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Date : 20060223

Dossier : IMM-656-06

Référence : 2006 CF 245

Ottawa (Ontario), le 23 février 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BARNES

ENTRE :

OLADIMEJI AREMU SOFELA

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE BARNES

[1]                Le demandeur, Oladimeji Aremu Sofela, sollicite un sursis à l'exécution d'une mesure d'expulsion jusqu'à ce qu'une décision soit rendue sur sa demande d'autorisation et de contrôle judiciaire présentée à l'encontre d'une décision qui a rejeté sa demande de résidence permanente au Canada.

[2]                Je dois, bien entendu, appliquer le critère à trois volets énoncé dans l'arrêt Toth c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1988), 86 N.R. 302 (CAF), aux faits présentés à l'appui de la présente requête.

[3]                Je n'ai aucune difficulté à conclure que la décision de rejeter la demande de résidence permanente soulève une question sérieuse. Cette décision était fondée sur une conclusion selon laquelle le demandeur était entré au Canada en utilisant un document obtenu frauduleusement. Dans la lettre de décision, l'agent a déclaré que cela faisait en sorte que le demandeur ne soit pas admissible dans la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada. Les lignes directrices du défendeur sur cette question d'admissibilité donnent à penser que, pour refuser l'entrée, le simple fait qu'une personne soit entrée au Canada avec un document de voyage obtenu frauduleusement pourrait être insuffisant. Le dossier soulève également un doute quant à la question de savoir si le défendeur détient le passeport nigérian du demandeur et cela peut également être pertinent à l'égard de son admissibilité. Le critère de la question sérieuse n'est pas difficile à remplir et, malgré les observations habiles de l'avocate du défendeur, je pense que la demande de contrôle judiciaire du demandeur soulève une question sérieuse.

[4]                Le problème que rencontre ici le demandeur découle de la preuve sur laquelle il s'appuie pour établir l'existence d'un préjudice irréparable. Dans son affidavit, il est fait référence au risque de retourner au Nigeria, mais ce point a déjà été examiné et rejeté par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) et dans un examen des risques avant renvoi (ERAR) effectué assez récemment. L'affidavit du demandeur ne fait état d'aucun élément nouveau à l'appui de la présente requête, abstraction faite de ce qui avait déjà été présenté lors de ces deux examens antérieurs.

[5]                L'autre élément de preuve invoqué dans l'affidavit pour établir l'existence d'un préjudice irréparable évoque les souffrances qu'endureront le demandeur et sa conjointe à la suite d'une séparation forcée. L'affidavit avance également un élément plutôt vague selon lequel la conjointe du demandeur serait en proie à des problèmes de santé permanents, mais le rapport médical qui y est joint est peu concluant. Si la conjointe du demandeur était physiquement ou financièrement dépendante de lui, et ce, dans une large mesure, des éléments de preuve seraient probablement disponibles et on me les aurait présentés pour que je les examine. Dans sa forme actuelle, cette preuve ne va pas au-delà des inconvénients et des souffrances constituant généralement la conséquence malheureuse de toute expulsion. La jurisprudence est tout à fait claire : une telle situation - aussi regrettable soit-elle - ne constitue pas un préjudice irréparable. Ce point a été établi par le juge Pelletier dans sa décision dans l'affaire Melo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] ACF no 403, lorsqu'il a déclaré au paragraphe 21 :

[21]      Ce sont là les conséquences déplaisantes et désagréables d'une expulsion. Mais pour que l'expression « préjudice irréparable » conserve un peu de sens, elle doit correspondre à un préjudice au-delà de ce qui est inhérent à la notion même d'expulsion. Être expulsé veut dire perdre son emploi, être séparé des gens et des endroits connus. L'expulsion s'accompagne de séparations forcées et de coeurs brisés. Il n'y a rien de plus dans la situation de M. Melo que les conséquences normales d'une expulsion. Il ne s'agit pas de l'expulsion d'une femme de 73 ans qui s'est occupée de son mari âgé, qui à son tour s'est occupé d'elle, comme c'était le cas dans Belkin, précitée. Il ne s'agit pas non plus de l'expulsion d'une personne qui est le seul soutien d'un grand-parent aveugle et malade, comme c'était le cas dans Richards c. Canada. Monsieur Melo n'est pas renvoyé dans un endroit aussi inhospitalier que l'Albanie avec son jeune enfant, comme c'était le cas pour M. Abazi. Aussi triste que soit la situation, elle n'entraîne pas de conséquences autres que les conséquences inhérentes à l'expulsion.

[Renvois omis.]

[6]                Vu ma conclusion en ce qui a trait à la question du préjudice irréparable, il n'est pas nécessaire d'aborder celle de la prépondérance des inconvénients.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la présente demande de sursis à l'exécution d'une mesure d'expulsion soit rejetée.

                                                                                                « R. L. Barnes »

                                                                                                         Juge

Traduction certifiée conforme

Christian Laroche, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                 IMM-656-06

INTITULÉ :                                                                OLADIMEJI AREMU SOFELA

                                                                                    c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                                          TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                                        LE 21 FÉVRIER 2006

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                                LE JUGE BARNES

DATE DES MOTIFS :                                               LE 23 FÉVRIER 2006

COMPARUTIONS :

Johnson Babalola                                                           POUR LE DEMANDEUR

Marina Stefanovic                                                          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Johnson Babalola                                                           POUR LE DEMANDEUR

Avocat

Toronto (Ontario)

John H. Sims, c.r.                                                          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

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