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Date : 20041217

Dossier : IMM-487-04

Référence : 2004 CF 1759

Ottawa (Ontario), le 17 décembre 2004

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE DANIÈLE TREMBLAY-LAMER

ENTRE :

                                                      NZOLAMESO N'SUNGANI

                                                           ZIBAKA N'SUNGANI

                                                         MAKUNZI N'SUNGANI

                                                      ZIMAKANDA N'SUNGANI

                                                            FUNDU N'SUNGANI

                                                          NGANDU N'SUNGANI

                                                                                                                                        demandeurs

                                                                             et

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Les demandeurs sollicitent, en application des articles 96 et 97 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), le contrôle judiciaire d'une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission), par laquelle la Commission a refusé aux demandeurs la qualité de réfugiés ou celle de personnes à protéger.


[2]                Les demandeurs (Nzolameso N'Sungani, Zibaka N'Sungani, Mazunki N'Sungani, Zimakanda N'Sungani, Fundu N'Sungani, Ngandu N'Sungani; âgés de 25, 20, 18, 16, 15 et 11 ans respectivement) sont des ressortissants de la République démocratique du Congo (la RDC) qui appartiennent à la même famille. L'aîné, Nzolameso N'Sungani, est le représentant désigné des trois mineurs. Les quatre premiers membres de la famille, qui ont voyagé depuis Kinshasa jusqu'aux États-Unis en passant par le Ghana, sont arrivés le 4 octobre 2001 au Canada, où ils ont demandé l'asile. Les deux derniers, dont le trajet a été essentiellement le même, sont arrivés le 26 août 2002 et ont demandé l'asile eux aussi.

[3]                Les demandeurs disent avoir des raisons de craindre la persécution en RDC, à cause de leur appartenance à un groupe social, c'est-à-dire leur famille. Ils affirment aussi être exposés à des risques de torture, à des peines cruelles et inusitées et à des menaces pour leurs vies.

[4]                Se fondant sur les nombreuses contradictions et invraisemblances de leurs témoignages, la Commission a conclu que les demandeurs n'étaient pas crédibles et que la persécution qu'ils appréhendaient était pure invention.


[5]                En l'espèce, la Commission, se fondant sur une série de divergences, de contradictions et d'invraisemblances, a tiré des conclusions négatives sur la crédibilité des demandeurs. Dans l'arrêt Aguebor c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.), [1993] A.C.F. no 732, au paragraphe 4 (QL), la Cour d'appel fédérale écrivait : « dans la mesure où les inférences que le tribunal tire ne sont pas déraisonnables au point d'attirer notre intervention, ses conclusions sont à l'abri du contrôle judiciaire » .

[6]                Plus récemment, des juges de la Cour fédérale, dont moi-même, ont appliqué, pour le contrôle des conclusions touchant la crédibilité, la norme de la décision manifestement déraisonnable : voir la décision Pissareva c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 2001 (1re inst.) (QL); et la décision Sinnathamby c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] A.C.F. no 742 (1re inst.) (QL). La Cour fédérale a même affirmé parfois que c'était là une règle bien établie : Selvarasa c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2004] A.C.F. no 515 (QL).

[7]                Néanmoins, s'agissant du contrôle judiciaire des conclusions touchant la crédibilité, l'analyse pragmatique et fonctionnelle est rarement employée dans la jurisprudence. L'arrêt Aguebor, précité, est fréquemment cité au soutien de la règle susmentionnée selon laquelle la norme de la décision manifestement déraisonnable est la norme applicable, et cela bien que l'arrêt de la Cour d'appel n'en fasse pas expressément état : voir par exemple la décision Husein c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 726 (1re inst.) (QL).


[8]                La Cour suprême du Canada a entre-temps souligné à maintes reprises la prééminence de l'analyse pragmatique et fonctionnelle : voir par exemple l'arrêt Dr. Q. c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226. Selon la Cour suprême, l'analyse ne doit pas être vue comme un rite machinal (ibid., au paragraphe 26), mais ses principes directeurs doivent être gardés à l'esprit dans un contrôle judiciaire. Il est donc nécessaire d'entreprendre cette analyse une fois d'une manière plus rigoureuse, d'autant que la question déterminante dans la grande majorité des décisions de la Commission se rapporte à la crédibilité.

[9]                L'analyse pragmatique et fonctionnelle repose sur quatre facteurs contextuels : « la présence ou l'absence dans la loi d'une clause privative ou d'un droit d'appel; l'expertise du tribunal par rapport à celle de la cour de révision sur la question en litige; l'objet de la loi et de la disposition particulière; enfin la nature de la question -- de droit, de fait ou mixte de droit et de fait » : arrêt Dr. Q., précité, au paragraphe 26.


[10]            S'agissant du premier de ces facteurs, les décisions de la Commission ne sont pas protégées par une clause privative formelle (voir l'arrêt Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 1 R.C.S. 982)[1], et donc ce facteur ne justifie pas une retenue considérable de la part de la juridiction de contrôle. Cependant, si l'on considère l'économie du texte législatif, et les dispositions se rapportant aux dossiers touchant les demandes d'asile -- c'est-à-dire le troisième facteur susmentionné -- on constate que la Commission jouit d'une latitude et d'un pouvoir considérables, ce qui milite pour une retenue judiciaire plus marquée : voir en particulier les articles 96, 97, 161 à 166 et 170 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.

[11]            Les facteurs décisifs ici sont la nature de la question et l'expertise de la Commission par rapport à celle de la Cour. Lorsque, comme c'est le cas ici, les conclusions tirées par la Commission, qu'elles se rapportent à des incohérences, des contradictions ou des invraisemblances, sont toutes de caractère purement factuel, alors les cours de justice doivent se montrer très circonspectes lorsqu'elles procèdent à un contrôle judiciaire. De même, la Commission a la « possibilité d'entendre le témoin et elle a compétence pour évaluer sa déposition, son comportement, sa franchise, son empressement à répondre, sa cohérence et sa logique » : Muthuthevar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1996] A.C.F. no 207, au paragraphe 6 (1re inst.) (QL). Il est évident que la Commission est la mieux placée pour juger de la crédibilité des demandeurs, parce que la Cour n'a pas la même occasion d'examiner et d'évaluer leurs témoignages.

[12]            Je suis donc d'avis que la norme de contrôle qu'il faut appliquer ici est celle de la décision manifestement déraisonnable.


[13]            Pour montrer que les conclusions de la Commission touchant leur crédibilité était manifestement déraisonnable, les demandeurs doivent prouver que sa décision était « clairement irrationnelle » . Autrement dit, « une décision qui est manifestement déraisonnable est à ce point viciée qu'aucun degré de déférence judiciaire ne peut justifier de la maintenir » : Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan, [2003] 1 R.C.S. 247, au paragraphe 52.

[14]            Les conclusions de la Commission relatives à la crédibilité des demandeurs portent sur deux aspects : la situation des demandeurs lorsqu'ils vivaient en RDC, et en particulier celle de l'aîné des demandeurs, Lukoki N'Sungani; puis le voyage des demandeurs vers le Canada.

[15]            S'agissant du premier aspect, la Commission a trouvé que l'incapacité de Makunzi de se souvenir, si ce n'est après y avoir réfléchi, du nom de son oncle, ainsi que des noms des personnes chez qui lui et ses frères et soeurs (Nzolameso, Zibaka et Zimakanda) sont demeurés après avoir été relâchés par les autorités, jetait le doute sur sa crédibilité.

[16]            L'ignorance du demandeur sur ce point est surprenante. Par ailleurs, le commissaire a donné au demandeur l'occasion de s'en expliquer, mais il n'a pu donner aucune raison, si ce n'est qu'il avait oublié. Il ne savait pas non plus qui étaient les gens qui avaient hébergé quatre des demandeurs pendant une période de huit mois, et cela rend sa version des faits peu crédible.


[17]            D'ailleurs, les événements qui se rapportent à Lukoki, le frère des demandeurs, constituent l'origine de leur fuite de la RDC vers le Canada et sont donc plus significatifs. Au cours de son témoignage, Makunzi a dit que Lukoki vivait chez les N'Sungani, alors que, selon la déclaration, les quatre demandeurs les plus âgés avaient quitté la maison pour se rendre avec Lukoki à Kinshasa.

[18]            Il y a là une contradiction évidente, et, puisque la Commission a porté cette contradiction à l'attention de Makunzi et que Makunzi ne s'en est pas expliqué, il était raisonnable pour la Commission d'en tirer une conclusion défavorable.

[19]            Finalement, pour ce qui est du voyage des demandeurs vers le Canada, la Commission avait des doutes sur la preuve entourant le financement du voyage, les actes de naissance des demandeurs et leurs documents de voyage. Le procès-verbal révèle des incohérences entre le témoignage du demandeur principal et le témoignage de son frère Nzolameso, à propos de la source des fonds. À un certain moment, l'un des demandeurs a déclaré que leur cousine et son mari avaient financé leur voyage; plus tard, un autre demandeur a reconnu que leur oncle les avait aidés financièrement. De même, s'agissant des deux demandeurs les plus jeunes (Fundu et Ngandu), Nzolameso a dit dans son témoignage que sa fiancée avait payé leur voyage, mais qu'il ne savait pas combien il avait coûté.


[20]            L'ignorance quasi totale des demandeurs à propos de leurs documents de voyage, et l'incohérence de leurs témoignages concernant la manière dont leur voyage avait été payé, voilà deux aspects qui permettaient de dire qu'ils n'étaient pas crédibles. La décision de la Commission de ne pas croire les demandeurs n'étaient en aucune façon manifestement déraisonnable.

Connaissances spécialisées

[21]            De par ses propres règles, la Commission est tenue, avant d'utiliser un renseignement ou une opinion qui est du ressort de sa spécialisation, d'en donner avis aux parties (article 18 des Règles de la section de la protection des réfugiés), afin qu'elles aient la possibilité d'y réagir. Si la Commission ne donne pas cet avis aux parties, elle commet un manquement à l'équité procédurale. Dans l'arrêt Gonzalez c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1981] 2 C.F. 781, à la page 782 (C.A.), cité dans la décision Hu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2003] A.C.F. no 788, au paragraphe 25 (1re inst.) (QL), le juge Urie décrivait en quoi consistent les connaissances spécialisées :

Il ne s'agit pas non plus de renseignements généraux, bien connus de la Commission et du public, du genre mentionné dans l'affaire Maslej. Si la Commission, lors d'une audience... doit se fonder sur le genre de renseignements dont il est question en l'espèce, renseignements auxquels un requérant pourrait, semble-t-il, très bien s'opposer, la justice naturelle exige que le requérant ait le droit de les contester de la même façon qu'il contesterait les preuves présentées lors de l'audience.


[22]            En l'espèce, les renseignements se rapportent au coût présumé du voyage des demandeurs de la RDC vers le Canada. La Commission a estimé dans ses motifs qu'un tel voyage coûte en général entre 5 000 et 7 0000 $US. La Commission a longuement questionné les demandeurs pour savoir qui avait payé leur voyage et quelles étaient les ressources de leurs protecteurs, mais aucun chiffre précis n'est apparu. Dans sa décision, la Commission a trouvé que les prétendus bienfaiteurs des demandeurs, un mécanicien et un commerçant, n'auraient pu décemment payer une telle somme. Les demandeurs n'ont pas eu l'occasion de réagir à cet aspect durant l'audience de la Commission.

[23]            Par ailleurs, même si ces chiffres ne sont qu'une estimation, la Cour a jugé qu'il est fautif de faire des conjectures sur ce que demandent habituellement les personnes qui organisent ce genre de voyage, et que l'on appelle parfois des « passeurs » : Anwar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] A.C.F. no 1434 (1re inst.) (QL).

[24]            Je suis disposé à admettre que, la Commission n'ayant pas révélé ces chiffres, qui étaient des « connaissances spécialisées » , au cours de son audience, elle a agi contrairement à ses propres règles de procédure et manqué à l'équité procédurale. Il s'agit cependant de savoir si ce manquement à l'équité procédurale requiert une nouvelle audience devant de nouveaux commissaires.


[25]            Selon le demandeur, cette erreur est fatale, et il cite à l'appui la décision Kitoko c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2004] A.C.F. no 1819 (1re inst.) (QL). Cependant, à mon avis, ce précédent n'autorise pas une telle conclusion. La décision rendue par la Commission dans l'affaire Kitoko soulevait plusieurs doutes, outre le fait que la Commission avait négligé de dire aux parties qu'elle s'en était remise à ses connaissances spécialisées. La juge MacTavish a expressément conclu que la décision de la Commission ne pouvait subsister, et cela en raison de l' « effet cumulatif des erreurs » : jugement Kitoko, précité, au paragraphe 27.

[26]            La jurisprudence autorise d'ailleurs une approche plus nuancée. Ordinairement, un manquement à l'équité procédurale rend nulles l'audience et la décision qui en résulte, mais il y a une exception à cette règle (voir les décisions suivantes : Kabedi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2004] A.C.F. no 545 (C.F.) (QL); Yassine c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), (1994) 172 N.R. 308 (C.A.F.), [1994] A.C.F. no 949 (C.A.F.) (QL)). Cette exception trouve son origine dans l'arrêt Mobil Oil Canada Ltd. c. Office Canada-Terre-Neuve des hydrocarbures extracôtiers, [1994] 1 R.C.S. 202. Dans cette affaire, la Cour suprême du Canada expliquait qu'un manquement à l'équité procédurale ne requiert pas la tenue d'une nouvelle audience dans les « circonstances spéciales » où la réclamation en cause était par ailleurs « sans espoir » ou que le résultat obtenu était « inéluctable » : ibid., aux paragraphes 52-54.

[27]            Et le professeur Mullan de renchérir : [traduction] « la [Cour suprême] a jugé que, sauf circonstances véritablement exceptionnelles, il n'est tout simplement pas opportun de se demander, la règle de common law en matière d'équité procédurale eût-elle été observée, si la conclusion de fond aurait alors été différente » : D.J. Mullan, Administrative Law (Toronto : Irwin Law, 2001).


[28]            Cependant, les cas précis où cette exception peut être validement invoquée n'apparaissent pas d'emblée. Ainsi que le disait la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Yassine, précité :

10    Les paramètres à l'intérieur desquels la distinction proposée par le professeur Wade devrait s'appliquer doivent encore être déterminés. S'exprimant au nom de la Cour, le juge Iacobucci, citant l'arrêt Cardinal c. Directeur de l'établissement Kent, [1985] 2 R.C.S. 643., a dit à la page 228 que les circonstances de l'affaire Mobile Oil étaient "exceptionnelles puisque, habituellement, la futilité apparente d'un redressement ne constituera pas une fin de non-recevoir". Il convient de souligner que l'affaire Cardinal portait sur le déni total du droit de se faire entendre. Il n'est pas nécessaire, en l'espèce, de formuler des hypothèses sur le résultat, en supposant évidemment qu'il y a eu manquement à la justice naturelle et qu'il n'y a pas eu de renonciation à cet égard [Voir Note 7 ci-dessous]. La conclusion défavorable quant à la crédibilité étant bien fondée, la demande ne pouvait qu'être refusée. Il serait inutile de renvoyer l'affaire à la Section du statut de réfugié dans ces circonstances. [note omise]

[29]            Il convient de noter que, dans l'affaire Yassine, la Commission avait en réalité informé les parties qu'elle entendait recourir à d'autres renseignements, et qu'elle avait donné aux avocats l'occasion d'y réagir. Aucune objection n'avait été soulevée à l'audience tenue devant la Commission. Conscient cependant de l'exception exposée dans l'arrêt Mobil Oil, précité, le juge Stone était disposé à présumer qu'il y avait eu manquement à l'équité procédurale. Il n'a pas ordonné la tenue d'une nouvelle audience, parce que la décision de la Commission de ne pas croire l'appelant Yassine permettait « à elle seule de trancher le litige » et qu'elle était parfaitement fondée.


[30]            En revanche, dans la décision Hu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2003] A.C.F. no 788 (1re inst.) (QL), le juge O'Keefe n'a pas cru devoir rejeter la demande de contrôle judiciaire, parce qu'il ne pouvait discerner « dans quelle mesure l'utilisation du témoignage produit par le pasteur Ng dans une autre affaire a pu conduire la Commission à mettre en doute la crédibilité de la demanderesse. Par ailleurs, la conclusion selon laquelle la demanderesse n'était pas crédible était capitale pour l'issue du dossier » : ibid., au paragraphe 26. Dans l'espèce Hu, tout comme dans la présente espèce, la Commission n'avait pas donné avis aux parties qu'elle s'en rapportait à ses connaissances spécialisées.

[31]            D'autres précédents rejettent l'application de l'exception énoncée dans l'arrêt Mobil Oil, précité, lorsque l'issue de la procédure n'est pas inéluctable (Fani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] A.C.F. no 1030 (1re inst.) (QL); Yue c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 863 (1re inst.) (QL)).

[32]            À mon avis, le principe exposé dans l'arrêt Yassine, précité, admet une réserve exprimée dans la décision Hu, précitée : pour autant que la décision de la Commission de ne pas croire un requérant d'asile soit fondée, et pour autant qu'elle suffise à disposer de la demande, c'est-à-dire s'il n'y a aucune raison de penser que les connaissances spécialisées de la Commission qui sont source de contestation ont de quelque manière conduit la Commission à décider comme elle l'a fait, alors l'exception énoncée dans l'arrêt Mobil Oil, précité, pourra être invoquée pour refuser la tenue d'une nouvelle audience.


[33]            En l'espèce, les seules connaissances spécialisées se rapportaient au coût estimatif (entre 5 000 et 7 000 $US) du voyage des demandeurs de la RDC au Canada, avec l'aide de passeurs. Dans ses motifs, la Commission s'est servie de ces chiffres pour mettre en doute le témoignage des demandeurs, qui disaient que leur cousine avait les moyens de payer leur voyage. Mais les nombreuses contradictions et incohérences présentes dans les témoignages des demandeurs et dans leurs déclarations écrites demeurent. Il serait futile dans ces circonstances de renvoyer l'affaire à la Commission.

[34]            Je suis donc d'avis que le recours de la Commission à ses connaissances spécialisées n'a pas motivé sa décision de ne pas croire les demandeurs et qu'une nouvelle audience n'est pas justifiée par l'existence d'un manquement à l'équité procédurale.

[35]            Pour tous ces motifs, cette demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                        ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE : la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                 « Danièle Tremblay-Lamer »              

                                                                                                     Juge                                 

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                               IMM-487-04

INTITULÉ :                                              Nzolameso N'Sungani, Zibaka N'Sungani, Makunzi N'Sungani, Zimakanda N'Sungani, Fundu N'Sungani, Ngandu N'Sungani

et

Le Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :                        TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                      LE 14 NOVEMBRE 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                              LA JUGE DANIÈLE TREMBLAY-LAMER

DATE DES MOTIFS :                             LE 17 DÉCEMBRE 2004

COMPARUTIONS :

Micheal Crane                                                                           POUR LES DEMANDEURS

David Tyndale                                                                           POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Avocat

166, rue Pearl

Bureau 100

Toronto (Ontario)

M5H 1L3                                                                                 POUR LES DEMANDEURS

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ministre de la Justice

Toronto (Ontario)

M5X 1K6                                                                                 POUR LE DÉFENDEUR



[1] Noter que le texte de la clause privative est pour l'essentiel resté le même après les modifications : comparer la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, paragraphe 162(1), avec la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2, paragraphe 67(1).


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