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Recueil des arrêts de la Cour fédérale
I.C.S. Petroleum (Montreal) Ltd. c. Polina 3 (Le) (C.F.) [2005] 3 C.F. 595

Date : 20050216

Dossier : T-1838-04

Référence : 2005 CF 251

                                            ACTION RÉELLE ET PERSONNELLE

ENTRE :

                                          I.C.S. PETROLEUM (MONTRÉAL) LTD.

                                                                                                                                    demanderesse

                                                                             et

                                               LES DAUPHINS DU ST-LAURENT

                    et LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES

AYANT UN DROIT SUR LES NAVIRES « POLINA 3 » ,

« SIRIUS 1 » OU « CORONA BOREALIS » ,

                               OU SUR LE RÉSERVOIR À TERRE APPARTENANT

À DAUPHINS DU ST-LAURENT LTÉE,

                                                   SITUÉ DANS LA SECTION M4

                                                      AU PORT DE MONTRÉAL

                                                                                                                                          défendeurs

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE HARGRAVE


[1]                La présente action a trait à une réclamation de 84 840,01 $ relative au carburant et au lubrifiant fournis par la demanderesse, I.C.S. Petroleum (Montréal) Ltd. (ICS), à la demande de la défenderesse Les Dauphins du St-Laurent Ltée (Dauphins), dont ICS demande maintenant l'exécution réelle. L'affaire aurait donné naissance à un privilège maritime et à un droit réel - une réclamation concernant des approvisionnements nécessaires - sur trois petits navires à passagers appartenant à des Canadiens et immatriculés au Canada. La demanderesse revendique également un privilège et un droit réel sur le carburant restant dans le réservoir à terre de Dauphins.

[2]                Le « Polina 3 » et le « Sirius 1 » appartiennent à Dauphins, une entreprise qui est maintenant en faillite. La propriétaire du « Corona Borealis » , Akula Cruise Lines Ltd. (Akula), qui avait affrété le navire à coque nue à Dauphins, tente maintenant de faire annuler l'arraisonnement du navire et de faire radier la réclamation réelle le visant, au motif qu'aucun droit réel n'existe contre le navire puisque le gasoil marin, un carburant semblable au carburant diesel qui est souvent utilisé dans des petits moteurs diesels rapides, n'a pas été livré au « Corona Borealis » , mais à un réservoir à terre contrôlé par Dauphins. Elle prétend en outre que le lubrifiant, qui ne représente qu'une partie relativement petite de la réclamation, n'a pas été livré par ICS au « Corona Borealis » , mais à un quai adjacent au navire. Subsidiairement, elle demande qu'un cautionnement soit fixé.

[3]                En examinant la présente requête en radiation portant sur la compétence de la Cour, j'ai exposé divers allégations, faits et conclusions qui - en particulier dans le cas des conclusions - ne constituent pas une décision sur le fond, mais permettent seulement de disposer d'une requête interlocutoire exigeant une analyse approfondie.

[4]                J'ai déterminé qu'aucune compétence en matière réelle ne peut être exercée à l'égard du « Corona Borealis » . L'arraisonnement prenant automatiquement fin, le navire est libéré. Je traiterai cependant de certains faits importants et, en particulier, de la source des éléments de preuve.

SOURCE DES FAITS ET DES ÉLÉMENTS DE PREUVE

[5]                La question des pièces qui sont admissibles en l'espèce se pose. Je peux certainement tenir compte des actes de procédure versés au dossier. La demanderesse soutient cependant que je ne peux pas, suivant le paragraphe 221(2) des Règles, tenir compte des affidavits parce que ceux-ci ne sont pas admissibles dans le cadre d'une requête en radiation d'un acte de procédure visée à l'article 221 des Règles. Or, ce qui est en cause en l'espèce, ce n'est pas l'absence de cause d'action ou l'un des faits énumérés au paragraphe 221(1) des Règles, mais l'absence de compétence en matière réelle. Faute d'élément réel, le mandat d'arraisonnement prendrait automatiquement fin.


[6]                L'arrêt Nation Dénée c. Canada, [1992] 2 C.F. 681, permet d'en savoir plus sur l'admissibilité de la preuve par affidavit dans le cadre d'une requête relative à la compétence. Le juge Pratte, de la Cour d'appel fédérale, a écrit dans cet arrêt qu'il était manifestement exact de dire qu' « il faut prendre en considération l'affidavit déposé à l'appui de la requête pour examiner s'il y a lieu de radier la déclaration par ce motif qu'elle fait valoir une cause d'action qui échappe à la compétence de la Cour » (page 687). De même, dans Cameron c. Ciné St-Henri Inc., [1984] 1 C.F. 421, le juge Walsh a reconnu que, pour déterminer s'il existe une cause d'action dans le cadre d'une requête en radiation, il faut tenir toutes les allégations de la déclaration pour avérées, mais que « lorsque la Cour est saisie d'éléments de preuve contenus dans l'affidavit déposé à l'appui qui démontrent qu'une allégation essentielle, et, de fait, une allégation sur laquelle repose la compétence de la Cour, n'est pas vraie ou est au moins erronée et trompeuse, il serait déraisonnable de s'attendre à ce que la Cour ferme ses yeux et rende jugement en tenant l'allégation pour avérée » (page 426). Cette latitude qui permet l'utilisation d'une preuve par affidavit pour réfuter une allégation contenue dans un acte de procédure visé à l'alinéa 221(1)a) des Règles est pertinente en l'espèce car ICS affirme dans son affidavit portant demande de mandat que le « Corona Borealis » est la propriété de Dauphins. Or, il s'agit d'une erreur puisque, à toutes les époques pertinentes, le navire était immatriculé au nom d'Akula. Par ailleurs, la Cour n'est pas tenue d'accepter la véracité d'un fait allégué dans la déclaration lorsque celui-ci est en réalité un point de droit : Lawrence c. La Reine, [1978] 2 C.F. 782 (C.F. 1re inst.), page 784. Finalement, la Cour d'appel fédérale a indiqué, dans MIL Davie Inc. c. Société d'exploitation et de développement d'Hibernia Ltée (1998), 226 N.R. 369, que la non-admissibilité prévue au paragraphe 419(2) des Règles, qui a été remplacé par le paragraphe 221(2), ne s'applique pas lorsque la compétence de la Cour est en cause :


En général, lorsqu'une objection se rapportant à la compétence de la Cour est soulevée, la Cour doit être convaincue que des faits juridictionnels ou des allégations de tels faits étayent une attribution de compétence. L'existence des faits juridictionnels requis pourra habituellement être établie à partir des actes de procédure et des affidavits déposés au soutien de la requête ou en réponse à celle-ci. À cet égard, l'interdiction prévue à la Règle 419(2) en matière d'admissibilité de la preuve ne s'applique pas lorsque c'est la compétence même de la Cour qui est contestée, par opposition à la situation où il s'agit de la formulation d'une simple objection contre les actes de procédure au motif qu'ils ne révèlent aucune cause raisonnable d'action [Erasmus c. Canada, [1993] 1 C.N.L.R. 59 (C.A.F.)]. Nous disons cela afin de dissiper tout doute concernant l'admissibilité de la preuve par affidavit en l'espèce. Quoi qu'il en soit, la requête déposée dans la présente affaire, comme nous l'avons déjà dit, était fondée sur la Règle 401c) de même que sur l'art. 50 et l'al. 17c) de la Loi sur la Cour fédérale.

Il est question, dans la dernière phrase du passage reproduit ci-dessus, de l'ancienne règle visant la contestation de la compétence par comparution conditionnelle. Dans le passé cependant, la Cour fédérale a accueilli des contestations de compétence fondées sur l'article 401 ou sur l'alinéa 419(1)a) des Règles. Cette disposition a été remplacée par l'alinéa 221(1)a), selon lequel un acte de procédure peut être radié s'il n'existe aucune cause d'action valable. La présente requête aurait pu être présentée en vertu de l'article 208 des Règles comme une contestation préliminaire de la compétence de la Cour, mais, selon Sgayias on the Federal Court Practice, édition de 2005, Carswell, le fondement le plus probable d'une telle contestation est l'alinéa 221(1)a) des Règles (page 540).

[7]                Je tiendrai compte en l'espèce des affidavits ayant trait à la compétence.

CERTAINS FAITS PERTINENTS

[8]                Le « Corona Borealis » est un navire à passagers rapide de 86,42 pieds, fait d'aluminium. Il a été construit en 1986 à Feodossia, dans la péninsule de Crimée. Il a été immatriculé au Port de Montréal en 2002, au nom d'Akula, une société de Vancouver.


[9]                Le 1er novembre 2003, Akula a affrété le « Corona Borealis » à coque nue à Dauphins pour une période d'un an. Bien qu'Akula et Dauphins soient des sociétés séparées, M. Alexandre Zadorjnyi, un dirigeant de Dauphins qui, selon l'affidavit signé par Michael Ouellette, se présente comme le président de cette société, est aussi le seul administrateur d'Akula. C'est lui qui a signé la charte-partie du « Corona Borealis » en qualité de président. Aucune preuve n'a été produite relativement aux actionnaires des deux sociétés. La charte-partie renferme une clause interdisant la « lien cause » , une notion américaine. L'avocate du « Corona Borealis » a fait état de l'existence de la clause, mais rien dans la preuve ne permet de savoir si la demanderesse était au courant de cette clause. Celle-ci n'a de toute façon aucune incidence sur la présente requête ou sur ma décision.

[10]            Dauphins se servait du « Corona Borealis » , ainsi que du « Polina 3 » et du « Sirius 1 » , pour offrir un service de navette sur le fleuve Saint-Laurent entre Montréal, Trois-Rivières et Québec pendant l'été. Comme je l'ai mentionné précédemment, Dauphins est actuellement en faillite.

[11]            La déclaration indique que [traduction] « la demanderesse a fourni au navire du combustible de soute pour lequel elle a le droit de réclamer ce qui suit » . Vient ensuite une liste de factures, énumérées par date. Avant de traiter des conditions sous-jacentes de ces factures qui figuraient sur des bons de livraison types, j'aimerais parler de l'affidavit portant demande de mandat concernant l'arraisonnement du « Corona Borealis » . Cet affidavit n'est peut-être pas parfait, mais ce motif n'est pas invoqué dans la requête en annulation de l'arraisonnement.

[12]            L'affidavit portant demande de mandat fait référence à des contrats de livraison qui, dans le cas du carburant, étaient des contrats de livraison types à des navires. Ces contrats faisaient état de la livraison :

[traduction] à un réservoir à terre appartenant à Dauphins du St-Laurent Ltée, situé dans la section M4 au Port de Montréal, devant être livré exclusivement aux navires MV « Polina 3 » , MV « Sirius 1 » et MV « Corona Borealis » .

Les bons de livraison types pour le lubrifiant font simplement référence à un ordre de livraison d'une certaine quantité de ce produit à un endroit donné et, ensuite :

[traduction] Navires : MV « Polina 3 » , MV « Sirius 1 » , MV « Corona Borealis » Port/HAP : Montréal - Section M4...

[13]            L'affidavit portant demande de mandat indique qu'ICS a accepté de fournir du carburant aux trois navires désignés [traduction] « et/ou à un réservoir à terre appartenant à Dauphins du St-Laurent, situé dans la section M4 au Port de Montréal, à la demande des propriétaires des navires, de Dauphins du St-Laurent Ltée, des exploitants et/ou des capitaines de ces navires » . Cet affidavit est quelque peu ambigu parce qu'il allègue que le carburant a été fourni [traduction] « aux navires et/ou à un réservoir à terre appartenant à Dauphins du St-Laurent, situé dans la section M4 au Port de Montréal » . Je dois faire référence ici à la preuve par affidavit et à la défense des propriétaires et du « Corona Borealis » , selon laquelle [traduction] « le carburant a été livré et fourni par la demanderesse à un réservoir à terre et non au _ Corona Borealis » .

[14]            Alexandre Zadorjnyi, le seul administrateur d'Akula, déclare dans un affidavit fait le 9 décembre 2004 :

[traduction]

7.             La demanderesse I.C.S. Petroleum (Montréal) Ltd. [...] n'a en aucun temps en 2003 ou en 2004 fourni du combustible de soute directement au navire « Corona Borealis » .

L'expression [traduction] « combustible de soute » n'aurait pas dû être utilisée, mais elle n'induit personne en erreur en l'espèce. Le même affidavit indique également :

[traduction]

8.             Au cours de la période de l'affrètement, le navire « Corona Borealis » a obtenu du combustible de soute contenu dans le réservoir à terre situé dans la section M4 au Port de Montréal, qui était exploité par Dauphins ...

[15]            M. Zadorjnyi déclare ensuite, dans son affidavit, qu'il a examiné le journal de bord du « Corona Borealis » et qu'il a constaté que ce navire avait consommé 27 670 litres de carburant, que le réservoir du navire maintenant déséquipé contenait 150 litres de carburant et que, à l'époque où le navire utilisait le carburant entreposé dans le réservoir à terre de Dauphins, Mini-Tankers Canada Ltd. avait fourni 3 039,9 litres de carburant au réservoir à terre après la dernière livraison effectuée par ICS. Il semblerait que le carburant utilisé par le « Corona Borealis » ou se trouvant encore à son bord n'ait pas été entièrement fourni par ICS. Le prix du carburant fourni par ICS variait entre 58,6 et 62,9 cents le litre.

[16]            Le « Corona Borealis » , le « Sirius 1 » , le « Polina 3 » et le contenu du réservoir à terre ont été saisis à Montréal au milieu d'octobre 2004.


ANALYSE

Conditions types de livraison du carburant

[17]            Il convient d'entreprendre l'examen de la présente requête par l'effet des bons de livraison types qu'ICS a remis à Dauphins au moment de la livraison du carburant et du lubrifiant. Ces bons énonçaient différentes conditions courantes dans l'industrie de l'approvisionnement en carburant marin. Akula dit que les bons de livraison n'ont jamais été signés au nom de Dauphins et que cette entreprise n'en a jamais accusé réception. J'aimerais faire remarquer ici que les documents de livraison énonçant des conditions qui sont utilisés dans le secteur de la livraison et de l'approvisionnement sont universels. Si ICS avait livré du carburant une seule fois, on pourrait peut-être faire valoir qu'un bon de livraison énonçant des conditions ne serait pas opposable à un client naïf si celui-ci ne l'avait pas signé. Ce sont toutefois des exploitants de navires avisés qui sont en cause en l'espèce. Ces exploitants ont accepté volontiers le carburant d'ICS et le crédit offert par cette entreprise, apparemment sans exprimer aucune réserve quant aux conditions de l'approvisionnement. J'ajoute que, selon la preuve, M. Zadorjnyi, qui a signé tous les chèques de Dauphins en paiement des factures d'ICS, est allé lui-même parfois porter les chèques aux bureaux d'ICS. Par conséquent, je suis convaincu que, s'ils avaient été quelque peu attentifs, Dauphins et M. Zadorjnyi, en sa qualité d'administrateur de cette entreprise, auraient dû connaître les conditions contractuelles s'ils ne les connaissaient pas déjà.

[18]            Sur un plan plus technique, ce qui est survenu entre Dauphins et ICS est clairement un contrat conclu entre deux entreprises pour la livraison et le paiement de carburant et de lubrifiant. La preuve indique que le directeur des opérations de Dauphins, Jan Tkach, avec lequel ICS traitait normalement lorsqu'elle recevait une commande de carburant, téléphonait à ICS et demandait une quantité particulière de lubrifiant et de carburant, ce dernier devant être livré au réservoir à terre de Dauphins. ICS livrait ensuite le carburant au réservoir à terre et le lubrifiant au quai où les navires « Polina 3 » , « Sirius 1 » et « Corona Borealis » étaient amarrés. Aucune répartition précise du carburant et du lubrifiant entre les trois navires n'était précisée au moment de la commande et de la livraison, mais il était clair pour ICS et Dauphins que ces produits devaient servir à l'usage exclusif de ces trois navires. L'absence de répartition entre les trois navires n'a aucune incidence sur l'obligation contractuelle à tout le moins de Dauphins de payer ICS.


[19]            Dauphins connaissait ou aurait dû connaître les conditions de livraison types imposées par ICS compte tenu des relations suivies qu'elle entretenait avec cette entreprise et de la nature des documents de livraison, lesquels étaient très courants dans l'industrie. Personne ne prétend sérieusement que les conditions sont abusives, mais simplement qu'elles n'ont pas été signées par Dauphins. Il ne s'agit pas d'un cas de conflit entre des conditions types, mais d'un cas comparable aux premières affaires relatives à des billets, dans lesquelles les conditions figurant sur un billet ont été appliquées si les parties s'attendaient à être régies par des conditions contractuelles raisonnables et si celle qui cherchait à s'en prévaloir avait pris les mesures raisonnables pour les porter à l'attention des autres parties : voir, par exemple, Waddams on the Law of Contract, 4e édition, 1999, Canada Law Book, pages 49 et 50.


[20]            Le droit relatif aux affaires des billets a évolué et s'applique maintenant aux contrats types. Selon les règles applicables à ce genre de contrats, la partie qui reçoit le document doit savoir que celui-ci renferme des conditions contractuelles ou une personne raisonnable devrait le savoir; les conditions doivent être portées à l'attention de la partie qu'elles visent avant ou au moment où le contrat est passé, sous réserve évidemment de l'existence de relations suivies entre les parties et de l'utilisation constante des mêmes conditions; la partie visée par les conditions doit en avoir été avisée suffisamment à l'avance; les conditions ne doivent pas être inéquitables ou inusitées. C'est ce qui est indiqué dans plusieurs courts paragraphes de l'ouvrage Chitty on Contracts, vol. 1, 28e édition, 2004, Sweet & Maxwell, page 711 et suivantes. En l'espèce, Dauphins, en tant qu'exploitant de navires, savait ou aurait dû raisonnablement savoir que les contrats de livraison de carburant d'ICS, qui sont d'authentiques contrats types, renfermaient des conditions contractuelles. La preuve n'indique pas à quel moment les conditions ont été portées à l'attention de Dauphins pour la première fois. Il ressort cependant de la preuve d'ICS que cette dernière approvisionnait en carburant les navires exploités par Dauphins depuis le 9 juin 2000 (sa réclamation ne concerne toutefois que la période du 2 août 2004 au 2 septembre 2004, soit la période visée par les factures impayées). ICS et Dauphins ont des relations depuis longtemps et une formule type a constamment été utilisée dans le passé. Comme je l'ai dit, les conditions en cause sont très courantes dans l'industrie, à la fois au Canada et à l'étranger, et aucune n'est inéquitable ou inusitée. En définitive, compte tenu du fait que les bons de livraison types étaient faciles à lire et que les conditions n'étaient pas complexes, ICS a fait tout ce qui était raisonnable pour informer Dauphins à leur sujet.

[21]            Il est difficile de croire que l'on puisse, d'une part, ignorer les conditions énoncées dans de nombreux bons de livraison identiques, suivis par des factures, et, d'autre part, accepter le carburant et le crédit. En conséquence, dans la mesure où les conditions énoncées dans la formule type sont pertinentes, je les prendrai en compte. Ces conditions sont celles qui figurent sur les première et deuxième pages des bons de livraison, à l'exclusion des prétendues conditions de vente énoncées dans la section B, lesquelles seraient disponibles sur demande mais pour lesquelles je ne dispose d'aucune preuve.

[22]            Parmi les conditions énoncées dans la formule type, celle qui suit a un lien avec la thèse d'ICS :

[traduction] L'acheteur reconnaît qu'un privilège correspondant à la valeur du produit fourni est créé sur le navire et que le vendeur se fie à l'aspect et au crédit du navire.

Le terme [traduction] « acheteur » est défini comme [traduction] « Les Dauphins du St-Laurent Ltée et/ou les propriétaires/exploitants/navire/commandant » . Le vendeur est I.C.S. Petroleum (Montréal) Ltd., la demanderesse en l'espèce.


[23]            ICS invoque la clause relative au privilège dans un double but : premièrement, créer un privilège et, deuxièmement, faire en sorte que toute sa réclamation porte sur le « Corona Borealis » , l'entreprise propriétaire des navires « Polina 3 » et « Sirius 1 » , Dauphins étant en faillite.

[24]            On dit que la clause relative au privilège crée un privilège maritime. Bien que la nature du privilège n'ait pas d'importance dans le cadre de la présente requête, j'aimerais souligner que c'est une pratique générale, peut-être bien même universelle, à tout le moins chez les fournisseurs d'approvisionnements nécessaires, de qualifier le privilège de privilège maritime, probablement parce que, à défaut de le faire, le privilège est d'un type inférieur. La clause relative au privilège doit cependant être examinée de plus près.

[25]            Par la clause relative au privilège qui est reproduite ci-dessus, l'acheteur reconnaît qu'un privilège est créé [traduction] « sur le navire » pour la valeur du carburant et que le vendeur se fie au crédit du navire. Cette clause crée un privilège d'une nature indéterminée et fait savoir à l'acheteur qu'ICS se fie au crédit du navire.


[26]            Le juge Muldoon a analysé une disposition contractuelle accordant un privilège maritime sur une flotte relativement à la fourniture générale de conteneurs par la demanderesse à la défenderesse dans Textainer Equipment Management B.V. c. Baltic Shipping Co. (1994), 84 F.T.R. 108. Se fondant sur la législation canadienne, la Cour a rejeté le principe établi dans The River Rima, [1988] 2 Lloyd's 193 (C.L.), selon lequel la disposition en question ne créait pas un droit réel exécutoire visé à l'alinéa 20(2)(m) de la English Supreme Court Act - [traduction] « toute demande concernant des marchandises ou des matériaux fournis à un navire pour son exploitation ou son entretien » - une disposition comparable mais non identique au paragraphe 22(1) et à l'alinéa 22(2)m) de la Loi sur la Cour fédérale. Dans The River Rima, la Chambre des lords a fait observer que le contrat de fourniture de conteneurs à une flotte était en réalité un contrat de fourniture de conteneurs à un armateur et non à un bateau. Il ne fait aucun doute que la décision était conforme au droit anglais, mais elle n'était pas applicable au droit ou aux faits dans Textainer. Dans cette affaire, le juge Muldoon a souligné qu'un litige de droit privé appartient aux parties et que rien n'empêchait la défenderesse de conclure une entente commerciale privée dans laquelle elle donnait de son plein gré un privilège à la demanderesse. Rien dans cette décision ne laisse croire que les parties peuvent inventer de nouveaux privilèges. La Cour devait cependant appliquer aux parties le marché créé par le contrat :

En l'espèce, la Cour ne laisse pas entendre que les parties, de gré à gré, peuvent inventer un privilège maritime là où aucun privilège n'a encore été découvert en droit maritime canadien. Toutefois, à supposer qu'en vertu de la Règle 419, les faits allégués dans la déclaration, lesquels ont été démontrés et exposés dans l'affidavit se rapportant au mandat, soient exacts, la Cour doit ex debito justiciae reconnaître aux parties les droits et responsabilités qu'elles ont elles-mêmes contractuellement créés, et ce, en particulier si, comme il le semble, l'article 22 de la Loi sur la Cour fédérale investit la Cour d'une compétence plus étendue que celle qui existe au Royaume-Uni. [Page 113]


La Cour a reconnu dans Textainer qu'un privilège maritime créé par contrat pouvait constituer une réparation en equity et a refusé de radier la partie de la déclaration concernant une action réelle et de libérer le navire porte-conteneurs de la défenderesse qui avait été arraisonné. Il est intéressant de mentionner que la Cour a examiné un contrat par lequel la défenderesse a donné en garantie les navires de sa flotte afin de maintenir l'arraisonnement d'un autre navire de sa flotte qui avait été choisi au hasard, un navire qui pouvait transporter seulement des conteneurs, même si ce n'est pas nécessairement toujours une fourniture directe de conteneurs au navire qui ferait clairement en sorte que le cas soit visé à l'alinéa 22(2)m) de la Loi sur la Cour fédérale - « une demande relative à des marchandises, matériels ou services fournis à un navire pour son fonctionnement ou son entretien » . La Cour a plutôt eu recours à sa juridiction en equity pour l'application du paragraphe 22(1) de la Loi sur la Cour fédérale - la disposition établissant la compétence générale de la Cour fédérale en matière de navigation et de marine marchande - et des paragraphes 43(2) et (3) selon lesquels cette compétence peut être exercée en matière réelle.

[27]            En l'espèce, Dauphins pouvait certainement donner ses navires « Polina 3 » et « Sirius 1 » en garantie et accorder ainsi à ICS un privilège dont la Cour pourrait exiger l'exécution en vertu de Textainer et ce, même si le carburant n'a pas été clairement fourni « à un navire » , selon les termes employés à l'alinéa 22(2)m) de la Loi dont il a été question ci-dessus, mais plutôt au réservoir à terre du propriétaire pour le fonctionnement d'un navire.

[28]            Le problème qui se pose lorsque l'on veut appliquer Textainer au « Corona Borealis » réside dans le fait que Dauphins n'a pas le droit ou le pouvoir de donner le « Corona Borealis » en garantie ou d'accorder un privilège sur ce navire puisqu'elle n'en est que l'affréteur et non la propriétaire.


[29]            Adoptant une position légèrement différente, l'avocate d'ICS commence par rappeler qu'il est bien établi qu'une réclamation réelle relative à des approvisionnements nécessaires est valable seulement si le propriétaire est personnellement responsable du montant réclamé. Presque toute la jurisprudence allant dans ce sens, dont Westcan Stevedoring Ltd. c. Le « Amar » , [1973] C.F. 1232 (1re inst.), est mentionnée dans Mount Royal/Walsh Inc. c. Jensen Star (Le), [1990] 1 C.F. 199 (C.A.F.), page 216. Dans cet arrêt, le juge Marceau, qui a rédigé les motifs de la Cour, souligne que cette participation personnelle du propriétaire - en fait sa responsabilité personnelle - sur laquelle s'appuie la responsabilité réelle peut exister si le propriétaire a conclu le contrat lui-même, a autorisé quelqu'un à s'engager en son nom ou a « autorisé [...] implicitement une personne qui a la possession et le contrôle du navire à tirer du crédit du navire (plutôt que de la totalité de ses biens personnels) » (page 217). Il a ensuite ajouté que, pour qu'une telle responsabilité personnelle existe, le propriétaire doit avoir eu « un comportement ou une attitude quelconque » (page 217). Ce qui nous amène aux faits de Jensen Star. Dans cette affaire, la demanderesse, dont un dirigeant entretenait une relation amicale avec le dirigeant de la société propriétaire du « Jensen Star » , un ancien associé, a effectué des réparations sur ce navire. Pendant les réparations, la défenderesse, Jensen Shipping Limited, a transféré le navire à Jensen Marine Holdings à des fins de refinancement. Le dirigeant de Jensen Shipping et de Jensen Marine ne considérait pas ces entités comme étant distinctes, bien au contraire, il n'a jamais pensé que ses droits sur le navire avaient changé. Le juge Marceau a fait observer :

Je n'ai aucune hésitation à conclure que Jensen Marine Holdings Ltd., lorsqu'elle a demandé à Mount Royal de fournir les services en question, possédait l'intérêt requis pour que l'action in rem soit valide, cet intérêt consistant à agir par l'intermédiaire de son président de manière à autoriser tacitement Jensen Shipping à tirer du crédit du navire et à engager, dans cette mesure, sa responsabilité personnelle. Il importe peu que les clauses de la charte-partie qui régissaient les rapports contractuels entre les deux sociétés confirment ou non cette interprétation de la situation.


De fait, je ne pense pas que Jensen Marine Holdings Ltd. puisse maintenant contredire une telle interprétation. Il est bien établi que les approvisionnements nécessaires fournis à un navire sont présumés prima facie l'avoir été sur le crédit du navire et de son propriétaire. C'est une présomption que l'on peut réfuter mais, en l'espèce, non seulement elle ne l'a pas été, mais aucune tentative dans ce sens n'a été faite.

[30]            Ainsi, Jensen Shipping, qui avait été propriétaire du « Jensen Star » pendant une partie des réparations, avait suffisamment participé au processus de réparations pour obliger Jensen Marine, celle-ci ne pouvant pas alors réfuter la présomption voulant que les approvisionnements nécessaires fournis sur le crédit du navire l'aient été également sur le crédit de la propriétaire, Jensen Marine. L'affaire est toutefois intéressante en particulier parce que Jensen Marine, la deuxième propriétaire, ne figure pas dans l'intitulé « les propriétaires et toutes les autres personnes ayant un droit » sur le navire, puisqu'elle n'a jamais été ajoutée à la liste des défendeurs. En conséquence, un jugement en matière personnelle ne pouvait pas être rendu contre cette entreprise. Cependant, d'après mon interprétation de l'arrêt Jensen Star, la responsabilité éventuelle de Jensen Marine était suffisante pour conclure à la responsabilité réelle du navire envers l'entreprise de réparation pendant la deuxième moitié des réparations, alors que Jensen Marine en était propriétaire.


[31]            La demanderesse se fonde également sur Kirgan Holdings S.A. c. Panamax Leader (2002), 225 F.T.R. 273. Je dois toutefois rappeler que le « Panamax Leader » avait été approvisionné en combustible de soute à Malte en vertu d'un contrat d'affrètement à coque nue et que le mandataire ayant conclu le contrat relatif à ce combustible avait assujetti le propriétaire au droit américain, lequel prévoit la création d'un privilège maritime, pour ce qui est du carburant fourni au navire sur l'ordre du propriétaire du navire ou d'une personne autorisée par lui ou non. Le juge Blais a conclu que le contrat des parties était régi par le droit américain et que, contrairement à ce qui se passe au Royaume-Uni, au Canada et dans la plupart des autres ressorts, où le pouvoir de commander des approvisionnements nécessaires relève du droit relatif aux mandats, il existe une présomption générale que différentes personnes, notamment celle qui gère le navire ou celle nommé par un affréteur, peut lier le navire dans la mesure où le fournisseur des approvisionnements nécessaires détient un privilège maritime sur le navire, exécutoire en matière réelle, et n'est pas tenu de prouver que le crédit a été donné au navire. Évidemment, le fournisseur doit savoir, par un avis à l'encontre du privilège, que le capitaine n'a pas le pouvoir d'obliger les propriétaires. Panamax Leader est une décision intéressante, mais je ne pense pas qu'elle s'applique de manière générale aux cas où les parties n'ont pas opté pour la loi américaine, comme dans le cas du « Corona Borealis » . Je dois cependant encore examiner le principe établi dans Jensen Star selon lequel, si les rapports entre le propriétaire et l'affréteur d'un navire sont suffisamment étroits, le premier peut être lié par les services fournis au navire. Je dois souligner que, dans Jensen Star, la compétence était fondée sur les alinéas 22(2)m) - qui a trait aux approvisionnements nécessaires et aux services fournis à un navire pour son fonctionnement ou son entretien - et n) - qui concerne les demandes fondées sur des contrats, notamment de réparation ou d'équipement d'un navire - de la Loi sur la Cour fédérale.


[32]            La secteur de la fourniture de combustible de soute et de carburant pour les navires peut être florissant ou précaire selon les conditions de l'industrie du transport maritime. La situation des fournisseurs de combustible de soute au Canada est rendue difficile par l'absence de loi sur le privilège maritime et de diverses présomptions qui existent lorsque le carburant est fourni par un fournisseur américain directement à un navire ou par l'entremise de l'un de ses mandataires. Le problème est plus grave lorsqu'un affréteur intervient et que le carburant est fourni à un réservoir à terre qui n'appartient pas au propriétaire du navire et sur lequel celui-ci n'exerce aucun contrôle. L'incertitude peut être atténuée dans une certaine mesure si un fournisseur de combustible de soute diligent prend le temps de connaître son client. En l'espèce par exemple, ICS a réussi à obtenir de Dauphins qu'elle mette en garantie en sa faveur deux navires lui appartenant, mais a négligé le fait que le « Corona Borealis » appartenait toujours à une autre société, Akula. ICS aurait pu facilement vérifier à qui appartenait le navire en faisant une recherche rapide et peu dispendieuse dans le registre maritime de Montréal ou en consultant la Nomenclature des navires publiée chaque année par le ministère des Transports du Canada. Comme elle ne semble pas avoir fait l'une ou l'autre de ces démarches, ICS en est réduite à s'appuyer sur la jurisprudence de l'amirauté canadienne, laquelle est incertaine en l'espèce car aucune loi ni aucune décision judiciaire n'est d'un grand secours.


[33]            Oublions pour l'instant que le carburant a été vendu à une tierce partie pour être entreposé et éventuellement utilisé par le navire affrété, le « Corona Borealis » . ICS cherche à faire en sorte que le navire affrété appartenant à Akula, une société qui n'est pas nommée dans la déclaration et dans l'affidavit portant demande de mandat, soit visée par sa réclamation. La décision Jensen Star n'aide pas vraiment la cause d'ICS parce que, dans cette affaire, il y avait eu transfert non annoncé d'un navire, que connaissait bien la demanderesse et dans lequel elle avait déjà eu un droit, à une nouvelle société. La direction de l'ancienne société propriétaire, Jensen Shipping, et de la nouvelle propriétaire, Jensen Marine, a considéré ces sociétés comme s'il s'agissait d'une seule entité ou, comme le juge Marceau de la Cour d'appel l'a dit en faisant référence aux actions du président des deux sociétés, M. Jorgensen :

... Jorgensen lui-même ne considérait pas Jensen Shipping et Jensen Marine Holdings Ltd. comme deux entités distinctes, bien au contraire, car d'après sa conduite à l'époque où les contrats ont été exécutés et son attitude durant l'instance, il n'a jamais pensé que ses droits sur le navire avaient changé. [page 217]

Comme je l'ai indiqué précédemment, la preuve ne démontre pas que M. Zadorjnyi ne savait pas à quoi s'en tenir ou a induit quiconque en erreur au sujet du fait que Dauphins et Akula étaient deux sociétés distinctes.

[34]            Comme le juge Marceau de la Cour d'appel l'a dit dans Jensen Star, à la page 218, les approvisionnements nécessaires fournis à un navire sont présumés prima facie l'avoir été sur le crédit du navire et de son propriétaire. En l'espèce, le carburant n'a pas été fourni « à un navire » , l'expression simple employée à l'alinéa 22(2)m) de la Loi sur la Cour fédérale, mais plutôt à un réservoir à terre d'un affréteur. Comme je l'ai mentionné précédemment, ICS n'a pas prétendu dans ses actes de procédure que Dauphins pouvait donner le « Corona Borealis » , un navire appartenant à une autre société, en garantie de la totalité ou d'une partie de sa dette, et elle ne peut pas le faire.

[35]            Le fait que le « Corona Borealis » a été affrété à coque nue n'aide en rien ICS. On peut consulter à ce sujet l'analyse de la propriété bénéficiaire et de l'affrètement à coque nue aux pages 207 à 210 de Jensen Star.

[36]            Je ne vois pas comment les circonstances entourant la fourniture de barils de lubrifiant, placés par ICS sur un quai contrôlé par Dauphins auquel les trois navires étaient parfois amarrés, peuvent entraîner une décision différente de celle qui serait rendue dans le cas où le carburant a été fourni à un réservoir à terre commun contrôlé par Dauphins. Non seulement la responsabilité réelle du « Corona Borealis » n'est pas engagée pour ce qui est du carburant, elle ne l'est pas non plus pour ce qui est du lubrifiant.

CONCLUSION

[37]            Bien qu'ICS ait, selon toute probabilité, une réclamation réelle valable à faire valoir à l'encontre du « Polina 3 » et du « Sirius 1 » , cette question n'est pas en litige en l'espèce. La présente requête porte en fait sur la responsabilité réelle du « Corona Borealis » . Or, la Cour fédérale n'a manifestement et hors de tout doute aucune compétence en matière réelle à l'égard du « Corona Borealis » relativement au carburant et au lubrifiant fournis à ce navire. La réclamation réelle visant le « Corona Borealis » est radiée pour défaut de compétence. L'arraisonnement prenant automatiquement fin, le « Corona Borealis » est libéré.

[38]            Dans ses observations écrites, ICS a demandé que les dépens lui soient adjugés. Les avocates n'ont pas parlé des dépens à la fin de leur plaidoirie. Comme les dépens suivent habituellement l'issue de la cause, une somme globale de 500 $ est payable sur-le-champ à


Akula, la propriétaire du « Corona Borealis » . Je remercie les avocates pour leurs intéressantes observations.

                                                                            « John A. Hargrave »                   

                                                                                         Protonotaire                         

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                      T-1838-04

INTITULÉ :                                     I.C.S. PETROLEUM (MONTRÉAL) LTD.

c.

LES DAUPHINS DU ST-LAURENT ET AL.

LIEU DE L'AUDIENCE :               VANCOUVER (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :             LE 24 JANVIER 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :               LE PROTONOTAIRE JOHN A. HARGRAVE

DATE DES MOTIFS :                    LE 16 FÉVRIER 2005

COMPARUTIONS :

Danièle Dion                                                      POUR LA DEMANDERESSE

Elyn Underhill                                                    POUR LES DÉFENDEURS

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Brisset Bishop S.E.N.C.                                    POUR LA DEMANDERESSE

Montréal (Québec)

Giaschi & Margolis                                            POUR LES DÉFENDEURS

Vancouver (C.-B.)


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