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Date : 20050120

Dossier : IMM-6905-03

Référence : 2005 CF 92

Ottawa (Ontario), le 20 janvier 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O'KEEFE

ENTRE :

                                                 OSCAR LUIS ALFARO ALFARO

                                                                                                                                          demandeur

                                                                          - et -

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE O'KEEFE

[1]                Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR) et visant la décision du 18 août 2003 de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) portant que le demandeur n'est ni un réfugié au sens de la Convention in une personne à protéger.

[2]                Le demandeur sollicite une ordonnance ayant pour effet d'annuler la décision de la Commission et de renvoyer l'affaire pour nouvelle décision.

Le contexte

[3]                Le demandeur, Oscar Luis Alfaro Alfaro, est un citoyen du Costa Rica qui prétend craindre avec raison d'être persécuté en raison de ses opinions politiques et de son appartenance à un certain groupe social, soit les citoyens respectueux de la loi qui sont persécutés par les trafiquants de drogue. Il prétend en outre être une personne à protéger, au sens où l'entend la LIPR.

[4]                Le demandeur déclare, dans l'exposé circonstancié contenu dans son Formulaire de renseignements personnels (FRP), qu'il a travaillé comme gérant pour une agence de location d'automobiles à San José, au Costa Rica. Le 1er décembre 2001, on l'a appelé sur son cellulaire, pour lui demander si l'entreprise acceptait les dépôts en espèces pour la location d'automobiles. Une entente a alors été conclue en vue d'une location, à compter du lendemain, d'une durée de deux semaines. Le 2 décembre 2001, le demandeur a rempli les formules appropriées et a remis l'automobile louée à M. Adrian Font Calderon, un associé de l'interlocuteur de la veille.


[5]                Le 10 décembre 2001, M. Font a signalé au demandeur le vol de l'automobile louée. Le demandeur a rempli un rapport de police et a informé du vol le propriétaire de la société de location. On a retrouvé l'automobile deux jours plus tard, mais l'intérieur de celle-ci avait été démantelé.

[6]                Le demandeur a soutenu avoir été agressé par trois étrangers alors qu'il quittait son travail, soit vers 19 h, le 15 décembre 2001. Ses agresseurs l'ont interrogé sur l'endroit où se trouvait la « marchandise » et l'ont accusé de projeter de voler celle-ci et d'en savoir trop au sujet de M. Font. Le demandeur a prétendu que les agresseurs l'avaient battu et que l'un d'eux avait dit : « Tue-le » . Les agresseurs se sont finalement enfuis lorsque le demandeur s'est mis à crier et à demander aux personnes aux alentours d'appeler la police.

[7]                Après sa sortie de l'hôpital, le demandeur a signalé l'agression du 15 décembre 2001 aux policiers, qui ont fait la patrouille devant sa maison et lui ont dit de leur téléphoner s'il se croyait suivi.

[8]                Les policiers ont arrêté M. Font le 1er février 2002, puis ils ont demandé au demandeur s'il pouvait repérer celui-ci lors d'une séance d'identification. Le demandeur a bel et bien identifié M. Font, le 4 février 2002. Ce dernier a été inculpé pour trafic de drogues. Le demandeur n'a pu identifier les autres personnes lors de cette séance, non plus que ses agresseurs.

[9]                Lors de son témoignage, le demandeur a déclaré qu'on lui avait proféré des menaces par téléphone après l'arrestation de M. Font.

[10]            Le 12 mars 2002, le demandeur a demandé à être inscrit à un programme de protection des témoins. Les policiers lui ont répondu qu'une telle forme de protection n'était pas disponible.

[11]            Après l'agression dont il avait fait l'objet en décembre 2001, le demandeur avait quitté son emploi, il s'était tenu caché, il avait acheté un pistolet pour assurer sa protection, puis il avait commencé à prendre des dispositions pour quitter le pays.

[12]            Le demandeur a quitté le Costa Rica le 14 mars 2002. Il est arrivé au Canada le lendemain, puis a aussitôt demandé l'asile.

[13]            Le 11 août 2003, la Commission a tenu audience pour instruire sa demande.

Les motifs de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (Section de la protection des réfugiés)

[14]            Dans une décision datée du 18 août 2003, la Commission a statué que le demandeur n'était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger au sens de la LIPR.

[15]            Ce n'est pas que la Commission n'a pas prêté foi au témoignage du demandeur. Elle a plutôt conclu que ce dernier n'avait pas présenté une preuve claire et convaincante quant à l'incapacité du Costa Rica d'assurer sa protection.

[16]            La Commission a fait état de la preuve documentaire mentionnant que les responsables de l'application de la loi déployaient de plus en plus d'efforts au Costa Rica pour faire enquête sur les crimes perpétrés avec violence de même que sur le trafic des stupéfiants et pour engager les poursuites appropriées.

[17]            Selon la Commission, le Costa Rica est depuis longtemps un pays démocratique qui assure la protection de ses citoyens; de l'aveu même du demandeur, on y avait réagi et procédé à l'arrestation de M. Font. La Commission a ensuite cité de la jurisprudence selon laquelle même les démocraties ne peuvent offrir en tout temps à leurs citoyens une protection totale.

[18]            La Commission a en outre statué que les motifs invoqués par le demandeur pour demander l'asile, soit qu'il est un citoyen respectueux de la loi associé bien malgré lui au trafic des stupéfiants, ne le rattachent pas au motif des opinions politiques - réelles ou présumées - ni ne satisfont à un quelconque critère quant à l'appartenance à un certain groupe social.

[19]            La Commission a conclu, enfin, que le demandeur n'était pas une personne à protéger au sens de la LIPR, parce qu'il disposait au Costa Rica d'une protection de l'État adéquate.


[20]            Il s'agit du contrôle judiciaire de la décision de la Commission.

Les prétentions du demandeur

[21]            Le demandeur a soutenu que la Commission n'avait pas tenu compte d'éléments de preuve documentaire quant aux lacunes de la protection de l'État au Costa Rica et avait mal interprété le fondement de sa revendication.

[22]            Le demandeur n'a pas contesté les conclusions suivantes de la Commission :

1.          la revendication du demandeur n'avait pas valablement comme fondement le motif des opinions politiques ou celui de l'appartenance à un certain groupe social.

2.          lorsque le demandeur a sollicité la protection de l'État après l'agression de décembre 2001, les policiers lui ont fourni une protection adéquate et efficace.

[23]            Ce que le demandeur conteste, toutefois, c'est la conclusion de la Commission portant qu'il n'est pas une personne à protéger parce qu'il a disposé au Costa Rica d'une protection de l'État adéquate.


[24]            La Commission a commis une erreur, le demandeur a-t-il soutenu, en ne mentionnant pas dans ses motifs qu'on avait rejeté la demande de protection de l'État qu'il avait présentée en mars 2002, du fait qu'il était un témoin à charge clé et qu'il avait reçu des menaces par téléphone. La Commission aurait d'ailleurs déclaré, selon le demandeur, que celui-ci avait obtenu la protection qu'il avait demandé; or, tel n'était pas le cas.

[25]            Selon le demandeur, en ne tenant pas compte du rejet de sa deuxième demande de protection, la Commission a omis d'examiner s'il y avait lieu de lui accorder la protection internationale en application de l'alinéa 97(1)b) de la LIPR.

[26]            Le demandeur a soutenu, en outre, que la Commission avait omis d'apprécier des éléments de preuve pertinents quant à l'absence de programme de protection des témoins au Costa Rica et quant à l'admission par l'État du fait qu'il ne peut protéger adéquatement les témoins à charge et qu'un programme de protection serait nécessaire.

[27]            D'après le demandeur, le défaut de la Commission de mentionner la preuve documentaire sur l'absence de protection des témoins à charge au Costa Rica réfute la présomption selon laquelle elle a tenu compte des éléments dont elle disposait pour en arriver à sa décision.


[28]            La preuve documentaire soumise par le demandeur est en contradiction directe avec la conclusion de fait tirée par la Commission. La Commission devait donc, pour écarter cette preuve, en faire état dans ses motifs. Puisque la Commission ne l'a pas fait, on peut en déduire, selon le demandeur, que celle-ci a tiré des conclusions de fait sans tenir compte d'éléments dont elle disposait.

[29]            Le demandeur a soutenu que la Commission avait également commis une erreur en concluant qu'il n'était pas une personne à protéger, puisqu'il ne disposait pas d'une protection adéquate de l'État au Costa Rica, et il demande donc à la Cour d'intervenir.

Les prétentions du défendeur

[30]            Le défendeur a soutenu qu'il n'était pas aisé pour un demandeur d'asile de s'acquitter du fardeau de démontrer qu'il ne pouvait se réclamer de la protection de l'État dans son pays d'origine. Le critère à cet égard est objectif, et c'est au demandeur d'asile qu'il incombe de présenter une preuve claire et convaincante au sujet de l'incapacité ou de l'absence de volonté de l'État de le protéger.

[31]            Le défendeur a ajouté qu'il ne suffisait pas, pour que soit justifiée la protection internationale, que soient toujours couronnés de succès les efforts faits par un pays démocratique tel que le Costa Rica pour protéger ses citoyens.


[32]            Selon le défendeur, la conclusion de la Commission quant au caractère adéquat de la protection de l'État était compatible avec la preuve dont elle était saisie. Le demandeur a concédé avoir bénéficié d'une protection adéquate de l'État après l'agression de décembre 2001 et il a simplement prétendu que cette protection n'avait plus suffi à un certain moment donné. On n'a présenté aucune preuve quant à une quelconque tentative faite de mettre à exécution les menaces proférées au demandeur après l'arrestation de M. Font, ou quant à l'insuffisance à cette période de la protection de l'État.

[33]            Le défendeur s'est opposé à la prétention du demandeur selon laquelle les menaces reçues par téléphone en février et mars 2002 constituaient un [traduction] « risque accru et nouveau » posé par les trafiquants.

[34]            Le défendeur a soutenu que l'absence d'un programme de protection des témoins ne permettait pas de conclure, à elle seule, en une protection inadéquate de l'État. Le Costa Rica a mis en place d'autres mesures pour protéger ses citoyens. Le défendeur a également soutenu que, de manière objective et sur le fondement de la preuve soumise à la Commission, il n'était pas manifestement déraisonnable pour celle-ci de conclure que le demandeur pouvait se réclamer d'une protection adéquate de l'État au Costa Rica.


[35]            Le défendeur a nié que la Commission n'avait pas tenu compte d'éléments de preuve dont elle disposait. La Commission est en effet présumée, sauf preuve contraire, avoir pris en compte tous les éléments de preuve dont elle a été saisie. Selon le défendeur, il n'était pas indiqué que le demandeur fasse valoir que la pièce P-9 constituait un document essentiel dont la Commission aurait dû faire mention. Le défendeur a soutenu que, selon ce document, la protection des témoins ne constitue pas besoin urgent au Costa Rica, ce pays a déjà commencé à mettre en place un programme pour une telle protection et peu d'information est disponible permettant de croire qu'il n'y aura pas bientôt de programme de protection, et le document P-9 est de nature générale plutôt qu'il n'est propre à un cas. Ce document, selon le défendeur, n'a pas d'effet déterminant sur l'issue de l'affaire ni même ne se rapproche du coeur de celle-ci. Le défaut de la Commission d'y renvoyer expressément ne constitue donc pas une erreur.

[36]            Le défendeur a soutenu, enfin, que la Cour ne devrait pas intervenir face à l'appréciation de la preuve par la Commission. De l'avis du défendeur, il était loisible à la Commission de préférer à la pièce P-9 d'autres documents présentés en preuve quant à la répression du trafic des stupéfiants et des crimes perpétrés avec violence, et qu'on n'avait pas démontré qu'était justifiée l'intervention de la Cour.

[37]            Ce que le défendeur a soutenu, en bref, c'est que le demandeur n'avait pas prouvé de manière claire et convaincante l'inefficacité de la protection offerte par l'État au Costa Rica. La preuve révélait plutôt que l'État fournit de sérieux efforts pour assurer la protection de ses citoyens, même s'il n'y est pas encore pleinement parvenu.

[38]            Le défendeur a donc demandé le rejet de la présente demande de contrôle judiciaire.


La question en litige

[39]            La Commission a-t-elle conclu erronément que le demandeur pouvait disposer d'une protection adéquate de l'État au Costa Rica?

Les dispositions légales pertinentes

[40]            On définit comme suit la « personne à protéger » au paragraphe 97(1) de la LIPR :

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n'a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

a) soit au risque, s'il y a des motifs sérieux de le croire, d'être soumise à la torture au sens de l'article premier de la Convention contre la torture;

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d'autres personnes originaires de ce pays ou qui s'y trouvent ne le sont généralement pas,

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes - sauf celles infligées au mépris des normes internationales - et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l'incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

Analyse et décision

[41]            La seule question en litige en l'espèce concerne la capacité de l'État à assurer la protection du demandeur au Costa Rica. La Commission a déclaré ce qui suit à ce sujet, à la page 2 de sa décision :

Le tribunal estime que le Costa Rica est depuis longtemps un pays démocratique qui assure la protection de ses citoyens. En outre, le demandeur a déclaré que l'État avait assuré sa protection et arrêté M. Font Calderon.

[42]            Les problèmes du demandeur ont débuté lorsque M. Font a loué une automobile auprès de l'agence de location où il travaillait. M. Font a ensuite signalé le vol de l'automobile; on a retrouvé celle-ci deux jours plus tard mais l'intérieur en avait été démantelé. Alors que le demandeur quittait son travail quelques jours plus tard, trois étrangers l'ont agressé tout en l'accusant de projeter de voler leur « marchandise » et d'en savoir trop au sujet de M. Font. Le demandeur a signalé l'incident aux policiers, qui lui ont offert leur assistance et ont patrouillé aux alentours de sa maison. Les policiers ont arrêté M. Font après que le demandeur l'eut identifié et ils l'ont inculpé de trafic de stupéfiants. Le demandeur a fait l'objet de nouvelles menaces de mort après l'arrestation de M. Font et il est retourné voir les policiers pour pouvoir faire partie d'un programme de protection des témoins. Les policiers ont dit au demandeur qu'un tel programme n'existait pas mais qu'ils lui offraient toujours d'effectuer des patrouilles.


[43]            La Cour d'appel fédérale a traité du caractère adéquat de la protection offerte par l'État dans Villafranca c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1992), 99 D.L.R. (4th) 334, autorisation d'interjeter appel à la Cour suprême du Canada rejetée, [1993] S.C.C.A. no 76 (QL). La Cour d'appel a déclaré ce qui suit (page 337 de l'arrêt) :

Il n'est pas facile de se décharger de l'obligation de prouver que l'on ne peut pas se réclamer de la protection de son propre pays. Le test applicable est objectif, le demandeur étant tenu de démontrer qu'il lui est physiquement impossible de rechercher l'aide de son gouvernement (ce n'est clairement pas le cas ici) ou que le gouvernement lui-même ne peut d'une façon quelconque la lui accorder.

Aucun gouvernement qui professe des valeurs démocratiques ou affirme son respect des droits de la personne ne peut garantir la protection de chacun de ses citoyens en tout temps. Ainsi donc, il ne suffit pas que le demandeur démontre que son gouvernement n'a pas toujours réussi à protéger des personnes dans sa situation. Le terrorisme au service d'une quelconque idéologie perverse est un fléau qui afflige aujourd'hui de nombreuses sociétés; ses victimes, bien qu'elles puissent grandement mériter notre sympathie, ne deviennent pas des réfugiés au sens de la Convention simplement parce que leurs gouvernements ont été incapables de supprimer ce mal. Toutefois, lorsque l'État se révèle se faible, et sa maîtrise sur une partie ou sur l'ensemble de son territoire est si ténue qu'il n'est qu'un gouvernement nominal, comme cette Cour a trouvé que c'était le cas dans l'arrêt Zalzali c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1991] 3 C.F. 605, 14 Imm. L.R. (2d) 81, 126 N.R. 126, un réfugié peut à bon droit affirmer être incapable de se réclamer de sa protection. Le demandeur qui fait valoir cette incapacité doit normalement invoquer la guerre civile, une invasion ou l'effondrement total de l'ordre au pays. Par contre, lorsqu'un État a le contrôle efficient de son territoire, qu'il possède des autorités militaires et civiles et une force policière établies, et qu'il fait de sérieux efforts pour protéger ses citoyens contre les activités terroristes, le seul fait qu'il n'y réussit pas toujours ne suffit pas à justifier la prétention que les victimes du terrorisme ne peuvent pas se réclamer de sa protection.

Il ressort clairement de ce passage que la protection offerte par l'État n'a pas à être parfaite pour être adéquate aux termes de la Convention.

[44]            Le demandeur a soutenu que la Commission avait fait abstraction de sa preuve ou l'avait mal interprétée, lorsqu'elle a déclaré que la protection de la police était disponible alors que cette protection lui avait en fait été refusée. La Commission a déclaré à la page 2 de ses motifs :

Le demandeur a reconnu qu'il avait reçu la protection de l'État, mais estimait qu'il lui fallait une protection supplémentaire. Le 12 mars 2002, trois mois après le dépôt de sa plainte initiale (pièce P-2), le demandeur voulait faire partie d'un programme de protection des témoins puisqu'il avait confirmé que M. Font était bel et bien la personne qui avait loué la voiture. En outre, il a dit qu'il avait servi de témoin et qu'à ce titre, il s'exposait à une menace puisqu'il n'existait pas de programme de protection.

[45]            Dans cette partie de sa décision, la Commission a reconnu qu'aucun programme de protection des témoins n'était offert par l'État et que le demandeur avait estimé inadéquate la protection obtenue de l'État après qu'on lui eut proféré des menaces de mort. Ces allégations ont été manifestement prises en compte avant que la Commission ne statue que, quoique la protection offerte au demandeur n'était sans doute pas parfaite, elle était adéquate au sens où l'entend Villafranca, précité.


[46]            Selon le demandeur, la Commission n'a pas mentionné ni prise en compte dans ses motifs les éléments de preuve allant en sens contraire des faits à l'appui de sa décision. Le demandeur a déclaré que la Commission n'a pas pris en compte la pièce P-9 qui, soutient-il, laisse voir que l'État n'offre aucune protection aux témoins d'un crime qui signalent ce crime à la police ou qui lui prêtent assistance. Il y a lieu de noter, premièrement, que la Commission a déclaré qu'aucun programme de protection des témoins n'était disponible au Costa Rica. J'ai passé en revue la pièce P-9 et je relève qu'on y mentionne l'absence de programme de protection des témoins. Cela n'est pas incompatible avec la conclusion de la Commission. Deuxièmement, on mentionne par ailleurs dans la pièce que jouissent d'une protection les témoins et les personnes qui aident la police lors d'une enquête.

[47]            On a signalé dans le rapport que l'information sur ce point était peu abondante dans les sources consultées. On y a fait aussi mention d'un cas où la protection de la police a été offerte après qu'a été soulevé un tollé à l'échelle internationale. La police, dans cette affaire, a assuré au témoin une protection de 24 heures sur 24. On ne dit pas dans le rapport que les témoins ne peuvent disposer de la protection de l'État, mais plutôt qu'aucun programme de protection des témoins n'est disponible.

[48]            J'estime qu'il était raisonnable pour la Commission de statuer comme elle l'a fait sur la capacité de l'État à dispenser sa protection.

[49]            La demande contrôle judiciaire sera par conséquent rejetée.

[50]            Ni l'une ni l'autre partie n'a désiré soumettre à mon examen de demande de certification d'une question grave de portée générale.


                                        ORDONNANCE

[51]            La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                            _ John A. O'Keefe _             

                                                                                                     Juge                          

Ottawa (Ontario)

Le 20 janvier 2005

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.


                         COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                       IMM-6905-03

INTITULÉ :                      OSCAR LUIS ALFARO ALFARO

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                            Le 10 août 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :      LE JUGE O'KEEFE

DATE DES MOTIFS ET DE

L'ORDONNANCE :        Le 20 janvier 2005

COMPARUTIONS :

Warren L. Creates                                             POUR LE DEMANDEUR

Susanne Pereira                                                 POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Perley-Robertson, Hill & McDougall LLP         POUR LE DEMANDEUR

Ottawa (Ontario)

John H. Sims, c.r.                                             POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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