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Date : 20060628

Dossier : IMM-71-06

Référence : 2006 CF 819

OTTAWA (ONTARIO), LE 28 JUIN 2006

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE DAWSON

 

ENTRE :

 

OLUWATOMISONA FADAYOMI

 

demandeur

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]        M. Oluwatomisona Fadayomi a présenté une demande en vue d'être dispensé, pour des raisons d'ordre humanitaire, de l'obligation que la loi lui impose de solliciter la résidence permanente depuis l'étranger. Alors que sa demande fondée sur des raisons d'ordre humanitaire était en instance, M. Fadayomi a épousé une citoyenne canadienne. Sa femme a ensuite soumis des documents de parrainage pour obtenir que la demande de son mari soit examinée en fonction de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada. Une agente d'immigration a conclu que M. Fadayomi ne remplissait pas les conditions prescrites pour pouvoir faire partie de cette catégorie en raison de l'insuffisance des éléments de preuve tendant à démontrer que ce mariage était authentique et qu'il n'avait pas été contracté en vue de faciliter l'immigration de M. Fadayomi. L'agente a également estimé qu'il n'y avait pas suffisamment de raisons d'ordre humanitaire pour justifier de dispenser M. Fadayomi de l'obligation de présenter sa demande de résidence permanente depuis l'étranger.

 

[2]        Saisi de la présente demande de contrôle judiciaire, je conclus que la preuve soumise à l'agente justifiait raisonnablement sa conclusion que l'authenticité du mariage n'avait pas été démontrée, et je conclus que l'agente n'a pas commis d'erreur qui justifierait d'annuler sa décision dans la façon dont elle a apprécié les raisons d'ordre humanitaire. La demande de contrôle judiciaire sera donc rejetée.

 

[3]        En ce qui concerne l'authenticité du mariage de M. Fadayomi, l'agente a signalé que M. Fadayomi s'était marié dans les trois mois suivant la première entrevue menée au sujet de sa demande fondée sur des raisons d'ordre humanitaire. Lors de cette entrevue, M. Fadayomi n'a cependant pas mentionné qu'il fréquentait sa future épouse, affirmant même expressément qu'il ne sortait avec personne parce qu'il n'avait pas de temps pour une petite amie. Lors de sa seconde entrevue, qui a eu lieu après son mariage, M. Fadayomi a déclaré qu'il avait en fait commencé à fréquenter sa femme avant la première entrevue. Lors de la seconde entrevue, M. Fadayomi et sa femme ont donné des versions différentes de leur situation financière et se sont contredits sur les raisons pour lesquelles, d'après leur souvenir, la belle-mère de M. Fadayomi n'avait pas assisté à leur mariage. Se fondant sur la seconde entrevue, l'agente a conclu que chacun des époux avait une connaissance limitée de certains des aspects importants de leur vie respective.

 

[4]        La conclusion selon laquelle M. Fadayomi n'a pas réussi à démontrer l'authenticité de son mariage est une conclusion de fait. L'exposé que l'agente a fait des éléments d'information communiqués par chacun des époux lors de l'entrevue n'est pas contesté. Je suis d'avis qu'il n'était pas déraisonnable de la part de l'agente, au vu de ces éléments, de conclure que M. Fadayomi n'avait pas réussi à démontrer que son mariage était authentique. Le fait que, lors de sa première entrevue, M. Fadayomi ait affirmé qu'il ne fréquentait personne alors qu'à sa seconde entrevue, il a déclaré qu'au moment de la première entrevue, il sortait déjà avec sa future épouse est d'ailleurs fort révélateur.

 

[5]        Le demandeur affirme que l'agente a commis trois erreurs qui justifient l'annulation de sa décision en ce qui concerne son évaluation des raisons d'ordre humanitaire. Elle aurait tout d'abord manqué aux principes de justice naturelle en se fondant sur des éléments de preuve extrinsèques portant sur l'état de santé de M. Fadayomi. Ces éléments de preuve extrinsèques consisteraient en des recherches effectuées sur Internet au sujet des effets du temps froid sur l'anémie falciforme, l'avis de la Direction générale des services médicaux de Citoyenneté et Immigration Canada et la réponse de cette Direction au sujet de la possibilité d'obtenir des soins médicaux au Nigeria. Le demandeur affirme, en deuxième lieu, que l'agente a commis une erreur en écartant l'opinion médicale donnée par le médecin de M. Fadayomi, le docteur Turner. Enfin, le demandeur affirme que l'agente a mal apprécié les difficultés disproportionnées et excessives qu'il subirait s'il était forcé de retourner au Nigeria.

 

[6]        On ne m'a pas convaincue que l'agente a manqué aux principes de justice naturelle. Pour ce qui est des recherches effectuées sur Internet, l'agente a fait savoir à l'avocat de M. Fadayomi qu'elle avait appris, en consultant Internet, qu'on a constaté que le temps très froid aggrave l'anémie falciforme. Ce faisant, l'agente a clairement exprimé ses réserves, donnant ainsi à M. Fadayomi la possibilité d'y répondre et de participer véritablement au processus décisionnel. Il n'était pas nécessaire, selon moi, de produire le fruit des recherches ainsi effectuées, parce que l'agente avait fourni suffisamment d'éléments d'information pour permettre à M. Fadayomi et à son médecin de répondre à ses préoccupations (voir le jugement Hersi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 2136).

 

[7]        Quant aux autres documents, il ressort du dossier du tribunal que les renseignements fournis par la Direction générale des services médicaux ont été transmis à l'avocat de M. Fadayomi (pages 37 et 38 du dossier du tribunal) et on ne m'a pas convaincue que l'agente a obtenu d'autres renseignements de la Direction générale des services médicaux.

 

[8]        Pour ce qui est de la deuxième erreur que le demandeur reproche à l'agente, signalons que, même si le docteur Turner possédait incontestablement la compétence voulue pour se prononcer sur le traitement de l'anémie falciforme, le débat portait en fait sur la possibilité d'obtenir des soins médicaux adéquats au Nigeria. Il n'était pas déraisonnable de la part de l'agente de préférer les renseignements obtenus de la Direction générale des services médicaux à ceux d'un professeur de médecine du Nigeria. Dans la mesure où les propos de ce même professeur ont été rapportés dans un article où il exprime ses inquiétudes au sujet du peu d'attention que le gouvernement accorde au problème de l'anémie falciforme au Nigeria, il semble que cet article ait été rédigé environ trois ans avant que le médecin n'exprime son avis et qu'une grande partie des préoccupations formulées par ce professeur portaient sur le fait que cette maladie était alors considérée comme incurable.

 

[9]        Pour ce qui est de la dernière erreur reprochée à l'agente, l'appréciation qu'elle a faite des difficultés disproportionnées et excessives reposait sur les renseignements qui lui avaient été communiqués par le professeur de médecine du Nigeria et selon lesquels le médicament dont M. Fadayomi a besoin existe au Nigeria, où il est également possible d'obtenir des soins médicaux efficaces, surtout si l'on est instruit et bien nanti. La décision de l'agente résiste à un examen assez poussé sur ce point.

 

[10]      Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Les avocats n'ont soumis aucune question à certifier et je suis persuadée que le présent dossier ne soulève pas de question grave de portée générale. Aucune question ne sera donc certifiée.

 

JUGEMENT

 

[11]      LA COUR ORDONNE :

 

            La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

 

« Eleanor R. Dawson »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-71-06

 

INTITULÉ :                                       OLUWATOMISONA FADAYOMI

demandeur

 

                                                            et

 

                                                            MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

défendeur

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                 EDMONTON (ALBERTA)

 

 

DATE DE L'AUDIENCE :               LE 20 JUIN 2006

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LA JUGE DAWSON

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 28 JUIN 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

SIMON K. YU                                                                        POUR LE DEMANDEUR

 

RICK GARVIN                                                                       POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

SIMON K. YU                                                                        POUR LE DEMANDEUR

AVOCAT ET NOTAIRE

EDMONTON (ALBERTA)

 

JOHN H. SIMS, c.r.                                                                POUR LE DÉFENDEUR

SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

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