Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20190502


Dossier : IMM‑5000‑18

Référence : 2019 CF 564

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie‑Britannique), le 2 mai 2019

En présence de monsieur le juge Zinn

ENTRE :

TERESA MOURATO LOPES

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  Mme Mourato Lopes a présenté une demande de visa de résident permanent au titre de la catégorie du démarrage d’entreprise. L’agente a conclu que Mme Mourato Lopes participait à l’entente principalement dans le but d’acquérir un statut ou un privilège sous le régime de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, et non dans le but d’exploiter l’entreprise.

[2]  Mme Mourato Lopes soutient que cette décision contrevient à l’équité procédurale et qu’elle est déraisonnable. Pour les motifs qui suivent, je ne suis pas convaincu que la décision a été rendue sans respecter l’équité procédurale ou qu’elle était déraisonnable.

[3]  Selon sa demande de résidence permanente, Mme Mourato Lopes avait conclu un partenariat avec Empowered Startups Ltd. [Empowered] dans le but de créer une application logicielle mobile qui servirait de centre d’échange de données ou de bureau d’éthique commerciale pour les certificats de responsabilité des entreprises et les étiquettes écologiques. Empowered figure sur la liste de l’annexe I des Instructions ministérielles 7 (IM7) : Programme de visa pour démarrage d’entreprise. L’agente avait demandé qu’un examen indépendant par des pairs soit réalisé afin de déterminer si Empowered avait fait preuve de toute la diligence voulue avant d’accepter la proposition de Mme Mourato Lopes. L’examen par des pairs a été effectué par la National Angel Capital Organization [NACO].

[4]  L’examen a notamment révélé qu’Empowered n’était pas constituée en société et que Mme Mourato Lopes avait accepté de verser 500 000 $ à l’entreprise, ce qui n’était pas normal. Il semble que les deux déclarations sont incorrectes.

[5]  Les résultats de l’examen par des pairs n’ont pas été mis à la disposition de Mme Mourato Lopes avant que la décision soit rendue, ce qui, selon elle, constitue un manquement à son droit à l’équité procédurale. Bien que les résultats de l’examen par des pairs n’aient pas été mis à sa disposition, elle était au courant de la décision préliminaire rendue à la suite de l’examen indépendant parce qu’elle en a fait mention dans ses observations. Cependant, elle n’était pas au courant des conclusions énoncées dans cette décision préliminaire.

[6]  Quoi qu’il en soit, la décision faisant l’objet du contrôle ne semble pas du tout être fondée sur les résultats de l’examen par des pairs. L’agente a écrit ce qui suit : [traduction] « Dans ma lettre relative à l’équité procédurale, je n’ai pas communiqué mes préoccupations quant à l’examen par des pairs à la demanderesse parce qu’elles n’ont eu aucune incidence sur mon appréciation ». Par ailleurs, contrairement à ce qu’a révélé l’examen par des pairs, l’agente a signalé à juste titre que l’entreprise a été constituée en société.

[7]  L’avocat a affirmé que le moment où l’examen par des pairs a été effectué et où la demande de mise à jour a été présentée montre que l’examen a joué un rôle dans la décision faisant l’objet du contrôle. Je ne souscris pas à cet argument. Il s’est écoulé plusieurs semaines entre l’examen par des pairs et la demande de mise à jour, et aucun autre élément de preuve au dossier n’appuie l’affirmation de l’avocat. Quoi qu’il en soit, si l’examen par des pairs a eu une incidence sur le dépôt d’une demande de mise à jour, cela ne signifie pas qu’il a eu une incidence sur la décision finale.

[8]  Je souscris à l’observation formulée par le juge Barnes dans la décision Kwan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 92, au paragraphe 23, qui porte également sur le rejet d’une demande de visa de résident permanent présentée au titre de la catégorie du démarrage d’entreprise, et selon laquelle en l’absence de preuve démontrant que les préoccupations soulevées dans le cadre de l’examen par des pairs ont été un facteur déterminant dans la décision, l’agent n’est pas tenu de porter cette question à l’attention du demandeur. Par conséquent, il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale lorsque la décision faisant l’objet du contrôle a été rendue.

[9]  Mme Mourato Lopes soutient que la décision est déraisonnable parce que : (i) elle ne tient pas compte de sa participation à un programme géré par un établissement désigné (Empowered), et (ii) elle est intrinsèquement contradictoire avec la preuve de son intention de poursuivre les activités de son entreprise et n’en tient pas compte.

[10]  En ce qui concerne sa participation au programme, Mme Mourato Lopes affirme que la décision est déraisonnable parce qu’on lui reproche de ne pas avoir fait des [traduction] « progrès considérables » lorsqu’elle travaillait sous la supervision d’Empowered, un incubateur d’entreprises figurant sur la liste de l’annexe en question. Elle soutient que rien ne permet de penser qu’Empowered se souciait de ses progrès, et qu’il faut faire preuve de retenue à l’égard du point de vue de l’entreprise.

[11]  Je suis d’accord avec le défendeur pour dire que le ministre, et non Empowered, est tenu de préserver l’intégrité du programme. Bien que son point de vue mérite d’être examiné, l’entreprise n’est pas tenue de prendre la décision que le ministre a le mandat de prendre. Mme Mourato Lopes devait soumettre sa demande de résidence permanente accompagnée de documents démontrant les progrès qu’elle avait réalisés. Les préoccupations de l’agente concernant l’insuffisance de la preuve étaient directement liées aux déclarations de Mme Mourato Lopes au sujet du rôle essentiel qu’elle jouait dans l’entreprise. L’agente lui a demandé de produire une preuve objective de ses réalisations par rapport aux rôles qu’elle affirmait jouer. Cette preuve n’a pas été présentée. La décision n’était donc pas déraisonnable sur ce fondement.

[12]  En ce qui a trait à l’affirmation selon laquelle la preuve n’a pas été prise en compte, Mme Mourato Lopes soutient qu’en mettant l’accent sur les réalisations qu’elle a accomplies au cours de la période où elle avait le droit de travailler au Canada, l’agente a négligé le fait qu’elle avait tenté de renouveler son permis de travail. Elle convient qu’il était approprié que le décideur tienne compte de l’absence de preuve démontrant qu’elle avait directement participé à l’évolution ou au développement de son entreprise. Cependant, elle affirme que [traduction] « ce n’est pas le seul facteur dont l’agente aurait dû tenir compte, surtout compte tenu des circonstances atténuantes liées à [son] incapacité de prolonger son permis de travail malgré tous ses efforts ».

[13]  Je suis d’accord avec le défendeur pour dire qu’il était approprié que l’agente mette l’accent sur les progrès, ou l’absence de progrès, de Mme Mourato Lopes pendant la période où celle‑ci était légalement autorisée à travailler. L’argument de Mme Mourato Lopes ne tient pas compte du fait qu’elle était entièrement responsable de son incapacité à travailler au Canada après décembre 2018. Elle a choisi de prendre des vacances à l’extérieur du Canada alors que, si elle était restée au pays, elle aurait pu conserver son statut de travailleuse selon ce que prévoit l’alinéa 186u) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227. Je suis d’accord avec le ministre pour dire que le fait qu’elle ne peut plus travailler en raison de ses propres actions n’est pas compatible avec l’affirmation selon laquelle elle a fait des [traduction] « efforts raisonnables » pour conserver son statut.

[14]  Un décideur n’a pas l’obligation de commenter chacun des éléments de preuve; il doit seulement commenter les éléments de preuve qui contredisent ses conclusions de façon claire. L’agente ne devait pas s’attarder aux éléments en dehors de la période visée, mais elle l’a fait, et aucun élément contradictoire ne méritait d’être pris en compte. Je ne trouve rien de déraisonnable dans le fait que l’agente a mis l’accent sur les efforts qu’avait déployés Mme Mourato Lopes au cours de la période où elle était effectivement autorisée à travailler au Canada.

[15]  La demanderesse a produit deux affidavits dont ne disposait pas le décideur. Je les ai examinés, mais seulement dans la mesure où ils se rapportent à la question d’équité procédurale qui a été soulevée.

[16]  Aucune des parties ne propose de question à certifier, et aucune ne se pose au vu des faits.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑5000‑18

LA COUR STATUE que la présente demande est rejetée et qu’aucune question n’est certifiée.

« Russel W. Zinn »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 30e jour de mai 2019

Manon Pouliot, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑5000‑18

INTITULÉ :

TERESA MOURATO LOPES c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

VANCOUVER (COLOMBIE‑BRITANNIQUE)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 29 AVRIL 2019

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE ZINN

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 2 MAI 2019

COMPARUTIONS :

Steven Meurrens

POUR LA DEMANDERESSE

Hilla Aharon

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Larlee Rosenberg LLP

Avocats

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LA DEMANDERESSE

Procureur général du Canada

Ministère de la Justice du Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.