Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20001012

Dossier : IMM-1768-99

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE DOLORES M. HANSEN

ENTRE :

LEUNG TAI TAK

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

ORDONNANCE

VU la demande de contrôle judiciaire de la décision de l'agente des visas rendue le 5 mars 1999, par laquelle la demande de résidence permanente au Canada du demandeur était rejetée;

ET VU les documents déposés et les observations faites par les parties;

ET pour les motifs prononcés aujourd'hui;

LA COUR ORDONNE :

1)             La décision datée du 5 mars 1999 est annulée et l'affaire est renvoyée pour un nouvel examen devant un agent des visas différent.

2)                    Aucune question n'est certifiée.

          « Dolores M. Hansen »          

Juge                           

OTTAWA

Traduction certifiée conforme

Martin Desmeules, LL.B.


Date : 20001012

Dossier : IMM-1768-99

ENTRE :

LEUNG TAI TAK

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE HANSEN

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision rendue le 5 mars 1999 par Amy L. Ma, une agente des visas au Consulat général du Canada à Los Angeles (Californie), rejetant la demande de résidence permanente du demandeur comme investisseur.

[2]         Avant l'entrevue du 23 février 1998, le demandeur a présenté un grand nombre de documents à l'appui de sa demande. Malgré qu'il ait présenté sa demande dans la catégorie des entrepreneurs, il a demandé à l'entrevue d'être évalué dans la catégorie des investisseurs en raison de la faillite, en 1996, de son entreprise : un restaurant de fruits de mer qu'il avait exploité à Vancouver.


[3]         Le demandeur est résident de Hong Kong. Après avoir quitté l'école, il a travaillé comme commis dans une usine de vêtements, comme ouvrier de la construction, comme marchand dans un entrepôt, comme débardeur et comme contrôleur / directeur général d'une compagnie offrant des services de conteneurs. De 1990 à 1995, il a travaillé comme contrôleur au terminal de Wideside.

[4]         Le demandeur dit qu'il a fondé Comcheung Ltd. en 1990, une entreprise qui a comme principale activité la manutention, la réparation et l'entretien de conteneurs. Le demandeur est présentement propriétaire de 95 % des actions de Comcheung. Depuis 1992, le demandeur est aussi l'un des neuf membres d'un groupe d'actionnaires exploitant une chaîne de restaurants appelée Newton Court Seafood Restaurants.

[5]         Aux fins de la demande, l'agente des visas a résumé les actifs du demandeur comme étant 100 000 $ CAN de fonds transférables, des biens évalués à 1 130 434,00 $ CAN, d'autres investissements totalisant 1 100 000 $ CAN et un prêt hypothécaire en cours de 347 826 $ CAN.


[6]         Le bureau de Hong Kong avait rejeté une demande de résidence permanente précédente du demandeur comme entrepreneur en raison de son dossier criminel et du fait que l'agent des visas avait conclu qu'il n'avait pas été réhabilité. Il n'est pas question ici de l'examen du dossier criminel du demandeur ni du contenu de l'entrevue relatif à cette partie de la demande, car ces éléments n'ont pas d'incidence sur les questions soulevées dans la présente demande de contrôle judiciaire.

[7]         Le demandeur allègue que l'agente des visas a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée sans considérer les éléments de preuve présentés. Ce qui est plus particulièrement pertinent aux fins de la présente demande de contrôle judiciaire est la participation du demandeur dans Comcheung. Voici une partie de la lettre de refus, datée du 20 octobre 1998 :

[traduction]

En plus d'indiquer les exigences financières, le paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration de 1978 définit un investisseur comme un immigrant ayant exploité, contrôlé ou dirigé avec succès une entreprise. À l'entrevue, vous ne m'avez pas convaincue que vous satisfaisiez à cette exigence : vous avez indiqué que vous aviez fondé Comcheung Ltd. en 1990 et que cette entreprise avait généré des bénéfices de 1994 à 1997, mais les documents que vous m'avez présentés n'appuyaient pas cette prétention; vous avez dit qu'en tant qu'actionnaire de Newton Court Seafood Restaurants, vous receviez un salaire et une part des bénéfices, mais vous n'avez pas pu présenter des déclarations de revenus d'entreprise relatifs aux restaurants, sauf pour Uni-Press, qui n'indiquait aucun bénéfice pour les années 1995 à 1997; vous avez déjà fait une faillite d'entreprise au Canada; et vous n'avez pas pu prouver que vous avez accumulé vos fonds par vos propres efforts. Vous ne m'avez pas convaincue que vous aviez du succès en affaires.


[8]         La première erreur soulevée par le demandeur a trait à la rentabilité de Comcheung et, plus particulièrement, à la déclaration de l'agente des visas selon laquelle les documents présentés n'appuyaient pas la prétention du demandeur voulant que l'entreprise ait généré des profits de 1994 à 1997. Les documents pertinents comprennent les déclarations de revenus sur les bénéfices et les états financiers correspondants préparés par les experts-comptables accrédités de la compagnie. Ces documents indiquent que la compagnie a subi des pertes pour les années d'exercice 1991-1992, 1992-1993 et 1993-1994. La compagnie a généré d'importants bénéfices en 1994-1995, 1995-1996 et en 1996-1997. Toutefois, l'agente des visas a conclu qu'étant donné que la compagnie avait reporté ses pertes des années précédentes aux années d'exercice se terminant en 1995 et en 1996, ce qui a fait que l'entreprise n'avait aucun bénéfice imposable, l'entreprise n'était pas rentable. À mon avis, il s'agit d'une erreur de sa part. Il ne s'agit pas d'un cas où la compagnie n'arrive pas à faire face à ses obligations financières. La compagnie a seulement utilisé ses pertes antérieures pour minimiser le montant d'impôts qu'elle devait payer.

[9]             L'agente des visas a aussi eu des réserves quant à la participation du demandeur dans Comcheung. Cela semble découler du fait que le demandeur n'est devenu directeur de la compagnie qu'en 1992 et qu'il a travaillé pour Wide shine Terminals Ltd. de 1990 à 1995. Dans son affidavit, elle a aussi émis des réserves quant au fait qu'il n'y avait pas de [traduction] « document officiel vérifiable faisant état de la date de création de la compagnie fourni par le demandeur » .

[10]       En ce qui concerne la date de création de Comcheung, le certificat de constitution en personne morale présenté par le demandeur indique que la compagnie a été constituée le 20 novembre 1990. De plus, l'évaluation de l'entreprise préparée par Anthony Kam & Co, experts-comptables accrédités, décrit la croissance de Comcheung et la participation du demandeur comme suit :

[traduction]


8                  L'exploitation de conteneurs constitue l'activité principale de la compagnie. Depuis 1992, la plupart des gros exploitants de conteneurs de Hong Kong ont changé leur mode d'exploitation. Ils ont commencé à confier à des sous-traitants la majorité de leurs activités, en vue de réduire leurs coûts indirects fixes en salaires. Profitant de ce changement, M. Leung a créé Comcheung en 1991 en vue de présenter des soumissions pour effectuer ces travaux.

9                  En conséquence de ces changements et des bonnes relations qu'entretenait M. Leung avec les gestionnaires de ces exploitants de conteneurs, Comcheung a créé plusieurs emplois durables et ses ventes ont fait l'objet d'une grande croissance. Le chiffre d'affaires de la compagnie est passé de 33,5 millions $HK en 1994 à 62,3 millions $HK en 1997. Cela représente un taux de croissance annuel composé d'approximativement 23 % par année. [...][1]

[11]       En arrivant à sa conclusion, l'agente des visas a omis de tenir compte de cette preuve documentaire pertinente qui corrobore les déclarations du demandeur relatives à sa participation directe et de longue date dans Comcheung. Étant donné que Comcheung est la principale entreprise sur laquelle s'est fondé le demandeur pour établir qu'il avait « exploité, contrôlé ou dirigé avec succès une entreprise » , la demande de résidence permanente doit faire l'objet d'un nouvel examen car l'agente des visas a mal interprété ou n'a pas tenu compte d'éléments de preuve pertinents.

[12]       Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision datée du 5 mars 1999 est annulée et l'affaire est renvoyée pour un nouvel examen par un agent des visas différent.


[13]       Les parties n'ont pas soulevé de question pour certification.

          « Dolores M. Hansen »           

Juge                          

OTTAWA

Traduction certifiée conforme

Martin Desmeules, LL.B.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                                                 IMM-1768-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :                         Leung Tai Tak c. Le ministre de la Citoyenneté

et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :                                     Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                                     Le 26 avril 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE MADAME LE JUGE HANSEN

EN DATE DU :                                                 12 octobre 2000

ONT COMPARU :

M. David Bruner                                                             POUR LE DEMANDEUR

M. Cheryl Mitchell                                                             POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. David Bruner                                                             POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

M. Morris Rosenberg                                                             POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada



[1]             Dossier du demandeur, à la page 277.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.