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Date : 19980618


Dossier : IMM-3186-97


EN PRÉSENCE DE :      MADAME LE JUGE TREMBLAY-LAMER

OTTAWA (ONTARIO), LE 18 JUIN 1998.

ENTRE :


     GURDEEP SINGH,

     demandeur,


     et


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     défendeur.



     ORDONNANCE


     La demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision de la Commission est annulée et l'affaire renvoyée devant un comité différemment constitué pour qu'il procède à une nouvelle audition.



     " Danièle Tremblay-Lamer "

                                     JUGE




Traduction certifiée conforme


Martine Brunet, LL.B.





Date : 19980618


Dossier : IMM-3186-97



ENTRE :

     GURDEEP SINGH,


demandeur,

     et


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


défendeur.



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE



LE JUGE TREMBLAY-LAMER :


[1]      Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Section d'appel de l'immigration de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Section d'appel), par laquelle l'appel du demandeur en ce qui concerne le parrainage de son fils adoptif, Ranjit Singh, a été rejeté.

[2]      Ranjit est, en fait, le neveu de la femme du demandeur. Il est l'enfant naturel de sa soeur et de son beau-frère en Inde. Il a été adopté par le demandeur et sa femme en 1990 et, peu de temps après, le demandeur l'a parrainé pour qu'il obtienne le droit d'établissement au Canada.

[3]      Cependant, la demande a été refusée par un agent d'immigration à l'étranger. La décision a été portée en appel devant la Section d'appel, conformément au paragraphe 77(3) de la Loi sur l'immigration 1 (la Loi), qui à son tour a rejeté l'appel.

[4]      La définition du mot " adopté " au paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration de 19782 (le Règlement) prévoit une analyse en deux volets dans laquelle une évaluation doit être faite en ce qui concerne premièrement l'observation des lois d'adoption étrangères, et deuxièmement la création d'un lien véritable entre père et mère et enfant. Le paragraphe 2(1) prévoyait, avant le 1er février 1993 :


" adopté " signifie adopté conformément aux lois de toute province du Canada ou de tout pays autre que le Canada ou de toute subdivision politique de ces pays lorsque l"adoption crée un lien entre père et mère et enfant.

"adopted" means adopted in accordance with the laws of any province of Canada or of any country other than Canada or any political subdivision thereof where the adoption created a relationship of parent and child.

[5]      La Section d'appel était d'avis que l'adoption de Ranjit ne remplissait aucun des deux volets.

[6]      La loi de l'Inde régissant l'adoption est le Hindu Adoptions and Maintenance Act (le HAMA). Elle prévoit, inter alia, qu'un enfant doit être, en fait, donné et pris en adoption par les parents ou le tuteur pendant une cérémonie, dans l'intention de transférer l'enfant de sa famille naturelle à sa famille adoptive.

[7]      La Section d'appel a statué que bien qu'une cérémonie d'adoption ait eu lieu, il n'y avait aucune intention de transférer Ranjit de sa famille naturelle à sa famille adoptive. De plus, elle n'était pas convaincue qu'un lien parental authentique existait entre Ranjit et ses parents adoptifs.

[8]      Le demandeur et sa femme ont témoigné qu'ils étaient désireux d'avoir un fils et que les parents biologiques de Ranjit ont volontiers consenti à l'adoption parce qu'ils savaient que leur fils comblerait les désirs d'un jeune couple souhaitant ardemment avoir un fils. La Section d'appel a jugé que cette explication était peu convaincante compte tenu du fait que la femme du demandeur a appris qu'elle était enceinte de son troisième enfant peu après le début des procédures d'adoption.

[9]      La Section d'appel a également été influencée par un certain nombre de faits [TRADUCTION] " singuliers ". Par exemple, le demandeur et sa femme n'ont pas assisté à la cérémonie d'adoption malgré leur grand désir d'adopter un fils.

[10]      La Section d'appel, qui a également relevé que la preuve de soutien financier était faible, n'était pas convaincue que le demandeur avait entretenu des rapports réguliers avec Ranjit. Bien que la Section d'appel ait reconnu que le demandeur et sa femme ont fait un séjour en Inde en 1992, elle n'était pas convaincue que leur seul but était de visiter Ranjit.

[11]      En ce qui concerne les autres éléments de preuve documentaire du demandeur, démontrant le lien entre Ranjit et ses parents adoptifs (c'est-à-dire des copies du passeport de Ranjit, des affidavits de personnes prétendument au courant de l'adoption, un avis dans le journal et un certificat scolaire), la Section d'appel a remarqué que chacun de ces documents a été soit délivré, fait ou publié après que l'agent d'immigration à l'étranger a refusé la demande et, par conséquent, peu de poids pouvait leur être accordé.

[12]      Il est bien établi que pour conclure à un manque de crédibilité il faut clairement en donner des motifs valables et se fonder sur de tels motifs.

[13]      En l'espèce, la Commission a agi de façon arbitraire en qualifiant la preuve de [TRADUCTION] " faible " ou de [TRADUCTION] " singulière " sans expliquer pourquoi elle n'était pas crédible.

[14]      Je ne peux trouver dans l'ensemble de la preuve un fondement approprié permettant d'écarter le témoignage non contredit du demandeur. La preuve démontre que le demandeur et sa femme voulaient adopter Ranjit parce qu'ils l'aimaient (la femme du demandeur a pris soin de lui quand il était enfant) et parce qu'ils voulaient un garçon. Ils ont obtenu le consentement des parents à l'adoption, leur ont retiré la garde de Ranjit, ont nommé un tuteur après l'adoption, ont pris des arrangements financiers pour les dépenses de Ranjit, sont allés le visiter une fois en Inde, et sont restés en contact avec lui par courrier et par téléphone.

[15]      Plusieurs conclusions importantes étaient fondées sur des spéculations, un examen microscopique de la preuve et un manque de compréhension des différences culturelles.

[16]      Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision de la Commission est annulée et l'affaire renvoyée à un comité différemment constitué pour qu'il procède à une nouvelle audition.

[17]      Aucun des avocats n'a recommandé la certification d'une question dans cette affaire. Par conséquent, aucune question ne sera certifiée.





     " Danièle Tremblay-Lamer "

                                     JUGE


OTTAWA (ONTARIO)

Le 18 juin 1998.





Traduction certifiée conforme


Martine Brunet, LL.B.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



NO DU GREFFE :                  IMM-3186-97


INTITULÉ DE LA CAUSE :          Gurdeep Singh c. M.C.I.


LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)


DATE DE L'AUDIENCE :          le 12 juin 1998


MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR :      Madame le juge Tremblay-Lamer


EN DATE DU :                  18 juin 1998





ONT COMPARU :


M. Lawrence L. Band                      pour le demandeur


M. John Loncar                      pour le défendeur



AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :


Bush, White and Wong                  pour le demandeur

Toronto (Ontario)


M. George Thomson                      pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada


__________________

     1      L.R.C. (1985), ch. I-2.

     2      DORS/78-122.

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