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Date : 20060511

Dossier : IMM‑5307‑05

Référence : 2006 CF 573

ENTRE :

MANJIT SINGH TOOR

demandeur

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge Pinard

 

 

[1]               Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de la décision d’un agent d’immigration du Haut‑Commissariat du Canada à New Delhi (l’agent), en date du 28 juillet 2005, qui lui a refusé un visa de résidence temporaire.

 

[2]               Le demandeur avait communiqué avec la Direction de l’immigration pour le commerce et l’investissement, en vue d’obtenir la résidence permanente selon le Programme de candidatures de la province du Manitoba.

[3]               Le 30 juin 2005, la Direction de l’immigration pour le commerce et l’investissement envoyait au demandeur une lettre lui indiquant qu’il devait obtenir un visa de visiteur avant de pouvoir obtenir une entrevue au Canada.

 

[4]               Le 28 juillet 2005, le demandeur sollicitait à cette fin un visa de résident temporaire.

 

[5]               Le même jour, la demande était refusée.

 

* * * * * * * *

 

[6]               Les dispositions applicables de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), sont les suivantes :

 

3. (1) En matière d’immigration, la présente loi a pour objet :

 

3. (1) The objectives of this Act with respect to immigration are

 

[…]

 

[…]

 

f) d’atteindre, par la prise de normes uniformes et l’application d’un traitement efficace, les objectifs fixés pour l’immigration par le gouvernement fédéral après consultation des provinces;

 

(f) to support, by means of consistent standards and prompt processing, the attainment of immigration goals established by the Government of Canada in consultation with the provinces;

 

[…]

 

[…]

 

20. (1) L’étranger non visé à l’article 19 qui cherche à entrer au Canada ou à y séjourner est tenu de prouver :

 

20. (1) Every foreign national, other than a foreign national referred to in section 19, who seeks to enter or remain in Canada must establish,

 

[…]

 

[…]

 

b) pour devenir un résident temporaire, qu’il détient les visa ou autres documents requis par règlement et aura quitté le Canada à la fin de la période de séjour autorisée.

 

(b) to become a temporary resident, that they hold the visa or other document required under the regulations and will leave Canada by the end of the period authorized for their stay.

 

22. (1) Devient résident temporaire l’étranger dont l’agent constate qu’il a demandé ce statut, s’est déchargé des obligations prévues à l’alinéa 20(1)b) et n’est pas interdit de territoire.

 

22. (1) A foreign national becomes a temporary resident if an officer is satisfied that the foreign national has applied for that status, has met the obligations set out in paragraph 20(1)(b) and is not inadmissible.

 

[7]               Les dispositions applicables du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227, sont les suivantes :

179. L’agent délivre un visa de résident temporaire à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

 

179. An officer shall issue a temporary resident visa to a foreign national if, following an examination, it is established that the foreign national

 

a) l’étranger en a fait, conformément au présent règlement, la demande au titre de la catégorie des visiteurs, des travailleurs ou des étudiants;

 

(a) has applied in accordance with these Regulations for a temporary resident visa as a member of the visitor, worker or student class;

 

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour autorisée qui lui est applicable au titre de la section 2;

 

(b) will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2;

 

c) il est titulaire d’un passeport ou autre document qui lui permet d’entrer dans le pays qui l’a délivré ou dans un autre pays;

 

(c) holds a passport or other document that they may use to enter the country that issued it or another country;

 

d) il se conforme aux exigences applicables à cette catégorie;

 

(d) meets the requirements applicable to that class;

 

e) il n’est pas interdit de territoire;

 

(e) is not inadmissible; and

 

f) il satisfait aux exigences prévues à l’article 30.

 

(f) meets the requirements of section 30.

 

 

 

[8]               Le paragraphe 81(1) des Règles des Cours fédérales (1998), DORS/98‑106, est ainsi rédigé :

 

81. (1) Les affidavits se limitent aux faits dont le déclarant a une connaissance personnelle, sauf s’ils sont présentés à l’appui d’une requête, auquel cas ils peuvent contenir des déclarations fondées sur ce que le déclarant croit être les faits, avec motifs à l’appui.

81. (1) Affidavits shall be confined to facts within the personal knowledge of the deponent, except on motions in which statements as to the deponent's belief, with the grounds therefor, may be included.

 

 

 

* * * * * * * *

 

 

[9]               Finalement, non convaincu de l’authenticité de la demande, l’agent a refusé la demande pour les motifs suivants :

[TRADUCTION]

J’ai examiné toutes les pièces versées au dossier.

 

J’ai remarqué que, selon la lettre de la province du Manitoba, il semble que les sommes demandées et les documents de financement montrent d’importantes contradictions qui amoindrissent la crédibilité d’ensemble du demandeur. Les épargnes alléguées ne peuvent être vérifiées et figurent sur des documents qui sont d’apparence douteuse, vu qu’ils présentent des caractères inhabituels et sont dépourvus d’historique.

 

Par ailleurs, le demandeur n’a pas voyagé auparavant, n’ayant jusqu’à maintenant obtenu que des refus des États‑Unis et de la Nouvelle‑Zélande.

 

Je ne suis donc pas persuadé que le demandeur réponde à l’obligation qu’il a d’être un visiteur authentique.

 

Demande refusée.

 

 

* * * * * * * *

 

 

 

[10]           Selon le demandeur, le fait qu’il avait été invité à une entrevue par un gouvernement provincial donne de la crédibilité à sa demande de résidence temporaire. Compte tenu des faits, le demandeur dit qu’il aurait été opportun pour le décideur de lui donner l’occasion de répondre à ses inquiétudes, d’autant qu’il semble, du moins à première vue, que le demandeur répondait aux conditions du programme manitobain.

 

[11]           Le demandeur fait aussi valoir que, même si un refus rapide est plus facile sur le plan administratif pour la mission chargée de délivrer les visas à l’étranger, cela est contraire à la politique générale d’immigration du Canada, en particulier à l’alinéa 3(1)f) de la LIPR, qui dit que la LIPR a pour objet « d’atteindre, par la prise de normes uniformes et l’application d’un traitement efficace, les objectifs fixés pour l’immigration par le gouvernement fédéral après consultation des provinces ».

 

[12]           Toutefois, les conditions d’obtention d’un visa de résident temporaire sont exposées à l’article 179 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés. Une personne obtient le statut de résident temporaire si l’agent est persuadé que son séjour au Canada sera temporaire.

 

[13]           La délivrance d’un visa de résident temporaire est une décision discrétionnaire. L’agent a l’obligation d’accorder toute l’attention voulue à une demande, mais il n’est pas tenu de délivrer un visa de résident temporaire s’il n’est pas persuadé que le demandeur remplit les conditions prévues par la loi (De La Cruz c. Le ministre de l’Emploi et de l’Immigration (1989), 26 F.T.R. 285).

 

[14]           À mon avis, la décision et les notes du Système de traitement informatisé des données d’immigration (le STIDI) disent clairement que l’agent a considéré la situation du demandeur ainsi que son témoignage, y compris toutes les pièces produites par le demandeur, mais cela n’a pas suffi pour prouver que son séjour au Canada allait être temporaire.

 

[15]           Le ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration du Canada a adopté des lignes directrices sur le traitement des demandes de résidence temporaire. Un agent est chargé de déterminer si les liens du demandeur avec son pays d’origine sont suffisamment étroits pour que l’on soit assuré qu’il a l’intention d’y retourner après sa visite au Canada. En l’espèce, le demandeur n’a pas produit une preuve suffisante montrant que tel était le cas.

 

[16]           Plus précisément, comme l’a noté l’agent, le demandeur n’a pas apporté la preuve de voyages antérieurs, uniquement la preuve de refus antérieurs de visas de deux autres pays. Il a produit une preuve discutable et incohérente d’une quelconque stabilité financière pouvant l’inciter à retourner en Inde après une visite au Canada.

 

[17]           Selon la jurisprudence, lorsqu’un agent des visas ne porte pas à l’attention du demandeur de visa les conclusions défavorables qu’il a tirées de documents produits par le demandeur de visa, cela n’équivaut pas à une erreur sujette à révision. Ainsi que l’écrivait le juge Pelletier dans la décision Poon c. Canada (M.C.I.), [2000] A.C.F. n° 1993 (1re inst.) (QL) :

[12]     Le devoir de confronter un demandeur à des conclusions défavorables survient lorsque celles‑ci se fondent sur des documents dont le demandeur n’a pas eu connaissance. Lorsque la question se rapporte à un document que le demandeur a lui‑même produit, il n’incombe nullement à l’autre partie de prévoir la possibilité que le demandeur s’explique, puisque celui qui présente le document est réputé en connaître le contenu. Wang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] A.C.F. no 1274, (1999), 173 F.T.R. 266.

 

 

 

[18]           Je suis donc d’avis qu’il n’y a pas eu ici manquement à l’équité procédurale en l’espèce.

 

[19]           Pour autant que soit concernée la manière dont l’agent a apprécié les faits, je ne suis pas persuadé, après audition des avocats des parties et examen de la preuve, que la décision de l’agent est fondée sur une conclusion de fait erronée qu’il aurait tirée d’une manière abusive ou arbitraire ou au mépris des éléments qu’il avait devant lui (alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7). À mon avis, il était loisible à l’agent de douter que le demandeur se rendrait au Canada temporairement et qu’il quitterait le Canada à la fin de la période.

 

[20]           Pour les motifs susmentionnés, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

« Yvon Pinard »

Juge

 

Ottawa (Ontario)

Le 11 mai 2006

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM‑5307‑05

 

 

INTITULÉ :                                       MANJIT SINGH TOOR

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 1er MAI 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                        LE JUGE PINARD

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 11 MAI 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Wennie Lee                                                                  POUR LE DEMANDEUR

 

Marina Stefanovic                                                         POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Lee & Company                                                           POUR LE DEMANDEUR

Avocats

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.                                                         POUR LE DÉFENDEUR

Sous‑procureur général du Canada

 

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