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Dossier : T-1301-98



ENTRE :

     FRANKLIN WILLIAM MILLER

     ET VIKI CARROLL-MILLER

     demandeurs



     - et -



     CONSEIL DES SIX-NATIONS DE LA BANDE INDIENNE

DES SIX-NATIONS DE LA RIVIÈRE GRAND

     défendeur





     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE HENEGHAN


[1]      Le demandeur Franklin William Miller a demandé par requête que son enfant d"âge mineur Matthew (Watio) Tehawerenhton Miller, représenté par son tuteur à l"instance Franklin (Frank) William Miller, soit partie à la présente procédure de contrôle judiciaire à titre de demandeur. Cette requête s"inscrit dans le cadre d"une demande de contrôle judiciaire formulée à l"encontre de la décision prise par le Conseil des Six-Nations en date du 25 mai 1998, par laquelle le Conseil ordonnait à Mme Viki Carroll-Miller de se retirer du Territoire des Six-Nations de la rivière Grand. La décision a été communiquée à Mme Carroll-Miller par une lettre datée du 26 mai 1998.

[2]      Pour étayer son avis de requête, le demandeur Franklin William Miller s"est fondé sur les paragraphes 1 à 21 de son affidavit déposé le 28 janvier 2000, de même que sur les pièces jointes. Cet affidavit fournit des renseignements généraux à propos de la cellule familiale composée de M. et Mme Miller et de leur fils dont ils ont la garde, Matthew (Watio) Tehawerenhton Miller, et notamment des renseignements sur les antécédents physiques et mentaux de cet enfant d"âge mineur. L"affidavit donne également des renseignements détaillés sur l"effet apparent qu"a eu l"avis d"expulsion sur le bien-être physique, mental et social de l"enfant mineur, cet avis faisant l"objet d"une demande de contrôle judiciaire.

[3]      L"avis de requête portant que Watio Miller soit partie à l"instance, par l"entremise de son tuteur à l"instance, est contesté par le défendeur essentiellement pour deux motifs. Premièrement, l"avocat du défendeur soutient que le demandeur cherche à constituer une partie à l"instance après l"expiration du délai imparti de trente jours prévu au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la Cour fédérale, ainsi rédigé :

18.1(2) An application for judicial review in respect of a decision or order of a federal board, commission or other tribunal shall be made within thirty days after the time the decision or order was first communicated by the federal board, commission or other tribunal to the office of the Deputy Attorney General of Canada or to the party directly affected thereby, or within such further time as a judge of the Trial Division may, either before or after the expiration of those thirty days, fix or allow.

18.1(2) Les demandes de contrôle judiciaire sont à présenter dans les trente jours qui suivent la première communication, par l"office fédéral, de sa décision ou de son ordonnance au bureau du sous-procureur général du Canada ou à la partie concernée, ou dans le délai supplémentaire qu"un juge de la Section de première instance peut, avant ou après l"expiration de ces trente jours, fixer ou accorder.

[4]      Le second argument avancé par l"avocat du défendeur pour s"opposer à l"avis de requête consiste à dire que la présence de l"enfant mineur à titre de partie officielle n"est pas requise aux fins de l"adjudication de la demande de contrôle judiciaire et que, quoi qu"il en soit, la Cour dispose déjà des renseignements pertinents relatifs à l"enfant mineur par l"entremise des éléments de preuve déposés à l"appui de la demande de contrôle judiciaire.

[5]      L"avocat du défendeur fait valoir que les demandeurs n"ont pas présenté de demande de prorogation de délai et qu"en outre, ils n"ont pas déposé d"éléments de preuve probants justifiant leur retard aux fins de la prorogation du délai prévu pour amorcer la procédure de contrôle judiciaire.

[6]      Quant à elle, se fondant sur l"arrêt Basarsky c. Quinlan , [1972] 1 W.W.R. 303, 24 D.L.R. (3d) 720 (C.S.C.), l"avocate du demandeur plaide que le délai imparti peut être prorogé lorsqu"il existe des circonstances spéciales. Elle soutient en l"espèce qu"il existe effectivement des circonstances spéciales justifiant l"ajout de l"enfant mineur à titre de partie à la demande de contrôle judiciaire et que cet ajout, à cette étape-ci, ne causerait aucun préjudice au défendeur.

[7]      Il convient de répondre à deux questions relativement à l"avis de requête déposé par le demandeur. La première consiste à savoir si l"enfant mineur doit être autorisé à présenter sa propre demande de contrôle judiciaire après l"expiration du délai imparti, compte tenu du fait que l"avis de requête ne comporte aucune demande de prorogation du délai prévu pour le commencement de la procédure de contrôle judiciaire. La seconde consiste à savoir si l"enfant mineur devrait être partie à la demande de contrôle judiciaire introduite par ses parents en leur nom propre.

[8]      En ce qui concerne les avocats des deux parties, je suis d"avis que leurs arguments relatifs à l"expiration du délai imparti de trente jours pour le commencement de la procédure de contrôle judiciaire sont sans pertinence. La demande de contrôle judiciaire en l"espèce a été introduite en bonne et due forme à l"intérieur du délai de trente jours. La présente requête découle simplement de la question de savoir si une partie doit être ajoutée à l"instance, dans le cadre de procédures déjà en cours.

[9]      À mon avis, la présente requête est régie par l"alinéa 104(1)b ) des Règles de la Cour fédérale (1998), qui prévoit :

104.(1) At any time, the Court may [...] (b) order that a person who ought to have been joined as a party or whose presence before the Court is necessary to ensure that all matters in dispute in the proceeding may be effectually and completely determined be added as a party, but no person shall be added as a plaintiff or applicant without his or her consent, signified in writing or in such other manner as the Court may order.

104.(1)La Cour peut, à tout moment, ordonner:[...] (b) que soit constituée comme partie à l"instance toute personne qui aurait dû l"être ou dont la présence devant la Cour est nécessaire pour assurer une instruction complète et le règlement des questions en litige dans l"instance; toutefois, nul ne peut être constitué codemandeur sans son consentement, lequel est notifié par écrit ou de telle autre manière que la Cour ordonne.

[10]      Cette règle soulève la question de savoir si l"enfant mineur devrait être ajouté comme partie à l"instance " pour assurer une instruction complète et le règlement des questions en litige dans l"instance ".

[11]      Pour trancher cette question, je tiens compte des circonstances et des intérêts de l"enfant mineur. Aux yeux de la loi, l"enfant mineur a le statut d"une personne affligée d"une invalidité, ce que les Règles de la Cour fédérale reconnaissent expressément; voir les règles 115 et 121.


[12]      Je suis d"avis que l"enfant pourrait détenir un intérêt qui ne soit pas entièrement protégé par le rôle qu"assumerait son père comme autre demandeur dans le cadre de la demande de contrôle judiciaire. Il convient de ne pas perdre de vue que la principale procédure en cause est le contrôle judiciaire d"une décision par laquelle le Conseil cherchait à expulser la mère du Territoire des Six-Nations de la rivière Grand. Je suis d"avis qu"on ne peut affirmer que l"enfant ne possède aucun intérêt dans cette décision.

[13]      En outre, je suis également consciente du fait que cet enfant mineur souffre d"un problème de santé important, à savoir le syndrome d"alcoolisme foetal. Le fait que cet enfant soit constitué comme demandeur n"entraîne aucun préjudice à l"égard du défendeur et, à mon avis, l"enfant devrait être constitué partie à l"instance pour assurer une instruction complète et le règlement des questions en litige dans l"instance, conformément à l"alinéa 104(1)b ) des Règles de la Cour fédérale (1998).

[14]      L"autorisation est accordée pour que Matthew (Watio) Tehawerenhton Miller, représenté par son tuteur à l"instance Franklin William Miller, soit constitué comme demandeur à l"instance.



[15]      J"adjuge les dépens, établis à 500,00 $, en faveur des demandeurs.



                     " E. Heneghan "
                                     Juge

Ottawa (Ontario)

Le 12 avril 2000


Traduction certifiée conforme


Thanh-Tram Dang, B.C.L., LL.B.

                                     Date : 20000412

                                     Dossier : T-1301-98


OTTAWA (Ontario), le mercredi 12 avril 2000.

EN PRÉSENCE DE : Madame le juge Heneghan


ENTRE :

     FRANKLIN WILLIAM MILLER

     ET VIKI CARROLL-MILLER

     demandeurs



     - et -



     CONSEIL DES SIX-NATIONS DE LA BANDE INDIENNE

DES SIX-NATIONS DE LA RIVIÈRE GRAND

     défendeur





     ORDONNANCE


ÉTANT DONNÉ la requête déposée par les demandeurs en date du 10 février 2000 en vue d"obtenir :

1. une ordonnance constituant Matthew (Watio) Tehawerenhton Miller, représenté par son tuteur à l"instance Franklin (Frank) William Miller, comme demandeur à l"instance;

2. une ordonnance sur consentement autorisant le défendeur à signifier les preuves par affidavit au plus tard le 10 mars 2000, et une ordonnance autorisant les demandeurs Frank et Watio Miller à signifier leur réponse aux preuves par affidavit au plus tard le 31 mars 2000;

3. une ordonnance prorogeant les délais de la manière suivante :

         i) les contre-interrogatoires en l"espèce devront être complétés le              30 avril 2000 ou avant;

         ii) les demandeurs doivent signifier et déposer leur dossier le              31 mai 2000 ou avant;

         iii) le défendeur doit signifier et déposer son dossier le 30 juin 2000 ou          avant;

         iv) les demandeurs doivent signifier et déposer leur demande d"audience          le 7 juillet 2000 ou avant.


LA COUR ORDONNE PAR LA PRÉSENTE :


     L"autorisation est accordée pour que Matthew (Watio) Tehawerenhton Miller, représenté par son tuteur à l"instance Franklin William Miller, soit constitué comme demandeur à l"instance, conformément aux motifs ci-joints. Les autres questions soulevées dans l"avis de requête ont été réglées sur consentement des parties. Les dépens, établis à 500,00 $, sont adjugés en faveur des demandeurs.


                             " E. Heneghan "

                                 Juge


Traduction certifiée conforme


Thanh-Tram Dang, B.C.L., LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                  T-1301-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :              FRANKLIN WILLIAM MILLER ET AL.                          c. CONSEIL DES SIX-NATIONS DE LA                          BANDE INDIENNE DES SIX-NATIONS                          DE LA RIVIÈRE GRAND

    

LIEU DE L"AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

DATE DE L"AUDIENCE :              Le 6 mars 2000

MOTIFS DE L"ORDONNANCE EXPOSÉS PAR LE JUGE HENEGHAN

EN DATE DU :                  12 avril 2000



ONT COMPARU :

Joanna Birenhaum                  POUR LES DEMANDEURS

Ben Jetten                      POUR LE DÉFENDEUR



AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Iler Campbell Klippenstein              POUR LES DEMANDEURS     

Toronto (Ontario)

Blake Cassels & Graydon LLP          POUR LE DÉFENDEUR

Toronto (Ontario)

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