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     Date: 19980203

     Dossier: T-1193-92

     DANS L'AFFAIRE de la Loi de l'impôt sur le revenu

E N T R E :

     SA MAJESTÉ LA REINE,

     Demanderesse,

     - et -

     PIERRE GRENIER,

     Défendeur.

     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE PINARD :

[1]      Il s'agit ici d'un appel d'une décision de la Cour canadienne de l'impôt qui, le 21 janvier 1992, a accueilli en partie l'appel du défendeur Pierre Grenier, relativement à une cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu (la "Loi") pour son année d'imposition 1987, en permettant la déduction des intérêts versés sur une partie de l'emprunt qu'il avait contracté le 24 mars 1986.

[2]      Les faits suivants ont été textuellement et expressément admis par les parties:

     1.      Le 5 juillet 1985, le défendeur était l'un des actionnaires de Albi (1980) Inc., ("Albi") société exploitant un commerce d'automobiles Mazda à Mascouche, province de Québec.
     2.      Le défendeur résidait alors au 306, rue Montcalm, Rosemère, province de Québec.
     3.      Par la suite, le défendeur est alors également devenu actionnaire principal de 144946 Canada Inc., opérant sous la raison sociale Argus Mazda ("Argus Mazda"), devant, suite à la vente anticipée par le défendeur de ses actions de Albi, exploiter un commerce d'automobiles Mazda à Hull, province de Québec.
     4.      Argus Mazda devait être financée en partie par la banque, qui exigea cependant une mise de fonds de la part du défendeur à titre d'avance à la compagnie.
     5.      Le 5 juillet 1985, le défendeur obtint de la Banque Nationale du Canada un prêt de 65 625 $, garanti par une hypothèque sur la résidence principale de ce dernier au 306, rue Montcalm, Rosemère, province de Québec.
     6.      Le défendeur avança ladite somme de 65 625 $ à Argus Mazda à titre d'avance par un administrateur, le tout reflété aux états financiers de Argus Mazda pour ses exercices se terminant le 31 août 1985, le 31 août 1986 et le 31 août 1987, respectivement.
     7.      Le 2 août 1985, le défendeur vendit les actions qu'il possédait dans Albi à la société Gestion Devault Inc., et ce pour la somme de 112 500 $.
     8.      À même le produit de vente des actions de Albi, le défendeur avança un montant de 90 194 $ à Argus Mazda à titre d'avance par un administrateur, tel que reflété aux états financiers de Argus Mazda pour ses exercices se terminant le 31 août 1985, le 31 août 1986, et le 31 août 1987, respectivement, faisant en sorte que le défendeur aura avancé une somme de 155 844 $, inter alia, à Argus Mazda, composée de la somme de 65 625 $ provenant du prêt hypothécaire du 5 juillet 1985 (voir paragraphe 5 ci-dessus) et de ladite somme de 90 194 $ provenant du produit de la vente des actions de Albi.1
     9.      Les avances totalisant 155 844 $ par le défendeur à la compagnie (65 650 $ et 90 194 $) étaient sans intérêt ni modalité de remboursement.
     10.      Argus Mazda débuta ses activités commerciales en septembre 1985, sur le boulevard Saint-Joseph à Hull, province de Québec.
     11.      Comme la nouvelle place de travail du défendeur était à Hull, le défendeur vendit, le 30 avril 1986, sa résidence de la rue Montcalm à Rosemère, pour la somme de 110 000 $.
     12.      Au même moment et à même le prix de vente, le prêt hypothécaire contracté le 5 juillet 1985, a été remboursé en totalité.
     13.      Le 14 mai 1986, un acte de quittance a été émis par la Banque Nationale du Canada en faveur du défendeur concernant le remboursement de l'emprunt du 5 juillet 1985.
     14.      Entre-temps, le 24 mars 1986, le défendeur avait obtenu de la Banque Royale du Canada un prêt au montant de 151 700 $ afin d'acquérir un immeuble, dont la bâtisse était en voie de construction, situé au 22, rue Méditerranée à Gatineau, province de Québec. Il était prévu au contrat de vente que ce montant serait versé au défendeur le 1er mai 1986.
     15.      Par acte de vente en date du 15 avril 1986, le défendeur acquérait l'immeuble situé au 22, rue Méditerranée à Gatineau, province de Québec, pour la somme de 167 361,84 $ et cédait au vendeur le produit du prêt obtenu le 24 mars 1986 (151 700 $) qui devait lui être versé le 1er mai 1986.
     16.      La différence entre le prix d'achat de 167 361,84 $ de la maison de Gatineau et de l'hypothèque de 151 700 $ fut payée par le défendeur en utilisant la partie du produit de vente des actions d'Albi qui ne fut pas avancée par lui à Argus Mazda.
     17.      Argus Mazda est demeurée endettée envers le défendeur pour l'avance de 65 625 $ tout au cours de l'année d'imposition 1987 du défendeur, et ce nonobstant le remboursement par ce dernier de la dette hypothécaire du même montant grèvant la résidence de Rosemère.
     18.      Depuis le 1er mai 1986, l'immeuble situé au 22, rue Méditerranée à Gatineau est la résidence principale du défendeur.
     19.      Au cours de son année d'imposition 1987, le défendeur a versé un montant de 15 360,32 $ à la Banque Royale du Canada à titre d'intérêts sur l'emprunt contracté le 24 mars 1986.
     20.      Pour son année d'imposition 1987, le défendeur a réclamé, à titre de déduction, le montant de 15 360,32    $ versé à la Banque Royale du Canada à titre d'intérêts sur l'emprunt contracté le 24 mars 1986.
     21.      Par avis de nouvelle cotisation en date du 13 septembre 1989, le ministre du Revenu national a refusé ladite déduction au motif que le montant de 15 360,32 $ n'avait pas été versé en exécution d'une obligation légale de verser des intérêts sur de l'argent emprunté et utilisé en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien tel que le prévoit l'alinéa 20(1)c) de la Loi de l'impôt sur le revenu.
     22.      Le 26 septembre 1989, le défendeur logeait un avis d'opposition à l'encontre de la cotisation mentionnée au paragraphe précédent.
     23.      Par avis de ratification en date du 7 mars 1990, le ministre du Revenu national ratifiait la cotisation du 13 septembre 1989.
     24.      Le défendeur logeait un appel à la Cour canadienne de l'impôt le 8 juin 1990.
     25.      Le 21 janvier 1992, la Cour canadienne de l'impôt accueillait en partie l'appel du défendeur; elle a permis la déduction des intérêts versés sur une partie de l'emprunt contracté le 24 mars 1986 soit, sur la somme de 65 625 $.
     26.      L'objet du présent litige concerne la déductibilité des intérêts versés sur ce montant de 65 625 $, qui constitue une partie de la somme empruntée le 24 mars 1986.

[3]      En plus de convenir que les questions de fait dans la présente action se limitent aux faits ci-dessus, les parties ont aussi consenti à ce que les seuls documents en preuve soient ceux formant partie de l'ANNEXE A faisant partie intégrante de l'"Entente sur les faits".

LE LITIGE

[4]      La seule question en litige est donc celle de savoir si les intérêts versés par le défendeur sur un montant de quelque 65 625 $, constituant une partie de la somme de 151 700 $ qu'il a empruntée le 24 mars 1986, peuvent être déduits de son revenu imposable.

ANALYSE

[5]      Les dispositions pertinentes de la Loi de l'impôt sur le revenu sont les suivantes:

         Article 18: Exceptions d'ordre général.                 
             (1) Dans le calcul du revenu du contribuable, tiré d'une entreprise ou d'un bien, les éléments suivants ne sont pas déductibles:                 
             (a) Idem - un débours ou une dépense, sauf dans la mesure où ce débours ou cette dépense a été fait ou engagé par le contribuable en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien;                 
         Article 20: Déductions admises dans le calcul du revenu tiré d'une entreprise ou d'un bien.                 
             (1) Malgré les alinéas 18(1)a), b) et h), sont déductibles dans le calcul du revenu tiré par un contribuable d'une entreprise ou d'un bien pour une année d'imposition celles des sommes suivantes qui se rapportent entièrement à cette source de revenus ou la partie des sommes suivantes qu'il est raisonnable de considérer comme s'y rapportant:                 
             [. . .]                 
             c) Intérêts - la moins élevée d'une somme payée au cours de l'année ou payable pour l'année (suivant la méthode habituellement utilisée par le contribuable dans le calcul de son revenu) et d'une somme raisonnable à cet égard, en exécution d'une obligation légale de verser des intérêts sur:                 
                 (i) de l'argent emprunté et utilisé en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien (autre que l'argent emprunté et utilisé pour acquérir un bien dont le revenu serait exonéré ou pour contracter une police d'assurance-vie),                 
                 (ii) une somme payable pour un bien acquis en vue d'en tirer un revenu ou de tirer un revenu d'une entreprise (à l'exception d'un bien dont le revenu serait exonéré ou à l'exception d'un bien représentant un intérêt dans une police d'assurance-vie),                 
                 [. . .]                 
             (3) Argent emprunté. Il est entendu que si un contribuable a utilisé de l'argent emprunté:                 
             a) pour rembourser un emprunt antérieur;                 
             b) pour payer une somme due relativement à des biens visés au sous-alinéa (1)c)(ii) et acquis antérieurement,                 
         sous réserve du paragraphe 20.1(6), l'argent emprunté est, pour l'application des alinéas (1)c), e) et e.1), des paragraphes 20.1(1) et (2), de l'article 21 et du sous-alinéa 95(2)a)(ii), ainsi que de l'alinéa 20(1)k) de la Loi de l'impôt sur le revenu, chapitre 148 des Statuts révisés du Canada de 1952, réputé avoir été utilisé aux fins auxquelles l'argent emprunté antérieurement a été utilisé ou était réputé par le présent paragraphe avoir été utilisé ou pour acquérir les biens relativement auxquels cette somme était due.                 

[6]      Tant la demanderesse, qui s'oppose à la déductibilité des intérêts en question, que le défendeur, qui clame son droit à cette déductibilité, s'appuie fondamentalement sur l'arrêt de la Cour suprême du Canada Sa Majesté la Reine c. Phyllis Barbara Bronfman Trust, [1987] 1 R.C.S. 32, pour justifier sa position.

[7]      Dans cet arrêt, le juge en chef Dickson a souligné, à la page 49, l'exigence légale fondamentale selon laquelle "la déductibilité des intérêts est conditionnelle à l'utilisation de l'argent emprunté à des fins bien précises productives de revenu". Puis référant au sous-alinéa 20(1)c)(i) et au paragraphe 20(3) de la Loi, dispositions ici invoquées à son profit par le défendeur, le juge en chef Dickson écrit, aux pages 49 et 50:

             On trouve dans la Loi non seulement la distinction que fait le sous-al. 20(1)c)(i) entre les utilisations admissibles et inadmissibles des fonds, mais d'autres dispositions qui exigent également que des fonds aient été affectés à des usages particuliers, ce qui vient contredire l'argument de la fiducie. Le paragraphe 20(3), anciennement le par. 11(3b), prévoit par exemple, que l'intérêt sur l'argent emprunté pour rembourser un emprunt existant est réputé avoir été utilisé aux fins pour lesquelles l'emprunt antérieur a été utilisé. Il va sans dire que cette disposition serait superflue si l'intérêt sur l'argent emprunté était déductible dans les cas où le contribuable avait des biens productifs de revenu à conserver. Au contraire, toutefois, pour les années d'imposition antérieures à l'adoption du par. 11(3b) dans S.C. 1953-54, chap. 57, par. 2(6), on avait conclu à la non-déductibilité de ces intérêts parce que les emprunts étaient utilisés pour rembourser un autre emprunt et non pas pour produire un revenu: Interior Breweries Ltd. v. Minister of National Revenue, 55 D.T.C. 1090, à la p. 1093 (C. de l'É.).                 
             Il n'est donc pas surprenant que les décisions interprétant le sous-al. 20(1)c)(i) et les dispositions qu'il a remplacées n'ont pas adopté le point de vue selon lequel on doit ne pas tenir compte d'une utilisation inadmissible directe de l'argent emprunté chaque fois qu'il est possible de découvrir une utilisation admissible indirecte des fonds. Voir l'affaire Sternthal [c. La Reine, 74 D.T.C. 6646 (C.F. 1re inst.)] ainsi que Garneau Marine Co. c. Ministre du Revenu national, 82 D.T.C. 1171 (C.R.I.).                 
             Dans le même ordre d'idées, on a conclu à maintes reprises qu'un particulier ne peut pas déduire l'intérêt payé sur l'hypothèque grevant une habitation personnelle, même s'il allègue que l'emprunt lui a évité d'avoir à vendre des placements productifs de revenu. . . .                 

[8]      Un peu plus loin, le juge en chef se dit en accord avec la proposition énoncée dans la décision Trans-Prairie Pipelines Ltd. v. Minister of National Revenue, 70 D.T.C. 6351 (C. de l'É.), selon laquelle "c'est l'utilisation actuelle et non pas l'usage primitif des fonds empruntés qui détermine l'admissibilité à une déduction", précisant toutefois, à la page 52:

         . . . Je répète cependant que ce n'est pas parce que le contribuable continue à payer de l'intérêt qu'on doit inévitablement conclure qu'il utilise encore l'argent emprunté et, à plus forte raison, qu'il l'utilise pour produire un revenu. Par exemple, un bien acheté avec de l'argent emprunté peut avoir été vendu, tandis que la dette contractée aux fins de l'achat reste impayée.                 
             Donc, à l'exception de l'affaire Trans-Prairie, dont, à mon humble avis, le raisonnement ne justifie pas la conclusion que la fiducie intimée cherche à tirer, la jurisprudence s'est montrée généralement hostile aux réclamations fondées sur des utilisations admissibles indirectes dans des cas où il y a une utilisation directe mais inadmissible des fonds empruntés.                 

[9]      Puis reconnaissant à la fois la tendance à s'éloigner d'une interprétation stricte des lois fiscales et la jurisprudence "récente" en matière fiscale ayant tendance à essayer de déterminer la véritable nature commerciale et pratique des opérations du contribuable, le juge en chef précise ce qui suit, à la page 53:

             Il s'agit là, je crois, d'une tendance louable, pourvu qu'elle soit compatible avec le texte et l'objet de la loi fiscale. Si, en appréciant les opérations des contribuables, on a présent à l'esprit les réalités commerciales et économiques plutôt que quelque critère juridique formel, cela aidera peut-être à éviter que l'assujettissement à l'impôt dépende, ce qui serait injuste, de l'habileté avec laquelle le contribuable peut se servir d'une série d'événements pour créer une illusion de conformité avec les conditions apparentes d'admissibilité à une déduction d'impôt.                 
             Cela ne signifie toutefois pas qu'une déduction telle que la déduction au titre d'intérêts prévue par le sous-al. 20(1)c)(i), laquelle, de par le texte même de cette disposition, ne peut être réclamée par un contribuable que dans des circonstances bien précises, ne doive tout à coup plus faire l'objet d'aucune restriction. Il ne faut pas supposer à la légère qu'une utilisation effective et directe d'argent emprunté est moins réelle que les utilisations abstraites et indirectes que les contribuables ont, à l'occasion, alléguées dans une tentative d'obtenir une qualification avantageuse de l'utilisation d'emprunts. En particulier, j'estime que, même si cela peut être décrit comme une façon indirecte de conserver un revenu, l'emprunt d'argent pour une fin directe inadmissible ne devrait pas conférer à un contribuable le droit de déduire les intérêts payés.                 

[10]      Enfin, tenant compte des faits particuliers de l'affaire, le juge en chef de la Cour suprême du Canada conclut à l'encontre du contribuable, mais reconnaît toutefois qu'il peut exister des circonstances exceptionnelles qui permettent la déduction d'intérêts sur des fonds empruntés pour un usage inadmissible. À la page 54, il écrit:

             Même s'il est des circonstances exceptionnelles dans lesquelles, selon une appréciation réaliste des opérations d'un contribuable, il pourrait convenir, en raison d'un effet indirect sur sa capacité de gagner des revenus, de lui permettre de déduire l'intérêt sur les fonds empruntés pour un usage inadmissible, je suis convaincu que de telles circonstances n'existent pas en l'espèce. Il me semble qu'à tout le moins, le contribuable doit convaincre la Cour que la fin réelle qu'il visait en utilisant les fonds était de gagner un revenu. . . .                 

ANALYSE

[11]      Je suis d'avis, compte tenu des circonstances particulières du présent cas, que le raisonnement de la Cour suprême dans Bronfman Trust, supra, supporte bien la position du défendeur, le contribuable. En effet, il n'est pas contesté que l'emprunt hypothécaire de 65 625 $ sur la première résidence du défendeur lui a permis d'utiliser cet argent en vue de tirer un revenu de sa nouvelle entreprise située à Hull, province de Québec. Ayant, à la même époque, vendu les actions qu'il possédait dans une entreprise similaire, à Mascouche, province de Québec, et ayant en outre investi 90 194 $ des 112 500 $ obtenus pour ces actions dans la nouvelle entreprise qu'il entendait exploiter à Hull, il était normal pour le défendeur de vendre sa résidence située à Rosemère, près de Mascouche, pour en acquérir une nouvelle à Gatineau, province de Québec, près de Hull. Bien qu'il ait acquitté le prêt hypothécaire de 65 625 $ lors de la vente de sa résidence de Rosemère, le demandeur a dû hypothéquer sa nouvelle résidence de Gatineau d'un montant supérieur à 65 625 $, soit 151 700 $ entièrement versés au vendeur de la résidence de Gatineau. Toutes ces transactions ont été complétées dans une période de temps raisonnable, soit quelque dix mois pendant lesquels l'avance de 65 625 $ à l'entreprise située à Hull a toujours été reflétée aux états financiers de celle-ci, le défendeur n'en ayant pas obtenu remboursement. Ces circonstances sont d'une ressemblance marquante avec celles considérées par le juge Strayer dans Her Majesty the Queen v. John Shore, [1992] 1 C.T.C. 34, où le contribuable, exploitant une entreprise similaire à celle du défendeur dans le présent cas, s'est vu permettre la déduction des intérêts sur un deuxième emprunt hypothécaire qui a servi directement à payer sa nouvelle résidence. Dans cette autre affaire, le juge Strayer écrit, à la page 35:

             Each case must turn on its own facts when a court is obliged to make such a characterization. In the present case when one looks at the commercial reality of the situation one sees that there was a series of transactions the net result of which was to enable the taxpayer to borrow money in order to earn income from his business, using his private homes as collateral for the loan. It is important to note that at the beginning of these transactions the taxpayer and his wife were owners of their Thamesford home. (There is some indication in the material that there was a previous mortgage on the home but this was discharged prior to the registration of the mortgage in favour of Guaranty Trust.) It is not disputed that the taxpayer and his wife gave a mortgage on their home to Guaranty Trust in order to raise approximately $42,000 to use in their new business, Joline Automobiles Ltd. and that the net proceeds of that mortgage were loaned to the business. That amounted to a direct use of the money for purposes of the business. Later, when they needed to change homes, they were not able to repay the loan to Guaranty Trust out of the sale proceeds from their Thamesford home because the only practicable way of selling it in that market was on the basis of cash to mortgage. Therefore the mortgage in favour of Guaranty Trust had to remain on the house in Thamesford. Similarly, in buying a house in Stratford, then, it became very important for the taxpayer and his wife to find a house with a similar mortgage and preferably with a similar rate of interest (interest rates having gone up substantially since the time they had granted a mortgage to Guaranty Trust). As they had not sold their house in Thamesford for cash but only cash to mortgage, they were not in a position to pay the total price of another house in cash. They found a house in Stratford which was encumbered by a mortgage of a similar amount to the mortgage on their previous house, and they were thus able to pay cash to mortgage to acquire the house in Stratford. In my view the reality of that transaction, in taking on a house encumbered by the mortgage in favour of Victoria and Grey Trust similar to the one on their previous residence, was in essence the replacement of one borrowing of money for the purpose of their business by another borrowing of money for the same purpose, thus bringing it within subsection 20(3) of the Income Tax Act so that such "borrowed" money could be deemed to be used for the same purpose as the original money borrowed from Guaranty Trust.                 
             Therefore I find on the facts that the direct use of the money borrowed on the security of the family home was, and remained throughout, for the purposes of the automobile business and that the interest paid on the mortgage in the 1980, 1981, 1982 taxation years was properly deductible from the defendant's income.                 
                                 (J'ai souligné.)                 

[12]      Bien que dans le présent cas la première hypothèque ait été remboursée et que la deuxième hypothèque corresponde à un montant supérieur, je ne considère pas ces différences suffisantes pour me forcer à conclure, sur l'essentiel, autrement que ne l'a fait le juge Strayer dans Shore. En l'espèce, je suis d'avis qu'il existe des circonstances exceptionnelles dans lesquelles, selon une appréciation réaliste des opérations du contribuable, il convient, en raison de l'effet indirect sur sa capacité de gagner des revenus dans son entreprise située à Hull, de lui permettre de déduire l'intérêt sur les fonds empruntés pour un usage inadmissible, soit l'acquisition de sa nouvelle résidence à Gatineau. Considérant le contexte économique des transactions et la concomitance des événements, je suis bien sûr convaincu que la fin réelle visée par le défendeur en utilisant les fonds concernés était de gagner un revenu. À mon sens, les circonstances exceptionnelles dont parle l'arrêt Bronfman Trust, supra, à la page 54, se retrouvent dans le présent cas.

CONCLUSION

[13]      Par ces motifs, l'appel ne peut être accueilli et l'action de la demanderesse est rejetée avec dépens.

                            

                                     JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 3 février 1998


__________________

1      À noter que les sommes de 65 625 $ et 90 194 $ totalisent plutôt 155 819 $; il appert du paragraphe suivant qu'on a additionné 65 650 $ au lieu de 65 625 $ pour en arriver au total de 155 844 $. Ces écarts de chiffres, qui n'ont pas été expliqués, sont toutefois sans importance pour la solution du présent litige.

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