Décisions de la Cour fédérale

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     T-1760-95

ENTRE:          CONSTANTINOS J. JOANNOU,

     Demandeur

ET:              ENGINEERING DYNAMICS LTD.,

     Défenderesse

     MOTIFS DE DÉCISION et DÉCISION

LE JUGE DENAULT:

     Le demandeur se pourvoit en appel d'une décision du protonotaire qui a accueilli la requête de la défenderesse et rejeté son action en contrefaçon des brevets canadiens 1,175,754 et 1,291,520 dont il est le titulaire.

     Il importe de relater certains des événements qui ont conduit à la décision dont il y a appel pour en comprendre la portée. Les parties sont engagées dans un litige pour déterminer non pas qui est l'auteur des inventions - la défenderesse ne contredit pas que c'est le demandeur - mais qui en est le propriétaire.

     Dans un premier dossier mû devant cette Cour (T-2910-93) Engineering Dynamics Ltd cherchait à se faire déclarer propriétaire de quatre brevets enregistrés au nom de l'inventeur Constantinos Joannou. Dans une décision rendue le 17 octobre 1996, le protonotaire a accueilli la requête du défendeur Joannou visant à faire rejeter l'action de Engineering Dynamics Ltd, faute de compétence de cette Cour. Estimant en effet que pour réussir à se faire déclarer propriétaire des brevets la demanderesse devait d'abord obtenir l'annulation de contrats intervenus entre les parties, une compétence qui relève d'un tribunal provincial, le protonotaire a rejeté l'action de Engineering Dynamics Ltd.1 Celle-ci s'est alors adressée à la Cour de l'Ontario, division générale (97-CV-311-CM), pour se faire déclarer propriétaire des brevets enregistrés au Bureau des brevets au nom du présent demandeur Joannou.

     Entre-temps, le demandeur Joannou a pris la présente action en contrefaçon de deux de ces brevets. La défenderesse a d'abord déposé, le 15 septembre 1995, une défense niant contrefaçon et une demande reconventionnelle visant à se faire déclarer propriétaire des deux brevets en litige. Une requête de la partie défenderesse pour surseoir à cette action en attendant la fin des procédures dans le dossier T-2910-93 fut rejetée le 30 avril 1996. En février 1997, Engineering Dynamics Ltd a demandé le rejet de l'action du demandeur Joannou aux mêmes motifs que le défendeur Joannou avait invoqués pour obtenir le rejet de l'action dans le dossier T-2910-93 à savoir l'absence de compétence de cette Cour.

     Appliquant le même raisonnement qui l'avait amené à rejeter l'action de Engineering Dynamics Ltd, le protonotaire a aussi rejeté l'action du présent demandeur, estimant que le scénario entre les parties était le même bien qu'elles avaient inversé les rôles2. C'est de cette décision que le demandeur appelle. J'estime qu'il a raison.

     Si le protonotaire a eu raison de décliner la compétence de cette Cour dans l'action intentée par Engineering Dynamics Ltd, il n'en va pas ainsi dans la présente cause dans la mesure où, de toute évidence, il s'agit en l'espèce d'une action en contrefaçon de brevets. Vu que la défenderesse a choisi, dans sa défense, de nier la contrefaçon, les parties devront débattre la question devant la cour compétente, en l'occurrence la Section de première instance de cette Cour aux termes de l'article 20 de la Loi sur la Cour fédérale et de l'article 54 de la Loi sur les brevets3. De plus, le demandeur allègue dans son action être titulaire et propriétaire enregistré des brevets sur lesquels porte le litige. À moins donc que le registre des brevets ne soit modifié quant au nom du propriétaire de ces brevets, par une preuve contraire, ils sont valides et acquis au breveté4 qui, pour la durée des brevets, possède le droit exclusif de fabriquer et de vendre à d'autres, pour qu'ils l'exploitent, l'objet de ses inventions5.

     Par ailleurs, sur le plan procédural, la requête de la partie défenderesse pour faire rejeter l'action du demandeur aux termes de la règle 419(1)a) n'aurait pas dû être accueillie par le protonotaire. D'une part les faits allégués, à ce stade, doivent être tenus pour avérés : on devait donc présumer que le demandeur était titulaire des brevets et qu'il bénéficiait de la protection conférée par la Loi sur les brevets. D'autre part il importait d'analyser si la déclaration du demandeur ne révélait aucune cause raisonnable d'action en se penchant d'abord sur les allégués de celle-ci, non pas sur des moyens soulevés en défense visant à faire perdre juridiction à cette Cour.

     Avec égards, j'estime que le protonotaire a erré en droit et dans l'appréciation des faits.

     Pour ces motifs, l'appel est accueilli avec dépens, et la requête de la défenderesse en rejet de l'action du demandeur est rejetée.

     D É C I S I O N

     L'appel de la décision du protonotaire Richard Morneau rendue le 21 mars 1997, par laquelle il accordait la requête en rejet d'action de la défenderesse et ordonnait que la déclaration du demandeur soit radiée, est accueilli avec dépens.

OTTAWA, le 30 juin 1997

J.C.F.C.

__________________

1      La demanderesse en a appelé de cette décision mais elle s'est désistée de son appel le 28 janvier 1997.

2      Le protonotaire s'est exprimé ainsi : "Apart from the fact that the parties are acting here in a different capacity, the rest of the scenario is, mutatis mutandis , the same".

3      1985, L.R.C. ch.P-4 telle qu'amendée par 1987, ch.41.

4      Art. 43 de la Loi sur les brevets , telle qu'amendée.

5      Art. 42 de la Loi sur les brevets , telle qu'amendée.


COUR FEDERALE DU CANADA SECTION DE PREMIERE INSTANCE

NOMS DES AVOCATS ET DES AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

N º DE LA COUR : T-1760-95

INTITULf : CONSTANTINOS J. JOANNOU

v. ENGINEERING DYNAMICS LTD.

LIEU DE L'AUDIENCE : Montreal, Quebec

DATE DE L'AUDIENCE : le 7 avril 1997

MOTIFS DE DECISION ET DECISION DE L'IIONORABLE JUGE DENAULT EN DATE DU 30 juin 1997

COMPARUTIONS

Me Bob 11. Sotiriadis POUR LE DEMANDEUR

Mr. Mitchell B. Charness POUR LA DEFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Me Jacques A. Leger/ Me Bob Sotiriadis POUR LE DEMANDEUR Leger Robic Richard

Montreal, Quebec

Mr. Marcus T. Gallie/ Mr. Mitchell B. Charness Kent & Edgar

Ottawa, Ontario POUR LA DEFENDERESSE

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