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Date : 19981211


Dossier : T-1284-98

OTTAWA (Ontario), le vendredi 11 décembre 1998

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE REED

ENTRE :


ROGER OBONSAWIN, FAISANT AFFAIRE SOUS LA DÉNOMINATION DE

NATIVE LEASING SERVICES,


demandeur,

(appelant),


- et -


SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA,

REPRÉSENTÉE PAR LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,


défenderesse,

(intimée).


ORDONNANCE

     VU la requête datée du 29 octobre 1998, présentée au nom du demandeur (appelant) pour interjeter appel, en vertu de l'article 51 des Règles de la Cour fédérale (1998), de l'ordonnance par laquelle le protonotaire adjoint a accueilli la demande de radiation de la déclaration présentée par la défenderesse (intimée);

     APRÈS avoir entendu la requête le 23 novembre 1998, à Toronto (Ontario);

     APRÈS avoir examiné les observations écrites déposées par la suite au nom des parties;

     POUR les motifs délivrés aujourd'hui;

     LA COUR STATUE QUE :

     L'appel est rejeté.


B. Reed

juge

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.


Date : 19981211


Dossier : T-1284-98

ENTRE :


ROGER OBONSAWIN, FAISANT AFFAIRE SOUS LA DÉNOMINATION DE

NATIVE LEASING SERVICES,


demandeur,

(appelant),


- et -


SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA,

REPRÉSENTÉE PAR LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,


défenderesse,

(intimée).


MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE REED

[1]      Il s'agit d'un appel d'une décision par laquelle le protonotaire adjoint a radié la déclaration du demandeur parce qu'elle ne révélait aucune d'action valable.

[2]      Le demandeur emploie un certain nombre d'Indiens inscrits, dont au moins une partie travaillent à l'extérieur de la réserve. Le siège de son entreprise est situé sur la réserve. En réponse à l'arrêt Williams c. Canada, [1992] 1 R.C.S. 877, la défenderesse a modifié sa pratique concernant l'imposition du revenu des employés du demandeur. La nouvelle pratique est exposée dans un document intitulé Exonération du revenu selon la Loi sur les Indiens : Lignes directrices, préparé pour guider les fonctionnaires de Revenu Canada et les contribuables concernés. Les Lignes directrices ont été rédigées après consultation avec un certain nombre de groupes (groupes autochtones). Le demandeur estime que les Lignes directrices ne sont pas fidèles à l'article 87 de la Loi sur les Indiens, tel qu'il a été interprété dans l'arrêt Williams, et que les Lignes directrices devraient être rédigées en des termes plus larges, qui étendraient la portée de l'exemption à ses employés.

[3]      À l'origine, la défenderesse était d'accord pour saisir la Cour de la portée des Lignes directrices de la façon la plus expéditive et la plus efficace possible. Malheureusement, les discussions ont échoué, les avocats s'opposent maintenant et quatre causes types introduites par les employés afin de faire trancher certaines questions, mettant en cause des faits légèrement différents, sont en instance devant la Cour.

[4]      L'employeur demandeur, M. Obonsawin, a également intenté une action. Il sollicite un jugement déclaratoire portant que les Lignes directrices n'ont pas d'effet juridique. Il demande :

         [Traduction]         
         a)      un jugement déclaratoire portant que les Lignes directrices n'ont pas d'effet juridique dans la mesure où elles sont interprétées ou appliquées de façon à exiger que l'employeur satisfasse à l'une ou l'autre des conditions suivantes, comme facteur de rattachement principal, pour qu'un Indien puisse se prévaloir de l'article 87 de la Loi sur les Indiens :         
              i)      l'employeur est une bande indienne,         
              ii)      l'employeur est un conseil tribal,         
              iii)      l'employeur est une organisation indienne dirigée par des bande ou conseils tribaux; et les personnes qui bénéficient de l'emploi vivent pour la plupart dans la réserve;         
         b)      un jugement déclaratoire portant que l'administration de l'article 87 de la Loi sur les Indiens au moyen de la ligne directrice # 4 constitue un manquement aux obligations fiduciaires de la défenderesse envers le demandeur;         
         c)      les dépens;         
         d)      toute autre réparation que la Cour jugera convenable et appropriée dans les circonstances.         

[5]      Le protonotaire adjoint a conclu que le demandeur avait un intérêt direct personnel dans le litige, mais que l'action devait être radiée parce que les Lignes directrices ne peuvent donner ouverture à un recours judiciaire - elles n'ont pas d'effet en droit.

[6]      La ligne directrice # 4, qui présente un intérêt particulier, est reproduite ci-dessous aux fins de l'appréciation du statut des Lignes directrices. Elle prévoit que tout le revenu qu'un Indien tire d'un emploi est exonéré d'impôt si toutes les conditions suivantes sont réunies :

         "      l'employeur réside dans une réserve         
         "      l'employeur est, selon le cas,         
              -      une bande indienne possédant une réserve, ou un conseil de bande représentant une ou plusieurs bandes indiennes qui possèdent des réserves;         
              -      une organisation indienne relevant d'un ou de plusieurs conseils ou bandes semblables et qui se consacre exclusivement au développement social, culturel, éducationnel ou économique d'Indiens qui vivent pour la plupart, dans des réserves;         
         "      les tâches liées à l'emploi font partie des activités non commerciales de l'employeur, lesquelles ne visent que le mieux-être des Indiens vivant dans la réserve. [Exemples omis.]         

[7]      Les Lignes directrices définissent aussi (" Définition des termes ") les termes utilisés :

         " dans une réserve " signifie dans une réserve selon la définition donnée dans la Loi sur les Indiens , y compris tout établissement considéré comme une réserve aux fins du Décret de remise visant les Indiens, ainsi que tout autre endroit considéré comme tel en vertu de la législation fédérale (par exemple, les terres de catégorie I-A aux termes de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec);         
         " employeur résidant dans une réserve " signifie que la réserve est l'endroit à partir duquel l'entreprise est effectivement dirigée et administrée.         
         " Indien " signifie un Indien selon la définition donnée dans la Loi sur les Indiens ;         
         " Indien vivant dans une réserve " signifie que l'Indien vit dans une réserve, dans un établissement domestique qui est son lieu principal de résidence et le centre de ses activités quotidiennes;         
         le " développement social, culturel, éducationnel ou économique " inclut la fourniture de services sociaux, notamment le counselling et les soins de santé.         
         Remarque         
         On considère habituellement que la direction et l'administration centrale d'une entreprise relèvent du groupe qui exerce les fonctions d'un conseil d'administration. Il se peut toutefois que d'autres personnes administrent effectivement l'entreprise. En général, la direction et l'administration d'une entreprise sont exercées à l'établissement principal de celle-ci, mais il est admis qu'elles peuvent l'être à un endroit autre que le bureau administratif principal. Les faits détermineront où la direction et l'administration centrale de l'entreprise sont réellement exercées.         

[8]      L'avocate du demandeur soutient que les Lignes directrices ne sont pas de la même nature que les directives ou décisions anticipées délivrées par Revenu Canada parce qu'elles ont été rédigées après consultation des différents groupes Indiens conformément à l'obligation fiduciaire de consulter ces groupes qui incombe à la défenderesse. Elle prétend que cette qualification des Lignes directrices est mentionnée dans la déclaration et doit être tenue pour véridique aux fins de la requête en radiation.

[9]      Je ne suis pas convaincue que, même si la consultation a eu lieu en conformité avec une obligation fiduciaire de consultation, ces Lignes directrices ne sont pas de la même nature que les bulletins sur la Loi de l'impôt sur le revenu et les décisions par anticipation que Revenu Canada publie quotidiennement en ce qui concerne l'interprétation de la Loi de l'impôt sur le revenu. Elles ne peuvent donner ouverture à un recours judiciaire.

[10]      Selon moi, la décision du protonotaire adjoint doit être confirmée. Je rends cette décision un peu à regret, parce que je pense que l'avocate du demandeur essaie de régler les questions en litige de la façon la plus efficace et la moins chère possible. Comme je l'ai mentionné lors de l'audience, il se peut que le demandeur puissent reformuler sa demande (bien que probablement pas devant notre Cour) pour contester l'obligation qui lui incombe en sa qualité d'employeur de retenir l'impôt payable par ses employés et ainsi soulever les questions dont il voulait saisir la Cour en l'espèce sous une forme pouvant donner ouverture à un recours judiciaire. Je dois néanmoins rejeter l'appel.


B. Reed

Juge

OTTAWA (ONTARIO)

le 11 décembre 1998

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :          T-1284-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Roger Obonsawin c. Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :          23 novembre 1998

MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR MADAME LE JUGE REED

DATE DES MOTIFS :          11 décembre 1998

ONT COMPARU :

Me Leslie Pinder              POUR LE DEMANDEUR

Me Clarine Ostrove

Me Paul Plourde              POUR LA DÉFENDERESSE

Me Karen Cooper

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mandell Pinder              POUR LE DEMANDEUR

Vancouver (C.-B.)

Morris Rosenberg              POUR LA DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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