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Date : 19981209


Dossier : IMM-6280-98

ENTRE :


YANICHEVSKI, VICTOR MYRONOWICH, en sa qualité de

père de Lilia YANICHEVSKI, (née le 05-09-97),


demandeur,


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION,


défendeur.


MOTIFS DE L"ORDONNANCE ET ORDONNANCE


[Prononcés à l"audience, dans le cadre d"une téléconférence

entre Montréal et Ottawa, le mercredi 9 décembre 1998.]

[1]      Je dois exposer mes motifs dans la présente affaire de façon urgente, étant donné que l"expulsion de Victor Yanichevski et de son épouse, les parents de l"enfant demanderesse, doit avoir lieu cet après-midi même.

[2]      Les parents de l"enfant demanderesse sont arrivés au Canada en tant que revendicateurs du statut de réfugiés, en mai et en juillet 1997. Des mesures de renvoi conditionnel ont été prises contre eux dès leur arrivée. L"enfant demanderesse est née au Canada en septembre 1997.

[3]      Le 14 mai 1998, la Commission de l"immigration et du statut de réfugié a rejeté les revendications du statut de réfugié déposées par les parents. Les parents n"ont pas présenté de demande de contrôle judiciaire pour contester la décision de la Commission de l"immigration et du statut de réfugié.

[4]      En août 1998, les parents ont déposé une demande fondée sur le paragraphe 114(2) de la Loi sur l"immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, modifiée, visant à obtenir une exemption des exigences relatives aux visas, sur le fondement de motifs d"ordre humanitaire. Cette demande a été rejetée le 22 septembre 1998, et les parents n"ont pas contesté cette décision en présentant une demande de contrôle judiciaire. Les parents n"ont pas non plus intenté d"action visant à contester la validité des mesures de renvoi. L"expulsion des parents devait avoir lieu le 19 octobre 1998.

[5]      Le 16 octobre 1998, le père de l"enfant demanderesse a intenté une action devant la Cour supérieure du Québec visant à obtenir une injonction empêchant leur expulsion. Le défendeur a accepté de surseoir à l"exécution de la mesure d"expulsion jusqu"au 15 novembre 1998, soit jusqu"à ce que la Cour supérieure du Québec rende sa décision. Le 13 novembre 1998, le juge Barbeau de la Cour supérieure a rejeté la requête en injonction.

[6]      Le 8 décembre 1998, le père de l"enfant demanderesse a déposé une déclaration devant notre Cour en vue d"obtenir un jugement déclaratoire portant que [TRADUCTION] " l"enfant a le droit de demeurer au Canada et de ne pas être séparée de ses parents jusqu"à ce qu"une décision définitive soit rendue dans les affaires Francis et Baker ". Il a également demandé qu"il soit sursis à l"exécution de la mesure d"expulsion.

[7]      Après avoir examiné tous les documents et avoir entendu les observations orales de l"avocat de l"enfant demanderesse, j"ai conclu que la demande de sursis devait être rejetée vu l"absence d"une question grave devant être tranchée.

[8]      L"affaire Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration) a fait l"objet d"une audition devant la Cour suprême du Canada le 4 novembre 1998. Il ressort de l"arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration), [1997] 2 C.F. 127 (C.A.F.) que la question que la Cour d"appel a examiné était la suivante :

         " [...] si, sur le plan juridique, cette Convention [la Convention relative aux droits de l"enfant] fait à l"agent ou au ministre exerçant le pouvoir discrétionnaire qu"ils tiennent du paragraphe 114(2) de la Loi sur l"immigration, l"obligation de reconnaître, dans leur décision, une certaine primauté à l"intérêt supérieur de l"enfant lorsqu"il s"agit de savoir s"il y a lieu de rapporter la mesure d"expulsion déjà prise contre le père ou la mère de cet enfant ".         

[9]      En tranchant cette question, le juge Strayer de la Cour d"appel, s"exprimant au nom de la Cour, a conclu, à la page 151, que " [...] la Convention relative aux droits de l"enfant, n"ayant pas été mise en vigueur par voie législative au Canada, ne saurait, du point de vue du droit constitutionnel, créer des droits ou des obligations quant au mode d"exercice du pouvoir discrétionnaire prévu par le paragraphe 114(2) de la Loi sur l"immigration ".

[10]      Vu l"omission des parents de l"enfant demanderesse de contester, par voie de contrôle judiciaire, la décision rendue en vertu du paragraphe 114(2) de la Loi sur l"immigration, l"arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration) de la Cour suprême du Canada ne pourra étayer l"argumentation de l"enfant demanderesse dans la présente affaire.

[11]      Dans l"arrêt Langner c. Canada (Ministre de l"Emploi et de l"Immigration) (1995) 184 N.R. 230 (C.A.F.), le juge Décary de la Cour d"appel, s"exprimant au nom de la Cour, a conclu que la Charte ne garantissait pas à l"enfant le droit de ne pas être séparé de ses parents, et qu"elle ne garantissait pas aux parents d"un enfant né au Canada le droit d"y demeurer. Une demande d"autorisation de pourvoi devant la Cour suprême du Canada a été rejetée le 17 août 1995 ([1995] 3 R.C.S. vii). Je suis liée par l"arrêt Langner c. Canada (Ministre de l"Emploi et de l"Immigration). [Voir également Naredo et Arduengo c. Ministre de l"Emploi et de l"Immigration (1995), 184 N.R. 352 (C.A.F.); Alouache c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration) (1996), 197 N.R. 305 (C.A.F.)]. En outre, je n"ai pas été convaincue que l"issue de l"affaire Francis , qui doit être entendue par la Cour d"appel de l"Ontario en janvier 1999, aura une influence directe sur la présente affaire, particulièrement en raison du refus de la Cour supérieure du Québec de rendre une injonction empêchant l"expulsion des parents de l"enfant demanderesse.

[12]      Pour ces motifs, j"ai conclu qu"il n"y avait aucune question grave à trancher.


[13]      LA COUR ORDONNE QUE la demande de sursis de l"exécution de la mesure d"expulsion soit rejetée.


D. McGillis

                                             juge

OTTAWA

Le 9 décembre 1998.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A. , LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :              IMM-6280-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :      YANICHEVSKI, VICTOR MYRONOWICH, en sa qualité de père de Lilia YANICHEVSKI, (née le 05-09-97)

                     c.

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE                          L"IMMIGRATION

LIEU DE L"AUDIENCE :          Ottawa (Ontario) (par téléconférence avec Montréal)

DATE DE L"AUDIENCE :          le 9 décembre 1998

MOTIFS DE L"ORDONNANCE EXPOSÉS PAR MADAME LE JUGE McGILLIS

EN DATE DU :              9 décembre 1998

ONT COMPARU :

Jean-François Bertrand                      POUR LA DEMANDERESSE

Michel Synott et Daniel Latulippe                  POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Bertrand, Deslauriers (Montréal (Québec))              POUR LA DEMANDERESSE

Morris Rosenberg                          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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