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     Date : 19980608

     Dossier : T-1096-97

OTTAWA (ONTARIO), LE 8 JUIN 1998

EN PRÉSENCE DE M. LE JUGE CULLEN

     AFFAIRE INTÉRESSANT une demande de contrôle judiciaire fondée sur l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, et ses modifications, de la décision du président du comité d'appel André Guillemette, prise le 21 avril 1997, concernant un appel fondé sur l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-33, et ses modifications (no de dossier de la CFP : 96-MOT-02104) ;

Entre :

     DANNO SCHUT,

     demandeur,

     - et -

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     défendeur.

     O R D O N N A N C E

     SUR PRÉSENTATION D'UNE demande au nom du demandeur en vue d'obtenir :

a)      une ordonnance infirmant la décision du président du comité d'appel André Guillemette prise le 21 avril 1997 ;
b)      une ordonnance renvoyant l'affaire au président du comité d'appel pour que d'autres mesures soient prises conformément aux directives de la Cour ; et
c)      tout autre redressement que l'avocat peut demander et que la Cour peut autoriser ;

LA COUR ORDONNE CE QUI SUIT :

1.      Avec le consentement des parties, la décision du président du comité d'appel André Guillemette, prise le 21 avril 1997, est infirmée, et l'affaire est renvoyée au comité d'appel de la Commission de la fonction publique pour nouvelle décision ;
2.      la demande du demandeur, pour les motifs énoncés ci-après, est refusée ;
3.      la demande du défendeur, pour les motifs énoncés ci-après, est refusée.

    

                                 B. Cullen

                    

                                 JUGE

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL. L.

     Date : 19980608

     Dossier : T-1096-97

     AFFAIRE INTÉRESSANT une demande de contrôle judiciaire fondée sur l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, et ses modifications, de la décision du président du comité d'appel André Guillemette, prise le 21 avril 1997, concernant un appel fondé sur l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-33, et ses modifications (no de dossier de la CFP : 96-MOT-02104) ;

Entre :

     DANNO SCHUT,

     demandeur,

     - et -

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     défendeur.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE CULLEN

[1]      Les parties à la présente procédure de contrôle judiciaire ont convenu que la décision devait être infirmée et l'affaire renvoyée au comité d'appel de la Commission de la fonction publique pour nouvelle décision.

[2]      Toutefois, les parties demandaient également d'autres redressements. Le demandeur voudrait que la Cour ordonne au comité d'appel de conclure que son employeur n'avait pas pris les mesures d'accommodement nécessaires concernant son invalidité. Par ailleurs, l'intimé demande à la Cour d'ordonner au comité d'appel d'examiner la question de savoir si le demandeur, en qualité de candidat invalide, avait l'obligation positive de jouer un rôle proactif dans les adaptations demandées en raison de son invalidité afin de démontrer ses compétences dans le cadre de sa participation à des concours. Pour les motifs qui suivent, aucune de ces demandes ne sera accordée.

[3]      Un bref résumé des faits s'impose. Le demandeur, visuellement handicapé, a participé à un concours interne au début de 1996 concernant le poste d'agent de préparation des urgences en mer (classification AS-05), au ministère des Transports du Canada. La date limite pour la participation au concours avait été fixée au 8 mars 1996 et le ministère a reçu en tout six demandes. L'une d'entre elles ne respectait pas les conditions imposées.

[4]      Pour évaluer les connaissances des candidats, un examen écrit a été tenu. Pour aider à la préparation de l'examen écrit, on a remis à tous les candidats des documents à étudier qui avaient trait aux connaissances à maîtriser pour occuper le poste. Ces documents ont été distribués le 1er mars 1996 et renfermait au total 240 pages d'information.

[5]      Le requérant a reçu ses documents sur support papier. Il n'est pas contesté que le requérant ne voit que d'un oeil. La vision qu'il a dans l'autre oeil est très limitée ; il a à peu près le quart de sa vision normale périphérique et 1/100 de sa vision focale normale et, à cause de cela, il ne peut se concentrer que sur une très petite partie du document qu'il lit. Par conséquent, plus le caractère d'impression est gros, plus le demandeur a de la difficulté à lire le texte.

[6]      Pour lire, le demandeur utilise un certain nombre d'aides visuels, notamment un lecteur qui lit le matériel pour lui et un synthétiseur vocal, qui lui permet de lire des disquettes formatées en utilisant un logiciel spécial de synthétiseur vocal.

[7]      À la réception des documents le 1er mars 1996, le demandeur a demandé à Mme Edda Brown, la représentante du ministère, que les documents lui soient fournis sous forme informatisée. Mme Brown lui a répondu qu'elle ne savait pas si ces documents étaient disponibles sous cette forme, mais elle a indiqué qu'elle lui fournirait tout ce qui était disponible le plus tôt possible. Le jour de l'examen écrit, soit le 2 avril 1996, le demandeur avait reçu moins de la moitié des pages sous forme informatisée, c'est-à-dire environ 104 pages.

[8]      Le 29 mars 1996, le demandeur a demandé l'aide de Mme Brown et de Peter Field de la Commission de la fonction publique. Leur aide a mené à l'informatisation d'autres documents que le demandeur n'a reçus que la veille de l'examen.

[9]      Peter Field a recommandé que le ministère repousse le concours jusqu'à ce que les renseignements adéquats aient été fournis, mais le ministère a décidé de tenir quand même l'examen écrit.

[10]      Le demandeur a obtenu 49,5 % à l'examen écrit. La note de passage était fixée à 70 %. Comme le demandeur n'a pas réussi son examen écrit, sa candidature a été rejetée. Le demandeur a déposé un appel fondé sur l'article 21 de la Loi sur la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-33, dans lequel il soutient qu'il n'a pas eu la même possibilité que les autres candidats d'étudier les documents pour la tenue de l'examen écrit et que, par conséquent, il avait été défavorisé, ce qui est contraire au principe du mérite enchâssé dans la LEFP.

[11]      La question dont était saisi le comité d'appel était de savoir si le demandeur avait reçu la formation appropriée sur un scanner avant l'examen écrit et si on lui avait offert de l'aide concernant la lecture des documents au scanner avant le 29 mars 1996.

[12]      Devant le comité d'appel, le ministère a soutenu que le demandeur pouvait utiliser un lecteur tant et aussi longtemps qu'il en avait besoin et qu'il avait un scanner à sa disposition avec une opératrice d'ordinateur pour l'aider à consulter les documents. Essentiellement, le ministère a soutenu qu'il avait fourni tous les accommodements raisonnables au demandeur. Il y a une preuve contradictoire sur ce point et également sur la question de savoir si la documentation nécessaire pour l'examen avait été mise à la disposition du demandeur. Plus précisément, l'intimé a fait valoir que les documents étaient accessibles sur l'ordinateur du demandeur.

[13]      Bien qu'il ne soit pas contesté que le demandeur n'a pas reçu tout le matériel informatisé avant l'examen, la question que devait trancher le comité d'appel était de savoir si le défendeur s'était acquitté de son obligation à l'égard du demandeur, puisqu'une certaine partie des documents qui n'avait pas été convertie sur disquette était en possession du demandeur avant la distribution du matériel à étudier. On ne peut répondre à cette question sans disposer d'une preuve pertinente, et si cette preuve est contradictoire, le comité d'appel doit évaluer la crédibilité des témoins. La Cour qui siège en révision dans ce genre d'affaires ne peut prendre cette décision. Par conséquent, la demande du demandeur est refusée.

[14]      Quant à la demande du défendeur, elle doit également être refusée. Dans un certain nombre de jugements, notamment Commission scolaire régionale de Chambly c. Bergevin, [1994] 2 R.C.S. 525 ; Central Alberta Dairy Pool c. Alberta (Human Rights Commission), [1990] 2 R.C.S. 489 et Central Okanagan School District No. 23 c. Renaud, [1992] 2 R.C.S. 970, la Cour suprême du Canada a conclu que c'est l'employeur, et non l'employé, qui a la responsabilité de fournir des mesures d'accommodement à un employé souffrant d'invalidité. Les mesures d'accommodement exigent que l'employeur prenne des mesures raisonnables, à moins que cela ne cause une contrainte excessive. Pour déterminer le caractère raisonnable des mesures d'accommodement, on mettra l'accent sur la conduite de l'employeur dans les circonstances. Déposer une preuve visant à démontrer que d'autres méthodes d'accommodement étaient disponibles permet à l'employeur d'établir le caractère raisonnable de ces mesures. Donc, la Cour n'ordonnera pas au comité d'appel de se prononcer sur cette question, étant donné que ce n'est pas la conduite de l'employé qui doit être examinée, mais bien le caractère raisonnable des mesures qui ont été prises par l'employeur.

[15]      Par conséquent, avec le consentement des parties, l'affaire est renvoyée au comité d'appel pour nouvelle décision et les demandes du demandeur et du défendeur sont rejetées.

    

OTTAWA (ONTARIO)                      B. Cullen

                    

le 8 juin 1998                          JUGE

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL. L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE 1re INSTANCE


AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :              T-1096-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Danno Schut c. Le procureur général du Canada

LIEU DE L'AUDIENCE :      Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :      le 14 mai 1998


MOTIFS DE L'ORDONNANCE


DU JUGE CULLEN


EN DATE DU 8 JUIN 1998

ONT COMPARU :

Andrew Raven                      pour le demandeur

Dogan D. Akman                      pour le défendeur

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Raven, Allen, Cameron & Ballantyne

Ottawa (Ontario)                      pour le demandeur

George Thomson

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)                      pour le défendeur

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