Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision




Date : 19990831


Dossier : IMM-4328-98

OTTAWA (Ontario), le 31 août 1999

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MacKAY


ENTRE :

     MOHAMMAD ALI ARASTEHPOUR,

     demandeur,

     - et -

     MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION,

     intimé.


     VU la demande présentée par le demandeur afin d"obtenir le contrôle judiciaire et l"annulation d"une décision datée du 29 juillet 1998 par laquelle un agent des visas a rejeté la demande de résidence permanente au Canada présentée par le demandeur pour lui-même et les personnes à sa charge;

     APRÈS avoir entendu les avocats des parties à Winnipeg, le 26 août 1999, date à laquelle elle a décidé de surseoir au prononcé de sa décision, et après avoir examiné les observations qui ont alors été faites;


     ORDONNANCE

     LA COUR ORDONNE le rejet de la demande. Chaque partie paiera ses propres frais.


                                     W. Andrew MacKay

    

                                         JUGE

Traduction certifiée conforme


Suzanne Bolduc, LL.B.




Date : 19990831


Dossier : IMM-4328-98


ENTRE :

     MOHAMMAD ALI ARASTEHPOUR,

     demandeur,

     - et -


     MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION,

     intimé.



     MOTIFS DE L"ORDONNANCE


LE JUGE MacKAY


[1]      Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire et l"annulation de la décision datée du 29 juillet 1998 par laquelle un agent des visas a rejeté la demande de résidence permanente au Canada présentée par le demandeur pour lui-même et les personnes à sa charge.

Les faits

[2]      Le demandeur, un citoyen iranien, a présenté une demande de visa à titre d"immigrant indépendant faisant partie de la catégorie des travailleurs autonomes. L"ambassade du Canada à Vienne a reçu la demande le 3 septembre 1996. Le demandeur a inclus son épouse et leurs deux fils à charge dans sa demande. L"un des fils, Ahmadreza, qui est présenté comme personne à charge, était alors âgé de 29 ans et en réponse à une question qui lui a été posée dans sa demande au sujet de sa profession, il a répondu : [TRADUCTION] " Comme je souffre de dystrophie musculaire, je suis incapable de travailler / ÉTUDIANT ".

[3]      Le 22 mai 1998, un agent des visas, qui était assisté d"un interprète, a reçu en entrevue le demandeur et son épouse à Vienne. Il a fait le compte rendu de cette entrevue dans des notes qu"il a consignées dans le STIDI. Il a interrogé les demandeurs au sujet d"Ahmadreza. Ces derniers ont répondu qu"ils subvenaient aux besoins de leur fils qui habitait avec eux, se déplaçait en fauteuil roulant, parlait bien l"anglais et travaillait à la maison à l"aide d"un ordinateur. L"agent des visas a informé les demandeurs qu"étant donné qu"Ahmadreza est une personne à charge, toute la famille serait non admissible s"il était jugé qu"il est non admissible pour des raisons médicales. De plus, l"agent des visas a insisté sur le fait, comme il le dit dans son affidavit, qu"Ahmadreza ne pourrait pas être laissé dans son pays pendant que les autres membres de sa famille immigreraient au Canada parce qu"il est un fils à charge et que ce statut ne pourrait pas être modifié.

[4]      Le 9 décembre 1997 et le 4 février 1998, l"agent des visas a reçu des avis indiquant que deux médecins agréés avaient confirmé qu"Ahmadreza n"était pas admissible en vertu du sous-alinéa 19(1)a) (ii) de la Loi sur l"immigration parce qu"il souffrait de dystrophie musculaire. Le 24 février 1998, des lettres informant le demandeur des conclusions des médecins et invitant celui-ci à produire une contre-preuve ont été envoyées à son consultant en immigration au Canada. Par la suite, le consultant a informé l"agent des visas par télécopieur qu"Ahmadreza pourrait rester chez une tante et a proposé que son nom soit radié dans la demande. Après avoir examiné le dossier, l"agent des visas a conclu qu"il ne pouvait pas radier le nom d"Ahmadreza parce qu"il était un " fils à charge " au sens du Règlement sur l"immigration de 19781. Il a expliqué son raisonnement dans une lettre qu"il a envoyée au consultant le 29 avril 1998. En effet, il n"était pas possible, en vertu du Règlement, de radier le nom d"Ahmadreza dans la demande si, de l"avis d"un agent des visas, il était un fils à charge, ce qu"avait conclu l"agent des visas en l"espèce. On trouvait aussi ce qui suit dans la lettre :

[TRADUCTION] ...si le fils en question est non admissible pour des raisons médicales (nous signalons à cet égard que nous n"avons encore reçu aucune réponse à la lettre dans laquelle nous vous invitons à produire toute autre preuve d"ordre médical qui pourrait être jugée pertinente), toute la famille est non admissible pour des raisons médicales. De plus, cela a été clairement expliqué aux membres de la famille lors de l"entrevue et ces derniers étaient tout à fait au courant des répercussions qu"aurait cette non-admissibilité sur leur demande.
À ma connaissance, il n"y a dans le cas présent aucune raison d"ordre humanitaire qui justifierait la délivrance d"un permis ministériel.

[5]      Dans une autre télécopie datée du 9 juillet 1998, le consultant a demandé à l"agent des visas de lui faire part de sa décision finale. Le 29 juillet 1998, l"agent des visas a écrit notamment ce qui suit au demandeur :

[TRADUCTION] J"ai maintenant terminé l"évaluation de votre demande. J"ai le regret de vous informer que votre fils à charge, Ahmadreza Arasteh, appartient à la catégorie non admissible visée au sous-al. 19(1)a) (ii) de la Loi sur l"immigration de 1976 parce qu"il souffre de dystrophie musculaire dont la nature, la gravité ou la durée probable sont telles qu"un médecin agréé, dont l"avis est confirmé par au moins un autre médecin agréé, conclut que son admission entraînerait ou risquerait d"entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé au Canada.
Plus particulièrement, il a été noté que votre fils :
a les symptômes d"une affection dégénérative, progressive et héréditaire des muscles squelettiques, se manifestant par la faiblesse et l"atrophie de la musculature de la ceinture pelvienne et de la région lombo-sacrée et des épaules. Même s"il est capable d"effectuer certaines activités de la vie quotidienne, il dépend entièrement à l"heure actuelle d"autres personnes pour se déplacer à l"intérieur ou à l"extérieur et pour monter des escaliers. Ses perspectives d"emploi actuelles sont très limitées.
Comme l"une des personnes à votre charge appartient à l"une des catégories de personnes non admissibles décrites ci-dessus, en vertu du paragraphe 9(4) du Règlement sur l"immigration et de l"alinéa 19(2)d) de la Loi sur l"immigration, je ne peux pas vous délivrer de visa d"immigrant. Par conséquent, votre demande est refusée.
J"ai en outre examiné s"il pouvait exister des raisons d"ordre humanitaire dans votre cas, mais j"ai conclu qu"il n"y a aucun motif justifiant une mesure spéciale.

Questions en litige

[6]      Le demandeur soutient que rien dans la preuve ne permettait à l"agent des visas de conclure qu"Ahmadreza ne pourrait pas subvenir à ses propres besoins au Canada et que l"agent des visas aurait dû, à la demande du consultant, radier le nom de son fils dans la demande.

Analyse

[7]      L"article 2 du Règlement sur l"immigration de 1978 définit l"expression " fils à charge " de la manière suivante :

" fils à charge " Fils :
. . .
c) soit qui est entièrement ou en grande partie à la charge financière de ses parents et qui :
     (i) d"une part, selon un médecin agréé, souffre d"une incapacité de nature physique ou mentale,
     (ii) d"autre part, selon l"agent d"immigration qui fonde son opinion sur les renseignements qu"il a reçus, y compris les renseignements reçus du médecin agréé visé au sous-alinéa (i), est incapable de subvenir à ses besoins en raison de cette incapacité.

[8]      Le demandeur soutient que l"agent des visas a commis une erreur de droit en concluant qu"Ahmadreza était un " fils à charge " puisque la preuve ne permettait pas de conclure qu"il ne pourrait pas subvenir à ses besoins. L"agent des visas savait que le fils travaillait à l"ordinateur, mais il n"a pas cherché à déterminer s"il était en mesure de subvenir à ses besoins grâce à ces efforts. De plus, l"avis du médecin agréé serait vicié puisqu"il fait une affirmation sans qu"il n"y ait de preuve que les perspectives d"emploi d"Ahmadreza sont limitées.

[9]      À mon avis, il y avait suffisamment d"éléments de preuve pour que l"agent des visas puisse conclure qu"Ahmadreza ne pourrait pas subvenir à ses besoins. Comme nous l"avons signalé plus haut, sa demande contenait l"énoncé suivant : [TRADUCTION] " Comme je souffre de dystrophie musculaire, je suis incapable de travailler... ". De plus, il convient de signaler que, dans son affidavit, le demandeur ne conteste pas la conclusion de l"agent des visas, dont il est fait état dans les notes consignées dans le STIDI qui ont été prises au moment de l"entrevue, et selon laquelle le demandeur et son épouse [TRADUCTION] " subviennent entièrement aux besoins de leur fils handicapé ". Enfin, il n"était pas déraisonnable de tenir compte de la conclusion des médecins agréés selon laquelle le fils avait des perspectives d"emploi limitées vu le pronostic suivant lequel sa santé se détériorerait vraisemblablement.

[10]      Il est vrai que l"agent des visas ne semble pas avoir examiné particulièrement si le fils pourrait à l"avenir subvenir à ses besoins s"il était admis au Canada. Il est allégué au nom du demandeur qu"il aurait dû examiner les perspectives d"avenir du fils. Je n"en suis pas convaincu. En dehors du commentaire des médecins, l"agent des visas n"avait été saisi d"aucun élément de preuve quant aux perspectives d"avenir du fils et il n"était nullement tenu de tenter d"obtenir de tels éléments de preuve.

[11]      Suivant l"article 8 de la Loi sur l"immigration, il incombait au demandeur de prouver qu"il avait le droit d"entrer au Canada. Aucune preuve n"a été soumise à l"agent des visas pour démontrer que le fils pourrait subvenir à ses besoins, et la simple suggestion qu"il habiterait avec sa tante laisse supposer qu"il n"est pas capable de vivre seul. À mon avis, il n"était pas déraisonnable pour l"agent des visas de conclure que le fils était un " fils à charge " suivant la Loi.

[12]      Le demandeur soutient que lorsqu"un agent des visas conclut qu"un fils n"est plus une personne à charge, il peut radier le nom de cette personne dans la demande. Il est vrai qu"il se peut qu"un fils à charge au moment où la demande est présentée ne soit plus à charge par suite d"un changement de circonstances avant qu"une décision ne soit rendue sur la demande. Il est allégué que l"agent des visas avait l"obligation de tenir compte du nouveau renseignement suivant lequel le fils habiterait avec sa tante, et qu"il a commis une erreur en refusant de réexaminer le statut du fils.

[13]      Suivant le paragraphe 9(2) de la Loi sur l"immigration, l"agent des visas avait l"obligation de déterminer si M. Arastehpour et les personnes à charge l"accompagnant semblaient " répondre aux critères de l"établissement ". Une fois qu"il a déterminé que le fils en question était un " fils à charge ", il était tenu, à mon avis, d"examiner s"il pouvait lui permettre d"entrer au pays.

[14]      Je ne suis pas d"accord pour dire que l"agent des visas a refusé d"examiner si le fils n"était plus un " fils à charge " après qu"on lui eut demandé de radier son nom de la demande et qu"on eut suggéré qu"il resterait en Iran avec une tante. J"estime plutôt qu"il est évident, d"après les notes consignées dans le STIDI, qu"il a reçu la télécopie du consultant proposant la suppression du nom du fils dans la demande et qu"il a écrit un mois plus tard dans ses notes qu"il avait réexaminé le dossier et conclu que le demandeur ne pouvait pas radier son fils de la demande. Qui plus est, l"agent des visas confirme dans son affidavit déposé le 13 octobre 1998, sur lequel il n"a pas été contre-interrogé, que :

[TRADUCTION] ...en aucun temps, on ne m"a fourni la preuve qu"Ahmadreza n"était plus à la charge de son père ou qu"il ne dépendait plus financièrement de lui. Au contraire, l"évaluation médicale a confirmé qu"il dépendait entièrement d"autres personnes pour l"aider dans de nombreuses activités de la vie quotidienne. Si Ahmadreza avait réussi l"examen médical, un visa lui aurait été délivré ainsi qu"à ses parents et à son frère. Cependant, comme cela a été expliqué au demandeur et à Mme Arastehpour lors de l"entrevue, la famille entière est devenue non admissible par suite de l"échec d"Ahmadreza à l"examen médical.

Conclusion

[15]      Pour les motifs qui précèdent, je rejette la présente demande de contrôle judiciaire.

[16]      L"intimé a demandé que les dépens lui soient adjugés et a proposé qu"ils soient fixés à 1 000 $. Aucune raison spéciale n"a été suggérée. Vu la règle 22 des Règles de 1988 de la Cour fédérale en matière d"immigration, aucune ordonnance n"est rendue quant aux dépens. Cette disposition porte ce qui suit : " Sauf ordonnance contraire rendue par un juge pour des raisons spéciales, la demande ou l"appel introduit en application des présentes règles ne donne pas lieu à des dépens ". Je ne suis pas convaincu qu"il existe en l"espèce des raisons spéciales qui justifieraient l"adjudication de dépens.

                                     W. Andrew MacKay

    

                                         JUGE

OTTAWA, Ontario

31 août 1999

Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.

     COUR FÉDÉRALE

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



NO DU GREFFE :              IMM-4328-98


INTITULÉ DE LA CAUSE :      Mohammad Ali Arastehpour c. Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration


LIEU DE L"AUDIENCE :          Winnipeg (Manitoba)


DATE DE L"AUDIENCE          26 août 1999

MOTIFS DE L"ORDONNANCE du juge MacKay en date du 31 août 1999




ONT COMPARU :


Edward Rice                  POUR LE DEMANDEUR
Sharlene Telles-Langdon          POUR L"INTIMÉ


PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Edward Rice                  POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)


Morris Rosenberg              POUR L"INTIMÉ

Sous-procureur général du Canada



__________________

1      DORS/78-172 et ses modifications.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.