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Date : 20191030


Dossier : IMM-6451-18

Référence : 2019 CF 1364

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 30 octobre 2019

En présence de monsieur le juge Gleeson

ENTRE :

YOUNUS ALGOHAR

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  M. Younus AlGohar, le demandeur, est citoyen du Royaume‑Uni. Sa demande de permis de séjour temporaire [PST] au titre du paragraphe 24(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [LIPR] a été rejetée au motif qu’il n’a pas révélé qu’on lui avait refusé un visa pour les États‑Unis. Après réexamen, la décision défavorable a été confirmée.

[2]  M. AlGohar sollicite le contrôle judiciaire de la décision de réexamen conformément au paragraphe 72(1) de la LIPR. Il soulève quatre questions :

  1. Y a‑t‑il eu atteinte aux droits de M. AlGohar en matière d’équité procédurale?

  2. L’agent a‑t‑il conclu à tort que l’omission portait sur des faits importants quant à un objet pertinent, ce qui a entraîné ou risqué d’entraîner une erreur dans l’application de la LIPR?

  3. L’agent a‑t‑il commis une erreur en n’examinant pas si la fausse déclaration avait été faite par inadvertance?

  4. L’agent a‑t‑il par ailleurs commis une erreur en refusant d’accorder le PST?

[3]  Je conclus qu’il n’y a pas eu manquement à l’équité procédurale et que la décision défavorable était raisonnable. Pour les motifs qui suivent, la demande est rejetée.

II.  Contexte

[4]  M. AlGohar se définit comme un chef spirituel. Il est le président‑directeur général [PDG] de la Messiah Foundation International [MFI], une organisation qui travaille à regrouper des gens de toutes confessions pour discuter de divinité et d’harmonie interconfessionnelle. À ce titre, M. AlGohar se déplace souvent pour donner des conférences et des entrevues.

[5]  En 2013, M. AlGohar a été déclaré coupable de fraude à l’aide sociale au Royaume‑Uni. Par conséquent, il est présumé interdit de territoire au Canada par application de l’alinéa 36(1)b) de la LIPR. Toutefois, suivant le paragraphe 24(1), les agents d’immigration sont autorisés à accorder la résidence temporaire aux étrangers malgré l’interdiction de territoire lorsque les circonstances le justifient.

[6]  À trois reprises avant la demande en cause, M. AlGohar avait obtenu un PST lui permettant de visiter le Canada en sa qualité de PDG de la MFI malgré son interdiction de territoire pour criminalité.

[7]  M. AlGohar avait prévu visiter de nouveau le Canada en octobre et novembre 2018 afin de poursuivre des activités liées à la MFI. Il a présenté une demande de PST au titre du paragraphe 24(1) de la LIPR. On lui a alors demandé de se présenter en entrevue.

[8]  Au cours de l’entrevue, on a demandé à M. AlGohar si un autre pays que le Canada lui avait refusé un visa. Il a d’abord répondu par la négative, ce qui correspondait aux renseignements contenus dans sa demande écrite. Lorsque l’agent lui a fait savoir qu’il ne croyait pas qu’il disait la vérité, M. AlGohar a reconnu qu’il s’est vu refuser un visa pour les États‑Unis. Il a expliqué que le refus ne lui était pas venu à l’esprit lorsqu’on lui avait posé la question auparavant et que, de toute façon, un visa américain avait finalement été accordé.

[9]  Dans une décision datée du 22 octobre 2018, l’agent a conclu que l’omission de divulguer le refus de visa constituait une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent qui aurait pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR. La demande de M. AlGohar a ainsi été refusée. La conclusion relative à la fausse déclaration a également entraîné une interdiction de territoire pour une période de cinq ans conformément au paragraphe 40(2) de la LIPR.

[10]  M. AlGohar a ensuite demandé le réexamen de la décision de refus. Ce faisant, M. AlGohar a soulevé un certain nombre de points, notamment (1) qu’il s’était antérieurement vu accorder trois PST; (2) qu’il s’était conformé aux conditions de son séjour lors de visites antérieures au Canada; (3) qu’il avait omis de mentionner le refus de visa américain parce qu’il était confus et stressé lors de l’entrevue; (4) qu’il avait signalé le refus de visa américain lorsqu’il avait reconnu son erreur. La décision de refus a été confirmée par lettre datée du 4 décembre 2018.

III.  Question préliminaire

[11]  Dans le cadre de ses observations orales, l’avocat du défendeur a fait remarquer que, dans l’avis de demande d’autorisation et de contrôle judiciaire [l’avis], M. AlGohar avait demandé une autorisation en vue du contrôle judiciaire de la décision du 22 octobre 2018. Or, l’ordonnance accordant l’autorisation de présenter une demande de contrôle judiciaire fait état de la décision rendue le 4 décembre 2018 à la suite du réexamen.

[12]  Les parties ne contestent pas que la décision dont la Cour est saisie est celle du 4 décembre. Dans sa plaidoirie, l’avocat du défendeur a confirmé que le dossier certifié du tribunal soumis à la Cour était complet en ce qui concerne les deux décisions, en date du 4 décembre et du 22 octobre. Les parties ont également reconnu que le contrôle de la décision du 4 décembre englobe nécessairement la décision du 22 octobre. Ni l’une ni l’autre partie n’a subi de préjudice en raison de la mention de la décision du 22 octobre dans l’avis.

[13]  À la suite de l’audience et à la demande de la Cour, l’avocat de M. AlGohar a informé la Cour par lettre que les parties convenaient que l’avis devait être modifié. J’estime qu’une modification officielle de l’avis n’est pas nécessaire. Toute lacune dans l’avis a été corrigée par l’ordonnance accordant l’autorisation de contrôle judiciaire de la décision du 4 décembre.

IV.  Norme de contrôle

[14]  Dans l’arrêt Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69, la Cour d’appel fédérale a récemment conclu que, lorsqu’il est question d’équité, la cour de révision doit se demander si le processus était « équitable eu égard à l’ensemble des circonstances » et que « la question fondamentale demeure celle de savoir si le demandeur connaissait la preuve à réfuter et s’il a eu possibilité complète et équitable d’y répondre ». La Cour d’appel a reconnu qu’il y a une certaine maladresse dans l’utilisation de la terminologie relative à la norme de contrôle lorsqu’il est question d’équité procédurale, et déclaré qu’« à proprement parler, aucune norme de contrôle n’est appliquée », mais que la norme de la décision correcte était celle qui reflétait bien le rôle de la cour (Chemin de fer Canadien Pacifique, par. 52 à 56). Dans mon examen de l’équité procédurale, je me pencherai sur la question de savoir si le processus était équitable compte tenu de l’ensemble des circonstances.

[15]  Les autres questions soulevées constituaient des questions de fait ou des questions mixtes de fait et de droit qui sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision raisonnable (Oloumi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 428, par. 12; Alalami c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 328, par. 10 [Alalami]).

V.  Analyse

A.  Y a‑t‑il eu atteinte aux droits de M. AlGohar en matière d’équité procédurale?

[16]  M. AlGohar soutient que le défaut de l’agent de l’informer, même de manière générale, de ses préoccupations quant à la fausse déclaration était inéquitable sur le plan procédural. Puisque l’agent n’a pas fait mention de ses préoccupations concernant le refus antérieur de visa des États‑Unis, M. AlGohar n’a pas été en mesure de se préparer pour l’entrevue et a été pris par surprise lorsque la question lui a été posée. Je ne suis pas d’accord.

[17]  La nature et l’étendue de l’obligation du décideur d’agir équitablement varient selon le contexte et doivent être évaluées au cas par cas. Cette obligation exige que le demandeur ait la possibilité de répondre aux préoccupations que le décideur peut avoir. Si tel est le cas, l’obligation est respectée (Jahazi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 242, par. 52). Dans certaines circonstances – par exemple, lorsque le demandeur n’est pas au courant des renseignements donnant lieu à une préoccupation – l’obligation de donner la possibilité de répondre peut comprendre l’obligation de donner un préavis. C’était le cas dans Chawla c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 434, que M. AlGohar invoque, mais ce n’est pas le cas en l’espèce.

[18]  M. AlGohar n’ignorait pas ses antécédents en matière d’immigration au Canada et dans d’autres pays et savait également que ses antécédents à cet égard étaient pertinents pour sa demande de PST. Il était tenu de divulguer cet historique dans sa demande écrite de PST, mais il ne l’a pas fait.

[19]  Au cours de l’entrevue, M. AlGohar a encore une fois omis de divulguer le refus de visa américain lorsqu’on lui a posé des questions au sujet des visas refusés antérieurement. À ce stade, l’agent a informé M. AlGohar qu’il ne le croyait pas et il lui a posé de nouveau la question. M. AlGohar a admis finalement le refus antérieur des États‑Unis et a expliqué pourquoi il ne l’avait pas signalé. Dans ces circonstances, je conclus qu’il n’y a pas eu manquement à l’équité procédurale.

[20]  Toutefois, si l’omission de donner un avis préalable à l’entrevue a entraîné un manquement quelconque à l’équité, j’estime que le processus de réexamen y a remédié. Dans le cadre du nouvel examen, M. AlGohar a non seulement réitéré son explication pour avoir omis de divulguer le refus de visa américain, mais il a également avancé l’argument selon lequel le fait que la question ait été soulevée au cours de l’entrevue l’a surpris et lui a causé un préjudice.

[21]  Dans ces circonstances, il n’y a pas eu d’atteinte aux droits de M. AlGohar en matière d’équité procédurale.

B.  L’agent a‑t‑il conclu à tort que l’omission portait sur des faits importants quant à un objet pertinent, ce qui a entraîné ou risqué d’entraîner une erreur dans l’application de la LIPR?

[22]  M. AlGohar souligne qu’un étranger est interdit de territoire en vertu de l’alinéa 40(1)a) de la LIPR lorsqu’une fausse déclaration porte sur des faits importants. Il s’appuie sur la décision Song c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 72 [Song] pour faire valoir que l’agent était tenu d’expliquer en quoi la fausse déclaration était importante et que le défaut de l’agent de le faire rend la décision déraisonnable.

[23]  Dans l’affaire Song, la fausse déclaration portait sur la mention inexacte du nom de l’employeur du demandeur dans une demande de résidence permanente. Tous les autres renseignements, y compris la nature de l’emploi du demandeur, étaient exacts et complets. Compte tenu de ces faits, le juge John Norris a conclu que l’omission de l’agent d’expliquer en quoi le nom inexact de l’employeur était important et comment il aurait pu entraîner une erreur dans l’application de la LIPR rendait la décision déraisonnable.

[24]  Les faits en l’espèce sont considérablement différents. M. AlGohar n’a pas déclaré de manière inexacte le refus de visa pour les États‑Unis. Il a plutôt omis de déclarer ces renseignements alors qu’ils étaient expressément exigés dans la demande écrite. En omettant ces renseignements, M. AlGohar a potentiellement privé l’agent de la possibilité d’enquêter sur le refus de visa et d’en tenir compte. Le fait que le visa américain a par la suite été accordé ne remédie pas à l’omission.

[25]  Le décideur n’est pas tenu de tirer une conclusion explicite sur chaque élément constitutif du raisonnement qui a mené à sa conclusion finale (Newfoundland and Labrador Nurses 'Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, par. 16 [Newfoundland Nurses]). Comme l’a fait remarquer le juge Yvan Roy, « [l]a nature même de l’omission, à savoir le rejet récent d’une demande de visa, est un fait important pour déterminer si la demande de visa de résident temporaire sera accordée » (Mohseni c Canada (MCI), 2018 CF 795, par. 41). En l’espèce, la nature importante de l’omission est évidente. Le fait que l’agent n’a pas abordé la question de l’importance de l’omission ne rend pas, compte tenu des faits, sa décision déraisonnable.

C.  L’agent a‑t‑il commis une erreur en n’examinant pas si la fausse déclaration avait été faite par inadvertance?

[26]  M. AlGohar se fonde sur son explication, à savoir qu’il avait simplement oublié le refus et que le visa américain avait finalement été accordé, pour faire valoir que l’agent aurait dû considérer l’omission comme une erreur commise par inadvertance. Il renvoie à la jurisprudence qui reconnaît une exception possible dans les cas où il y a eu omission innocente de fournir des renseignements (voir Alalami, par. 15). Il soutient que la conclusion de l’agent selon laquelle son omission de déclarer le refus de visa américain équivalait à une fausse déclaration était déraisonnable. Elle ne l’est pas.

[27]  M. AlGohar avait l’obligation de divulguer tous les faits importants dans sa demande. Or, il ne l’a pas fait. M. AlGonhar était expressément tenu de mentionner les refus de visa pour d’autres pays. Le refus du visa américain n’a pas été divulgué. Selon les notes du Système mondial de gestion des cas [SMGC], M. AlGohar a été interrogé plus d’une fois au sujet de refus antérieurs de visa pour d’autres pays au cours de l’entrevue avant qu’il reconnaisse avoir fait l’objet d’un tel refus. Compte tenu de ces faits, il était raisonnable de la part de l’agent de conclure que l’omission n’avait pas été faite par inadvertance.

[28]  L’agent a examiné et raisonnablement rejeté l’explication de M. AlGohar concernant l’omission par inadvertance. Aucune exception relative aux omissions innocentes de fournir des renseignements ne s’applique en l’espèce.

[29]  L’agent n’a pas commis d’erreur en omettant d’examiner si la fausse déclaration avait été faite par inadvertance.

D.  L’agent a‑t‑il par ailleurs commis une erreur en refusant d’accorder le PST?

[30]  Au début de sa décision, l’agent résume l’objet d’un PST et conclut qu’il n’y a pas de motifs suffisants justifiant la délivrance d’un tel permis :

[traduction]

Bien qu’un permis de séjour temporaire ait pour objet de permettre l’entrée au Canada en dépit d’infractions criminelles, il ne peut être délivré que dans des circonstances exceptionnelles, ou à l’occasion, lorsqu’il s’agit de protéger des intérêts impérieux du Canada. Après un examen attentif effectué avec compassion et après avoir soupesé tous les facteurs, j’ai conclu qu’il n’y avait pas de motifs suffisants justifiant la délivrance d’un permis dans votre cas.

[31]  Selon M. AlGohar, l’agent a ensuite procédé à une deuxième analyse complètement distincte, qui l’a mené à conclure à l’interdiction de territoire pour fausses déclarations. M. AlGohar soutient que cette conclusion n’est pas liée à la décision relative au PST, qu’elle ne constitue pas le fondement du refus et que la décision relative au PST est donc déraisonnable.

[32]  Je souscris aux observations de M. AlGohar jusqu’à un certain point. La décision initiale de refus est structurée d’une manière qui donne à penser que deux décisions distinctes ont été prises.

[33]  Les motifs, qui en l’espèce comprennent les notes du SMGC, doivent être examinés en corrélation avec le résultat. Comme je l’ai mentionné précédemment, il n’est pas nécessaire que les motifs soient parfaits, pas plus qu’ils ne doivent comprendre tous les arguments ou tous les détails qu’un juge siégeant en révision peut préférer voir examinés. Ils doivent plutôt permettre à la cour de révision de comprendre le fondement de la décision et de déterminer si la conclusion fait partie des issues acceptables. Au besoin, la cour de révision peut également examiner le dossier (Newfoundland Nurses, par. 12 à 18).

[34]  En l’espèce, l’agent a tiré deux conclusions distinctes. Bien qu’il ait été possible de parvenir à chacune de ces conclusions indépendamment l’une de l’autre, l’examen des motifs dans leur ensemble montre qu’en l’espèce, il ne s’agissait pas de décisions isolées. L’agent a d’abord conclu que le PST n’était pas justifié, puis il a abordé les préoccupations relatives aux fausses déclarations. Il est évident que le PST a été refusé en raison de la conclusion de fausse déclaration. 

VI.  Conclusion

[35]  Il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale. Les motifs reflètent les éléments requis en matière de justification, de transparence et d’intelligibilité, et la décision appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

[36]  La demande est rejetée. Les parties n’ont pas relevé de question grave de portée générale à certifier, et l’affaire n’est soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM-6451-18

LA COUR STATUE comme suit :

  1. La demande est rejetée;

  2. Aucune question n’est certifiée.

« Patrick Gleeson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 19e jour de novembre 2019

Sandra de Azevedo, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-6451-18

 

INTITULÉ :

YOUNUS ALGOHAR c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 21 OCTOBRE 2019

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE GLEESON

 

DATE DES MOTIFS :

LE 30 OCTOBRE 2019

 

COMPARUTIONS :

Ronald Poulton

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Bradley Gotkin

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Poulton Law Office

Professional Corporation

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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