Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20190530


Dossier : IMM-5796-18

Référence : 2019 CF 758

Ottawa (Ontario), le 30 mai 2019

En présence de monsieur le juge Roy

ENTRE :

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

demandeur

et

KHADRA GHERRAS

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  C’est le Ministre de la citoyenneté et de l’immigration qui fait une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Section d’appel de l’immigration [la SAI] , le tout en vertu de l’article 72 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 [la Loi].

[2]  La demande de contrôle judiciaire se repose essentiellement sur ce que le Ministre considère être une violation de l’équité procédurale. En effet, après ce qui me semble être davantage un imbroglio qu’une décision arrêtée de priver le Ministre de son droit d’être entendu, la Section d’appel de l’immigration a fait droit à la demande de Madame Gherras en invoquant des considérations d’ordre humanitaire. À mon avis, l’imbroglio est suffisant pour que l’affaire soit entendue de nouveau par une formation différente de la Section d’appel de l’immigration.

I.  Les faits

[3]  Il appert que Mme Gherras a déjà eu le statut de résidente permanente au Canada. Elle est une ressortissante algérienne avec ce qui semble être un statut quelconque de résidence en France.

[4]  Un agent des visas à l’ambassade canadienne à Paris a refusé à Mme Gherras un titre de voyage, le 5 août 2015. La raison pour ce refus était que Mme Gherras n’avait pas résidé au Canada pour le nombre minimum de jours nécessaires pour maintenir son statut de résidente permanente. En effet, un résident permanent doit être présent au Canada pour un minimum de deux ans (730 jours) durant la période de cinq ans précédant immédiatement la demande de titre de voyage. Il n’est pas contesté que Mme Gherras n’avait pas été présente pour une période de 730 jours dans les cinq années précédentes. Du moment où elle a obtenu sa demande de résidence au Canada en octobre 2009, elle serait restée au pays pour une période approximative de quatre mois avant de quitter pour retourner en France aux fins d’un suivi médical. Mme Gherras a des enfants au Canada et en France.

[5]  La défenderesse est maintenant âgée de quatre-vingt-trois ans et elle souffre de troubles cardiaques. Ainsi, on lui a implanté un « pacemaker » en 2009 et elle a été hospitalisée à Toulouse, en France, en novembre 2014 pour l’implantation d’une sonde ventriculaire droite. D’autres problèmes de santé ont aussi été répertoriés (vésicule biliaire et thyroïde). Mais, entre le 19 juin 2010 et le 18 juin 2015, la défenderesse n’avait cumulé aucun jour de résidence au Canada. On était loin du compte. C’est ainsi que l’agent des visas à Paris a sans difficulté refusé l’émission du titre de voyage. Par ailleurs, cet agent a examiné des considérations d’ordre humanitaire pour conclure que la perte du statut de résident permanent ne causerait aucune difficulté à la défenderesse. Malgré tout, celle-ci a décidé de faire appel auprès de la Division d’appel de l’immigration.

[6]  Il convient de relater les péripéties qui ont mené, éventuellement, à une audience dite péremptoire le 4 octobre 2018 parce que là se trouve l’atteinte à l’équité procédurale dont se plaint le demandeur.

[7]  C’est le 8 septembre 2015 que la défenderesse a produit son avis d’appel auprès de la section d’appel. Ce n’est que le 14 février 2018 que la greffière de la Section d’appel de l’immigration a convié les parties à une conférence de mise au rôle de l’audience, comme c’est prévu aux règles de la SAI. Ladite conférence fut alors fixée pour le 19 juin 2018.

[8]  Or, l’un des fils de la défenderesse faisait une demande de remise de l’audience le 7 juin 2018 parce que la défenderesse était hospitalisée en Algérie pour une période qui était alors considérée comme indéterminée. La représentante du Ministre ne s’objecte pas à la remise, notant toutefois qu’aucun certificat médical n’a été produit à l’appui d’une telle demande.

[9]  La demande de remise est rejetée le 11 juin 2018.

[10]  Malgré cela, la commissaire siégeant le 19 juin 2018 accueille une demande de remise faite séance tenante. Cette remise a été suivie le 27 juillet 2018 par la fixation de l’audience au 5 octobre 2018. La fixation de l’audience est fixée de façon péremptoire, ce qui signifie généralement qu’aucune remise subséquente ne sera tolérée. Jusqu’alors, il n’y avait aucune indication que des témoins autres que la défenderesse seraient entendus lors de l’audience.

[11]  Le 18 septembre 2018, la représentante du Ministre déposait des représentations écrites et indiquait qu’elle ne serait pas présente à l’audience du 5 octobre. Toutefois, elle se réservait le droit de se présenter en ces termes :

27.  Nous souhaitons informer le tribunal que notre recommandation écrite est basée sur la preuve documentaire au dossier. Le Ministre rappelle à l’appelante qu'elle a l’obligation de nous soumettre une copie de tout document qu’elle entend utiliser à l’audience. Si de nouveaux faits le justifient, le Ministre pourrait être présent en salle.

[12]  Deux jours avant l’audience du 5 octobre, Me Laurent Gryner transmettait à la SAI l’information selon laquelle il représentait maintenant la défenderesse. Par ailleurs, il voulait en même temps obtenir une remise, indiquant que si la remise lui était refusée, il ne pourrait intervenir à l’audience du 5 octobre. La représentante du Ministre s’objectait dans l’heure qui suivait à cette demande de remise. Ladite demande de remise était rejetée le 4 octobre 2018. L’affaire devait procéder dès le 5 octobre au matin.

[13]  Mais cela ne mettait pas fin aux péripéties du 4 octobre. À 15h15, la défenderesse annonçait pour la toute première fois que quatre témoins seraient entendus à l’audience du lendemain. Tous ces témoins étaient des membres de la famille immédiate de la défenderesse. De plus, à peine 30 minutes plus tard, on annonçait qu’un conseiller en immigration, M. Abdellatif Hamdouny, devenait le nouveau conseil de la défenderesse. La liste de témoins n’est jamais parvenue à la représentante du Ministre. Envoyée en milieu de l’après-midi la veille de l’audience, elle avait été acheminée au bureau de la représentante qui ne s’y trouvait pas. Elle n’en a pas davantage pris connaissance le matin du 5 octobre, si bien que malgré les développements de toute dernière minute, le Ministre n’était pas présent pour l’audience du 5 octobre.

[14]  Il convient de noter dès maintenant pour une meilleure compréhension des choses que l’article 37 des Règles de la section d’appel de l’immigration, DORS/2002-230, prévoit un délai de 20 jours pour aviser les parties et le tribunal administratif de la présentation de témoins. Il vaut la peine de reproduire le texte de cet article 37 en entier :

Transmission des renseignements concernant les témoins

Providing witness information

37 (1) Pour faire comparaître un témoin, la partie transmet par écrit à l’autre partie à la Section les renseignements suivants :

37 (1) If a party wants to call a witness, the party must provide in writing to the other party and the Division the following witness information:

a) les coordonnées du témoin;

(a) the witness’s contact information

b) la durée du témoignage;

(b) the time needed for the witness’s testimony;

c) le lien entre le témoin et la partie;

(c) the party’s relationship to the witness;

d) le fait qu’elle veut faire comparaître le témoin par vidéoconférence ou par téléphone, le cas échéant;

(d) whether the party wants the witness to testify by videoconference or telephone; and

e) dans le cas du témoin expert, un rapport, signé par lui, indiquant ses compétences et résumant son témoignage.

(e) in the case of an expert witness, a report signed by the expert witness giving their qualifications and summarizing their evidence.

Preuve de transmission

Proof that document was provided

2) En même temps que la partie transmet à la Section les renseignements concernant les témoins, elle lui transmet une déclaration écrite indiquant à quel moment et de quelle façon elle a transmis ces renseignements à l’autre partie.

(2) The witness information must be provided to the Division together with a written statement of how and when it was provided to the other party.

Délai

Time limit

(3) Les documents transmis selon la présente règle doivent être reçus par leurs destinataires au plus tard vingt jours avant l’audience.

(3) Documents provided under this rule must be received by their recipients no later than 20 days before the hearing.

Omission de transmettre les renseignements

Failure to provide witness information

(4) La partie qui ne transmet pas les renseignements concernant les témoins selon la présente règle ne peut faire comparaître son témoin à l’audience, sauf autorisation de la Section.

(4) If a party does not provide the witness information as required under this rule, the witness may not testify at the hearing unless the Division allows the witness to testify.

[15]  Le délai de 20 jours requis par les règles faisait en sorte que la liste des témoins et les renseignements qui doivent être transmis le soient au plus tard le 17 septembre 2018. Ainsi, la représentante du Ministre, lorsqu’elle avisait qu’elle ne se présenterait pas le 5 octobre 2018, pouvait croire qu’il n’y avait pas de témoin dans cette affaire puisque le délai imparti par les règles s’était déjà écoulé. À tout événement, la représentante n’était pas présente le 5 octobre 2018.

II.  La décision de la Section d’appel de l’immigration

[16]  C’est sans difficulté que la SAI conclut que les conditions de maintien de la résidence permanente n’ont pas été remplies. L’attention se porte ainsi sur les considérations d’ordre humanitaire.

[17]  La preuve faite à cet égard à l’audience du 5 octobre ne viendra pas de la défenderesse, mais plutôt du témoignage d’un fils résidant au Québec et d’un autre fils résidant en France et qui a témoigné par téléphone alors que sa mère était à ses côtés. C’est à  mon avis un élément important à mettre en exergue parce que la seule preuve devant la SAI venait de personnes dont le témoignage n’a été annoncé que moins de 18 heures avant l’audience et alors même que la représentante du Ministre n’était pas présente. Ceci constitue certainement des faits nouveaux qui auraient pu faire en sorte que le Ministre doive être représenté à l’audience. Mais tel ne fut pas le cas.

[18]  La SAI note dans sa décision que les fils de la défenderesse lui ont offert un soutien constant malgré leurs obligations personnelles au Canada pour se rendre auprès de leur mère au cours de la période sous étude. Ils auraient témoigné au sujet de la situation vraiment difficile et critique dans laquelle se trouvait leur mère au cours des années qui font partie de la période quinquennale.

[19]  Mais la difficulté ici procède du fait que la seule preuve offerte sur la situation de santé de la défenderesse provient du témoignage des deux fils. Or, la représentante du Ministre avait fait valoir dans ses représentations écrites qu’il n’y avait au dossier aucune preuve documentaire justifiant des problèmes de santé entre 2009 et 2014. C’est donc dire que c’est sur la seule foi des observations des fils de la défenderesse que la SAI aura conclu à des problèmes de santé suffisamment significatifs pour que la défenderesse ne se présente au Canada en aucune manière durant la période quinquennale. La SAI écrit aux paragraphes 20 et 21 de sa décision :

[20]  Pour toute 1a période quinquennale en question, je suis d’avis que les problèmes de santé de l’appelante étaient majeurs et que son état de santé était critique et je considère que ce sont des éléments suffisamment importants pour justifier toute l’étendue du non-respect de l’obligation de résidence. Pour moi, il aurait été déraisonnable de demander à l’appelante, dans ces circonstances, de quitter le pays où elle recevait des traitements, alors qu’elle était une personne assez âgée qui avait confiance en son équipe médicale traitante, pour recommencer à être suivie au Canada par des médecins qui ne la connaissaient pas.

[21]  Considérant son état critique de santé et les avis des médecins qui lui recommandaient de ne pas voyager, je suis d’avis que la preuve présentée est suffisante pour expliquer l’entièreté de l’absence de l’appelante du Canada pour toute la durée de la période quinquennale. II s’agit d’un élément qui milite en faveur de l’octroi d’une mesure spéciale auquel le tribunal accorde un poids important et déterminant dans l’analyse des considérations humanitaires.

[20]  À la seule lecture de la décision, il n’est pas clair en quoi la situation aura été critique durant toute la période. On nous parle d’une série d’opérations et de suivis médicaux et de périodes d’hospitalisation durant toute la période quinquennale. Les détails sont manquants. Les témoins auraient indiqué que la défenderesse n’était pas en mesure de voyager. Il semble que le « pacemaker » ait été éventuellement remplacé et que la défenderesse ait dû subir une intervention chirurgicale pour la vésicule biliaire et l’ablation de la thyroïde.

[21]  Il ne s’agit pas ici de tenter de contester les diagnostics médicaux. De fait, il ne semble pas y en avoir au dossier. C’est plutôt que la seule preuve sur laquelle semble s’être appuyée la SAI est celle de deux témoins idoines dont on n’a pu tester la qualité du témoignage puisque l’une des parties aux procédures n’était pas présente.

[22]  De fait, la SAI a contrecarré les observations de la représentante du Ministre qui disait dans ses représentations écrites que la défenderesse avait quitté le Canada pour s’établir en France où habitent ses enfants. Or, la SAI considère plutôt que le retour en France était pour des raisons de santé, se fondant essentiellement sur le témoignage d’un fils résidant au Canada et d’un autre résidant en France. De façon encore plus pointue, la SAI indique clairement que la preuve documentaire a été supplantée par le témoignage entendu le 5 octobre. On peut lire aux paragraphes 30 et 33 de la décision :

[30]  Maintenant, à propos de l’allégation 5 dans laquelle le conseil du ministre mentionne qu’elle n’a pas eu de problèmes de santé suite à l’implantation de son pacemaker en 2009; encore là, cette remarque est basée sur la preuve documentaire. Le tribunal a entendu une preuve tout autre aujourd’hui qui explique que c’est suite à un suivi en 2010 que les médecins ont découvert toute l’étendue des problèmes de santé que causait le pacemaker et qu’il y a eu des interventions chirurgicales et des hospitalisations par la suite.

[33]  Encore une fois, concernant le suivi médical à l’allégation 8, le conseil du ministre assume que la santé de l’appelante ne nécessitait pas autre chose qu’un suivi médical régulier; ce n’est pas ce que le tribunal a entendu aujourd’hui, donc je ne peux retenir cet argument.

III.  Norme de contrôle et analyse

[23]  La seule question qui se pose est de déterminer si la règle voulant que les parties aient le droit de participer au processus de décision a été respectée. Il s’agit là d’une des règles d’équité les plus fondamentales (voir Judicial Review of Administrative Action in Canada, par Donald Brown et John Evans, Thomson Reuters, feuilles-mobiles, chap. 10). Cette participation inclura le contre-interrogatoire des témoins dans les cas où les faits sont contestés ou les témoignages entrent en conflit avec d’autres preuves (Innisfil Township c Vespra Township, [1981] 2 RCS 145). Je ne vois aucune raison pour laquelle le droit à la participation à un processus de décision ne devrait pas s’appliquer au Ministre.

[24]  La règle dont il est question ici est le droit d’une partie d’être entendue : audi alteram partem. Cette règle d’équité procédurale requiert l’intervention de la Cour lorsqu’il y a violation. En ces matières, il n’est pas contesté que la norme de contrôle est celle de la décision correcte (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 1, [2009] 1 RCS 339, para 43 ; Établissement de Mission c Khela, 2014 CSC 24, [2014] 1 RCS 502, para 79).

[25]  Cela implique que la cour de révision n’a pas à faire preuve de déférence à l’endroit du tribunal administratif et doit rendre la décision appropriée dans les circonstances.

[26]  En l’espèce, la règle relative à la présentation de témoins est sans équivoque. L’avis de présentation de témoins doit être reçu par la partie adverse au plus tard 20 jours avant l’audience. Ici, ces témoins sont cruciaux parce qu’ils viennent contredire la preuve documentaire qui est alors disponible au dossier et sur laquelle se repose le Ministre. Cette preuve ne peut évidemment pas être contestée si la partie n’est pas présente en Cour. On a tenté d’imputer la faute à la représentante du Ministre qui n’était pas à son bureau lorsque la liste de témoins a été transmise. Cela est trop sévère. À l’inverse, on a cherché à mettre la faute sur la Section d’appel de l’immigration qui s’est contentée, le matin de l’audience, de se satisfaire de l’indication de la représentante de la Ministre quelques 17 jours avant qu’elle ne serait pas présente. Il ne semble pas qu’il y ait eu un effort particulier de la rejoindre outre que de se contenter de l’absence annoncée, d’autant plus que les circonstances avaient changé considérablement le 4 octobre. Mais, comme indiqué plus tôt, après une série de péripéties, l’affaire avait été fixée péremptoirement au 5 octobre 2018. Parmi ces péripéties avaient été les difficultés de rejoindre la défenderesse où qu’elle se trouve en France ou en Algérie. Or, tout le monde était présent ce 5 octobre, outre bien sûr la représentante du Ministre qui avait annoncé son absence. La communication avec la défenderesse avait finalement été établie. On peut penser que la commissaire voulait que cette affaire aille de l’avant. Malheureusement, il en est résulté une violation des règles d’équité procédurale parce que les conditions avaient considérablement changé, l’avis de présentation de témoins n’avait pas été donné en temps utile et l’absence annoncée était fonction que les circonstances connues le 18 septembre ne changent pas. Elles avaient considérablement changé.

[27]  La règle des 20 jours a ses raisons d’être. Elle évite les surprises et permet une préparation adéquate pour des audiences qui ont une grande importance pour les personnes impliquées. Cette règle a été appliquée par le passé par la Section d’appel de l’immigration. L’avocat de l’appelante a cité trois décisions où le délai de 20 jours n’avait pas été respecté, ce qui avait entraîné l’impossibilité de témoigner (Komaeihaghighatdel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CanLII 58185 ; Khazraeiesfahanimofrad c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2014 CanLII 93670 ; Price c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CanLII 92829). D’ailleurs, il ne s’agit pas là d’une règle qui soit d’une manière ou d’une autre exceptionnelle. Elle est courante (mais la durée de l’avis variera).

[28]  Il est certes vrai que la règle n’est pas absolue. Il est prévu l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire de soustraire une partie à l’obligation du délai préalable de 20 jours. En l’espèce, il n’y a aucune indication que j’ai pu trouver dans les transcriptions des différentes audiences que la SAI ait choisi d’appliquer son pouvoir discrétionnaire. J’ajoute que si tel avait été le cas, il eut fallu expliquer en quoi le pouvoir discrétionnaire devrait être appliqué dans les circonstances, alors que la liste de témoins n’avait été communiquée qu’en fin de journée la veille, et en choisissant de ne pas tenter de rejoindre la représentante du Ministre qui avait instamment indiqué pouvoir choisir de se présenter si les circonstances desquelles elle avait connaissance le 18 septembre 2018 devaient changer. On peut aussi croire que la discrétion n’est exercée qu’après avoir entendu les observations des parties. On ne peut voir de changement plus draconien que celui qui survient la veille d’une audience par une indication que des témoins seront entendus, pour par la suite conclure que ces témoins palliaient à la preuve alors disponible.

[29]  C’est ainsi que l’on ne peut que conclure à la violation des règles les plus fondamentales de l’équité procédurale, soit de pouvoir se présenter devant un tribunal administratif pour y être entendu. En l’espèce, cette violation aura privé le Ministre de sa faculté de contester la nouvelle preuve testimoniale qui semble avoir été en contradiction avec la preuve documentaire qui était au dossier.

[30]  Il en résulte que la demande de contrôle judiciaire doit être accordée. Les parties conviennent qu’il n’y a pas de question sérieuse d’importance générale devant être certifiée. J’en conviens aussi.

 


JUGEMENT au dossier IMM-5796-18

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie; l’affaire est retournée à une formation différente de la Section d’appel de l’immigration pour une nouvelle audition de l’appel.

  2. Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

 « Yvan Roy »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5796-18

INTITULÉ :

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION c KHADRA GHERRAS

LIEU DE L’AUDIENCE :

MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 16 MAI 2019

JUGEMENT ET motifs :

LE JUGE ROY

DATE DES MOTIFS :

LE 30 MAI 2019

COMPARUTIONS :

Daniel Latulippe

Pour le demandeur

 

Laurent Gryner

Pour lA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

Pour le demandeur

Avocat

Montréal (Québec)

Pour lA DÉFENDERESSE

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.