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                                                                                                                                 Date : 20050617

                                                                                                                    Dossier : IMM-4160-04

                                                                                                                  Référence : 2005 CF 846

ENTRE :

                                                               AKHTAR ARFAN

                                                               JABEEN FAKHRA

                                                              AKHTAR NTASHA

                                                              AKHTAR AYISHA

                                                    AKHTAR MOHAMAD AHMAR

                                                                                                                                          demandeurs

                                                                             et

                                              LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                         ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                             défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision en date du 8 avril 2004 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que les demandeurs n'étaient pas des « réfugiés au sens de la Convention » ou des « personnes à protéger » selon les définitions figurant respectivement aux articles 96 et 97 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.


[2]         Arfan Akhtar (le demandeur principal) et Fakhra Jabeen ont respectivement 38 et 35 ans. Leurs enfants, Ntasha, Ayisha et Mohamad Ahmar, sont âgés de 8, 6 et 3 ans. Ils sont tous citoyens pakistanais. Ils allèguent craindre avec raison d'être persécutés aux mains de la police et de l'armée du fait de leurs opinions politiques. Ils allèguent également être des personnes à protéger parce qu'ils sont exposés au risque d'être soumis à la torture, à une menace à leur vie ou encore au risque de traitements ou peines cruels et inusités au Pakistan.

[3]         La Commission a fondé sa décision sur une conclusion défavorable en matière de crédibilité. Elle a tiré ses conclusions en se fondant sur l'invraisemblance des explications que le demandeur principal avait données au sujet des contradictions relevées entre son histoire et la preuve documentaire.

[4]         Ainsi, la Commission se préoccupait notamment de ce que le demandeur principal n'était pas au courant de l'existence de la liste de contrôle de sortie (la LCS). En 2002, la liste comportait 2 450 noms. Il n'est pas déraisonnable pour la Commission d'avoir conclu que le demandeur principal aurait dû être au courant de cette liste, étant donné en particulier que les demandeurs avaient utilisé de faux passeports afin de quitter le pays. Les demandeurs auraient, selon toute probabilité, été mis au courant, d'une façon ou d'une autre, de l'existence de la LCS lorsqu'ils ont obtenu leurs faux passeports puisque certains contrôles au Pakistan étaient exercés après coup.

[5]         Il n'était pas non plus déraisonnable pour la Commission de conclure également que le comportement du demandeur principal, en ne quittant pas le Pakistan plus tôt qu'il ne l'avait fait, n'était pas conforme à ce à quoi on s'attendrait d'une personne qui est si terriblement torturée par la police (Huerta c. Canada (M.E.I.), (1993), 157 N.R. 225 (C.A.F.)). Le demandeur a dit que la torture et la blessure aux orteils étaient les pires qu'il avait connues; pourtant, il n'a pas quitté le pays parce qu'il n'entrevoyait pas son avenir sous un jour aussi lugubre à ce moment-là.


[6]         Comme autre exemple, le demandeur principal prétend avoir continué à critiquer le régime militaire après son arrestation, au mois de mai 2000; pourtant, il n'a pas été arrêté au mois de juillet 2000, lorsque d'autres chefs et travailleurs de la Ligue pakistanaise (la LP) avaient été arrêtés. Le demandeur a expliqué que la police lui avait déjà donné une leçon et que c'est la raison pour laquelle elle lui avait donné un simple avertissement et qu'elle ne l'avait pas arrêté. La Commission n'a pas commis d'erreur en ne jugeant pas cette explication satisfaisante; en effet, si le demandeur avait en fait poursuivi sa campagne contre le régime militaire à l'échelle locale, la police l'aurait vraisemblablement arrêté avec les autres.

[7]         Ce qui est encore plus important, c'est l'interception des documents par Citoyenneté et Immigration Canada. Il ne semble pas probable que le secrétaire général de la LP se soit donné la peine de rassembler tous les documents qui ont été trouvés dans l'enveloppe et de les envoyer au demandeur principal, à Montréal, dans l'espoir que les autorités canadiennes jugent bon de les saisir. Cela semble être un travail trop onéreux pour un simple acte de revanche à la suite d'une violente querelle qu'ils avaient eue entre eux. En outre, le nom et l'adresse du père du demandeur étaient inscrits sur le paquet et ce paquet renfermait des documents concernant la santé du père. On pourrait être amené à croire que c'était en fait le père du demandeur qui avait envoyé les documents. Quelles que soient les raisons, il n'était pas clairement irrationnel pour la Commission de ne pas retenir l'explication du demandeur, à savoir qu'il n'était pas au courant de l'envoi.


[8]         Après avoir examiné la preuve, j'ai remarqué que la décision contestée est bien étayée par la preuve documentaire mentionnée par la Commission; je ne suis pas convaincu que la Commission ait rendu une décision fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait (voir alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7). Je ne suis pas non plus convaincu que les inférences que la Commission a faites ne pouvaient pas être faites avec raison (voir Aguebor c. Canada (M.E.I.) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.)).

[9]         Pour les motifs susmentionnés, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                                                                                   _ Yvon Pinard _                        

                                                                                                                                                     Juge                                 

Ottawa (Ontario)

le 17 juin 2005

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                 IMM-4160-04

INTITULÉ :                                                                AKHTAR ARFAN, JABEEN FAKHRA, AKHTAR NTASHA, AKHTAR AYISHA, et AKHTAR MOHAMAD AHMAR

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                                          MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :                                       LE 16 MAI 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                           LE JUGE PINARD

DATE DES MOTIFS :                                               LE 17 JUIN 2005

COMPARUTIONS:

Styliani Markaki                                                            POUR LES DEMANDEURS

Daniel Latulippe                                                             POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Styliani Markaki                                                            POUR LES DEMANDEURS

Montréal (Québec)

John H. Sims, c.r.                                                          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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