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Date : 20060627

Dossier : T‑337‑06

Référence : 2006 CF 817

ENTRE :

KEYVAN NOURHAGHIGHI

demandeur

 

 

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

défenderesse

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

 

LE JUGE BARNES

 

[1]               Il s’agit d’un appel interjeté par le demandeur en vertu de l’article 51 des Règles des Cours fédérales contre une ordonnance du protonotaire Roger Lafrenière.

 

[2]               L’ordonnance visée par l’appel a été rendue le 12 avril 2006. Elle annulait la déclaration du demandeur sans autorisation de la modifier et ordonnait le paiement à la défenderesse de dépens de 1 000 $ (débours inclus).

 

[3]               Dans le présent appel, le demandeur me demande d’annuler en partie l’ordonnance du protonotaire en l’autorisant à modifier la déclaration dans un délai de 60 jours et en rejetant ou en réduisant les dépens adjugés.

 

[4]               La défenderesse reconnaît que je ne suis pas lié par la conclusion du protonotaire et que je puis exercer mon propre pouvoir discrétionnaire en examinant l’affaire à nouveau. La Cour d’appel fédérale souscrit à cette approche dans l’arrêt Canada c. Aqua‑Gem Investments Ltd., [1993] 2 C.F. 425.

 

[5]               L’ordonnance du protonotaire dont il est question en l’espèce décrit comme suit la déclaration du demandeur :

[traduction]

Même en considérant la déclaration dans son ensemble, et en l’interprétant de manière généreuse, il est évident que le demandeur n’a plaidé en détail aucune des allégations sérieuses formulées contre la défenderesse. En particulier, il ne fournit pas toutes les informations qui permettent d’étayer une cause d’action pour fraude, vol, interception illégale de communications ou discrimination au sens de l’article 15 de la Charte. De plus, même s’il réclame des dommages‑intérêts, le demandeur ne fait aucun lien entre sa réclamation et les allégations formulées contre la défenderesse. L’acte de procédure ne révèle que de simples allégations dénuées de faits importants.

 

En résumé, la déclaration ne révèle pas l’existence d’une cause d’action raisonnable contre la défenderesse, et il convient de l’annuler intégralement sans possibilité de la modifier. Soit l’acte de procédure fait état de griefs au sujet de la cotisation d’impôt établie à l’endroit du demandeur, ce qui n’est pas du ressort de la Cour, soit il ne fait pas valoir les faits importants et pertinents qui sont aptes à établir une cause d’action raisonnable et, au besoin, les détails des faits qui pourraient donner lieu à une cause d’action raisonnable.

 

[6]               J’ai examiné la déclaration de manière indépendante et je souscris entièrement à la description que le protonotaire en fait. Bien qu’un justiciable ordinaire puisse avoir droit à une certaine latitude pour la rédaction d’un acte de procédure, il faut tout de même qu’une déclaration révèle une cause d’action raisonnable et soit suffisamment instructive et cohérente pour que la partie défenderesse sache ce qu’elle doit prouver. La déclaration du demandeur comporte une multitude de griefs et d’allégations générales, nullement étayés par des faits importants. Le document contient de vagues allégations de fraude, de mauvaise foi, de malhonnêteté, de vol et de malveillance, de même que la perturbation et l’interception de communications privées. Ces plaintes sont formulées en l’absence d’un contexte factuel suffisant pour que le défendeur puisse y répondre. Les allégations visent non seulement la Couronne fédérale mais aussi la Reine du Chef de l’Ontario et du Québec, de sorte que l’on ne sait même pas avec certitude qui est le défendeur visé.

 

[7]               Les plaintes du défendeur selon lesquelles il n’a pas pu communiquer efficacement avec Revenu Canada au téléphone n’est pas une cause d’action raisonnable en droit et, pour la plupart des citoyens, les difficultés de ce genre représentent de simples désagréments qui ne mènent pas à un litige.

 

[8]               Quand on lui a demandé lors des débats si l’allégation concernant les crédits de TPS en souffrance faisaient partie de sa demande de réparation, le défendeur a répondu que non. Cet aspect de la déclaration est donc tout à fait inutile et superflu.

 

[9]               En l’espèce, la déclaration du demandeur ne contient pas la moindre cause d’action, et le protonotaire a conclu avec raison et équité qu’elle est frivole et vexatoire. J’ajouterais qu’elle est également scandaleuse. Il ne s’agit pas d’un document qui peut ou qui devrait être maintenu en accordant un droit de modification : voir l’arrêt Larden c. Canada (1998), 145 F.T.R. 140.

 

[10]           Je ne vois rien dans l’adjudication de dépens du protonotaire qui soit déraisonnable ou qui ne cadre pas avec les dépens adjugés dans des causes analogues. Le demandeur doit comprendre qu’un litige est un processus sérieux et coûteux, qui ne doit pas être entrepris à la légère. Le protonotaire a simplement appliqué la règle habituelle selon laquelle les dépens sont adjugés en faveur de la partie qui a gain de cause, à un montant qui représente une contribution raisonnable aux frais réellement engagés.

 

[11]           Je ne souscris pas non plus à l’argument du demandeur selon lequel les mesures prises par la défenderesse à l’égard de la requête sous‑jacente étaient inutiles ou excessives. Au contraire, elles étaient avisées, complètes et d’excellente qualité.

 

[12]           Étant donné que l’appel porte sur un grand nombre des mêmes points et arguments qui ont été invoqués devant le protonotaire, j’accorderai à la défenderesse, pour le présent appel, des dépens de 750 $, débours inclus.

 

« R. L. Barnes »

Juge

 

 

Toronto (Ontario)

Le 27 juin 2006

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                          T‑337‑06

 

 

INTITULÉ :                                                         KEYVAN NOURHAGHIGHI

                                                                              c.

                                                                              SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                   TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                 LE 26 JUIN 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :                    LE JUGE BARNES

 

DATE DES MOTIFS :                                        LE 27 JUIN 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

Keyvan Nourhaghighi                                             DEMANDEUR

 

 

Maria Vujnovic                                                       POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Keyvan Nourhaghighi                                             DEMANDEUR

                                                                              POUR SON PROPRE COMPTE

 

 

John H. Sims, c.r.                                                   POUR LA DÉFENDERESSE

Sous‑procureur général du Canada

 

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