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Date : 20050125

Dossier : IMM-3047-04

Référence : 2005 CF 101

Ottawa, Ontario, le 25ième jour de janvier 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE SHORE

ENTRE :

                                                 MOSEKA MASUKI, CLAUDINE

                                                                                                                         Partie demanderesse

                                                                             et

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                             

                                                                                                                           Partie défenderesse

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

INTRODUCTION

[1]                L'imagination humaine, souvent traduite à travers des actes, ne possède pas de limites au-delà desquelles des normes acceptables sont outrepassées et même contrevenues; également, des justifications, appuyant ces actes, dépassent ce qu'une société pourrait être en mesure de tolérer.


NATURE DE LA PROCÉDURE JUDICIAIRE

[2]                La présente demande de contrôle judiciaire, introduite en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés[1] (Loi), porte sur une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (Commission), rendue le 5 mars 2004. Dans cette décision, la Commission a annulé la décision du 18 août 1994 qui reconnaissait à la demanderesse le statut de « réfugiée au sens de la Convention » selon l'article 96 de la Loi.

FAITS

[3]                Citoyenne de la République démocratique du Congo (RDC), la demanderesse, Mme Claudine Moseka Masuki, a été déclarée réfugiée le 18 août 1994 au terme d'un processus accéléré où elle n'a présenté que son Formulaire de renseignements personnels (FRP) et sa carte d'identité nationale. Selon le FRP de Mme Masuki, son mari aurait été directeur général chargé des télécommunications à la présidence de la RDC sous Mobutu. Il aurait été arrêté par des militaires puis, le 27 septembre 1992, « [à] force de résister face aux actes posés par les militaires, mon mari a été tué ainsi que son père devant nous » . Ayant perdu conscience à la vue de ces événements, Mme Masuki se serait réveillée en prison. Elle aurait réussi à s'échapper et à venir au Canada.


[4]                Dans le cadre de sa demande de résidence permanente, Mme Masuki a fourni, au printemps 1999, le certificat de naissance de ses sept enfants et un certificat de décès de son mari indiquant que ce dernier était décédé « à domicile » le 27 septembre 1992. Analysés par un expert, les certificats de naissance se sont avérés contrefaits. Le résultat de l'expertise sur le certificat de décès s'est avéré « peu concluant » . La demande de résidence permanente a donc été suspendue.


[5]                Le 22 décembre 1999, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) a effectué trois perquisitions : la première, dans deux valises adressées à Mme Masuki; la deuxième, au domicile de Mme Masuki; la troisième, dans la voiture de son fils. Les deux premières perquisitions étaient, sans contredit, légales car elles ont été faites suite à l'obtention d'un mandat de perquisition en bonne et due forme. La troisième perquisition découle du fait que le fils de Mme Masuki, Papy (ou Fiston) Zamwangana, se trouvait au domicile de sa mère lors de la saisie et avait dans ses poches des clés avec lesquelles les policiers ont réussi à ouvrir une voiture non loin de là. Au nombre des objets trouvés lors de la première perquisition figuraient des documents d'identité officiels du Zimbabwe et de la Côte-d'Ivoire, 3 attestations de mariage du Zaïre, 10 attestations de naissance du Zaïre, 30 certificats de naissance américains en blanc, des sceaux et des tampons permettant de fabriquer des documents d'identité officiels, ainsi que des cartes de crédit. Lors de la deuxième perquisition, la GRC a notamment trouvé un Paymaster série 9000 (instrument servant à émettre des chèques du gouvernement canadien) au nom du fils de Mme Masuki. Lors de la troisième perquisition, soit dans la voiture de son fils, la GRC a trouvé plus de 200 documents, dont un certificat de décès du mari de Mme Masuki indiquant que celui-ci était décédé d'un « arrêt cardio-vasculaire » le 27 septembre 1992, plusieurs documents d'identité contenant la photo de Mme Masuki mais sous 7 noms différents, le permis de travail délivré par Immigration Canada au nom de Mme Masuki, 13 extraits de naissance liés à ses enfants et de nombreux documents et instruments permettant de fabriquer des documents d'identité. Le 3 avril 2000, la GRC a remis au défendeur un rapport contenant la liste de tous les objets saisis. Ce rapport a été déposé en preuve.

[6]                Sur la foi de ces renseignements et en vertu de l'article 109(1) de la Loi, le défendeur a présenté à la Commission une demande d'annulation du statut de personne protégée de Mme Masuki. Le 5 mars 2004, la Commission a accueilli cette demande.

QUESTIONS EN LITIGE

[7]                1. La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de contrôle judiciaire en concluant que les éléments de preuve obtenus lors de la perquisition de l'automobile du fils de la demanderesse étaient admissibles ?

2. La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de contrôle judiciaire en concluant que la demanderesse avait erronément présenté des faits importants et pertinents ?


3. La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de contrôle judiciaire en concluant qu'il ne restait pas suffisamment d'éléments de preuve justifiant l'octroi de l'asile ?

ANALYSE

1. La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de contrôle judiciaire en concluant que les éléments de preuve obtenus lors de la perquisition de l'automobile du fils de la demanderesse étaient admissibles ?

[8]                Avant de procéder à une analyse approfondie de la décision d'annulation, il convient de déterminer quels éléments de preuve pouvaient être pris en compte par la Commission dans son analyse. La légalité des deux premières perquisitions, soit celle dans les deux valises adressées à Mme Masuki et celle à son domicile, n'est pas contestée, la GRC ayant préalablement obtenu un mandat de perquisition à ces fins. La seule question est de déterminer si la perquisition dans la voiture du fils de Mme Masuki était légale, permettant ainsi à la Commission de tenir compte des objets qui y ont été saisis.


[9]                Il est bien établi en droit constitutionnel que le paragraphe 24(2) de la Charte canadienne des droits et libertés[2](Charte) ne prévoit une réparation que pour les personnes dont les droits garantis par la Charte ont été violés (R. c. Wijesinha, [1995] 3 R.C.S. 422, [1995] A.C.S. no 49 (QL) au paragraphe 66). Dans l'arrêt R. c. Edwards, [1996] 1 R.C.S. 128, [1996] A.C.S. no 11 (QL) au paragraphe 45, la Cour suprême du Canada a énuméré une liste de sept principes directeurs qui circonscrivent la nature des droits protégés par l'article 8 de la Charte :

1. Une demande de réparation fondée sur le par. 24(2) ne peut être présentée que par la personne dont les droits garantis par la Charte ont été violés. Voir R. c. Rahey, [1987] 1 R.C.S. 588, à la p. 619.

2. Comme tous les droits garantis par la Charte, l'art. 8 est un droit personnel. Il protège les personnes et non les lieux. Voir Hunter, précité.

3. Le droit d'attaquer la légalité d'une fouille ou perquisition dépend de la capacité de l'accusé d'établir qu'il y eu violation de son droit personnel à la vie privée. Voir Pugliese, précité.

4. En règle générale, deux questions distinctes doivent être posées relativement à l'art. 8. Premièrement, l'accusé pouvait-il raisonnablement s'attendre au respect de sa vie privée? Deuxièmement, si tel est le cas, la fouille ou la perquisition a-t-elle été effectuée de façon raisonnable par la police? Voir Rawlings, précité.

5. L'existence d'une attente raisonnable en matière de vie privée doit être déterminée eu égard à l'ensemble des circonstances. Voir Colarusso, précité, à la p. 54, et Wong, précité, à la p. 62.

6. Les facteurs qui peuvent être pris en considération dans l'appréciation de l'ensemble des circonstances incluent notamment:

(i) la présence au moment de la perquisition;

(ii) la possession ou le contrôle du bien ou du lieu faisant l'objet de la fouille ou de la perquisition;

(iii) la propriété du bien ou du lieu;

(iv) l'usage historique du bien ou de l'article;

(v) l'habilité à régir l'accès au lieu, y compris le droit d'y recevoir ou d'en exclure autrui;

(vi) l'existence d'une attente subjective en matière de vie privée;

(vii) le caractère raisonnable de l'attente, sur le plan objectif.

Voir United States c. Gomez, 16 F.3d 254 (8th Cir. 1994), à la p. 256.


7. Si l'accusé établit l'existence d'une attente raisonnable en matière de vie privée, il faut alors, dans un deuxième temps, déterminer si la perquisition ou la fouille a été effectuée de façon raisonnable.                          (La Cour souligne)

[10]            En l'espèce, Mme Masuki a expressément nié avoir une quelconque attente raisonnable en matière de vie privée : elle n'est pas propriétaire de l'automobile dans laquelle les objets ont été saisis et elle se dissocie tant de l'automobile que de son contenu. Le seul facteur qui favorise la reconnaissance de l'existence d'une attente raisonnable en matière de vie privée est la présence de Mme Masuki lors de la saisie, mais ce seul facteur a bien peu de poids en l'espèce. Mme Masuki ne pouvait donc alléguer à son avantage la violation des droits constitutionnels de son fils et partant, la Commission n'a pas commis d'erreur en admettant les objets trouvés dans la voiture de son fils.

2. La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de contrôle judiciaire en concluant que la demanderesse avait erronément présenté des faits importants et pertinents ?

[11]            L'article 109 de la Loi prévoit les circonstances dans lesquelles une décision ayant accueilli une demande de réfugié peut être annulée :



(1) La Section de la protection des réfugiés peut, sur demande du ministre, annuler la décision ayant accueilli la demande d'asile résultant, directement ou indirectement, de présentations erronées sur un fait important quant à un objet pertinent, ou de réticence sur ce fait.

(2) Elle peut rejeter la demande si elle estime qu'il reste suffisamment d'éléments de preuve, parmi ceux pris en compte lors de la décision initiale, pour justifier l'asile.

(3) La décision portant annulation est assimilée au rejet de la demande d'asile, la décision initiale étant dès lors nulle.

(1) The Refugee Protection Division may, on application by the Minister, vacate a decision to allow a claim for refugee protection, if it finds that the decision was obtained as a result of directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter.

(2) The Refugee Protection Division may reject the application if it is satisfied that other sufficient evidence was considered at the time of the first determination to justify refugee protection.

(3) If the application is allowed, the claim of the person is deemed to be rejected and the decision that led to the conferral of refugee protection is nullified.


2 certificats de décès

[12]            La Commission était en présence de deux certificats de décès du mari de Mme Masuki. Le premier certificat de décès a été fourni par cette dernière lors de sa demande de résidence permanente au printemps 1999. Il a été délivré par le docteur M'Bomba Bosana de l'hôpital de Kitambo à Kinshasa-Ouest. Ce document atteste que Bongo Mokili serait décédé le 27 septembre 1992 « à domicile » . Le deuxième certificat de décès a été trouvé dans la voiture du fils de Mme Masuki lors des perquisitions de décembre 1999. Il s'agit d'un document de la République du Zaïre délivré par un médecin différent, qui certifie que Bongo Mokili serait décédé à Kinshasa le 27 septembre 1992, la cause du décès étant un « arrêt cardio-vasculaire » .

[13]            Selon Mme Masuki, la Commission ne pouvait conclure que ces deux certificats de décès sont incompatibles puisque la cause médicale du décès ( « arrêt cardio-vasculaire » ) se distingue des circonstances du décès ( « à domicile » ).


[14]            Cet argument suppose que la Commission a tiré une conclusion négative simplement à partir de l'existence de deux certificats qui semblent contradictoires quant aux causes ou aux circonstances du décès. Toutefois, une lecture attentive des motifs révèle que la conclusion quant à l'absence de force probante du premier certificat repose sur au moins deux autres différences importantes. D'une part, les deux certificats n'ont pas été délivrés par le même médecin. D'autre part, sur un certificat, le mari est décédé à domicile alors que selon l'autre, il semble être décédé à l'hôpital. C'est ce qui ressort des renseignements sur les certificats et des questions que posent la Commission à la page 4 de ses motifs :

Est-il mort à domicile ou à l'hôpital? Les causes du décès sont-elles dues à la torture ou à un arrêt cardiaque? Quel est le médecin qui a constaté le décès?

[15]            La Cour note en outre que si, selon le FRP de Mme Masuki, « [à] force de résister face aux actes posés par les militaires, mon mari a été tué » , il n'est donc pas décédé d'un arrêt cardio-vasculaire comme l'indique le deuxième certificat de décès.

[16]            La Cour estime qu'il était tout à fait raisonnable que la Commission écarte, comme non crédibles, les renseignements entourant le décès du mari de Mme Masuki. Les circonstances entourant la mort du mari de Mme Masuki étant le seul élément central du FRP et du témoignage de cette dernière, ce fait important présenté de façon erroné permet à lui seul d'annuler la décision ayant accueilli la demande d'asile de Mme Masuki.


[17]            Finalement, la Cour aimerait répondre à deux derniers arguments présentés par Mme Masuki au sujet des deux certificats de décès. Cette dernière allègue que la Commission a commis une erreur en écrivant dans ses motifs que le premier certificat de décès a été obtenu dans le cadre de la demande de protection (plutôt que dans le cadre de la demande de résidence permanente). Ceci est effectivement le cas mais n'a pas d'incidence sur l'analyse et les conclusions tirées quant aux certificats. Il ne s'agit donc pas d'une erreur requérant l'intervention de la Cour. Mme Masuki allègue également que la Commission a ignoré ses explications, à savoir qu'elle a demandé le premier certificat pour sa demande de résidence permanente et a demandé un deuxième certificat parce que le premier ne faisait pas mention de l'hôpital. Encore une fois, la Commission a pris en considération ces explications, elle a fait son analyse et en ait arrivé à des conclusions raisonnables.

Multiples identités

[18]            La preuve au dossier, c'est-à-dire les nombreux documents saisis lors des perquisitions de décembre 1999, révèle que Mme Masuki était connue sous au moins 7 identités différentes. De plus, il est incontesté que les 7 certificats de naissance des enfants de Mme Masuki, produits par elle en 1999 à l'appui de sa demande de résidence permanente, étaient faux. La Commission a soulevé ces problèmes d'identité et a notamment déclaré que « madame Masuki était connue sous plusieurs identités (pièce M-11) et qu'elle s'était dotée de moyens pour fournir et produire des documents à volonté selon les besoins de la cause » . La constatation que Mme Masuki agissait sous le couvert de multiples identités était, en soi, un autre fait important qui justifiait l'annulation de la décision d'octroyer le statut de réfugié à Mme Masuki.


[19]            Toutefois, la Commission aurait dû indiquer de façon explicite si elle rejetait le témoignage des deux personnes que Mme Masuki a fait entendre lors de son audience, ainsi que les raisons de ce rejet. Une première dame vivant en Alberta a affirmé au téléphone que Mme Masuki est sa soeur. Une deuxième dame, Bienvenue, présente à l'audience, a affirmé que Mme Masuki est sa mère. Un ou des témoins corroborant l'identité d'un demandeur sont une preuve qui ne peut être passée sous silence. En bout de ligne, la Commission n'est pas tenue d'accepter ces témoignages, si, comme en l'espèce, d'autres éléments au dossier sont plus crédibles, mais elle doit certainement indiquer, ne serait-ce que très succinctement, pourquoi elle rejette ces témoignages. La Cour reprend ici les propos du juge Pinard dans Tshimbombo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)[3] :

Or, à cet égard, le tribunal s'est contenté de simplement faire mention, sans en disposer, du témoignage d'un tiers qui, affirmant provenir de la République démocratique du Congo (RDC), a juré que le demandeur était réellement son frère et qu'ils avaient tous deux le même père et la même mère. À mon sens, l'omission du tribunal est sérieuse, puisqu'elle est reliée à une preuve émanant d'une tierce personne concernant l'identité même du demandeur, dont la crédibilité est en cause, et justifie donc à elle seule l'intervention de cette Cour.

La Commission a donc commis une erreur en ne disposant pas des deux témoignages. Toutefois, cette erreur n'affecte pas l'issue finale du litige, car les conclusions quant aux 2 certificats de décès du mari demeurent valides et suffisants pour entraîner l'annulation de la protection. L'erreur de la Commission relativement aux deux témoignages n'est donc pas déterminante et ne requiert pas l'intervention de la Cour.


[20]            Pour ce qui est de la carte d'identité nationale présentée en preuve par Mme Masuki, la règle générale voulant que la Commission est réputée prendre en considération tous les éléments qui lui sont présentés s'applique et la Commission n'était pas tenue de commenter sur sa valeur probante. D'autant plus qu'en l'espèce, un très grand nombre de documents venaient jeter un doute fatal sur l'identité de Mme Masuki.

FRP du fils de Mme Masuka

[21]            Pour en arriver à la conclusion que des présentations erronées ont été faites par Mme Masuki sur un fait important dans sa demande, la Commission s'est également appuyée sur deux FRP présentés successivement par le fils de Mme Masuki, Fiston Elikya Zamwangana, dans le cadre de sa propre demande de réfugié. Ces deux FRP comportaient des contradictions flagrantes quant au nombre d'enfants que Mme Masuki avait et quant à l'identité de son mari. Bien que ces deux FRP aient été très pertinents et très révélateurs, le défendeur ne les a pas déposés en preuve dans le cadre de l'audience sur l'annulation de Mme Masuki. La Commission n'a donc que cité des extraits de la décision négative rendue à l'égard du fils de Mme Masuki, extraits qui relataient et commentaient le contenu de ces deux FRP.


[22]            La Cour convient avec Mme Masuki que la Commission ne pouvait se fonder sur des éléments de preuve - les deux FRP du fils de Mme Masuki présentés dans le cadre d'une autre demande - qui n'avaient pas été déposés en preuve dans le cadre de l'audience concernant Mme Masuki. Une simple référence à une décision qui faisait elle-même référence à des éléments de preuve n'était pas suffisante. Il s'agit là d'une erreur de la part de la Commission, qui constitue une violation des principes de justice naturelle. En effet, une partie doit connaître les éléments de preuve en sa défaveur pour avoir la possibilité d'y répondre. Toutefois, comme cette violation de la justice naturelle n'aurait pu entraîner une issue différente dans la présente affaire (les conclusions quant aux deux certificats de décès du mari demeurant valides et suffisants pour entraîner l'annulation de la protection), elle ne constitue pas une erreur requérant l'intervention de cette Cour [Yassine c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration),[4] Kabedi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)[5]].

[23]            Mme Masuki allègue également que le fait que la Commission a fondé sa décision sur deux éléments de preuve (les 2 FRP du fils de Mme Masuki) qui ne figuraient pas au dossier soulève une crainte raisonnable de partialité puisqu'au surplus, la Commission avait déjà refusé la demande d'asile du fils de Mme Masuki. La Cour ne saurait souscrire à un tel argument puisque ce n'est qu'un manquement technique, procédural, c'est-à-dire le fait d'avoir cité une décision contenant les renseignements pertinents sans que les documents-source contenant ces renseignements n'aient été déposés en preuve, qui est à l'origine de cette erreur. Une telle erreur ne révèle aucunement une attitude biaisée ou malveillante de la part de la Commission. Pour ce qui est du fait que la Commission a entendu la cause de Mme Masuki après avoir refusé l'asile au fils de cette dernière, cela ne constitue pas même une apparence de partialité à moins, évidemment, que des faits plus précis ne soient allégués à cet égard, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.   


3. La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de contrôle judiciaire en concluant qu'il ne restait pas suffisamment d'éléments de preuve justifiant l'octroi de l'asile ?

[24]            L'élément décrit dans le FRP de Mme Masuki comme ayant entraîné sa détention et sa fuite vers le Canada à la recherche d'un asile est la situation du 27 septembre 1992 où son mari a été tué par les militaires (ou est mort d'un arrêt cardiaque devant les militaires et Mme Masuki, selon le deuxième certificat de décès). Ayant conclu que les renseignements entourant le décès du mari de Mme Masuki n'étaient pas crédibles, il ne reste plus suffisamment d'éléments de preuve justifiant l'octroi de l'asile à Mme Masuki. Par conséquent, c'est à bon droit que la Commission a prononcé l'annulation de la décision ayant accueilli la demande de protection de Mme Masuki.

CONCLUSION

[25]            Sous réserve des précisions apportées en réponse à la deuxième question en litige, la Cour répond par la négative aux trois questions et je rejetterai donc la présente demande de contrôle judiciaire.


                                                                ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n'est certifiée.           

_ Michel M.J. Shore _

                                                                                                                                                     Juge                        


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     IMM-3047-04

INTITULÉ :                                                    MOSEKA MASUKI, CLAUDINE

LIEU DE L'AUDIENCE :                              MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE 17 JANVIER 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE    

ET ORDONNANCE :                                    MONSIEUR LE JUGE JUGE SHORE

DATE DE L'ORDONNANCE         

ET ORDONNANCE :                                    LE 25 JANVIER 2005

COMPARUTIONS :

Me Johanne Doyon                                           POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Me Ian Demers                                                 POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

DOYON, MORIN                                           POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Montréal (Québec)

JOHN H. SIMS C.R.                                        POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada



[1] L.C. 2001, ch. 27.

[2]Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, ch. 11.

[3][1999] A.C.F. no 1918 (C.F. 1ère inst.) (QL) au paragraphe 2.

[4][1994] A.C.F. no 949 (C.A.F.) (QL).

[5][2004] A.C.F. no 545 (QL) au paragraphe 10.


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