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                                                                                                                                 Date : 19990420

                                                                                                                    Dossier : IMM-4852-97

OTTAWA (Ontario), le 20 avril 1999

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE ROULEAU

ENTRE :

                                                              YONG-SOO AHN,

                                                                                                                                         demandeur,

ET :

                    LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                                                                                                                                          défendeur.

                                                                ORDONNANCE

[1]         La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                                                           « P. ROULEAU »           

                                                                                                                        JUGE

Traduction certifiée conforme

Marie Descombes, LL.L.


                                                                                                                                 Date : 19990420

                                                                                                                    Dossier : IMM-4852-97

ENTRE :

                                                              YONG-SOO AHN,

                                                                                                                                         demandeur,

ET :

                    LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                                                                                                                                          défendeur.

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE ROULEAU

[1]         La présente demande de contrôle judiciaire vise l'annulation de la décision prise par un agent des visas le 19 septembre 1997, de même que le prononcé d'un bref de mandamus. L'agent des visas a rejeté la demande de résidence permanente au Canada présentée par le demandeur en ordonnant au défendeur de traiter la demande en conformité avec la Loi sur l'immigration et ses règlements.

[2]         En mars 1997, le demandeur, un citoyen coréen, a présenté une demande de résidence permanente au Canada en tant que parent indépendant aidé. Dans sa demande, il déclarait qu'il avait l'intention de travailler comme agent préposé à l'aide financière aux étudiants.

[3]         L'expérience de travail du demandeur au sein de la Korean Bank n'est pas contestée. Il a travaillé pour cette institution en tant qu'agent préposé à l'aide financière en Corée de 1983 à 1994 et à New York de 1994 à 1997.

[4]         L'agent des visas a rejeté la demande à l'étape de la sélection administrative du processus d'appréciation; plus précisément, il n'a attribué aucun point d'appréciation pour le facteur expérience. L'agent des visas a conclu que le demandeur ne possédait pas l'expérience voulue comme agent préposé à l'aide financière aux étudiants dans un collègue ou une université, ainsi que l'exigent la Classification canadienne descriptive des professions (CCDP) et la Classification nationale des professions (CNP). Le demandeur a travaillé dans une banque, mais pas dans le secteur prévu par la classification. L'agent des visas a donc conclu que le demandeur relevait de la catégorie des personnes non admissibles prévue au paragraphe 11(1) du Règlement et à l'alinéa 19(2)d) de la Loi, et il a attribué 65 points d'appréciation.

[5]         Le demandeur soulève deux questions. Premièrement, il allègue que l'agent des visas a commis une erreur en concluant qu'il n'avait pas l'expérience voulue pour occuper l'emploi d'agent préposé à l'aide financière aux étudiants. Deuxièmement, il soutient que l'agent des visas a manqué à son devoir d'équité en ne le convoquant pas à une entrevue avant de prendre une décision définitive au sujet de ses titres et qualités.

[6]         Le défendeur soutient que l'agent des visas n'a pas commis d'erreur en interprétant la loi ou en n'attribuant aucun point d'appréciation pour l'expérience dans la profession envisagée d'agent préposé à l'aide financière aux étudiants. Il affirme que l'agent des visas a conclu à bon droit que le demandeur n'était pas apte à travailler comme agent préposé à l'aide financière aux étudiants puisque la CCDP et la CNP exigent une expérience dans un collège ou une université.

[7]         La présente demande soulève les questions litigieuses suivantes : 1) l'agent des visas a-t-il commis une erreur susceptible de révision en interprétant la classification de la CCDP et de la CNP comme il l'a fait, en concluant que le demandeur n'avait pas d'expérience comme agent préposé à l'aide financière aux étudiants et en n'attribuant aucun point d'appréciation pour le facteur expérience, et 2) la décision de l'agent des visas constitue-t-elle un manquement aux règles de justice naturelle et d'équité procédurale étant donné son refus de tenir une entrevue?

[8]         La description de l'emploi est la suivante :

1174-126 AGENT PRÉPOSÉ À L'AIDE FINANCIÈRE AUX ÉTUDIANTS

Coordonne des programmes d'octroi de bourses, de subventions et de prêts aux étudiants, ainsi que les services de placement des étudiants, dans un collège ou une université:

Interroge les étudiants et les renseigne sur les divers types d'assistance financière et sur les montants qu'ils peuvent demander. Explique les modalités des prêts, des subventions et des bourses, étudie les demandes et notifie les bénéficiaires. Aide les étudiants admissibles à présenter leurs demandes au gouvernement provincial, au gouvernement fédéral ou à d'autres organismes, et rédige des lettres de recommandation. Coordonne la sélection des candidats et les remises de fonds, en collaboration avec les services de sélection et la trésorerie.

Peut surveiller le travail du personnel de soutien préposé aux écritures et à la comptabilité. Peut collaborer avec un comité du corps enseignant pour choisir les candidats et pour décider du genre d'aide et du montant qui sera consenti. Peut conseiller les étudiants sur les offres d'emploi transmises par des personnes de sa connaissance ou communiquées par des entreprises commerciales ou industrielles, dans le cadre de campagnes de recrutement, et par des agences de placement fédérales ou privées.

[9]         Pour modifier l'évaluation d'une demande de résidence permanente faite par un agent des visas, la Cour doit être convaincue que la décision est mal fondée en droit, ou que le décideur n'a tenu aucun compte d'éléments de preuve pertinents ou a fondé sa décision sur des considérations dénuées de pertinence.

[10]       Ainsi que le précise la CCDP, un agent préposé à l'aide financière aux étudiants fournit des services aux étudiants d'un collège ou d'une université, mène des entrevues et renseigne les étudiants sur les divers types d'assistance financière et sur les montants qu'ils peuvent demander, explique les modalités des prêts, des subventions et des bourses, et étudie les demandes. De plus, l'agent préposé à l'aide financière aux étudiants répond aux besoins du collège ou de l'université en coordonnant la sélection des candidats et les remises de fonds, en collaboration avec les services de sélection et la trésorerie.

[11]       Malgré l'argument du demandeur selon lequel il a exercé des fonctions similaires dans une banque et devrait obtenir 8 points d'appréciation pour ses 14 années d'expérience, il ressort de sa propre preuve que son expérience bancaire se rapportait principalement au traitement de prêts consentis à des entreprises commerciales et industrielles, et à la recherche de nouvelles entreprises clientes.

[12]       À mon avis, la prétention du demandeur ne tient pas compte du fait qu'un agent préposé à l'aide financière aux étudiants doit, conformément à la description fournie dans la CCDP, non seulement aider et conseiller les étudiants en ce qui a trait à leurs besoins financiers, mais aussi collaborer avec des comités du corps enseignant et d'autres services en vue de la sélection de candidats et de la remise de fonds. De plus, comme la description précise clairement que les fonctions de l'agent préposé à l'aide financière aux étudiants sont exercées dans un collège ou une université, et comme les fonctions énumérées se rapportent précisément à des étudiants, à des comités du corps enseignant et à des facultés dans le contexte d'une université ou d'un collège, il serait difficile d'élargir la portée de cette description pour englober l'expérience et les domaines de compétence du demandeur.

[13]       Dans la présente espèce, le demandeur n'a pas rencontré l'agent des visas pour lui expliquer son expérience parce que l'article 11.1 du Règlement sur l'immigration de 1978 dispose qu'une entrevue n'est pas obligatoire quand aucun point d'appréciation n'est attribué pour l'expérience.

[14]       Dans l'affaire Bandoo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F. 1re inst.) (IMM-1969-96, 12 mai 1997), la Section de première instance de la Cour fédérale du Canada a examiné la question de savoir si l'agent des visas avait commis une erreur en ne tenant aucun compte de l'expérience du demandeur à l'étape de la sélection administrative, d'où l'absence d'entrevue et le rejet de la demande de résidence permanente. Le juge Nadon a rejeté la demande et résumé la règle de droit en ces termes :

Encore plus pertinente est la décision rendue par le juge Rothstein dans l'affaire Mohammad c. M.C.I. (1995), 90 F.T.R. 310. Dans l'affaire Mohammad, le requérant cherchait à être admis au Canada en tant que « parent aidé » . Le juge Rothstein a déclaré, aux pp. 1 et 2 :

Le requérant a obtenu 54 points. Conformément au sous-alinéa 11.1a)(ii) du Règlement, l'agent des visas n'était pas obligé de tenir une entrevue avec le requérant en l'espèce après avoir établi qu'il n'avait pas obtenu au moins 55 points d'appréciation. Il s'ensuit que l'agent des visas n'a pas accordé d'entrevue au requérant et a rejeté sa demande.

L'avocat du requérant fait valoir au cours du présent contrôle judiciaire que l'agent des visas a commis une erreur, en fondant sa décision sur une conclusion de fait erronée, sans tenir compte des documents dont il disposait, ou en ne respectant pas les règles de justice naturelle. Il prétend que l'agent des visas, pour ce qui est de l'aptitude du requérant à parler le français a, sans tenir compte des documents dont il disposait, refusé à tort de lui attribuer le moindre point. Bien que le requérant n'ait pas indiqué dans sa demande son niveau d'aptitude à parler le français (les autres possibilités étant couramment, bien, difficilement ou pas du tout) il a effectivement déclaré ce qui suit : « A passé le cours d'enseignement primaire du français de l'Alliance française à Karachi en 1973 et 1974. » L'avocat du requérant affirme que cette mention indiquait que le requérant avait une certaine aptitude à parler le français, et que si l'agent des visas avait tenu compte de cet élément de preuve, il aurait attribué un ou plusieurs points au requérant, qui serait alors passé à l'étape suivante, celle de l'entrevue. Subsidiairement, l'avocat du requérant fait valoir que l'agent des visas aurait dû s'entretenir avec le requérant en vue d'obtenir les précisions sur la mention en question.

                Dans l'examen de ces arguments, le juge Rothstein, déclare à la p. 3 :

L'agent des visas n'était pas tenu non plus d'appeler le requérant pour une entrevue aux fins de clarifier la mention relative à ses aptitudes en français. L'avocat du requérant n'a pu mentionner l'une quelconque des dispositions de la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2 ou de ses règlements d'application qui impose à l'agent des visas une obligation semblable. Bien que l'avocat en question ait invoqué les principes de justice naturelle, je ne vois pas comment l'agent des visas aurait violé l'un de ces principes. Il a de fait avancé que le requérant qui remplit sa demande de résidence permanente de façon ambiguë, doit être convoqué pour y apporter des éclaircissements. S'il en était ainsi, les requérants qui ont mal rempli leur demande auraient l'avantage d'une entrevue alors que ceux qui l'ont bien remplie en seraient privés. Le moins qu'on puisse dire c'est qu'une situation semblable serait anormale. L'agent des visas a respecté les principes de justice naturelle.

[15]       Compte tenu des dispositions législatives et de la jurisprudence, il est évident que l'agent des visas n'était pas obligé de tenir une entrevue pour apprécier l'expérience du demandeur.

[16]       Puisque j'ai décidé que le demandeur n'a pas démontré que l'agent des visas a commis une erreur en interprétant les classifications de la CCDP ou de la CNP ou en appréciant la preuve comme il l'a fait, je suis arrivé à la conclusion que l'agent des visas n'a pas commis d'erreur en ne tenant pas d'entrevue et, par conséquent, n'a pas manqué à son devoir d'équité envers le demandeur.

[17]       La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                                                           « P. ROULEAU »            

                                                                                                                        JUGE

OTTAWA (Ontario)

Le 20 avril 1999

Traduction certifiée conforme

Marie Descombes, LL.L.


                                                  COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                               SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                         NOMS DES AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :                                             IMM-4852-97

INTITULÉ :                                                      YONG-SOO AHN

                                                                                    ET

                                                                        LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                                 TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                                LE 13 AVRIL 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE prononcés par le juge Rouleau le 20 avril 1999

COMPARUTIONS :

S. Ehrlich                                                                                   POUR LE DEMANDEUR

Ian Hicks                                                                                   POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Codina & Pukitis                                                                       POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

M. Morris Rosenberg                                                    POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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