ce sens que la décision est interlocutoire. Monsieur le juge en chef Deschenes de la Cour du Banc de la Reine du Nouveau-Brunswick, qui a décidé que la doctrine de la préclusion s'appliquait aux décisions interlocutoires, s'est reporté, à la page 178, à une décision de la Cour suprême du Canada et à un extrait de l'ouvrage de Sopinka et Lederman intitulé Law of Evidence in Civil Cases comme sources établissant qu'une décision interlocutoire peut être de nature définitive :

         [Traduction] Les remarques formulées par le juge Duff de la Cour suprême du Canada, dans l'arrêt Diamond v. Western Reality Co., [1924] R.C.S. 308, [1924] 2 D.L.R. 922 (C.S.C.), aux pages 315 et 316 (R.C.S.) sont toutefois pertinentes :         
              [Traduction] Il est vrai que, dans un sens, la décision était interlocutoire; c'est-à-dire que la procédure dans laquelle elle a été rendue était une procédure interlocutoire; mais il s'agissait néanmoins d'une décision définitive en ce sens qu'en l'absence d'appel elle liait les parties. (Non souligné dans l'original.)         
              J'adopterais ce point de vue et je statuerais que la préclusion fondée sur la chose jugée s'applique aux décisions tranchant des demandes interlocutoires.         
              J'ai par ailleurs trouvé un certain appui étayant mon opinion dans les remarques suivantes figurant dans l'ouvrage de Sopinka et Lederman intitulé Law of Evidence in Civil Cases (1974), à la page 367 :         
              [Traduction] Bien que la jurisprudence soit contradictoire, il semble qu'au Canada, une décision tranchant une demande interlocutoire lie les parties, au moins en ce qui concerne les autres mesures dans la même action.         

[7]      Les conditions d'application de la préclusion fondée sur la chose jugée se divisent en deux catégories. Il y a d'abord la préclusion fondée sur l'identité de la cause d'action, qui empêche une personne d'intenter une action lorsqu'une décision a été rendue relativement à la même cause d'action dans une procédure antérieure, puis la préclusion fondée sur l'identité de la question, touchant une question qui a déjà été tranchée. Dans l'arrêt Angle c. Ministre du Revenu national, [1975] 2 R.C.S. 248, la Cour suprême du Canada s'est reportée, à la page 254, à l'arrêt Carl Zeiss Stiftung v. Rayner & Keeler Ltd. (no 2), [1967] 1 A.C. 853, à la page 935, pour définir les conditions d'application de la préclusion fondée sur l'identité de la question :

              [Traduction] Les conditions de la préclusion fondée sur l'identité de la question exigent (1) que la même question ait été décidée; (2) que la décision judiciaire invoquée comme créant la fin de non-recevoir soit finale; et, (3) que les parties dans la décision judiciaire invoquée ou leurs ayants droit, soient les mêmes que les parties engagées dans l'affaire où la fin de non-recevoir est soulevée, ou leurs ayants droit ...         

En l'espèce, il est clair que les parties sont les mêmes. La question de savoir si la décision est définitive est légèrement plus délicate, mais elle a été examinée en profondeur dans l'arrêt Stamper c. Finnigan. Enfin, il reste à déterminer si la question en litige a déjà été décidée.

[8]      Dans les motifs que j'ai prononcés le 11 mars 1998, j'ai cerné la question essentielle, à l'égard de laquelle je n'ai pas conclu qu'une décision a été rendue ni qu'elle constitue une question de droit, comme étant celle de savoir en quoi consistaient, de l'avis des défendeurs, les coutumes électorales de la Bande. En l'espèce, les requêtes présentées par les demandeurs en vue d'obtenir des précisions le 4 février 1998 et aujourd'hui sont identiques. L'énoncé des points en litige des demandeurs constitue, en un sens, une tentative de faire révéler spontanément aux défendeurs les hypothèses qu'ils vont défendre relativement à la question de savoir premièrement si les élections de la Bande sont régies par les coutumes, deuxièmement quelle est la teneur des coutumes applicables, troisièmement si l'élection d'octobre 1997 a été tenue en conformité avec les coutumes et, enfin, dans le cas où l'élection n'aurait pas respecté les coutumes, si cette élection est nulle. L'énoncé des points en litige, par lequel les demandeurs veulent connaître les prétentions des défendeurs, est semblable, c'est-à-dire identique, aux précisions demandées dans les deux requêtes. Compte tenu de la décision que j'ai déjà rendue à cet égard, il ne serait pas acceptable d'exiger les précisions relatives aux coutumes ni les réponses à l'énoncé des points en litige demandées en l'espèce, car la préclusion fondée sur l'identité de la question s'applique aux demandeurs en raison de l'ordonnance prononcée le 9 février 1998 et des motifs datés du 11 mars 1998, ainsi que de l'appel de cette ordonnance qui a donné lieu à l'ordonnance et aux motifs du juge Noël, le 24 mars 1998.

[9]      Dans la mesure où les demandeurs plaident la présente demande de précisions de façon légèrement différente et s'appuient sur de nouvelles décisions judiciaires (décisions qu'il faut à mon avis distinguer de la présente affaire), la doctrine de la préclusion fondée sur la chose jugée s'applique non seulement aux questions effectivement en litige, mais encore à tout point qu'une partie aurait pu soulever, si elle avait fait preuve de diligence, au moment de l'audition antérieure. Ce concept se fonde sur le principe voulant que les litiges prennent fin un jour, même s'il s'agit d'un conflit interlocutoire, car les requêtes, à l'instar des actions, ne doivent pas être tranchées par bribes, requête après requête ou action après action, car cette façon de procéder constituerait un emploi abusif de la procédure : voir, par exemple, Borley c. Fraser River Harbour Commission (1995), 92 F.T.R. 275, à la page 279.

[10]      Pour rendre cette décision, concernant la préclusion fondée sur la chose jugée, j'ai examiné différentes prétentions additionnelles des défendeurs sur lesquelles je n'ai toutefois pas eu à me prononcer. C'est notamment le cas de la prétention portant que les demandeurs n'ont déposé aucun élément qui démontrerait la nécessité des précisions demandées en raison de la difficulté de comprendre les questions en litige et celle portant que la question directe des coutumes électorales de la Bande n'a pas été abordée dans l'interrogatoire préalable de Harry, Victor ou Gilbert Chingee. Cette dernière prétention peut être exacte, sur le plan technique, mais j'ai lu de longs extraits pertinents des interrogatoires préalables de MM. Harry, Victor et Gilbert Chingee : l'avocat des demandeurs a pu sans conteste obtenir des témoignages assez étoffés sur les coutumes électorales de la Bande et l'opinion de ces témoins sur la légalité de l'élection du mois d'octobre 1997, bien que ces témoignages aient été parsemés de nombreuses incohérences. Je porterai maintenant mon attention sur les parties B, C et D de la requête des demandeurs, traitant des réponses à des questions de l'interrogatoire préalable de ces trois témoins.

RÉPONSES AUX QUESTIONS DE L'INTERROGATOIRE PRÉALABLE

[11]      Les demandeurs ont tenté d'interroger les défendeurs membres de la Bande sur des questions financières, dont la construction d'une résidence pour Gilbert Chingee et le transfert de montants et d'éléments d'actifs très importants de la Bande, jusqu'à la veille de l'élection contestée. Les demandeurs désirent en outre poser des questions en interrogatoire préalable à Harry Chingee, concernant des documents produits à l'interrogatoire préalable de Gilbert Chingee, faisant état de différents paiements dont des paiements en faveur de Gilbert Chingee, Harry Chingee, Sheila Chingee et Charles Chingee. Les demandeurs affirment que ces questions sont pertinentes parce que les défendeurs, dans leur demande reconventionnelle, ont allégué que les demandeurs ont déclenché l'élection du mois d'octobre 1997 dans le but d'empêcher une vérification des affaires de la Bande et de son entreprise connexe, Duz Cho Logging Ltd. Les défendeurs prétendent en effet que les demandeurs ont déclenché l'élection pour des motifs irréguliers.

[12]      Les arguments des défendeurs, concernant les questions de l'interrogatoire préalable, portent premièrement que, si les demandeurs ont tenu une élection dans le but de faire obstacle à la vérification, comme le prétendent les défendeurs dans leur demande reconventionnelle, le motif qui les a poussés à agir ainsi est la possibilité que des irrégularités dans la gestion des finances par les demandeurs soient mises au jour. Par conséquent, les seuls opérations financières pertinentes sont celles qui touchent les demandeurs et non les défendeurs. Deuxièmement, toujours en ce qui a trait aux finances, les défendeurs affirment que les résultats d'une vérification ne seraient pas pertinents, car la Cour a déjà rejeté la demande des demandeurs sollicitant une vérification judiciaire ordonnée par la Cour parce qu'une telle vérification ne serait pas pertinente au litige. Troisièmement, pour ce qui est d'interroger Harry Chingee relativement aux documents produits pendant l'interrogatoire préalable de Gilbert Chingee, les défendeurs soutiennent que l'interrogatoire préalable de Harry Chingee est terminé.

[13]      En ce qui a trait à l'interrogatoire préalable des défendeurs membres de la Bande, la question de la vérification, entravée par la tenue de l'élection, est soulevée non seulement dans la demande reconventionnelle, mais également dans la défense à la demande reconventionnelle déposée par les demandeurs. La première contient une allégation portant que les demandeurs voulaient empêcher la tenue d'une vérification indépendante entreprise par les défendeurs afin d'examiner les affaires de la Bande et de la société Duz Cho Logging Ltd. Dans la deuxième, les demandeurs affirment que la vérification n'était pas effectuée par un comptable agréé qualifié et compétent, que le rapport du vérificateur comportait des lacunes et qu'il a donné lieu inutilement à la nomination d'un administrateur-séquestre dont les demandeurs, en leur qualité de chef et de conseillers de la Bande, veulent recouvrer le coût en le réclamant aux défendeurs, en leur qualité d'anciens chef et conseillers.

[14]      Il conviendrait mieux d'envisager le problème comme suit : les paragraphes 6 de la demande reconventionnelle et 2 et 3 de la défense à la demande reconventionnelle soulèvent la question des renseignements qu'une vérification aurait pu mettre au jour. Une vérification aurait pu révéler des irrégularités dans la gestion des finances de la part des demandeurs ou des défendeurs ou à la fois des demandeurs et des défendeurs et servir, à des degrés divers, la cause des demandeurs ou des défendeurs. Les questions de l'interrogatoire préalable portant sur la gestion des finances seraient donc pertinentes aux faits allégués soit dans la demande reconventionnelle, soit dans la défense à la demande reconventionnelle. Les questions que les demandeurs désirent maintenant poser à Gilbert Chingee et à Victor Chingee concernant la gestion des finances pourraient bien mener au déroulement d'une enquête susceptible de servir la cause des demandeurs ou de desservir celle des défendeurs, directement ou indirectement; elles sont donc pertinentes et elles exigent une réponse. Notons que la norme d'appréciation de l'opportunité des questions posées en interrogatoire préalable est moins exigeante que celle qui s'applique à l'admissibilité de la preuve à l'instruction : elle tient à la pertinence des renseignements demandés par rapport aux actes de procédure, tout doute devant être résolu en faveur de l'admissibilité des questions : voir, par exemple, Sidney Steel Corporation c. Omisalj (Le), [1992] 2 C.F. 193 aux pages 197 à 199. Il se pourrait bien qu'un juge présidant l'instruction ne s'intéresse pas aux irrégularités de la gestion financière pour rendre une décision sur les coutumes électorales de la Bande, mais les actes de procédure soulèvent nettement cette question.

[15]      Quant à la prétention des défendeurs portant que la Cour a refusé d'ordonner une vérification judiciaire et que, pour cette raison, la question des irrégularités dans la gestion financière devrait être entièrement exclue, soulignons qu'une vérification judiciaire est très différente d'une série de questions pertinentes en regard des actes de procédure, dont le but est d'obtenir des éléments de preuve concernant les actes des parties et les motifs pour lesquels elles ont transféré des éléments d'actif.

[16]      Gilbert Chingee et Victor Chingee doivent répondre aux questions relatives aux opérations financières, sous réserve, bien sûr, de leur désistement par l'intermédiaire de leurs avocats de certaines parties de leurs actes de procédure afin de les épurer des allégations de mauvaise gestion financière et de concentrer le débat sur la question essentielle plus étroite soulevée dans la déclaration, soit celle des coutumes électorales de la Bande et de la régularité de l'élection du mois d'octobre 1997.

[17]      Enfin, en ce qui a trait à la reprise de l'interrogatoire de Harry Chingee, relativement à plusieurs documents traitant d'opérations financières constituant les pièces 5, 6 et 7 de l'interrogatoire de Gilbert Chingee, il ressort de la transcription que l'interrogatoire de Harry Chingee est terminé, malgré la mention d'un ajournement par le sténographe judiciaire. De plus, à ce que je comprends, les demandeurs n'ont pas présenté la présente requête prématurément, au milieu de leur interrogatoire préalable des défendeurs, mais après avoir terminé leur interrogatoire préalable, sous réserve de la production de documents additionnels et des questions encore sans réponse et n'étant toujours pas satisfaits des précisions obtenues.

[18]      Pour forcer Harry Chingee, dont l'interrogatoire préalable est terminé, à répondre à d'autres questions, les demandeurs doivent établir l'existence d'une raison spéciale. Je songe ici à la règle 235, selon laquelle " Sauf autorisation contraire de la Cour, une partie ne peut interroger au préalable une partie adverse qu'une seule fois. " Cette règle est une version adoucie du paragraphe 465(19) qui assujettissait, jusqu'en 1990, environ, la reprise d'un interrogatoire préalable à l'existence de raisons spéciales dans des cas exceptionnels. La nouvelle version de cette règle ne doit toutefois pas être interprétée de façon à permettre trop facilement la reprise d'un interrogatoire préalable terminé, car l'interrogatoire préalable doit prendre fin un jour. En l'espèce, je refuserais la reprise de l'interrogatoire préalable parce que les éléments sur lesquels les demandeurs entendent interroger le défendeur étaient connus au moment de l'interrogatoire préalable de Harry Chingee et parce qu'il aurait alors pu être interrogé à leur égard si les demandeurs avaient fait preuve de diligence.

RÉSUMÉ

[19]      La partie de la requête sollicitant des précisions est rejetée. Les défendeurs Gilbert Chingee et Victor Chingee doivent répondre aux questions touchant la gestion des finances énoncées dans la requête. Le défendeur Harry Chingee n'est pas tenu de comparaître aux fins de la reprise de son interrogatoire préalable relativement aux pièces 5, 6 et 7 de l'interrogatoire préalable de Gilbert Chingee.

[20]      La requête a été plaidée habilement. Les mémoires ainsi que les documents et la jurisprudence à l'appui se sont avérés particulièrement utiles. Je remercie les avocats d'avoir fait preuve d'un bon sens de l'organisation.

     (signature) " John A. Hargrave "

                                     Protonotaire

Vancouver (Colombie-Britannique)

8 mai 1998

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE DE LA COUR FÉDÉRALE

     AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :                  T-2327-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Alec Chingee et autres,

     Demandeurs,

                     - et -

                     Harry Chingee et autres,

     Défendeurs.

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Vancouver (C.-B.)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE PROTONOTAIRE HARGRAVE

DATE DES MOTIFS :                  8 mai 1998

ONT COMPARU :

     Me Christopher Harvey              pour les demandeurs

     Me Stan Ashcroft                  pour les défendeurs

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

     Me Christopher Harvey     

     Russell & DuMoulin          pour les demandeurs

     Me Stan Ashcroft

     Ganapathi, Ashcroft          pour les défendeurs

     George Thomson              pour le MAINC et le PGC

     Sous-procureur général du Canada

        

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