Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision



     Date: 20001206

     Dossier: IMM-512-00


Entre :

     Siula LUBEYA

     Mayena LUBEYA

     Partie demanderesse

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION

     Partie défenderesse



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE PINARD :

[1]      La demande de contrôle judiciaire vise une décision rendue le 4 janvier 2000 par la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié statuant que les demandeurs ne sont pas des réfugiés au sens de la Convention.

[2]      Monsieur Siula Lubeya, « le demandeur » , âgé de 42 ans, et son épouse, madame Mayena Lubeya, âgée de 36 ans, citoyens de la République démocratique du Congo (RDC, ex-Zaïre), sont arrivés au Canada le 25 septembre 1998 et ont revendiqué le statut de réfugié au point d'entrée.

[3]      Monsieur Lubeya allègue avoir une crainte bien fondée de persécution en RDC en raison d'opinions politiques imputées et en raison de son appartenance au groupe social des anciens membres des Forces armées zaïroises (FAZ) et de la Garde civile du Zaïre.

     Page:

[4]      Madame Lubeya, de son côté, allègue avoir une crainte bien fondée de persécution en RDC en raison d'opinions politiques imputées et en raison de son appartenance au groupe social de la famille.

[5]      Il s'agit ici d'un cas où, après avoir refusé d'exclure le demandeur en vertu de l'alinéa 1F(a) de la Convention du fait qu'il était un membre de la FAZ et de l a Garde civile du Zaïre à une époque où cette dernière était devenue une organisation criminelle, le tribunal n'a pas cru l'histoire des demandeurs et a, en conséquence, rejeté leur revendication du statut de réfugié.

[6]      Devant présumer, en l'absence d'une preuve claire et convaincante au contraire, que la Section du statut a considéré la totalité de la preuve (voir Hassan c. Canada (M.E.I.) (1992), 147 N.R. 317, à la page 318) et considérant qu'il était loisible à la Section du sta tut de donner préséance à la preuve documentaire avec laquelle elle a confronté le demandeur (voir Zhou c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (18 juillet 1994), A-492-91 (C.F., Appel)), je n'ai pas été convaincu, après audition du procureur des deman deurs et révision de la preuve, que ce tribunal spécialisé ne pouvait pas, de façon générale, raisonnablement tirer les inférences qu'il a tirées et conclure comme il l'a fait (voir Aguebor c. Canada (M.E.I.) (1993), 160 N.R. 315, aux pages 316 et 317).

[7]      La Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, à son article 18.1(4)d ), nous enseigne également qu'en matière de crédibilité et d'appréciation des faits, il n'appartient pas à cette Cour de se substituer au tribunal administratif lorsque, comme ici, les demandeurs font défaut de prouver que sa décision est fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Je ne décèle en effet aucune erreur manifeste qui soit déterminante, dans ce dossier.

[8]      Enfin, compte tenu des circonstances particulières du présent cas, la perception de la Section du statut que l es demandeurs ne sont pas crédibles équivaut en fait à la conclusion qu'il n'existe aucun élément crédible pouvant justifier leur revendication du statut de réfugié (voir Sheikh c. Canada (M.E.I.) , [1990] 3 C.F. 238, à la page 244).

[9]      Bien que la demanderesse n'ait pas exclusivement lié sa revendication à celle du demandeur, invoquant ses propres opinions politiques imputées en plus de son appartenance au groupe social de la famille, il n'en demeure pas moins, tel qu'il appert de l'extrait suivant de la décision en cause, qu'ayant endossé totalement les déclarations jugées non crédibles de son époux, le tribunal pouvait raisonnablement conclure qu'elle n' était pas davantage crédible et en conséquence rejeter sa revendication comme i l l'a fait pour le demandeur :

         Vers la fin de l'audience, la demanderesse, dans un court témoignage entrecoupé de pleurs, a totalement endossé les déclarations faites par son époux.
         En raison des nombreuses invraisemblances et divergences, relevées durant le témoignage du demandeur principal et qui sont restées sans explication satisfaisante, le tribunal ne peut accorder de crédibilité à l'histoire des demandeurs. Les propos du juge MacGuigan, dans la cause Sheikh [Abdulhakim Ali Sheikh c. Canada (M.E.I.) (1990) 3 C.F. 238 (C.A.), p. 244], sont directement applicables en l'espèce:
« ...même sans mettre en doute chacune des paroles du demandeur, le tribunal peut douter raisonnablement de sa crédibilité au point de conclure qu'il n'existe aucun élém ent de preuve crédible ayant trait à la revendication...En d'autres termes, une conclusion générale quant au manque de crédibilité du revendicateur peut fort bien s' étendre à tous les éléments de preuve pertinents de son témoignage » .


[10]      Par ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[11]      Suite à l'audition devant moi, le procureur des demandeurs a proposé, prétentions écrites à l'appui, que les questions suivantes soient certifiées en vertu du paragraphe 83(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 :

[12]          1.      « Nonobstant une conclusion de la SSR à l'effet qu'un revendicateur n'est pas crédible quant aux événements qu'il doit avoir vécu dans son pays d'origine, ladite SSR a-t-elle l'obligation d' évaluer si ce revendicateur a tout de même une crainte raisonnable de persécution du fait de ses caractéristiques intrinsèques et/ou immuables tel que race, sexe, âge, orientation sexuelle, rel igion ou appartenance, ancienne ou actuelle, à un groupe particulier. »
2.      « La SSR a-t-elle l'obligation de statuer distinctement et spécifiquement sur la crédibilité du témoignage (selon les critères de l'arrêt Hilo (A-260-90, 15/03/91) de la Division d'Appel de cette Cour) et sur la crainte raisonnable de persécution de la conjointe d'un revendicateur principal qui au surplus a allégué une crainte propre de persécution et qui a témoigné d'actes précis de persécution vécus par elle. »


[13]      J'ai également pris connaissance des représentations écrites de la partie défenderesse qui s'oppose à la certification demandée, de même que des représentations écrites du 24 novembre 2000 déposées par la partie demanderesse en réplique.

[14]      Vu les faits particuliers de la présente cause et la nature des motifs ci-dessus, il m'apparaît évident que les questions proposées ne rencontrent pas les critères énoncés par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Liyanagamage c. Canada (M.C.I.) (1994), 176 N.R. 4. Il n'y a donc pas ici matière à certification.




                                                        

                                                                         JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 6 décembre 2000



 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.