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                                                                                                                              Date : 20020513

                                                                                                                Dossier : IMM-1993-02

                                                                                              Référence neutre : 2002 CFPI 543

ENTRE :

JOCELYN ADVIENTO

                                                                                                                                 demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

Le juge MacKay

[1]                 De brefs motifs sont ici prononcés par suite de l'octroi, le 3 mai 2002, d'un sursis à l'exécution de la mesure de renvoi qui devait être exécutée contre la demanderesse le 4 mai 2002.


[2]                 La demanderesse est une citoyenne des Philippines qui est arrivée au Canada au mois de juillet 1990 dans le cadre du Programme concernant les employés de maison étrangers, maintenant connu sous le nom de Programme concernant les aides familiaux résidants. Lorsqu'elle est arrivée au Canada, la demanderesse a subi l'examen médical nécessaire. Elle remplissait les conditions du programme et elle a demandé à résider en permanence au Canada avec son conjoint, mais par une lettre en date du 26 octobre 1995, elle a été informée qu'étant donné que son conjoint était frappé d'une mesure de renvoi, la demande d'établissement qu'elle avait présentée était refusée.

[3]                 En 1994, la demanderesse est tombée gravement malade; une insuffisance rénale a été diagnostiquée et la demanderesse a commencé à être dialysée. Depuis 1996, la demanderesse se soumet à une dialyse péritonéale ambulatoire continue, quatre fois par jour, laquelle lui est fournie sans frais par le Toronto Western Hospital. Ce traitement lui a permis de mener une vie à peu près normale, de continuer à travailler et de s'occuper d'elle-même.


[4]                 En 1996, la demanderesse a de nouveau demandé la résidence permanente. Il a été jugé qu'elle n'était pas admissible sur le plan médical et sa demande a été refusée. Toutefois, la demanderesse n'a été mise au courant de ce refus qu'au mois de janvier 1999, lorsqu'elle a demandé une prorogation de son permis de travail. La demanderesse déclare qu'à ce moment-là, un agent d'immigration l'a informée qu'elle recevrait un permis du ministre après avoir rempli les formulaires pertinents et avoir soumis une demande fondée sur des raisons humanitaires (la demande d'ordre humanitaire) en vue d'obtenir le droit d'établissement depuis le Canada. Cette demande a été soumise au mois de mars 2000. La demanderesse n'a pas eu d'entrevue à ce sujet et la demande a été refusée le 9 janvier 2002. Un permis du ministre n'a jamais été délivré à la demanderesse.

[5]                 L'agente d'immigration qui a refusé la demande d'ordre humanitaire au mois de janvier de l'année en cours a noté dans ses motifs que selon certains renseignements mis à sa disposition, il existait des établissements de santé appropriés aux Philippines en vue d'administrer des soins à la demanderesse. L'avocat qui représentait alors la demanderesse n'a pas contesté la chose. Les services d'un nouvel avocat ont été retenus et, par la suite, au nom de la demanderesse, on a obtenu une preuve documentaire indiquant que la demanderesse ne recevrait probablement pas les soins appropriés aux Philippines. La demanderesse a ensuite présenté une nouvelle demande d'ordre humanitaire en vue d'obtenir le droit d'établissement depuis le Canada, en fournissant cette fois des renseignements au sujet des problèmes que posait une dialyse aux Philippines et en alléguant que, même si pareil traitement était offert, le coût en était élevé, ce qui, selon la demanderesse, rend le traitement inaccessible à la personne moyenne qui vit à cet endroit.

[6]                 L'avocate de la demanderesse a ensuite tenté de convaincre les agents chargés du renvoi de ne pas renvoyer sa cliente, compte tenu de la preuve fournie par un spécialiste aux Philippines, en alléguant que la vie de la demanderesse pourrait être en danger si elle était renvoyée aux Philippines. Les agents d'immigration en cause semblaient comprendre qu'il était nécessaire d'assurer les soins appropriés de façon continue, soit une question qui n'est pas ici en litige.


[7]                 Néanmoins, la demanderesse a été arrêtée le 1er mai 2002. Le lendemain, elle a été informée qu'elle serait renvoyée aux Philippines le 4 mai 2002.

[8]                 En plus de présenter la demande de sursis, la demanderesse a soumis, le 1er mai 2002, une demande en vue d'obtenir l'autorisation de demander le contrôle judiciaire de la décision qui devait être rendue et qui a subséquemment été rendue, selon laquelle elle devait être renvoyée du Canada. Il se peut que normalement une requête visant le sursis à l'exécution de la mesure de renvoi en attendant le règlement de la demande sous-jacente de contrôle judiciaire se rapportant essentiellement à la même décision ne soit pas facilement accueillie. Néanmoins, eu égard aux circonstances de l'affaire, la Cour est saisie d'une question sérieuse dans le cadre de la demande d'autorisation et de contrôle judiciaire puisqu'elle dispose d'une preuve contradictoire au sujet de la disponibilité et de l'accessibilité des services de santé aux Philippines, services qui, est-il concédé, sont essentiels à la vie de la demanderesse.


[9]                 En outre, à mon avis, un préjudice irréparable est ici établi. Il est reconnu que la vie de la demanderesse dépend de l'obtention de services médicaux et de services de santé spécialisés continus, qu'il existe des éléments de preuve contradictoires au sujet de la question de savoir si ces services seront raisonnablement disponibles et accessibles dans le cas où la demanderesse serait renvoyée du Canada, et que la preuve tendant à montrer que l'accessibilité de ces services aux Philippines est gravement remise en question n'a pas été prise en considération par les agents chargés de prendre des décisions d'ordre humanitaire ou des décisions relatives au renvoi. Eu égard aux circonstances, la perte de la possibilité d'examiner ces éléments de preuve constitue un préjudice irréparable.

[10]            De toute évidence, compte tenu de ces circonstances, la prépondérance des inconvénients favorise la demanderesse.

[11]            Pour ces motifs, une ordonnance a été rendue à la suite de l'audience en vue de surseoir à l'exécution de la mesure de renvoi dont la demanderesse fait l'objet, en attendant le règlement de la demande d'autorisation et de contrôle judiciaire.

   

« W. Andrew MacKay »

Juge

OTTAWA (Ontario)

le 13 mai 2002

  

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.

  

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                      IMM-1993-02

INTITULÉ :                                                                     Jocelyn Adviento

c.

MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                                             Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                                           le 3 mai 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                           Monsieur le juge MacKay

DATE DES MOTIFS :                                                  le 13 mai 2002

COMPARUTIONS :

Mme Krassina Kostadinov/M. Lorne Waldman              POUR LA DEMANDERESSE

M. Marcel Larouche                                                          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jackman, Waldman et associés                                        POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)

M. Morris Rosenberg                                                        POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada                                 

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