Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision


Date : 19980331


Dossier : IMM-3742-97

ENTRE :


YUNCHENG BI,


requérant,


- et -


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L"IMMIGRATION,


intimé.


MOTIFS DE L"ORDONNANCE

Le juge Gibson

[1]      Les présents motifs découlent d"une demande de contrôle judiciaire qui fait suite à une décision qui aurait été rendue par une agente des visas à Hong Kong. Cette agente aurait informé l"avocat du requérant que la demande de résidence permanente au Canada présentée par son client a été tranchée par lettre datée du 9 septembre 1996. Cette lettre rejetait la demande. La décision ultérieure en cause est datée du 25 juillet 1997.

[2]      Le requérant réside à Hong Kong. Il a demandé la résidence permanente au Canada à titre d"indépendant. Dans une lettre datée du 9 septembre 1996, il a été informé que sa demande de droit d"établissement était refusée. On l"a également informé qu"il pouvait se faire rembourser le " droit exigé pour l"établissement " qu"il a acquitté en présentant sa demande. On l"a avisé que le remboursement était en cours de traitement et qu"il devait le recevoir d"ici trois ou quatre mois.

[3]      Par décret du Conseil privé C.P. 1997-680 daté du 24 avril 1997, le Règlement sur l"immigration de 19781 a été modifié. Les critères prévus par la Classification canadienne descriptive des professions (la CCDP), à partir desquels la demande du requérant a été évaluée, ont été abrogés. Ils ont été remplacés par un nouveau guide de la Classification nationale des professions. Une nouvelle disposition du Règlement sur l"immigration prévoyait la transition entre les deux fondements de l"évaluation des demandes du droit d"établissement en rapport avec la profession envisagée :


2.03      (1)      For the purpose of an assessment by a visa officer under section 8, in respect of an application for a visa that was made under section 9 of the Act before May 1, 1977 and was still pending on that date, the applicable factors set out in Schedule 1, as that Schedule read immediately before May 1, 1997, shall apply.

     (2)      If an application for a visa referred to in subsection (1) is refused, the visa officer shall reassess the applicant in accordance with the applicable factors set out in Schedule I, as that Schedule read on May 1, 1997.

     [emphasis added]

2.03      (1)      L"appréciation par l"agent des visas aux termes de l"article 8, dans le cadre d"une demande de visa pendante au 1er mai qui a été présentée avant cette date en vertu de l"article 9 de la Loi, se fait suivant les facteurs applicables prévus à l"annexe I dans sa version antérieure au 1er mai 1997.

     (2)      Lorsque la demande visée au paragraphe (1) est refusée, l"agent des visas apprécie à nouveau le demandeur suivant les facteurs applicables prévus à l"annexe I dans sa version du 1er mai 1997.

     [Non souligné dans l'original.]



[4]      Par conséquent, si une demande de droit d"établissement comme celle qu"a présenté le requérant en l"espèce demeurait " pendante au " 1er mai 1997, les règles transitoires prévoyaient que la demande devait être évaluée en fonction des critères de la CCDP. Si la demande était rejetée en fonction de ces critères, elle devrait être réévaluée au regard du guide de la Classification nationale des professions.

[5]      En date du 16 juillet 1997, le requérant n"avait pas encore reçu son remboursement du droit exigé pour l"établissement qui lui avait été promis dans la lettre datée du 9 septembre 1996. Par conséquent, l"avocat du requérant a fait parvenir une télécopie à l"agente des visas de Hong Kong, qui était en partie rédigé comme suit :

             [TRADUCTION]             
             Vous croyiez sans doute que ce dossier était clos depuis longtemps. Toutefois, compte tenu (1) de la décision de la Commission de conserver le droit d"admission de M. Bi, ce qui laissait son dossier ouvert; (2) de l"approbation, par la Cour fédérale, de la décision de la Commission qui a infirmé une décision de délivrer un visa d"immigrant à Dolly Shuk-Ching Chan (IMM-6477-93) et (3) du paragraphe 2.03(2) du Règlement sur l"immigration, qui exige une évaluation en vertu des critères de la CNP des demandes pendantes rejetées en vertu des critères de la CCDP, je soumets respectueusement que la demande de M. Bi devrait être réexaminée parce que (a) si elle avait été bien évaluée en vertu de la CCDP, elle aurait dû être approuvée et (b) une évaluation du requérant à titre de programmeur d"applications en vertu des critères de la CNP porte son évaluation au seuil de soixante-dix points.             

[6]      L"agente des visas a répondu dans une lettre datée du 25 juillet 1997, qui était en partie rédigée comme suit :

             [TRADUCTION]             
             La demande de résidence permanente au Canada présentée par M. Bi a été examinée au fond et en fonction de considérations humanitaires et a été refusée sur ces deux motifs. La décision renfermant les motifs du refus de sa demande de résidence permanente au Canada a été communiquée à M. Bi par lettre datée du 9 septembre 1996, ce qui tranchait définitivement sa demande. Je vous remercie de nous avoir signalé notre défaut d"avoir remboursé à M. Bi son droit exigé pour l"établissement. La procédure de remboursement a maintenant été mise en branle et un chèque de remboursement sera émis d"ici trois ou quatre mois.             
                  [Non souligné dans l'original.]             

[7]      La première question en litige plaidée devant moi dans le cadre de la présente demande consistait à déterminer si la lettre de l"agente des visas datée du 25 juillet 1997 n"était qu"une " réponse de courtoisie " et ne pouvait donc pas être assujettie à un examen judiciaire ou s"il s"agissait d"une décision assujettie à un examen judiciaire. À la lecture conjointe du passage de la lettre susmentionnée et de la télécopie à laquelle cette lettre répondait, j"en viens à la conclusion qu'il s'agit d'une décision susceptible de contrôle judiciaire. Dans la deuxième phrase du paragraphe cité de la lettre de l"agente des visas datée du 25 juillet 1997, l"agente des visas a rejeté, à tout le moins de manière implicite, la proposition selon laquelle la demande de droit d"établissement était toujours en suspens le 1er mai 1997. Par conséquent, si cette demande était rejetée en vertu des critères de la CCDP, elle devait être réévaluée en vertu du guide de la CNP. En outre, l"agente des visas a également refusé implicitement d"exercer quelque pouvoir discrétionnaire que ce soit de revoir sa décision du 9 septembre 1996 pour un autre motif que celui des modifications au Règlement sur l"immigration de 1978.

[8]      Je considère que les deux " conclusions " implicites de l"agente des visas constituaient des décisions susceptibles de contrôle judiciaire. En d"autres termes, j"en viens à la conclusion que la lettre datée du 25 juillet 1997 n"était pas qu"une " réponse de courtoisie ".

[9]      L'avocat du requérant a soutenu que l'agente des visas a commis des erreurs dans ses deux conclusions ou décisions implicites. J'en viens à la conclusion opposée. La lettre de l'agente des visas datée du 9 septembre 1996 rejetait clairement la demande de droit d'établissement du requérant. Il est vrai que, sur le plan administratif, le remboursement du droit exigé pour l'établissement demeurait en suspens. Cependant, cet élément demeuré en suspens n'était rien de plus que le résultat administratif de la décision prise. La demande de visa du requérant n'était pas " pendante au " 1er mai 1997. Par conséquent, la conclusion ou la décision implicite à laquelle en est venue l'agente des visas, à savoir qu'elle n'avait ni le droit ni l'obligation, en vertu de l'article 2.03 du Règlement sur l'immigration, de réévaluer la demande du requérant en fonction du guide de la Classification nationale des professions, était non seulement une décision qu'elle pouvait raisonnablement prendre; mais une décision était appropriée.

[10]      Dans ses décisions, la Cour s'est montrée ambivalente sur la question de savoir si un agent des visas ayant rejeté une demande de droit d'établissement au Canada possède le pouvoir discrétionnaire de reconsidérer sa décision2. Je n'ai pas besoin de prendre position sur cette question pour trancher la présente affaire et je m'abstiens de le faire. Si, en l'espèce, l'agente des visas possédait le pouvoir discrétionnaire de reconsidérer la décision, comme nous l'avons indiqué précédemment dans les présents motifs, à tout le moins de façon implicite, elle a refusé de l'exercer. Je ne puis constater aucune erreur dans cet exercice d'un pouvoir discrétionnaire. Autrement dit, il lui était loisible d'exercer son pouvoir discrétionnaire en ne reconsidérant pas sa décision, si elle possédait effectivement ce pouvoir.

[11]      Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire a été rejetée à l'audience.

[12]      Aucun des avocats ayant comparu devant moi n'a demandé la certification d'une question. Aucune question n'a été certifiée.

                             Frederick E. Gibson
__________________________
                             Juge

Ottawa (Ontario)

Le 31 mars 1998

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


NOMS DES AVOCATS ET DES PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU DOSSIER DE LA COUR :      IMM-3742-97
INTITULÉ DE LA CAUSE :      YUNCHENG BI c. MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
                     ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE :          Le 25 mars 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE RENDUE PAR MONSIEUR LE JUGE GIBSON

DATE DU JUGEMENT :          Le 31 mars 1998

COMPARUTIONS :

Me Timothy E. Leahy          POUR LE REQUÉRANT
Me Bridget O'Leary              POUR L'INTIMÉ

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

Me Timothy E. Leahy          POUR LE REQUÉRANT

Toronto (Ontario)

M. George Thomson              POUR L'INTIMÉ

Sous-procureur général

du Canada

__________________

1      D.O.R.S. /78-172, et modifications.

2      Décisions selon lesquelles un agent des visas ne possède pas un tel pouvoir discrétionnaire : Dumbra va c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) , (1995) 31 Imm. L. R. (2d) 76 (C.F. 1re inst.); Brar c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1979] A.C.F. no 1527 (Q.L.) (C.F. 1re inst.) et Rozenkovicius c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1997] A.C.F. no 334 (Q.L.) (C.F. 1re inst.). Décisions contraires : Soimu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1994] A.C.F. no 1330 (Q.L.) (C.F. 1re inst.); Chan c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), (1996), 34 Imm. L. R. (2d) 259 (C.F. 1re inst.) et Park c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 133 (Q.L.) (C.F. 1re inst.).

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.