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Date: 19971210


Dossier: T-956-97

         ACTION IN PERSONAM AGAINST BESTON CHEMICAL CORPORATION, INC., CHINA NORTH CHEMICAL INDUSTRIES CORPORATION, CHINA XINSHIDAI COMPANY, CHINA OCEAN SHIPPING (GROUP) CO. (COSCO) AND GUANGZHOU OCEAN SHIPPING COMPANY (COSCO GUANGZHOU)                 

Entre:

     PARAMOUNT ENTERPRISES INTERNATIONAL, INC.

     Plaintiff

     ET

     BESTON CHEMICAL CORPORATION, INC.

     and

CHINA NORTH CHEMICAL

INDUSTRIES CORPORATION

and

CHINA XINSHIDAI COMPANY

and

CHINA OCEAN SHIPPING (GROUP) CO. (COSCO)

and

GUANGZHOU OCEAN SHIPPING

COMPANY (COSCO GUANGZHOU)

     Defendants

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE

[1]      Il s'agit en l'espèce d'une requête des défenderesses, China Ocean Shipping (Group) Co. et Guangzhou Ocean Shipping Company (les défenderesses), en vertu de l'alinéa 415(1)a) et du paragraphe 415(3) des Règles de la Cour fédérale (les règles) afin qu'il soit ordonné à la demanderesse de leur fournir des détails plus amples et plus précis sur certains paragraphes de sa déclaration d'action.

[2]      Le ou vers le 29 août 1997, les procureurs de la demanderesse ont fait parvenir au procureur des défenderesses une réponse (la réponse) à la demande de précisions que ce dernier leur avait fait parvenir en juillet 1997. Toutefois, cette réponse est vue comme insuffisante et non conforme aux exigences des règles qui exigent que les faits essentiels supportant une plaidoirie soient plaidés expressément.

Contexte de l'action

[3]      On retient pour les fins de la présente requête qu'aux paragraphes 7 et 11 de sa déclaration d'action, la demanderesse reproche aux défenderesses d'avoir commis à son égard un délit d'ingérence, c'est-à-dire d'avoir délibérément obtenu que les autres défenderesses au dossier ne respectent pas une charte-partie conclue entre ces dernières et la demanderesse.

Règles en matière de détails

[4]      Avant de rendre une ordonnance en matière de détails, la Cour doit se demander si une partie dispose de renseignements suffisants pour comprendre la thèse de la partie adverse et préparer une réponse adéquate, qu'il s'agisse d'une défense ou d'une réponse. (Voir Astra Aktiebolag c. Inflazyme Pharmaceuticals Inc. (1995), 61 C.P.R. (3d) 178 (C.F. 1ère inst.), à la page 184.)

[5]      Dans la décision Embee Electronic Agencies Ltd. c. Agence Sherwood Agencies Inc. et al (1979), 43 C.P.R. (2d) 285 (C.F. 1ère inst.), à la page 287, le juge Marceau explique dans quelle mesure la partie défenderesse est en droit d'obtenir, à l'étape des plaidoiries, des détails quant à la preuve de la partie demanderesse:

                 À ce stade préliminaire, un défendeur a le droit d'obtenir tous les détails qui lui permettront de mieux saisir la position du demandeur, de savoir sur quoi se fonde l'action contre lui et de comprendre les faits sur lesquels elle s'appuie, afin de pouvoir répondre intelligemment à la déclaration et énoncer correctement les moyens sur lesquels il appuie sa propre défense, mais il n'a pas le droit d'aller plus loin et d'en demander plus.                 
                 (mon souligné)                 

Analyse

[6]      Ce que les défenderesses déplorent principalement dans la réponse est le fait qu'à cette occasion les procureurs de la demanderesse leur ont fait parvenir une foule de documents plutôt que d'extirper de ces documents et de colliger dans une plaidoirie distincte les faits essentiels qu'ils entendaient fournir à titre de précisions.

[7]      Je ne suis pas prêt à reconnaître que la réponse des défenderesses est insuffisante à tous égards. Certes, elle ne respecte pas la forme selon laquelle les détails apportés doivent se retrouver. Toutefois, il m'appert qu'en ce qui a trait aux paragraphes 1, 2 et 4 de la déclaration d'action sur lesquels les défenderesses avaient initialement formulé des questions, la réponse est satisfaisante. Aucune précision additionnelle ne sera requise à leur égard.

[8]      La même conclusion s'applique en ce qui concerne le paragraphe 12 de la déclaration d'action puisque suivant la réponse et les propos tenus par le procureur de la demanderesse lors des plaidoiries sur la requête à l'étude, ledit paragraphe 12 s'adresse au bris contractuel de la charte-partie; bris qui, à l'opposé du délit d'ingérence, n'implique pas directement les défenderesses.

[9]      Il n'en va pas de même toutefois en ce qui a trait au paragraphe 8 de la déclaration d'action qui se lit comme suit:

                 8.      Further or alternatively and without prejudice to the foregoing, Defendants Cosco and Cosco Guangzhou are equally liable to indemnify Paramount, jointly and severally with the other Defendants herein, as a result of their wrongful and illegal interference with the Conlinebooking, of which Cosco and/or Cosco Guangzhou had full knowledge and knowing or being deemed to have known that their said interference would cause damages to Paramount;                 

[10]      Une affirmation d'ingérence dans l'exécution d'un contrat entre deux autres parties constitue une affirmation sérieuse. C'est un allégué qui porte. Pour le mettre de l'avant, on doit compter que la demanderesse possédait et possède toujours les faits essentiels le soutenant (pour un aperçu des éléments devant soutenir un allégué d'ingérence dans l'exécution d'un contrat, voir Halsbury's Laws of England, 4e éd., vol. 45, par. 1518 et l'arrêt Fabbi et al c. Jones, [1973] R.C.S. 42).

[11]      Ce délit est certes dans la même famille que les gestes pour lesquels les règles 409 in limine et 415(1)a) prévoient des plaidoiries détaillées. Ces dispositions se lisent comme suit:

                 409. Une partie doit plaider spécifiquement toute question (par exemple l'exécution, la décharge, une loi de prescription, la fraude ou tout fait impliquant une illégalité)                 
                      ...                 
                 415. (1) Sous réserve de l'alinéa (2), toute plaidoirie doit fournir les détails nécessaires à toute allégation y compris mais, sans restreindre la portée générale de ce qui précède,                 
                      a) des détails des fausses déclarations, fraudes, abus de confiance, manquements délibérés ou influences indues sur lesquels s'appuie la partie qui plaide;                 
                 (mes soulignés)                 

[12]      L'importance de respecter ces règles en plaidoirie est rappelée, entre autres, dans les arrêts Dolomite Svenska Aktiebolag c. Dana Douglas Medical Inc. (1994), 58 C.P.R. (3d) 531 et Commercial Union Assurance Co. plc et al. v. M.T. Fishing Co. and Wood (1996), 107 F.T.R. 291.

[13]      Comme précisions additionnelles sur le paragraphe 8 de la déclaration d'action, la demanderesse a référé les défenderesses à six documents et a indiqué ce qui suit dans sa réponse:

                 3.      In full and complete answer to the particulars sought with respect to paragraph 8 of the Statement of Claim, Plaintiff states as follows:                 
                      a.      The wrongful and illegal interference results from Cosco and/or Cosco Guangzhou's agreement to carry the cargo referred to in the Statement of Claim and/or their insistence and/or coercion as alleged by the Defendants Beston and Nocinco that the shippers of this cargo ship the subject cargo with the Defendants Cosco or Cosco Guangzhou;                 

[14]      Cela ne m'apparaît pas suffisant dans les circonstances pour permettre aux défenderesses de plaider intelligemment sur cet allégué. Je considère donc que la demanderesse devra fournir les précisions suivantes que les défenderesses formulent comme suit au paragraphe 5 de leur requête amendée:

                 a)      what wrongful and illegal "insistence and/or coercion" was allegedly made by these Defendants?                 
                 b)      how was such alleged "insistence and/or coercion" made, and if in writing, Defendants request production thereof?                 
                 c)      what person(s) within each of the Defendants made the alleged "insistence and/or coercion"?                 
                 d)      when was it made?                 
                 e)      to what individual person(s) was the alleged "insistence and/or coercion" addressed?                 
                 f)      where or from what place was the alleged "insistence and/or coercion" made?                 

[15]      Contrairement à ce que soutient la demanderesse, ces différentes questions ne m'apparaissent pas aller par leur détail au-delà de ce qui doit normalement se plaider dans les circonstances.

[16]      De plus, si en réponse auxdites questions la demanderesse entend référer les défenderesses à divers documents, elle pourra certes le faire mais elle devra également extirper de ces documents les faits essentiels qu'elle entend amener à titre de précisions.

[17]      La demanderesse disposera d'un délai de quinze (15) jours pour fournir lesdites précisions.

[18]      La requête présente des défenderesses doit être autrement rejetée. Bon nombre des autres précisions recherchées sont de la nature d'éclaircissements que les défenderesses devront conserver pour l'étape de l'interrogatoire au préalable de la partie demanderesse; étape qui sans nul doute prendra place dans la présente affaire.

[19]      Les frais sur la présente requête suivront le sort de la cause.

Richard Morneau

     protonotaire

MONTRÉAL (QUÉBEC)

le 10 décembre 1997

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     NOMS DES AVOCATS ET DES PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU DOSSIER DE LA COUR:

INTITULÉ DE LA CAUSE:

T-956-97

PARAMOUNT ENTERPRISES INTERNATIONAL, INC.

     Plaintiff

ET

BESTON CHEMICAL CORPORATION, INC. and CHINA NORTH CHEMICAL INDUSTRIES CORPORATION and CHINA XINSHIDAI COMPANY and CHINA OCEAN SHIPPING (GROUP) CO. (COSCO) and GUANGZHOU OCEAN SHIPPING COMPANY (COSCO GUANGZHOU)

     Defendants

LIEU DE L'AUDIENCE:Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE:le 1er décembre 1997

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE

DATE DES MOTIFS DE L'ORDONNANCE:le 10 décembre 1997

COMPARUTIONS:


Me Andrew Ness

pour la demanderesse


Me Guy Vaillancourt

pour les défenderesses China Ocean Shipping (Group) Co. (Cosco) et Guangzhou Ocean Shipping Company (Cosco Guangzhou)

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:


Me Andrew Ness

Sproule, Castonguay, Pollack

Montréal (Québec)

pour la demanderesse


Me Guy Vaillancourt

Étude légale Guy Vaillancourt

Québec (Québec)

pour les défenderesses China Ocean Shipping (Group) Co. (Cosco) et Guangzhou Ocean Shipping Company (Cosco Guangzhou)


Me John O'Connor

Langlois, Robert

Québec (Québec)

pour la défenderesse Beston Chemical Corporation, Inc.


Me Andrea Sterling

Gottlieb & Pearson

Montréal (Québec)

pour ICI Canada Inc.


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