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Date : 20000808


Dossier : T-2211-98



ENTRE :

     MARK1 MARKETING CORPORATION,

     demanderesse,

     - et -

     INTENSE SOFTWARE INCORPORATED,

     VINCENT LEBOW, CHRISTOPHER

     BOOTHROYD, CLIVE ALLWORK

     et PATRICK ASHFORD,

     défendeurs.


     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE JOHN A. HARGRAVE




[1]          Il s'agit d'une action en contrefaçon d'un procédé breveté d'impression d'illustrations en couleur. Le procédé ordinaire de quadrichromie utilisé pour l'impression d'illustrations en couleur exige quatre clichés distincts, un pour chaque couleur d'encre transparente, en jaune, en magenta, en bleu et en noir, pour produire une illustration en couleur; c'est un procédé coûteux. Il existe bien des procédés faisant appel à un nombre moindre de clichés, par sélection de deux ou trois couleurs, mais ils comportent des inconvénients, particulièrement pour l'impression de reproductions dans lesquelles les couleurs sont bien équilibrées.


[2]          La demanderesse a breveté un procédé d'impression à deux clichés n'utilisant que deux couleurs d'encre, au lieu de quatre, et qui donne une image apparemment supérieure à celles qui sont obtenues au moyen des procédés actuellement disponibles de reproduction à deux clichés et deux couleurs d'encre. L'invention s'applique, dit-on, aussi bien à l'impression qu'à la photocopie. La contrefaçon alléguée est concrétisée dans le logiciel des défendeurs appelé « Powertone » , qui utiliserait le procédé breveté de la demanderesse.


[3]          La demanderesse poursuit la société défenderesse pour contrefaçon et les particuliers défendeurs Lebow et Boothroyd parce qu'en leur qualité de dirigeants, ils ont sciemment et délibérément fait développer et commercialiser par leur société le logiciel Powertone après avoir eu connaissance de la contrefaçon. Elle poursuit également Allwork et Ashford, en qualité d'administrateurs, pour avoir soutenu les dirigeants de la société, en ayant connaissance de la contrefaçon ou sans s'en soucier. Il est allégué que cette activité a violé les droits de la demanderesse, a permis aux défendeurs de réaliser un bénéfice et a causé un préjudice à la demanderesse.


[4]          Les défendeurs sollicitent maintenant par cette requête la radiation de la déclaration tout entière, ou subsidiairement la radiation des mentions de trois des particuliers défendeurs dans la déclaration, diverses précisions et, s'il y a lieu, une prorogation de délai en vue du dépôt de leur défense.


[5]          Il convient de relever que la requête ne mentionne que trois des particuliers défendeurs, MM. Lebow, Boothroyd et Allwork. Les précisions demandées de la demanderesse concernent les quatre particuliers défendeurs. Les arguments, tels qu'ils ont été déposés dans le dossier de la requête et par la suite, ne font mention que des trois particuliers défendeurs indiqués ci-dessus. Bien que les présents motifs et l'ordonnance en découlant visent Intense Software Incorporated et les défendeurs Lebow, Boothroyd et Allwork, les motifs s'appliquent également, en un certain sens, à M. Ashford, qui se trouve dans la même situation que M. Allwork. Il se peut que la demanderesse, volontairement, renonce à sa demande à l'égard de M. Ashford ou fasse une modification appropriée.


[6]          Dans les présents motifs, les termes « défendeurs » ou « particuliers défendeurs » excluent M. Ashford.


ANALYSE

Principes de droit usuels

[7]          L'avocat des défendeurs expose que la norme en matière de radiation consiste à apprécier si les faits articulés, tenus pour avérés, révèlent une cause raisonnable d'action, c'est-à-dire une cause d'action « qui a quelque chance de succès » , citant l'arrêt de la Cour d'appel fédérale Hirsch Company c. Minshall (1989), 22 C.P.R. (3d) 268, à la page 269. Selon d'autres formulations de la règle, il faut qu'il soit évident, manifeste et hors de tout doute raisonnable que l'action n'a aucune chance de succès : voir, par exemple, l'arrêt Hunt c. Carey Canada, [1990] 2 R.C.S. 959, à la page 980, car un demandeur ne devrait pas « être privé d'un jugement » , même si l'affaire soulève des questions complexes ou si l'action est inédite (loc. cit.).


[8]          Quelle que soit la formulation retenue, il s'agit d'une norme très exigeante pour le défendeur qui cherche à faire radier une déclaration, car il doit fondamentalement établir que la demande est futile.

Radiation de la déclaration tout entière

[9]          L'argumentation des défendeurs, en ce qui touche la radiation de la déclaration tout entière sur le fondement de l'absence de cause d'action selon l'alinéa 221(1)a) des Règles, est qu'il n'y a pas allégation que quiconque ait pratiqué la méthode de reproduction Powertone au Canada et, en l'absence de faits établissant une violation du brevet, aucune cause d'action n'a été plaidée, ce qu'ils appuient sur l'affaire Precision Metalsmith Inc. c. Cercast Inc. (1966), 49 C.P.R. 234 (Cour de l'échiquier), dont le sommaire expose les motifs. En fait, plaident les défendeurs, la déclaration devrait exposer le droit exclusif de la demanderesse et l'empiétement actif des défendeurs sur ce droit.

[10]          L'avocat de la défenderesse reconnaît que la simple vente d'articles destinés à la contrefaçon d'un brevet n'est pas nécessairement constitutive de contrefaçon, ainsi que l'établit l'affaire Procter & Gamble Co. c. Bristol-Myers Canada Ltd. (1979), 39 C.P.R. (2d) 145, à la page 166 (C.F.).

[11]          Dans cette affaire, il s'agissait d'un brevet portant sur des feuilles d'adoucisseur de tissus pour les sécheuses. La défenderesse n'utilisait pas elle-même l'adoucisseur, mais elle le mettait à la disposition des consommateurs. Le juge Addy a relevé le mode d'emploi qui figurait sur les emballages, ainsi que la façon dont la défenderesse invitait et encourageait le public à utiliser le produit. Il a poursuivi en disant que la défenderesse avait, pour son propre profit et de façon systématique, aidé et incité le public à la contrefaçon et qu'il suffisait d'établir que l'article avait été en fait vendu par la défenderesse aux fins de distribution au dernier contrefacteur. Voici la teneur de ses propos, à la page 167 :

Il est difficile de nier que la présente défenderesse a, pour son propre profit et de façon systématique, aidé et incité le public à violer les revendications de méthode détenues par la demanderesse et, en conséquence, qu'elle est une partie à chacune des violations commises par les usagers. Si la défenderesse a encouragé ou provoqué une contrefaçon, je pense qu'il n'est pas nécessaire dans ce cas que le fournisseur ait été en rapport direct avec le consommateur en état de contrefaçon, ni même qu'il connaisse l'identité de ce dernier ou qu'il lui ait vendu directement l'article. Il suffit d'établir que l'article a été en fait vendu par la défenderesse aux fins de distribution au dernier contrefacteur, que la dernière vente soit faite par un mandataire de la défenderesse ou par un distributeur ou un détaillant indépendant. En l'espèce, l'article vendu enfreint les revendications de produit faisant l'objet du brevet détenu par la demanderesse et est produit et vendu initialement dans le but exprès de revente au public aux fins d'utilisation conforme au mode d'emploi établi par la défenderesse.
L'invention comprend à la fois un produit et une méthode. Dans les circonstances, le fait d'amener sciemment, le grand public à contrefaire l'une ou l'autre des revendications de méthode, constitue en soi une contrefaçon, par la défenderesse, de cette revendication de méthode.      (page 167)

Essentiellement, inciter à la contrefaçon ou provoquer la contrefaçon d'une revendication de méthode constitue en soi une contrefaçon. C'est essentiellement ce que font les défendeurs en l'espèce : ils vendent, sous la forme d'un logiciel appelé Powertone, la méthode d'impression en couleur à l'égard de laquelle la demanderesse est titulaire d'un droit breveté.

[12]          L'avocat de la demanderesse invoque également l'arrêt Windsurfing International Inc. c. Trilantic Corp. (1986), 8 C.P.R. (3d) 241 (C.A.F.), portant sur la vente d'éléments constitutifs pouvant être assemblés en vue de produire une planche à voile qui violait le brevet de la demanderesse. Le juge Urie, s'exprimant au nom de la Cour, était d'avis que « ... l'argument voulant que l'intimée n'ait pu violer le brevet parce qu'elle aurait fourni des pièces plutôt que la planche à voile tout assemblée est dénué de tout fondement » (page 264). Dans l'affaire Windsurfing, essentiellement, l'intimée ne vendait pas simplement des pièces, elle vendait des pièces dans le but de constituer une planche à voile contrefaite. Sans l'assemblage, l'achat des pièces disjointes n'avait aucun sens. Le juge Urie a repoussé l'argumentation de la défenderesse en ces termes : « À mon avis, la proposition voulant qu'on puisse éviter une action en contrefaçon de brevet en vendant des pièces formant un ensemble plutôt qu'en vendant ces pièces assemblées est absurde et erronée » (page 265). Dans l'affaire Windsurfing, la défenderesse a également plaidé qu'il ne peut y avoir contrefaçon de la part de celui qui vend simplement des pièces disjointes, puisqu'il ne saurait y avoir contrefaçon qu'une fois la planche à voile effectivement assemblée par le client. Le juge Urie a rejeté l'argument en disant qu'il devait être qualifié de spécieux (loc.cit.).

[13]          Essentiellement, la défenderesse Intense Software Incorporated ne vend pas seulement un logiciel : selon les allégations de la déclaration, que je dois, dans le cadre d'une requête en radiation, tenir pour avérées, ce qui est vendu, c'est la méthode brevetée de reproduction des couleurs. Cela est conforme aux propos du juge Urie dans l'arrêt Windsurfing, notamment son observation tranchante que l'argument présenté en faveur de la radiation de la déclaration tout entière était spécieux et constituait même une proposition « absurde et erronée » . Je passe maintenant à la question de la radiation de la demande contre les administrateurs eux-mêmes.

Radiation de la demande contre les dirigeants et administrateurs

[14]          Selon la déclaration, M. Lebow, en qualité de président, dirigeant et administrateur de la société défenderesse, et M. Boothroyd, en qualité de secrétaire et administrateur, ont sciemment et délibérément fait poursuivre le développement et la commercialisation par la société défenderesse du logiciel Powertone après qu'ils eurent pris connaissance de la contrefaçon alléguée (paragraphes 17 et 18 de la déclaration).

[15]          Au paragraphe 19 de la déclaration, il est ensuite exposé que MM. Allwork et Ashford, en qualité d'administrateurs au courant des agissements du président et du secrétaire, ont soutenu ces agissements en sachant qu'ils étaient de nature à constituer une contrefaçon ou se sont montrés indifférents à l'égard du risque de contrefaçon. Il n'est pas donné de précisions au sujet de ce soutien.

[16]          Les deux avocats sont d'avis que les principes applicables sont exposés dans l'arrêt de la Cour d'appel fédérale Mentmore Manufacturing Co. v. National Merchandise Manufacturing Co. (1978), 40 C.P.R. (2d) 164.

[17]          Cet arrêt pose le principe que les dirigeants et les administrateurs ne doivent pas être condamnés pour la contrefaçon par la société, à moins qu'il existe des faits à partir desquels on peut raisonnablement conclure que l'administrateur ou le dirigeant ne faisait pas simplement diriger la fabrication et la vente des marchandises contrefaites, dans le cours normal des activités de la société, mais avait plutôt commis, de façon délibérée, des actes qui étaient de nature à constituer une contrefaçon, ou s'est montré indifférent à l'égard de la contrefaçon. Dans cet arrêt, la Cour d'appel n'est pas allée jusqu'à statuer que l'administrateur ou le dirigeant doit savoir que les actes qu'il ordonne ou accomplit constituent des violations du brevet, jugeant simplement qu'on devait pouvoir conclure raisonnablement, d'après les circonstances, qu'il avait commis délibérément des actes condamnables :

Je ne pense pas qu'on doive aller jusqu'à poser en principe que l'administrateur ou le dirigeant doit savoir ou avoir des raisons de savoir que les actes qu'il ordonne ou accomplit constituent des violations. Ce serait imposer une condition de responsabilité qui n'existe pas, généralement, en matière de violation de brevet. Il convient d'observer qu'une telle connaissance a été jugée, aux États-Unis, non essentielle en matière de responsabilité personnelle d'administrateurs ou dirigeants (voir Deller's Walker on Patents, 2e éd., 1972, vol. 7, aux pages 117-118). À mon avis, il existe toutefois certainement des circonstances à partir desquelles il y a lieu de conclure que ce que visait l'administrateur ou le dirigeant n'était pas la conduite ordinaire des activités de fabrication et de vente de celle-ci, mais plutôt la commission délibérée d'actes qui étaient de nature à constituer une contrefaçon ou qui reflètent une indifférence à l'égard du risque de contrefaçon. De toute évidence, il est difficile de formuler précisément le critère approprié. Il convient de pouvoir dans chaque cas apprécier toutes les circonstances pour déterminer si celles-ci entraînent la responsabilité personnelle.      (p. 174)

[18]          Dans l'arrêt Mentmore Manufacturing, le juge LeDain a signalé le danger que comportait la tendance à condamner trop facilement un administrateur ou un dirigeant pour contrefaçon, qui est que cela rendrait les postes d'administrateur ou de dirigeant excessivement hasardeux, en particulier dans le cas d'une petite société dont les actions sont concentrées dans quelques mains : voir les pages 171 et 172 de l'arrêt Mentmore Manufacturing. Toutefois, pour la même raison, les administrateurs et les dirigeants d'une petite société dont les actions sont concentrées dans quelques mains seront considérés, peut-être à leur désavantage, être au courant de toutes les activités de la société : Laboratoire Dr. Renauld Inc. c. 537500 Ontario Ltd. (1990), 31 C.P.R. (3d) 333, à la page 338 (C.F. 1re inst.)

[19]          Il est clairement établi qu'il faut des actes commis délibérément ou sciemment pour condamner personnellement les dirigeants et administrateurs pour contrefaçon de brevet. L'avocat des défendeurs cite une affaire pertinente, Katun Corp. c. Technofax Inc. (1988), 22 C.P.R. (3d) 269, décision du juge Strayer (tel était alors son titre). Le juge Strayer a abordé la question de la radiation de parties de la déclaration comportant des allégations de contrefaçon à l'encontre des dirigeants et administrateurs de la société défenderesse, en fonction du principe établi dans l'arrêt Mentmore Manufacturing, mais a conclu qu'il ne suffisait pas d'alléguer, dans la déclaration, des actes commis de propos délibéré et sciemment, sans autre précision :

Le paragraphe 19 de la déclaration précité, bien que reprenant les termes employés par la Cour d'appel dans l'affaire Mentmore, n'expose pas de faits permettant de conclure que ces deux individus ont « délibérément et sciemment » provoqué ou dirigé l'acte de contrefaçon allégué. Certes, il ne suffit pas simplement d'utiliser ces mots précis pour alléguer les « faits essentiels » du prétendu méfait de ces défendeurs particuliers : autrement nous serions revenus aux considérations d'ordre technique des anciennes formes d'action. Il est plutôt nécessaire que des faits suffisants soient allégués pour que les défendeurs particuliers connaissent, du moins de façon générale, le genre de contrôle qu'ils exercent sur la société ou le genre de comportement personnel dont on se plaint.

Le juge Strayer souligne qu'il ne suffit pas d'employer les termes « délibérément et sciemment » , mais qu'il faut plutôt que des faits suffisants soient allégués pour que les défendeurs particuliers connaissent, du moins de façon générale, le genre de contrôle qu'ils exercent sur la société ou le genre de comportement personnel dont on se plaint. À ce point, je répartirais les particuliers défendeurs en deux groupes : les dirigeants, d'un côté, et ceux qui n'étaient qu'administrateurs, de l'autre.

[20]          Dans le cas de MM. Lebow et Boothroyd, qui étaient à la fois dirigeants et administrateurs, il est précisé qu'ils ont poursuivi le développement et la commercialisation du logiciel argué de contrefaçon, après qu'ils eurent pris connaissance de la contrefaçon. Il s'agit de précisions suffisantes pour les soustraire au résultat de l'affaire Katun, où la demande de radiation de deux particuliers défendeurs a été accueillie, encore qu'elle l'a été sans préjudice du droit des demandeurs de déposer une déclaration modifiée.

[21]          J'ai de la difficulté à accepter la demande formée contre MM. Allwork et Ashford, en leur qualité d'administrateurs, leur seule faute semblant être d'avoir soutenu les activités de contrefaçon des dirigeants de la société, en sachant que ces agissements étaient de nature à constituer une contrefaçon, ou en montrant de l'indifférence à l'égard du risque de contrefaçon. Juger les administrateurs responsables sur la base d'allégations du genre irait bien au-delà de la jurisprudence actuelle. On est loin de la notion, mentionnée dans l'affaire Procter & Gamble (précitée) de l'aide ou de l'incitation à la contrefaçon. Je ne considérerais même pas que cela constitue une cause d'action inédite, qu'il y aurait lieu d'examiner. La mention de M. Allwork au paragraphe 19 est donc radiée, ainsi que toutes les autres mentions du défendeur Allwork, mais sans préjudice de toute modification appropriée que la demanderesse peut souhaiter effectuer, à l'égard de M. Allwork ou de M. Ashford, dans un délai de 21 jours. J'en viens maintenant à la demande de précisions.

Précisions

[22]          La déclaration n'ayant pas été radiée tout entière, il me reste à examiner la demande de précisions. La fonction des précisions est bien connue, étant exposée dans plusieurs arrêts, notamment dans l'arrêt Gulf Canada Ltd. c. The Mary Mackin, [1984] 1 C.F. 884 (C.A.F.). En l'espèce, les défendeurs mettent l'accent sur la première fonction, informer l'autre partie de la nature des arguments auxquels elle devra faire face, ainsi que sur les quatrième, cinquième et sixième fonctions, limiter la généralité des plaidoiries, déterminer les points à instruire et ceux pour lesquels un interrogatoire est requis et enlever toute liberté d'action à la partie de manière à ce qu'elle ne puisse examiner les questions qui ne font pas partie des plaidoiries.

[23]          Si les défendeurs suggèrent que la demanderesse agit sur la base de simples hypothèses, espérant découvrir des faits additionnels au cours de l'enquête préalable, il semble, du moins dans la plupart des cas, y avoir suffisamment de faits sur lesquels fonder une demande sans qu'on puisse reprocher à la demanderesse de se livrer à un interrogatoire à l'aveuglette.

[24]          Quant aux précisions demandées, je note l'absence d'un affidavit exposant que les précisions sont nécessaires pour la plaidoirie des défendeurs et qu'ils n'en ont pas connaissance : voir, par exemple, le passage en ce sens dans l'affaire Windsurfing International c. Novaction Sports Inc. (1988), 18 C.P.R. (3d) 230, à la page 237 (C.F. 1re inst.) et la jurisprudence qui y est citée. À titre d'exemple, dans l'affaire Flexi-Coil Ltd. c. Smith-Roles Ltd. (1979), 42 C.P.R. (2d) 180, à la page 182, le juge Cattanach rejette une requête en précisions, en raison de l'insuffisance de l'affidavit, même s'il s'agissait d'un affidavit souscrit par un associé principal, lequel y exprimait l'opinion que les précisions étaient nécessaires. Voir également Lex Tex Canada Ltd. c. Cirtex Knitting Inc. (1977), 28 C.P.R. (2d) 30, à la page 32, où le juge Mahoney se dit forcé, en l'absence d'affidavit, de conclure qu'il est probable que la défenderesse possède déjà ces précisions :

Subsidiairement, la défenderesse cherche à obtenir des détails relatifs au présumé achat des marchandises à un importateur, sans déposer d'affidavit à l'appui de la demande. D'après le dossier, je dois conclure qu'il est probable que la défenderesse possède déjà ces détails, alors que vraisemblablement la demanderesse n'en aura pas connaissance avant la communication des documents.

Sur le fondement de cet extrait, il me faut examiner la déclaration, les précisions demandées et les précisions déjà fournies pour voir s'il existe des lacunes manifestes qui appellent des précisions.

[25]          J'ai examiné les actes de procédure, notamment les précisions données, du point de vue de celui qui n'est pas versé dans la technique de l'imprimerie, sinon qu'il a lu attentivement le brevet annexé à la déclaration, et qui a fait un effort pour établir les correspondances entre le brevet et les actes de procédure. J'ai gardé à l'esprit que, lorsque les actes de procédure mentionnent la méthode Powertone, je peux appliquer l'opinion du juge Mahoney dans l'affaire Lex Tex (précitée), que « ... il est probable que la défenderesse possède déjà ces détails, alors que vraisemblablement la demanderesse n'en aura pas connaissance avant la communication des documents » . J'éprouve de la difficulté à comprendre un passage du paragraphe 15 de la déclaration : [traduction] « La contribution à la première image optique obtenue utilise l'un d'au moins deux filtres différents et est considérablement moindre que la contribution à cette première image optique obtenue à l'aide de l'autre de ces deux filtres différents » . La demanderesse fournira donc une réponse à la demande de précision numéro 17. Sauf sur ce point, il semble que les défendeurs possèdent suffisamment de précisions en vue de leurs plaidoiries : il se peut que d'autres précisions soient demandées en vue de l'instruction, mais à ce stade, cela est prématuré.

[26]          Les défendeurs ont un délai de 21 jours, à compter du moment où leur seront fournies la précision ci-dessus et éventuellement une déclaration modifiée, lesquelles doivent être fournies dans les 21 prochains jours, pour déposer leur défense.

[27]          Quant aux dépens, chaque partie n'ayant eu gain de cause qu'en partie, chacune supportera ses frais.


                             (Signature) « John A. Hargrave »

                                 Protonotaire

Le 8 août 2000

Vancouver (Colombie-Britannique)

Traduction certifiée conforme


__________________________

Richard Jacques, LL. L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER




N DU DOSSIER :      T-2211-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :      MARK1 MARKETING CORPORATION

     c.     

     INTENSE SOFTWARE INCORPORATED,

     VINCENT LEBOW, CHRISTOPHER

     BOOTHROYD, CLIVE ALLWORK

     et PATRICK ASHFORD

LIEU DE L'AUDIENCE :      Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :      le 1er février 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU PROTONOTAIRE HARGRAVE

EN DATE DU :      8 août 2000



ONT COMPARU :

Richard Martin          POUR LA DEMANDERESSE

Gavin Manning          POUR LA DÉFENDERESSE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Richard W. Martin

Avocat

Toronto (Ontario)          POUR LA DEMANDERESSE

Oyen Wiggs Green & Mutala

Vancouver (Colombie-Britannique)      POUR LA DÉFENDERESSE

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