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Date : 20050831

Dossier : T-614-05

Référence : 2005 CF 1191

ENTRE :

                    L'ASSOCIATION DES CRABIERS ACADIENS, constituée en vertu

                                       des lois de la province du Nouveau-Brunswick,

                   l'ASSOCIATION DES CRABIERS DE LA BAIE, enregistrée en vertu

                                 des lois de la province de Québec, et l'ASSOCIATION

                                 DES CRABIERS GASPÉSIENS, enregistrée en vertu

                                                  des lois de la province de Québec

                                                                                                                                    demanderesse

                                                                          - et -

                                        LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                           défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE HARRINGTON

[1]                Le 10 mars 2005 ou vers cette date, Geoff Regan, ministre des Pêches et des Océans, décidait d'annoncer la stabilisation de l'accès et des allocations de certaines pêches dans les provinces du Canada atlantique pour diverses périodes allant de un à cinq ans, selon la pêche considérée.

[2]                Les demanderesses, qui s'intéressent à la pêche du crabe, ont déposé une demande de contrôle judiciaire de cette décision. Elles ont produit à l'appui un affidavit de Robert Haché, qui a une expérience considérable en la matière et déclare être un spécialiste du domaine.

[3]                Le défendeur voudrait que soient radiés certains paragraphes de l'affidavit. Plusieurs raisons ont été avancées. L'affidavit ne se limite pas aux faits dont le déclarant a une connaissance personnelle, contrairement à ce qu'exige l'article 81 des Règles des Cours fédérales, il traite de données que le ministre n'avait pas devant lui, il renferme des allégations hors de propos et il est parsemé d'opinions personnelles et de ouï-dire.

[4]                Après examen des conclusions écrites et orales des parties, ainsi que des précédents qu'elles ont invoqués et qui pour la plupart sont les mêmes de part et d'autre, j'ai décidé de rejeter la requête en radiation au motif qu'elle est prématurée.

[5]                M. Haché fait référence à des données que, semble-t-il, le ministre n'avait pas devant lui, mais les demanderesses estiment que les renseignements auraient dû se trouver devant lui lorsqu'il a pris sa décision.


[6]                M. Haché expose effectivement dans son affidavit une preuve par ouï-dire, mais il y a des exceptions fondées sur des principes à la bonne vieille règle rigide interdisant la preuve par ouï-dire, et certains des renseignements indiqués viendraient de fonctionnaires du gouvernement du Canada. L'une de ces exceptions a trait à la compétence, et il est allégué que le ministre a outrepassé sa compétence et que, en tout état de cause, il n'a pas observé l'équité procédurale compte tenu des attentes légitimes historiques des demanderesses, attentes qui étaient fondées sur des négociations antérieures.

[7]                Il y a aussi des exceptions à la règle selon laquelle un affidavit doit se limiter aux faits dont le déclarant a une connaissance personnelle. Un exemple évident est le témoignage d'opinion produit par un expert.

[8]                Le défendeur n'a pas encore répondu par le dépôt d'affidavits. Sans doute les allégations prétendument hors de propos contenues dans l'affidavit des demanderesses appelleront-elles comme réponse des affidavits tout aussi hors de propos, et sans doute l'économie des ressources judiciaires requiert-elle que le débat soit adéquatement circonscrit, mais il est trop tôt pour dire avec un minimum d'assurance ce à quoi se résumeront les points litigieux après le dépôt des affidavits, le cas échéant, et après les contre-interrogatoires, s'il y en a.

[9]                La norme de contrôle judiciaire pourrait bien devoir être débattue. Le défendeur n'a pas encore déposé son exposé des faits et du droit.


[10]            On ne saurait dire à ce stade que l'affidavit est abusif ou qu'il causera un préjudice au défendeur. L'unique préjudice serait un surcroît de temps et de travail, qui pourra être compensé par des dépens.

[11]            Pour tous ces motifs, je suis d'avis que la recevabilité de l'affidavit de M. Haché et le poids qu'il convient de lui donner devraient être laissés à l'appréciation du juge qui instruira au fond la demande de contrôle judiciaire. Le juge disposera d'un dossier plus complet. Il sera par exemple en meilleure position pour dire si un témoignage d'expert devrait être produit pour l'examen de la demande et quel poids devrait être accordé à l'opinion de M. Haché, étant donné qu'il a été en relation étroite avec certaines des demanderesses.

[12]            Le défendeur aura 30 jours à compter d'aujourd'hui pour déposer et signifier ses affidavits ainsi que les pièces documentaires dont parle l'article 307 des Règles. Tous les autres délais seront rajustés en conséquence.

[13]            Les demanderesses auront droit à leurs dépens.

« Sean Harrington »

                                                                                                                                                     Juge                    

Ottawa (Ontario)

le 31 août 2005


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                                             

DOSSIER :                                        T-614-05

INTITULÉ :                                       L'ASSOCIATION DES CRABIERS ACADIENS,

constituée en vertu des lois de la province du Nouveau-Brunswick, l'ASSOCIATION DES CRABIERS DE LA BAIE, enregistrée en vertu des lois de la province de Québec, et l'ASSOCIATION DES CRABIERS GASPÉSIENS, enregistrée en vertu des lois de la province de Québec    

ET

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :                Halifax (Nouvelle-Écosse)

DATE DE L'AUDIENCE :               Le 4 août 2005

MOTIFS DE L'ORDONNACE:     Le juge Harrington

DATE DES MOTIFS :                     Le 31 août 2005

COMPARUTIONS :

Brigitte Sivret                                                                             POUR LA DEMANDERESSE

Ginette Mazerolle                                                                      POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Brigitte Sivret                                                                             POUR LA DEMANDERESSE

Bathurst (Nouveau-Brunswick)

John H. Sims, c.r.                                                                      POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


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